C. DES MODALITÉS NOUVELLES D'ACCUEIL DU PUBLIC ET DE PRISE EN CHARGE DES VICTIMES À ÉVALUER, EN VUE D'UNE ÉVENTUELLE PÉRENNISATION

L'accueil du public et l'assistance aux victimes a été maintenu comme une priorité pendant le confinement, de sorte que peu de commissariats et de brigades ont été fermés au public.

Dans la police nationale, les 442 hôtels de police et les commissariats siège sont ainsi tous restés ouverts et seuls les commissariats divisionnaires et subdivisionnaires, qui ne bénéficient pas d'unité de police-secours dédiés, ont été fermés au public. Il en est de même dans la gendarmerie, qui a maintenu l'ouverture de la quasi-intégralité de ses brigades territoriales.

Ceci étant, la police et la gendarmerie nationales ont cherché dès le début de la crise à favoriser, autant que faire se peut, le recours aux outils numériques pour faciliter certaines démarches . Il s'est agi, ce faisant, d'une part, de limiter les contacts et, d'autre part, d'éviter que les restrictions imposées aux déplacements ne se traduisent par une dégradation du service rendu à la population.

Le recours au dispositif de la pré-plainte en ligne a ainsi fortement augmenté 15 ( * ) . La moyenne de pré-plaintes déposées par jour au niveau national, qui s'élevait à 1 814 en février 2020, s'est ainsi établie à 2 374 en mars et à 3 748 en avril. À titre de comparaison, elle s'élevait, en avril 2019, à 1 521.

La gendarmerie nationale a également renforcé sa brigade numérique , chargée d'accueillir, d'orienter et d'informer les internautes. Ses effectifs ont été multipliés par cinq sur la période, pour être en capacité d'absorber un nombre plus élevé de sollicitations.

Enfin, dans les deux forces ont été développés de nouveaux canaux de signalement pour les violences intrafamiliales et conjugales afin de tenir compte de l'impératif de discrétion pesant sur les victimes du fait du confinement. Au dispositif d'appel classique au « 17 » sont ainsi venus s'ajouter plusieurs outils :

- le champ de la plateforme du 114, dédiée à l'origine aux personnes sourdes et malentendantes et qui permet aux victimes de se signaler aux forces de l'ordre par l'envoi d'un SMS, a tout d'abord été étendu à l'ensemble de la population ;

- il a également été procédé à un élargissement du portail de signalement des violences sexuelles ou sexistes ;

- le réseau des pharmaciens a, parallèlement, été mobilisé pour recueillir des signalements. Une fiche réflexe dédiée a, à cette fin, été produite par le ministère de l'intérieur et le ministère de la santé en vue d'être diffusée aux professionnels ;

- enfin, au sein de la gendarmerie nationale a été instaurée la pratique des appels d'initiative, qui a consisté à organiser des appels réguliers au sein des familles réputées pour connaître des difficultés.

Selon les informations communiquées aux co-rapporteurs, ces nouveaux moyens de communication ont été fortement mobilisés pendant la période de confinement, témoignant de leur utilité . Entre le début du confinement et le 24 avril 2020, le nombre de tchats concernant des faits de violences conjugales adressés à la police nationale a été multiplié par vingt par rapport à la même période en 2019, passant de 31 à 612. Le 13 avril 2020, le ministre de l'intérieur indiquait devant la commission des lois que 170 SMS étaient, en moyenne, reçus et traités chaque jour depuis le début du confinement sur le numéro 114.

Quant au dispositif de signalement via les pharmacies, les données communiquées aux co-rapporteurs demeurent partielles et ne permettent pas de se prononcer sur son efficacité. Lors de son audition, le directeur général de la gendarmerie nationale faisait état d'un seul cas signalé par ce biais, ayant débouché sur une interpellation.

S'ils avaient initialement vocation à faciliter l'action des forces de sécurité intérieure en période de crise, ces dispositifs innovants pourraient permettre de renouveler, de manière plus durable, les modes de contact avec la population et d'assistance aux victimes . Une évaluation de leur efficacité mériterait donc, de l'avis des co-rapporteurs, d'être conduite au sein des deux forces en vue, le cas échéant, d'envisager leur pérennisation.

Il semble, à cet égard, que la police nationale ait d'ores et déjà entamé des démarches en ce sens, en vue de la création prochaine d'un commissariat numérique , sur le modèle de la brigade numérique de la gendarmerie nationale, qui pourrait reprendre les attributions de la plateforme d'assistance mise en place pendant la crise.


* 15 Expérimenté à compter de 2008 et généralisé en 2013, le dispositif de la pré-plainte en ligne n'est ouvert que pour certaines catégories d'infractions, à savoir les atteintes aux biens dont l'auteur est inconnu et, à titre expérimental, certains faits de discrimination dont l'auteur est inconnu.

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