C. QUELQUES EXEMPLES DE POLITIQUES DE SCIENCE OUVERTE DANS LES INSTITUTS DE RECHERCHE

1. Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) s'est doté en 2019 d'une feuille de route pour la science ouverte 91 ( * ) qui a fait suite à un premier livre blanc « Une Science ouverte dans une République numérique » en 2016. Trois raisons (scientifique, citoyenne et socio-économique) rendent incontournable selon cette feuille de route le développement de la science ouverte :

- le partage des connaissances scientifiques rend la recherche plus efficace, plus visible, moins redondante. L'accès ouvert aux données et aux résultats révolutionne la manière de faire de la recherche, et permet l'utilisation de nouveaux outils. Les outils issus des recherches récentes en intelligence artificielle (fouille de textes et de données, apprentissage automatique) permettent ainsi une recherche plus transversale, facilitant l'interdisciplinarité ;

- la science ouverte modifie la façon dont la recherche s'inscrit dans la société en aidant à rétablir la confiance entre le citoyen et le scientifique. L'accessibilité par de nombreux acteurs et par plusieurs disciplines facilite la réponse aux enjeux contemporains (défis interdisciplinaires par exemple) et l'intégrité scientifique est renforcée ;

- les chercheurs et les chercheuses paient souvent pour publier et pour lire les articles, réalisent gratuitement le travail de reviewing et les coûts d'abonnement ne cessent d'augmenter. La publication accessible des résultats scientifiques redonne aux scientifiques le contrôle d'un système qui leur a échappé et qui est devenu financièrement insoutenable à cause de l'augmentation constante des coûts de la diffusion scientifique.

L'action du CNRS pour la science ouverte est mise en oeuvre à travers un plan d'action et recours notamment à trois unités :

- l'Inist (Institut de l'information scientifique et technique), qui vise l'accès à l'information scientifique - avec le portail BibCNRS et les plateformes ISTEX et PANIST pour les publications - la valorisation des données, la fouille d'informations scientifiques ;

- le CCSD, maître d'oeuvre de HAL, d'Episciences et d'autres services ;

- Persée, plateforme créée en 2013 pour numériser et valoriser le patrimoine scientifique.

La politique de la science ouverte doit être différenciée selon les disciplines et se placer au coeur des instituts du CNRS. Certains d'entre eux ont développé des initiatives liées aux publications, en particulier la plateforme d'édition de revues et ouvrages OpenEdition ou le centre Mersenne développé pour la publication en accès ouvert des revues mathématiques.

La stratégie du CNRS pour atteindre 100 % des publications scientifiques en accès ouvert consiste à favoriser autour de plusieurs actions la « bibliodiversité », c'est-à-dire la diversité des produits issus de la recherche ainsi que la diversité des modes de publication. La science ouverte au CNRS porte aussi sur les données, la fouille des textes et des données avec le développement d'infrastructures ad hoc , l'évaluation individuelle des chercheurs, la formation, le positionnement international et la refondation de l'information scientifique et technique. Cette dernière s'est longtemps appuyée sur des dispositifs privés, possédés par des entreprises à but lucratif faisant chèrement payer leurs services. Outre son coût économique, cette configuration limitait la maîtrise des données, la capacité des opérateurs publics à les enrichir, les fusionner et les réutiliser.

2. L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)

L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) s'est engagé dans le mouvement pour l'accès ouvert (AO) avec la création de HAL et de la plateforme ouverte iPubli, qui donne accès à diverses productions éditoriales de l'Institut (2012), la reconnaissance de l'usage des preprints (2017) ou encore l'endossement de DORA (2018). Du soutien à l'accès ouvert aux publications, l'engagement de l'Institut s'est naturellement élargi aux pratiques de la science ouverte. Des informations ont ainsi été mises en avant sur l'intranet de l'Institut et des rencontres sur ce sujet ont été organisées dans plusieurs pôles de recherche (Site Pitié-Salpêtrière, Institut Imagine, Institut de Psychiatrie et Neurosciences de Paris) ou lors des réunions annuelles des directeurs de laboratoires et les rencontres avec les jeunes chercheurs recrutés. Après sa participation aux travaux de la Bibliothèque scientifique numérique (BSN), l'Inserm a poursuivi son engagement à différents niveaux de la nouvelle entité, le CoSO (au sein des collèges Publications, Données, SPSO, ReiSo et COPIL). L'Inserm s'est placé dans la vision du Plan national pour la science ouverte (PNSO) en adoptant ses règles et en identifiant la science ouverte et la science en société comme l'une des quatre priorités de son plan stratégique 2020-2025. Les propositions du plan stratégique ont été renforcées lors de la préparation du Contrat d'objectifs et de moyens :

