B. PUISER DANS LE « VIVIER » DE TALENTS FÉMININS POUR DIVERSIFIER LA COMPOSITION DES INSTANCES DE DIRECTION DES ENTREPRISES

La réussite de la loi Copé-Zimmermann a prouvé qu'il existe bien un « vivier » suffisant de femmes compétentes. Ce sujet était fréquemment mis en avant par les détracteurs de la loi qui estimaient qu'il serait difficile de trouver des femmes ayant la formation nécessaire pour siéger dans les conseils d'administration et de surveillance. Tel ne fut pas le cas. Et la délégation est convaincue que tel ne sera pas le cas non plus pour les postes à responsabilité visés par la proposition de loi visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle.

Les femmes sont aujourd'hui plus nombreuses à être diplômées du supérieur que les hommes. Elles représentent la moitié des diplômés des grandes écoles parmi lesquels se recrutent majoritairement les membres des conseils d'administration mais aussi des cadres dirigeants des grandes entreprises françaises.

En outre, une enquête de l' Usine Nouvelle publiée en janvier 2021 12 ( * ) montre que le taux de féminisation des Comex et des Codir n'est pas nécessairement lié à la plus ou moins forte féminisation du secteur dans lequel opère l'entreprise .

Proportion de femmes dans les comités exécutifs
et de direction des grandes entreprises industrielles

Source : Usine nouvelle , Femmes dans les comités exécutifs, les bons et les mauvais élèves de l'industrie française , 26 janvier 2021

Citant cette étude qui relève que des groupes comme Kering et Suez comptent 36 % de femmes dans leurs Comex, contre 15 % pour LVMH et 9 % pour Veolia , Marie-Pierre Rixain a indiqué devant la délégation : « Dans le secteur de l'énergie, deux entreprises que nous avons tous en tête ont des taux de féminisation de leur Codir totalement différents. De la même manière, deux groupes de luxe, également bien connus, ont des taux de féminisation de leur Codir complètement différents alors même qu'ils opèrent tous deux dans un secteur très féminisé. On voit donc bien que la difficulté ne tient pas nécessairement à l'état de féminisation du secteur, mais également à la dynamique de la politique RH de l'entreprise . »

Selon Anne-Françoise Bender, maîtresse de conférences en sciences de gestion au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) : « il faut des politiques RH affirmées qui incluent des viviers de femmes dans la réserve de potentiels, sinon la reproduction homosociale continuera de fonctionner de manière assez naturelle . (...) Les femmes vont avoir des carrières dans des secteurs moins stratégiques et davantage sur des postes support. L'accès aux postes d'encadrement opérationnel stratégique reste donc assez difficile ».

Dans les secteurs technologiques et au sein des écoles d'ingénieurs, il convient d'agir en amont, au moment de l'orientation scolaire et universitaire, afin d'attirer davantage d'étudiantes dans les formations scientifiques et technologiques, également dénommées STEM 13 ( * ) . Lors de la table ronde précitée du 21 janvier 2021, Anne-Françoise Bender indiquait ainsi : « Il faut continuer à agir plus fort et de manière systémique sur l'éducation, la mixité des métiers et l'accès des femmes au secteur de l'informatique . Il faut que les écoles d'informatique continuent de chercher des étudiantes et que les entreprises du secteur les recrutent, pour changer l'image de ces métiers, de la même manière qu'il faut, bien sûr, continuer de combattre tous les stéréotypes de genre dans les médias . »

Par conséquent, des délais supplémentaires pourraient être donnés aux entreprises des secteurs où la féminisation est moindre. Il ne s'agit pas d'imposer aux entreprises des contraintes qu'elles ne pourraient pas tenir à court terme.

La confirmation de l'existence d'un vivier de femmes compétentes pour siéger dans les instances de gouvernance amène logiquement à se poser aujourd'hui la question de la limite du cumul des mandats. Limiter le nombre de mandats d'administrateurs à trois, contre cinq actuellement, libérerait des places dans les conseils et permettrait à davantage de femmes d'accéder à ces fonctions .

Cette recommandation figurait déjà dans le rapport réalisé par la délégation lors de l'examen de la proposition de loi Copé-Zimmermann au Sénat en 2010. Joëlle Garriaud-Maylam, alors rapporteure, estimait qu' « une réglementation plus réaliste du cumul des mandats d'administrateur, en plus de laisser de la place pour les femmes dans les instances, contribuera à renforcer l'indépendance des conseils, dans le sens d'un renforcement de la transparence et de l'intégrité du monde des affaires ».

Marie-Jo Zimmermann a, par ailleurs, déclaré lors de la table ronde du 21 janvier 2021 que « le moment est peut-être venu de réfléchir à limiter à trois les mandats des administrateurs ».

Recommandation n° 2 : Limiter à trois, au lieu de cinq actuellement, le nombre de mandats d'administrateur pouvant être simultanément exercés par une même personne.


* 12 https://www.usinenouvelle.com/editorial/tableau-femmes-aux-comites-executifs-les-bons-et-les-mauvais-eleves-de-l-industrie-francaise.N1053099

* 13 Sciences, technologie, ingénierie et mathématiques.

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