EXAMEN EN DÉLÉGATION

Réunies le mardi 3 mars 2020, sous la présidence d'Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes, et de Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer, les délégations ont examiné le présent rapport.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -Monsieur le Président, cher Michel, chers collègues. C'est un plaisir et un honneur particulier pour moi de participer à cette nouvelle réunion commune à nos deux délégations, qui marque une étape importante de la coopération que nous avons engagée en février 2018 autour du sujet des violences faites aux femmes.

Je voudrais saluer la force de conviction et l'implication de nos collègues ultramarins (Victoire Jasmin, Nassimah Dindar, Viviane Malet et Guillaume Arnell) qui ont rejoint la délégation depuis le dernier renouvellement sénatorial. Cette représentation des outre-mer dans notre délégation était sans précédent et a été unanimement saluée comme un enrichissement.

D'emblée, nos collègues ont souhaité inscrire les violences faites aux femmes à notre agenda.

Nous sommes d'accord, cher Michel, pour les en remercier, car leur détermination nous a permis de réfléchir ensemble, dans une belle complémentarité, aux violences faites aux femmes en croisant nos expériences de métropole et d'outre-mer.

Cette réflexion a commencé en février 2018 et se termine aujourd'hui. Elle s'est échelonnée sur deux années très marquées par le thème des violences faites aux femmes :

- notre travail a commencé au moment où la vague Metoo libérait la parole et permettait une prise de conscience générale de violences trop longtemps tues et minimisées ;

- deux ans plus tard, le mot féminicide est entré dans le langage courant et la gravité des violences conjugales a conduit le Gouvernement à organiser un Grenelle pour lutter contre ce fléau, avec un groupe de travail dédié aux outre-mer - nous en avons d'ailleurs rencontré ensemble la responsable.

Nous voici donc cet après-midi au terme d'un cycle d'auditions sur les violences dans les outre-mer qui ont été particulièrement intéressantes :

- non seulement par l'intérêt des informations dont nous ont fait part les experts auditionnés ;

- mais aussi et surtout par la richesse des échanges que ces réunions ont permis entre nous, sénateurs et sénatrices de métropole et des outre-mer.

Michel Magras et moi-même avons donc souhaité qu'un rapport d'information publié conjointement par nos deux délégations présente la synthèse de nos réflexions communes et les propositions que nous pouvons formuler pour renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes dans les outre-mer.

Je vais tout d'abord revenir avec vous sur les constats qui ont émergé de ces réunions communes, en rendant hommage à l'expertise de nos collègues ultramarins sur ce sujet, dont les réflexions sont abondamment citées dans le document qui vous est soumis.

En ce qui concerne les causes de ces violences : nous avons entendu parler du poids des coutumes, de l'influence des stéréotypes sexistes et de l'impact des réalités géographiques dans des territoires où tout le monde connaît tout le monde, et où la peur des représailles conduit trop souvent les victimes à se taire.

S'agissant des lacunes des politiques publiques : les défaillances de la chaîne judiciaire ont été dénoncées, de même que la faiblesse des moyens dédiés à la lutte contre les violences. Ces insuffisances ne sont malheureusement pas propres aux outre-mer. J'aimerais d'ailleurs savoir s'il existe d'autres exemples de politiques publiques qui reposent à ce point sur l'implication d'acteurs qui sont pour la plupart bénévoles !

J'ai par ailleurs été frappée par une réflexion de notre collègue Victoire Jasmin, excusée aujourd'hui, concernant des Antillaises victimes de violences qui fuyaient parfois leur conjoint violent jusqu'en métropole. Cette remarque montre que la lutte contre les violences nécessite une approche globale, qui ne doit exclure aucun territoire.

Parmi les évolutions importantes à encourager, j'ai été sensible à l'intérêt qu'attachent nos collègues, hommes et femmes, à l'éducation des garçons, et à la nécessité d'impliquer les hommes dans ce combat. Il s'agit là de deux aspects majeurs de la lutte contre ce fléau : notre délégation partage ce constat.

Je voudrais aussi souligner l'importance cruciale de l'autonomie économique des femmes pour échapper à un conjoint violent, plusieurs fois rappelée au cours de nos échanges. Ce point souligne l'intérêt du colloque que nous avons co-organisé il y a un an sur l'engagement des femmes dans les économies ultramarines, cher Michel !

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - Madame la Présidente, mes chers collègues. Je voudrais d'abord, chère Annick, remercier très vivement ta délégation, pour avoir initié ce travail en commun sur un immense défi de société : la lutte contre les violences faites aux femmes.