- à partir de 2020, dans leurs rapports d'évaluation, les chercheurs doivent signifier pour chaque publication si sa version manuscrit auteur accepté (MAA) a été déposée dans HAL. Les instances d'évaluation de l'Inserm valoriseront les dépôts signalés ainsi que l'engagement individuel ou collectif dans la structuration, le partage et l'ouverture des données ;

- sur le modèle du Baromètre de la science ouverte (BSO) mis en place par le CoSO, l'Inserm a adapté une version institutionnelle du baromètre qui ouvrira début 2022. L'Institut analyse ses publications en AO et participe, depuis 2015, aux campagnes du suivi des dépenses en Article Processing Charges (APC) ; il met à disposition ces données pour un usage national ;

- une charte de la science ouverte est en préparation en complément du guide pratique pour la science ouverte disponible sur l'intranet. Au côté d'autres établissements, l'Inserm participe aux groupes de travail ou de réflexion sur l'élaboration et la mise en place des pratiques de la science ouverte (Académie des Sciences, ANR et autres agences de financement de la recherche, Paris-Sorbonne université, université Grenoble-Alpes) ;

- l'Inserm est l'un des coorganisateurs de la Conférence européenne sur la science ouverte (OSEC) qui s'est tenue en février 2022 dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Et au sein d'un groupe de travail réunissant les signataires français de DORA, l'Inserm a participé à l'élaboration du texte du « Pacte de Paris sur la science ouverte et l'évaluation de la recherche » adopté lors de la Conférence. Plus généralement, ce groupe de travail élabore les préconisations pour l'évolution des pratiques de l'évaluation de la recherche.

Par ailleurs, depuis 2020, une cellule d'orientation stratégique et un comité de pilotage mettent en oeuvre la politique de l'Institut en matière des données de la recherche :

- le déploiement progressif du cahier électronique de laboratoire (CLE, soit le premier niveau organisé de la gestion des données) se poursuit au sein des laboratoires et un programme d'accompagnement est mis en place ;

- la création d'un entrepôt de données Inserm (EDI), fondé sur la solution Dataverse et interopérable avec d'autres entrepôts existants et labellisés est à l'étude. Plus largement, ce projet s'accompagne de la construction d'une offre complète de stockage tenant compte de la typologie des données et des pratiques dans différentes communautés de la recherche ;

- un comité « Support informatique à la recherche » a commencé ses travaux sur la mise en place d'un Plan de gestion des données (PGD) institutionnel.

Enfin, sur le plan international, l'Inserm soutien et participe activement au développement de la science ouverte :

- la publication selon le modèle « Gold » est promue et facilitée par un soutien financier annuel des éditions BioMed Central ;

- l'Inserm participe aux travaux du Réseau d'experts internationaux de la science ouverte (ReiSo) ;

- l'Inserm contribue aux projets EOSC-Life et EOSC-Pilar, financés par la Commission européenne ;

- l'Institut est engagé dans le Technical advisory board de la Research Data Alliance pour coordonner techniquement les groupes de travail et leurs recommandations.

3. L'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae)

L'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) est impliqué dans l'édition scientifique d'ouvrages de recherche et de médiation scientifique à travers le groupement d'intérêt économique (GIE) « QUAE » 92 ( * ) , qui évolue vers une combinaison de diffusion en accès libre et de ventes d'ouvrages papier. Il est une des co-tutelles du CCSD, mais est également propriétaire de revues scientifiques et de diffusion de connaissances qui sont présentées en détail sur un site dédié. Il entend faire coïncider sa politique de diffusion des connaissances scientifiques avec les principes de la science ouverte et fait donc évoluer ses revues en partenariat avec des maisons d'édition privées (Springer-Nature, Elsevier et EDPS) ou sur des plateformes de publication ouvertes comme Open U Journals. Dans ce dernier cas, un projet du Fonds national pour la science ouverte (FNSO) lancé début 2022 devrait permettre de développer cette plateforme lancée par l'université de Bordeaux et d'accueillir un nombre croissant de revues pour l'essentiel francophones 93 ( * ) . Avec d'autres partenaires, il soutient également le mouvement de prise en charge, par la communauté scientifique, de l'évaluation qualitative ouverte de preprints hébergés par diverses plateformes internationales 94 ( * ) .

