II. GOUVERNANCE : UN CADRE DE TRANSPARENCE ENFIN FIXÉ ET UNE ACCÉLÉRATION BIENVENUE DE L'AGENDA CLIMATIQUE INTERNATIONAL

Alors que le monde pourrait atteindre un réchauffement de 1,5 °C au début des années 2030, selon les estimations du GIEC, et que la somme des engagements nationaux et sectoriels demeure très éloignée de cette cible privilégiée de réchauffement (voir I), une des priorités de Glasgow était d'assurer l'application la plus complète et rapide du cadre de gouvernance de l'Accord de Paris, ainsi que l'accélération de l'agenda climatique international.

Sur ce volet des négociations, un bilan favorable peut-être dressé, laissant espérer une véritable transparence dans la mise en oeuvre des CDN et une réduction du considérable écart entre la trajectoire actuelle d'évolution des émissions et les objectifs de l'Accord de Paris.

A. DES RÈGLES DE TRANSPARENCE ENFIN FIXÉES

1. L'article 13, clé de voûte de l'Accord de Paris

« Afin de renforcer la confiance mutuelle et de promouvoir une mise en oeuvre efficace » de l'accord, son article 13 prévoit la création d'« un cadre de transparence renforcé des mesures et de l'appui ». Ce dispositif impose à l'ensemble des pays, développés ou en développement, de fournir un rapport national d'inventaire des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre, ainsi que les informations nécessaires au suivi des progrès accomplis dans la mise en oeuvre et la réalisation de leur contribution déterminée au niveau national (CDN).

L'article 13 invite également les Parties à communiquer des informations sur les effets des changements climatiques et sur l'adaptation.

Sur le fondement de cet article, les États développés doivent par ailleurs communiquer les informations sur l'appui fourni aux pays en développement, que ce soutien prenne la forme de ressources financières, d'un transfert de technologies ou d'un renforcement des capacités.

Les informations communiquées par chaque État au titre de l'article 13 doivent être soumises à un examen technique par des experts, ainsi qu'à une analyse par les pairs.

L'article 13 prévoit enfin que le cadre de transparence accorde aux pays en développement qui en ont besoin une certaine flexibilité dans la mise en oeuvre de ses dispositions. Il revient à ces pays de déterminer eux-mêmes leur niveau de flexibilité, ainsi que la durée pendant laquelle ils estiment que cette flexibilité leur est applicable.

Cet article constitue, en résumé, la clé de voûte de l'édifice de gouvernance créé à Paris en 2015 : garant de la réciprocité dans l'application de l'Accord de Paris, il doit permettre à chaque État de s'assurer de la mise en oeuvre effective des CDN des autres États.

2. Une opérationnalisation du cadre de transparence enfin assurée

La mise en oeuvre du cadre de transparence créé à Paris en 2015 nécessitait l'adoption par la COP « des modalités, des procédures et des lignes directrices » associées (ou MPGs, pour « modalities, procedures and guidelines »). Après trois années de négociation, les MPGs ont enfin été finalisées à la COP 24 de Katowice.

Les MPGs devaient notamment préciser les modalités de recours aux flexibilités en matière de déclarations effectuées par les pays en développement. Si ces flexibilités étaient inévitables - compte tenu des difficultés de collecte de données et des problématiques spécifiques aux pays en développement - des flexibilités trop générales et non-limitées auraient de facto pu remettre en cause la qualité du processus de rapportage et, partant, la solidité de l'édifice de gouvernance créé par l'Accord de Paris.

Les MPGs actées lors de la COP24 de Katowice ont écarté l'essentiel de ces risques en prévoyant que les flexibilités :

- soient détaillées élément par élément ;

- et portent avant tout sur le rapportage des émissions de gaz à effet de serre .

Les MPGs prévoient enfin que les rapports de transparence des États soient publiés au plus tard le 31 décembre 2024, puis tous les deux ans .

Restaient à rendre plus concrètement opérationnelles les modalités de mise au point des « tableaux de rapport communs » - permettant aux Parties de faire état de leurs inventaires de gaz à effet de serre - et des « modèles de tableaux communs » permettant de mesurer les progrès en matière de mise en oeuvre et d'atteinte de leurs CDN.

Après l'échec de la COP25 de Madrid, Glasgow devait à tout prix permettre d'assurer la mise en oeuvre complète de l'article 13, compte tenu de la date limite de 2024 - fixée à Katowice - de remise des rapports nationaux .

L'opérationnalisation du cadre de transparence acté à la COP26 constitue un réel soulagement et un des succès majeurs de la négociation . La décision finale - décrivant les tableaux, listes d'indicateurs et formats de rapportage que les États devront utiliser - garantit surtout l'uniformité du cadre de transparence - en empêchant la suppression par certains États de tableaux entiers ou l'effacement de colonnes et de lignes entières - tout en garantissant un degré de flexibilité pour les pays en développement - comprenant la possibilité de développer ou de réduire (« expand and collapse ») certains des éléments inscrits dans les tableaux.

La portée pratique de cette décision technique devra néanmoins être éprouvée à l'occasion de la remise des premiers rapports nationaux de transparence, en 2024.

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