Vous l'avez rappelé, cette fructueuse collaboration a bénéficié de l'engagement déterminé de nos collègues membres des deux délégations - Victoire Jasmin, Nassimah Dindar, Viviane Malet, et Guillaume Arnell que je remercie sincèrement - autour d'un sujet qui n'a cessé de faire l'actualité tout au long de l'année.

Nos auditions conjointes sur les résultats des enquêtes « Violences et rapports de genre dans les outre-mer » ( Virage Dom ) menées dans les départements de La Réunion, de la Martinique et de la Guadeloupe ont été en effet très fructueuses.

Elles nous ont d'abord permis de mieux connaître ce phénomène et d'en mesurer l'ampleur. L'état des lieux est certes préoccupant car il montre un niveau de violence élevé, je dirais même insupportable, dans nos îles. Mais face à ce constat, certaines causalités sont mieux cernées.

Les enquêtes font apparaître de forts points communs avec la métropole, mais aussi quelques spécificités des outre-mer, comme par exemple :

- dans l'espace public, une importance plus marquée des agressions verbales en métropole, alors que les agressions sexuelles et physiques prévalent dans les outre-mer ;

- des violences plus régulièrement déclarées par des femmes nées en métropole, qui ne sont pas habituées aux mêmes « codes sociaux du territoire » - sortir seules le soir par exemple ;

- la « proximité résidentielle de la famille » qui a pour conséquence un fort contrôle social s'exerçant sur les femmes ;

- des violences psychologiques exercées au travail surtout sur les cadres, et en particulier sur la catégorie des « femmes de la fonction publique de l'État »...

En 2019, il faut se féliciter que pour la première fois les enjeux ultramarins de ces violences aient fait l'objet d'un groupe de travail entièrement dédié dans le cadre d'un Grenelle . Le calendrier de ses travaux s'est déroulé sur un peu moins de deux mois, entre début octobre et la journée symbolique du 25 novembre. Nous avions reçu dans ce cadre Mme Michaela Rusnac, Haute fonctionnaire à l'égalité des droits du ministère des outre-mer et des annonces gouvernementales ont été faites depuis La Réunion.

À l'issue de ce travail commun et en résonance avec ces réflexions, nous vous proposons donc cinq points de vigilance - que je vais vous exposer - et dix recommandations - qu'Annick Billon vous présentera ensuite - pour mieux identifier, protéger et orienter les victimes de ces violences et prévenir celles-ci.

Les cinq points de vigilance que nous vous soumettons sont les suivants :

1. Premièrement, la mise en place, dans la durée, d'une politique publique complète, dans tous les territoires, engageant de nombreux intervenants - acteurs de la chaîne judiciaire et de l'éducation nationale, soignants, bénévoles et salariés du monde associatif, personnels de la fonction publique territoriale et de la fonction publique de l'État, etc. - et impliquant, pour réussir, la mobilisation de moyens substantiels.

2. Dans le même esprit, pour prolonger le Grenelle , les deux délégations assureront un suivi des mesures annoncées et s'attacheront à l'avenir à effectuer des bilans réguliers de leur application, grâce à la vigilance de leurs membres.

3. Troisièmement, la lutte contre les violences faites aux femmes dans les outre-mer ne doit se limiter, ni en métropole ni dans les outre-mer, aux violences conjugales mais impose une approche globale et transversale des différents formes de violence : au sein des couples, au travail, dans l'espace public ou en ligne sur les réseaux, etc.

4. Quatrièmement, des mesures de prévention doivent être menées dès le plus jeune âge pour une mise à distance des stéréotypes sexistes très marqués dans ces territoires.

5. Enfin, des moyens financiers cohérents avec les besoins observés doivent être mis en oeuvre afin de donner aux associations qui sont en première ligne sur ce terrain, par des engagements pluriannuels, la prévisibilité et la continuité qu'implique leur action.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -Outre ces cinq points de vigilance, nous vous soumettons dix recommandations très concrètes :

- l'extension des enquêtes Virage Dom à tous les territoires ;

- la mobilisation de moyens à la hauteur des enjeux - c'est une recommandation classique pour la délégation aux droits des femmes ;

- la mise en place d'un effort pour l'éducation à l'égalité dès le plus jeune âge, dans le cadre scolaire ;

- le renforcement de la formation de l'ensemble des personnels concernés par le repérage, l'accueil et l'orientation des victimes et leur formation systématique avant toute mutation outre-mer. Cela concerne aussi bien la police, la gendarmerie et la magistrature que l'Éducation nationale ou les soignants ;