S'agissant du domaine des données ouvertes 95 ( * ) , la politique d'Inrae s'inscrit dans le cadre de référence fixé par la loi (loi pour une République numérique, loi relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public...). L'Institut a été précurseur sur la thématique de gestion et partage des données de la recherche et le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (MESRI) lui a confié en 2021 le développement du volet entrepôt et catalogue de la plateforme recherche.data.gouv 96 ( * ) .

Le projet stratégique Inrae 2030 précise qu'en cohérence avec le Plan national pour la science ouverte et avec les initiatives européennes et internationales, auxquels il contribue, Inrae établit une feuille de route pour accélérer l'ouverture et le partage des connaissances et des données. L'institut est également fortement engagé dans l'essor des recherches participatives et le dialogue avec le tiers secteur de la recherche. Cette position n'empêche pas pour autant de préserver découvertes et innovations chaque fois que nécessaire, selon le principe : « la science doit être aussi ouverte que possible et aussi fermée que nécessaire ».

La politique « science ouverte » d'Inrae 97 ( * ) affirme qu'en favorisant le partage des données, résultats, savoirs et savoir-faire, tout en permettant la confrontation des approches en amont du processus d'élaboration de la connaissance, les démarches de science ouverte ont pour objectifs de renouveler et d'améliorer la production, la validation, la diffusion et l'impact des connaissances et de contribuer à combler les écarts en matière de science, de technologie et d'innovation qui existent au sein des pays et entre eux. La science ouverte a également pour ambition la coopération entre chercheurs et avec la société. Dans la sphère académique, le dialogue entre disciplines doit faciliter la production de nouvelles connaissances en réponse à des enjeux sociétaux complexes. Les défis des transitions agricole, alimentaire et environnementale impliquent d'améliorer l'accès aux données, leur interopérabilité, et de permettre leur connexion. C'est pourquoi, Inrae développe notamment des partenariats avec Météo France, le Centre national d'études spatiales (CNES) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria). L'ouverture du processus de recherche à d'autres acteurs, notamment de la société civile, peut permettre de combiner des savoirs de différentes natures (scientifique, empirique, etc.) pour créer de nouvelles connaissances et pour innover dans un cadre collaboratif et multi-partenarial. La politique de science ouverte intègre aussi les démarches de sciences participatives 98 ( * ) .

4. L'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria)

L'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) a souvent été en avance dans sa politique de science ouverte, en s'appuyant sur une vision cohérente et systématique des actions initiées, un engagement auprès des chercheurs et un appui sur les infrastructures nationales disponibles. Au 1 er janvier 2022, Inria a mis en place une nouvelle direction de la culture et de l'information scientifiques qui regroupe, d'une part, les missions relevant de l'information et de l'édition scientifique, d'autre part, l'ensemble des activités d'éducation et de médiation scientifiques de l'institut. En matière d'archives ouvertes, Inria est une des co-tutelles du CCSD et après avoir fait partie des tout premiers établissements ayant signé la déclaration de Berlin en 2004, Inria s'est engagé dès 2005 dans le dépôt des articles scientifiques en archives ouvertes en inaugurant le portail HAL Inria. L'action d'Inria dans le domaine des archives ouvertes repose sur trois principaux éléments :

- l'obligation de dépôt des manuscrits auteurs dans HAL pour les publications dans des revues ou conférences scientifiques. HAL est la seule source documentaire pour les rapports annuels d'équipes de recherche ;

- l'accompagnement documentaire par son service Information et édition scientifiques qui mène des actions d'information et assure par ailleurs la modération des dépôts dans HAL ;

- une contribution au développement technologique autour de la plateforme HAL, notamment dans les domaines de l'import groupé ou la fouille de textes.

