B. POUR UN PILOTAGE NATIONAL CLARIFIÉ

1. La CNSA : de l'animation du réseau au pilotage des MDPH

La CNSA assure une mission d'animation et d'appui des MDPH grâce notamment à :

- l'organisation de rencontres nationales avec les différents professionnels : directeurs, référents des équipes pluridisciplinaires, aides techniques, spécialistes de l'insertion professionnelle, correspondants scolarisation, spécialistes des affaires juridiques, personnels d'accueil etc. ;

- l'organisation de groupes de travail ;

- la production de guides ;

- la publication d'une lettre d'information bi-mensuelle à destination des MDPH.

L'enjeu pour la CNSA est d'enrichir cette mission vers un pilotage accru, auquel contribuent notamment la mise en oeuvre du système d'information harmonisé et du centre de données en cours de constitution, pour le déploiement desquels la CNSA est en première ligne. Une cellule d'appui dédiée au SIH a par ailleurs été constituée en son sein.

Plus largement, la CNSA assure le pilotage de la feuille de route MDPH 2022 et a conclu à cette fin une convention pluriannuelle avec chaque département en 2020 . L'un des enjeux pour la CNSA, dans le prolongement de ces conventions, est d'être en mesure d'assurer un pilotage territorial actif de leur mise en oeuvre.

La « task force » en faveur des MDPH les plus en difficulté mentionnée supra participe également de ce repositionnement de la CNSA.

Plus généralement, il ressort des auditions conduites par les rapporteurs spéciaux que le rôle d'appui des MDPH pourrait encore être développé, notamment en ce qui concerne l'appui juridique eu égard à l'environnement normatif extrêmement complexe et évolutif au sein duquel les MDPH interviennent.

2. L'État : un rôle à clarifier
a) Une tendance au renforcement du rôle de l'État, qui doit s'articuler avec l'action de la CNSA

Le rôle de l'État, et plus spécifiquement en son sein de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), reste à clarifier .

La supervision de l'État est d'abord d'ordre juridique, avec l'institution dès 2011 dans les services déconcentrés de « référents AAH » départementaux chargés de s'assurer, au sein des CDAPH où ils représentent l'État, de la bonne application du droit d'attribution de l'AAH, et dont l'action est coordonnée par des « référents AAH » régionaux.

La tendance récente est toutefois celle d'un repositionnement de la DGCS sur la définition des orientations stratégiques de la politique du handicap, et spécifiquement en matière d'AAH . Cette évolution peut être en partie être interprétée comme un souci de remédier au hiatus propre à la gouvernance de l'AAH. Il faut en effet rappeler que l'État ne joue pratiquement aucun rôle dans la procédure d'attribution et de service de la prestation, il en reste l'unique financeur (voir supra ).

Le rôle prépondérant de la DGCS dans la conception de la feuille de route « MDPH 2022 » illustre pleinement cette tendance au dépassement de la seule supervision juridique.

Il semblerait qu'un partage efficace des rôles entre la DGCS et la CNSA serait ainsi de confier à la première ce rôle stratégique et de conférer à la seconde un rôle de pilotage opérationnel.

Les deux autorités doivent ainsi constamment veiller à articuler leurs initiatives. Par exemple, pour légitime qu'elle soit, la production de guides juridiques par la DGCS évoquée supra pour ce qui concerne la RSDAE apparaît quelque peu redondante par rapport à celle de la CNSA, et présente le risque d'accroître la complexité des directives nationales.

b) Des incertitudes à lever autour de la mission nationale d'audit et de contrôle des MDPH

Des clarifications sont plus particulièrement attendues concernant la mise en place d'une mission nationale d'audit et de contrôle (MNAC) annoncée dans le cadre de la réforme de l'organisation territoriale de l'État 22 ( * ) .

Cette initiative a été fortement appuyée par la Cour des comptes dans son rapport relatif à l'AAH, en s'inspirant de la mission nationale de contrôle des organismes de sécurité sociale - service à compétence nationale placé sous l'égide de la direction de la sécurité sociale 23 ( * ) - et en lui fixant notamment l'objectif de participer au contrôle de l'attribution à bon droit des prestations dans une logique de lutte contre la fraude à l'éligibilité (voir supra ) et en la dotant à cette fin de compétences médicales.

Elle est reprise par l'accord de méthode entre l'État et les départements relatif au pilotage et au fonctionnement des MDPH du 11 février 2020 et constitue à ce titre le 38 ème projet de la feuille de route « MDPH 2022 », qui serait spécifiquement porté par la DGCS. Cet accord prévoit quant à lui que cette mission, dans le cadre d'une gouvernance partagée avec les départements , vise la diffusion du contrôle de la conformité, la culture du contrôle interne et de la maîtrise des risques, sans plus de précisions.

Dans ses réponses au questionnaire qui lui a été adressé, la DGCS a en outre indiqué aux rapporteurs spéciaux qu'une telle mission nationale constituerait un « véritable dispositif d'impulsion et d'appui aux MDPH dans une perspective d'amélioration significative de leurs processus et, partant, des délais de traitement » , missions qui peuvent également à certains égard paraître redondantes par rapport à la mission de pilotage opérationnel incombant à la CNSA, par exemple au titre de la « task force » mise en place en 2021 en appui aux MDPH connaissant les situations de plus forte tension.

Enfin, dans sa note sur l'analyse de l'exécution budgétaire de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » en 2020, la Cour des comptes relève que le lancement de la mission nationale devait, selon l'administration, générer 117 millions d'euros d'économies budgétaires sur les dépenses d'AAH, objectif qui n'avait jusqu'ici jamais été affiché explicitement.

Cet objectif ne s'est cependant pas concrétisé, les travaux de lancement de la MNAC ayant été retardés dans le contexte sanitaire. La MNAC n'a toutefois pas davantage vu le jour en 2021, faute de crédits budgétaire fléchés à sa création. La question de son financement et de ses modalités, qui est liée avec celles de sa gouvernance et de la participation des départements ainsi que du contenu précis de ses attributions, doit donc être tranchée. Les rapporteurs spéciaux considèrent que ces clarifications doivent intervenir au plus vite, et en tout état de cause d'ici au projet de loi de finances pour 2022.

Il convient cependant de noter qu'une telle MNAC ne pourra jamais, à elle seule, se substituer à l'exigence d'un renforcement du contrôle interne de chaque MDPH. La DGCS estime en effet que seulement un tiers des MDPH ont institué leur propre dispositif de contrôle interne à ce jour.

Recommandation n° 12 : clarifier la gouvernance, le rôle et les objectifs de la mission nationale de contrôle et d'audit devant être constituée auprès de la DGCS, son niveau et ses modalités de financement, et son articulation avec les missions assurées par la CNSA.


* 22 Circulaire du Premier ministre du 12 juin 2019 relative à la mise en oeuvre de la réforme de l'organisation territoriale de l'État.

* 23 Arrêté du 9 novembre 2009 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Mission nationale de contrôle et d'audit des organismes de sécurité sociale ».

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