- la création d'unités de soins de psycho-trauma et leur prise en charge à 100 %, comme c'est le cas pour les victimes de terrorisme ;

- la création, dans les outre-mer, de centres où les victimes pourraient être accueillies dans une logique pluridisciplinaire - médicale, juridique, psychologique, sociale ;

- l'extension d'outils de protection tels que le « téléphone grave danger » (TGD), ce qui suppose de trouver une solution aux difficultés liées à la faiblesse du réseau téléphonique ;

- le renforcement de solutions de mise à l'abri et d'hébergement : à cet égard, nous devons insister sur le fait que c'est au conjoint violent de partir du logement, non à la femme et aux enfants ;

- l'amélioration de l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle pour encourager l'autonomie économique des victimes ; dans cet esprit, l'attribution systématique des allocations familiales à la mère en cas de violences doit être envisagée ;

- enfin, dixième recommandation, le développement de mesures destinées à la protection et l'accompagnement des enfants, qui sont, ne l'oublions pas, les premières victimes de ces violences.

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - Encore un mot pour conclure. Nous proposons également que nos deux délégations expriment leur intérêt pour certaines orientations qui ont émergé du Grenelle , à savoir :

- améliorer la formation des professionnels, la sensibilisation des enfants et adolescents dans le cadre scolaire, le soutien aux associations et la prise en charge du psycho-trauma ;

- renforcer le réseau des observatoires locaux des violences faites aux femmes ;

- rendre le numéro 3919 disponible en permanence et mieux articulé avec la plateforme de signalement de la Police nationale, avec la possibilité de s'exprimer dans les langues parlées dans les territoires ;

- identifier des « ambassadeurs/ambassadrices » - sportives ultramarines, par exemple - qui permettraient de véhiculer des messages positifs sur l'égalité femmes-hommes ;

- diffuser des messages de sensibilisation en faisant appel aux médias les plus utilisés dans les outre-mer - télévision et radios locales - et privilégier notamment le vecteur constitué par les séries télé ;

- développer les intervenants sociaux ainsi que des psychologues au sein des commissariats, pour améliorer l'écoute et l'accueil des victimes ;

- et enfin, créer un événement inspiré du « Téléthon » pour rassembler des acteurs engagés de tous les territoires ultramarins et mobiliser des artistes.

Voici quelques-unes des propositions qui découlent de ce travail en commun et que nous entendons poursuivre et faire aboutir.

Vous avez à présent la parole.

Maryvonne Blondin . - Je me rappelle l'audition, par la délégation aux droits des femmes, de la chercheure de l'Ined qui nous avait présenté, en février 2018, la dernière enquête Virage effectuée en métropole. Cette audition nous avait d'ailleurs conduits, en conclusion du rapport d'information publié par notre délégation en juin 2018 sur les violences faites aux femmes, à recommander l'extension de l'enquête Virage à l'ensemble des outre-mer. Les résultats des enquêtes Virage Dom à La réunion, la Guadeloupe et la Martinique nous ont ensuite été présentés. Leur extension à tous les territoires est désormais un prérequis.

Il existe dans notre pays de nombreux outils pour lutter contre les violences faites aux femmes, mais on a parfois l'impression que les considérations liées au coût de ces dispositifs l'emportent, alors que des vies pourraient être sauvées grâce à la mobilisation de moyens adaptés ! Je considère que l'importance des enjeux devrait rendre inopérants les arguments budgétaires.

S'agissant des causes des violences faites aux femmes, nos rapporteurs ont évoqué le poids des traditions. Le rapport du CESE dont nous avons entendu les auteurs mentionnait également le rôle de la religion. C'est probablement en prenant le problème à la base, par l'éducation des filles et des garçons, qu'on arrivera à des résultats. Le projet de rapport que nous examinons aujourd'hui souligne aussi l'intérêt de l'autonomisation économique des femmes pour les aider à s'émanciper d'un compagnon violent. Je suis d'accord avec cette idée. De plus, quand les femmes gagnent de l'argent, elles le consacrent à leurs enfants et à leur famille.

Je souscris donc au rapport et à ses conclusions. Il nous reste à concrétiser celles-ci... Ce rapport pourrait-il avoir pour suite une proposition de résolution ?

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -En ce qui concerne l'insuffisance des moyens affectés à la politique publique de lutte contre les violences faites aux femmes, je suis tout à fait d'accord. L'exemple espagnol le montre clairement : la mobilisation d'un budget important a permis de faire diminuer le nombre de féminicides dans ce pays. Le Gouvernement nous a annoncé des efforts budgétaires substantiels, mais ceux-ci comprennent pour une part importante l'aide au développement... Or pour mettre les victimes de violences à l'abri, il faut des solutions d'hébergement, des bracelets électroniques, des Téléphones grave danger (TGD)... Tout cela implique des moyens.

Je suis d'accord avec Maryvonne Blondin sur un autre point : l'égalité doit être enseignée dès le plus jeune âge, c'est impératif pour prévenir les violences.

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - Le travail de la délégation aux outre-mer se situe en amont du processus législatif. Une fois nos recommandations adoptées, le Gouvernement et nos collègues parlementaires ont la possibilité de s'en saisir comme cela a été le cas sur les questions du foncier ou de la lutte contre l'habitat insalubre. Autre exemple récent, notre rapport sur les risques naturels majeurs en outre-mer a été remis fin 2019 au Gouvernement, qui a annoncé qu'il va reprendre nos propositions dans le futur projet de loi sur ce sujet. Je pourrais vous citer d'autres exemples, comme nos préconisations sur les normes dans le bâtiment qui ont été reprises par nombre d'organismes de ce secteur. Notre travail est d'assurer, de manière individuelle et collective, le suivi de toutes ces propositions. Plus on sera nombreux à exercer ce contrôle, plus vite on fera évoluer les comportements. Telle est la démarche de la délégation aux outre-mer depuis que je la préside.

Thani Mohamed Soilihi . - Je salue la qualité des travaux des deux délégations et du rapport qui en résulte. Une proposition de loi concernant les violences conjugales sera prochainement examinée par la commission des lois du Sénat. Ne serait-ce pas l'occasion pour y introduire nos conclusions ? Je souscris aux propos du président Magras sur le foncier. En ce sens, je formulerais deux observations. D'une part, je souhaite relever un point de vigilance : la question des violences requiert un travail de longue haleine et nécessite de procéder à un renforcement des contrôles. La mise en pratique des recommandations impose un travail de terrain, la prise en compte territoire par territoire et un ciblage précis des spécificités. Cela peut passer par des missions sur place. D'autre part, l'association des deux délégations pour l'élaboration d'un rapport commun constitue une bonne solution pour conjuguer nos efforts et d'avancer tous ensemble dans la même direction.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -S'agissant du suivi du Grenelle , notre délégation a pris l'initiative d'organiser, dans les départements des sénateurs et sénatrices qui le souhaitent, des réunions avec les acteurs de la lutte contre les violences pour faire le point des avancées franchies, ou des obstacles à surmonter, dans chaque territoire étudié. Ces rencontres devraient permettre un bilan de ces échos du terrain courant juin.

Par ailleurs, la piste d'une proposition de résolution, évoquée par Maryvonne Blondin, me semble très intéressante. Ces textes permettent à des travaux comme celui qui nous réunit ce soir d'aboutir en séance publique, sans pour autant passer par un texte législatif. Nous l'avons expérimenté en mars 2019 avec une proposition de résolution sur le mariage des enfants, les grossesses précoces et les mutilations sexuelles féminines, puis en janvier dernier avec une proposition de résolution sur les violences faites aux femmes en situation de handicap. Ces deux textes ont été adoptés par le Sénat à l'unanimité. C'est très gratifiant.

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - La délégation aux outre-mer souscrit à l'idée d'une proposition de résolution. Elle a d'ailleurs soutenu le remarquable travail de la commission des affaires européennes et de celle des finances pour la prise en compte des enjeux pour les outre-mer des négociations budgétaires européennes actuelles. L'adoption de leur résolution définit la position commune du Sénat sur le sujet. Quant au véhicule législatif, je précise que notre démarche est plus large que celle des violences conjugales stricto sensu .

Marie-Pierre Monier . - Je suis heureuse que ce rapport nous permette de rappeler que la France est un territoire pluriel et que les outre-mer ne doivent pas être oubliés des politiques publiques de lutte contre les violences. La connaissance statistique est un préalable de cette politique publique : le fait que l'extension de Virage Dom à tous les outre-mer constitue la recommandation n° 1 est une bonne chose.

S'agissant des suites de ce rapport, nous retrouvons un point commun à de nombreux travaux de la délégation aux droits des femmes : là où les travaux de la délégation sénatoriale aux outre-mer aboutissent naturellement à des recommandations très concrètes, à portée essentiellement économique, nous nous situons, a fortiori avec le sujet des violences, dans un registre plus vaste, faisant intervenir des causes très profondes comme les traditions. Les leviers d'action sont de ce fait beaucoup plus difficiles à mobiliser, car pour faire bouger les lignes il faut intervenir via l'éducation, la sensibilisation...

De plus, les violences faites aux femmes ne mobilisent pas les foules, même si l'on ose enfin en parler : il faut saluer cette évolution de notre société. En outre, le manque de moyens dédiés à la lutte contre ces violences m'inquiète. Ce sont des associations qui prennent en charge les victimes, pour l'essentiel. Or leurs moyens sont cruellement insuffisants, comme l'a rappelé notre présidente. C'est un sujet malheureusement récurrent pour la délégation aux droits des femmes. Nous ne devons pas perdre une occasion de dénoncer cette situation très préoccupante.

Finalement, ces violences ont pour cause essentielle le fait que les femmes ne sont pas considérées comme les égales des hommes...

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - La question est celle des compétences. Dès lors qu'il s'agit du domaine législatif, il est facile d'intervenir et lorsque le sujet relève du pouvoir règlementaire, une pression sur l'exécutif reste possible. Toutefois, nous ne disposons pas, à nous seuls, de tous les outils. Le milieu associatif, par exemple, joue un rôle absolument essentiel.

Henri Leroy . - Ce rapport est très pertinent. Cependant, sur certains territoires, on oublie que s'applique aussi du droit coutumier. Certains ne reconnaissent pas l'enseignement qui leur est dispensé comme étant supérieur au droit coutumier. Le travail des magistrats, des gendarmes - je parle d'expérience -, etc. s'avère difficile. J'estime qu'une action importante est à mener concernant le pouvoir coutumier, et sur la place de la femme précisément. Ce droit est toujours en vigueur en Nouvelle Calédonie ou en Guyane et il faut intégrer cette dimension très importante. C'est pourquoi je suggère d'intégrer dans nos recommandations la formation au droit coutumier.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -Cette intervention confirme la complémentarité entre nos deux délégations et l'expertise très réelle qu'apportent les collègues qui connaissent les outre-mer à la thématique des violences faites aux femmes. Merci pour cette excellente remarque, qui apporte de la densité à cette recommandation n° 4 sur la formation des personnels avant une affectation en outre-mer. Si Michel Magras est d'accord, nous pourrions la modifier pour étendre au droit coutumier le contenu de cette formation, dans les territoires où cela est pertinent.

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - Je suis entièrement d'accord avec cet amendement. Dans le cadre des travaux de la délégation, nous avons eu l'occasion d'appréhender le poids du droit coutumier - par exemple, sur la question foncière en Polynésie. L'idée de l'inclure dans nos réflexions fait son chemin. Je vous indique que le professeur de droit Ferdinand Mélin-Soucramanien vient d'être chargé par le Gouvernement de créer, dans les meilleurs délais, une chaire universitaire dédiée spécifiquement à l'étude des outre-mer afin de proposer une offre de formation adaptée.

Henri Leroy . - Si on ne fait pas évoluer la place de la femme dans le système coutumier, on n'y arrivera pas.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . - Je suggère que nous passions au titre de ce rapport. Que diriez-vous de La lutte contre les violences faites aux femmes dans les outre-mer : un enjeu d'égalité ? Il me semble que cette proposition recueille un large consensus.

Au terme de cet échange, le rapport d'information, intitulé La lutte contre les violences faites aux femmes dans les outre-mer : un enjeu d'égalité , est adopté à l'unanimité.

Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes . -Monsieur le président, cher Michel Magras, j'ai beaucoup apprécié, comme tous mes collègues de la délégation aux droits des femmes, ce travail que nous avons conduit en commun et je voudrais vous remercier très chaleureusement. J'espère que nous pourrons le poursuivre à l'avenir : ce sujet mérite que nous n'en restions pas là, et la synergie qui s'est manifestée entre nos deux délégations est très précieuse.

Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer . - En effet, il s'agit d'une question fondamentale sur laquelle il est urgent d'agir. Je tiens à remercier la délégation aux droits des femmes et sa présidente pour ce fructueux travail en commun.

I. ANNEXES

A. SYNTHÈSE DES ENQUÊTES VIRAGE DOM (LA RÉUNION, MARTINIQUE ET GUADELOUPE)

Ces documents peuvent être consultés dans la version pdf du présent rapport.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page