Pour ce qui concerne les abonnements et les frais de publication, Inria mène une politique d'abonnement qui vise à réduire son engagement budgétaire en se concentrant sur les ressources essentielles pour les thématiques de recherche de l'institut. En particulier, il s'est désabonné au fil des années de plusieurs collections jugées non pertinentes d'un point de vue scientifique (comme Nature ) ou de qualité estimée insuffisante (collection Springer Lecture Notes in Computer Science ). Dans le cadre du suivi des conséquences de l'expansion du modèle auteur-payeur, qui subordonne la publication d'articles dans certaines revues scientifiques au paiement de frais de publication (ou Article Processing Charges - APC), Inria a mis en place la politique suivante :

- un budget centralisé de paiement des APC de façon à éviter la fragmentation des frais correspondants, mais surtout afin d'établir un contact direct d'information avec les chercheurs (par exemple pour identifier les éditeurs ou revues prédatrices) ;

- pas de paiement de frais de publication sur ce budget centralisé dans les revues hybrides, c'est-à-dire des revues qui sont normalement sous abonnement, mais pour lesquelles l'éditeur propose une option payante de mise en libre accès des articles sur leur site ;

- des recommandations et de la pédagogie auprès des chercheurs pour que le paiement de frais de publication ne se fasse pas dans les revues hybrides ; l'intégration des publications pour lesquelles des APC ont été payés dans l'obligation de dépôt dans HAL, de façon à contribuer à l'établissement d'un corpus souverain de publications ;

- un suivi des nouveaux modèles économiques proposant une transition depuis le modèle de l'abonnement où les institutions payent pour lire vers les modèles où les institutions payent pour publier.

En termes d'édition scientifique, Inria s'implique dans le déploiement de nouvelles plateformes d'édition scientifique ouverte, notamment Episciences, développée et maintenue par le CCSD, en portant le portefeuille de revues scientifiques dédié à l'informatique et aux mathématiques appliquées. Ce modèle éditorial repose sur le dépôt préalable de manuscrits auteurs en archives ouvertes qui sont ensuite soumis à la relecture par les pairs, sans frais ni pour le contributeur ou son institution ni pour le lecteur.

S'agissant des données de la recherche, Inria s'est impliqué dans la gestion des données de la recherche depuis 2019, en recueillant les besoins de ses chercheurs et en publiant deux notes de positionnement stratégique. Une cellule a été mise en place pour accompagner les chercheurs, notamment au regard de l'obligation de fournir des plans de gestion de données pour les projets ANR et européens. La mise en place de la nouvelle direction de la culture et de l'information scientifique sera l'occasion de mettre officiellement en place un pôle relatif à la gestion des données au sein du service information et édition scientifique. Il est prévu de s'appuyer au maximum sur l'initiative d'hébergement national RechercheData.Gouv et de l'articuler avec les solutions locales déployées en son sein. Enfin, la participation au nouveau baromètre de la science ouverte (BSO3) intègre une expérimentation de repérage des jeux de données de recherche mentionnés dans les publications scientifiques.

Au niveau logiciel, Inria a accompagné depuis sa création le développement de l'initiative Software Heritage qui vise le recensement et l'archivage de l'ensemble du patrimoine logiciel en sources ouvertes. Software Heritage héberge actuellement près de 12 milliards de fichiers de code source correspondant à 170 millions de projets logiciels. De façon complémentaire, Inria a contribué à l'ouverture de HAL à la déclaration de logiciels déposés dans Software Heritage, et participe, en collaboration avec le MESRI et l'université de Lorraine qui coordonne cette activité, au baromètre précité de la science ouverte BSO3 sur l'identification des références aux logiciels dans les publications scientifiques.

En outre, en matière d'éducation et de médiation scientifiques, la création au 1 er janvier 2022 d'un service « Éducation et médiation scientifiques » traduit l'engagement de l'Institut dans la diffusion des sciences du numérique vers le grand public avec l'idée de partager et de participer à la création et à la diffusion de biens communs en gardant comme objectif et valeur la science ouverte. Dès 2013, