B. DES MESURES INSUFFISANTES POUR RELANCER LA CONSTRUCTION

Selon les statistiques officielles du Gouvernement, parues en septembre 5 ( * ), les nombres de logements autorisés et commencés au cours des douze derniers mois sont encore légèrement inférieurs (respectivement - 0,9 et - 0,4 %) à leurs niveaux des douze mois précédant le premier confinement. Aucun rattrapage n'a été effectué.

« Il est grand temps de prendre la mesure de la gravité de la situation.
Le Gouvernement a une responsabilité.
»

Concernant le logement social, comme la ministre l'a indiqué à la commission, l'objectif de 120 000 logements sociaux agréés en 2021 ne sera pas atteint ni celui de 250 000 logements en deux ans . Un peu plus de 100 000 logements sociaux devraient être agréés cette année.

Certes la crise sanitaire a eu un impact important de même que l'étalement dans le temps des élections municipales. Mais ces éléments conjoncturels n'expliquent pas tout. Le Gouvernement a une responsabilité dans la crise mais incrimine surtout les maires qui ne signeraient pas les permis de construire. Les données de long terme, notamment celles publiées par l'INSEE en novembre 6 ( * ) , montrent un recul de la construction au cours des cinq dernières années par rapport à ce qui a été observé depuis 1986 en termes d'augmentation annuelle moyenne du nombre de logements par catégorie :

Face à cette crise, les mesures que le Gouvernement propose restent insuffisantes . Après l'échec du « choc d'offre » du début du quinquennat, le « choc de confiance » pour relancer la construction pourrait faire long feu.

En effet, dans le cadre de la « commission Rebsamen 7 ( * ) », un diagnostic commun sur le besoin de construire et plusieurs propositions ont émergé mais la déclinaison dans ce PLF de la plus emblématique d'entre elles, la compensation intégrale aux maires de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), dont bénéficient les logements sociaux, ne pourra créer la confiance attendue. Comme l'a regretté l'AMF 8 ( * ) , il ne s'agit pas de compenser intégralement l'exonération pour toutes les communes et tous les logements sociaux existants mais seulement les nouveaux qui seraient agréés entre le 1 er janvier 2021 et juin 2026 et ce pour 10 ans sur les 25 ans d'exonération. De plus, cette compensation sera soumise à une clause de revoyure pour vérifier son efficacité. Enfin, ce n'est qu'à partir de 2023 ou 2024 que les premières compensations seront versées. Compte tenu de l'expérience des maires concernant les compensations de l'État et le niveau anecdotique de la compensation actuelle, il n'est pas du tout certain que l'effet attendu soit au rendez-vous.

« D'autres mesures étaient possibles pour relancer la construction, notamment en profitant du plan de relance ».

Concernant le logement social, il était possible de redonner des marges financières aux bailleurs, par exemple en rétablissant le taux de TVA à 5,5 % pour toutes leurs constructions ou ne serait-ce que pour les opérations de rénovation comme le Sénat l'a proposé dans le cadre de la loi « Climat et résilience » 9 ( * ) . Ce taux réduit, c'est environ 5 000 euros de moins par logement neuf, de quoi créer un effet de masse efficace dès lors que l'on veut en construire ou rénover plus de 200 000 !

C'était également l'occasion de revenir sur les effets de la RLS . Comme l'a montré la Caisse des dépôts dans sa dernière étude Perspectives 10 ( * ) , la solvabilité des bailleurs n'a été stabilisée qu'au prix d'un allongement de leur dette et de l'augmentation des ventes. Pour prendre ce dernier point, est-ce bien ce que l'on souhaite alors que le foncier en zone tendue est bien souvent irremplaçable et que la loi 3DS a instauré une priorité pour l'attribution de logements aux travailleurs clefs ?

Enfin, c'était le bon timing pour s'attaquer véritablement au statut du bailleur privé . À force de considérer l'investisseur immobilier comme un « rentier improductif » et non comme un « entrepreneur en logement », on a obéré durablement le logement locatif. Pourtant, le rapport du Comité d'Action publique 2022 11 ( * ) , de juin 2018, invitait clairement à changer de pied. Dans le projet de loi « Climat et résilience », le Sénat avait rehaussé le déficit foncier. C'était une première pierre. Dans la loi 3DS 12 ( * ) , il avait demandé au Gouvernement la prolongation et l'élargissement du dispositif « Louer Abordable », le Gouvernement a fait adopter un amendement en ce sens 13 ( * ) dans le PLF, c'est une bonne chose mais pas une rupture dans l'approche du sujet.


* 5 https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publicationweb/405.

* 6 https://www.insee.fr/fr/statistiques/5761272.

* 7 https://www.gouvernement.fr/partage/12460-rapport-rebsamen-commission-pour-la-relance-durable-de-la-construction-de-logements-tome-1.

* 8 https://www.amf.asso.fr/documents-annonces-du-premier-ministre-en-faveur-du-logement-social-une-reponse-partielle-aux-enjeux-construction-/40908.

* 9 www.senat.fr/rap/a20-650-1/a20-650-1-syn.pdf.

* 10 https://www.banquedesterritoires.fr/sites/default/files/2021-09/perspectives-2021.pdf.

* 11 https://www.modernisation.gouv.fr/files/2021-06/rapport_cap22_vdef.pdf.

* 12 www.senat.fr/rap/a20-720/a20-720-syn.pdf.

* 13 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4482C/AN/3536.

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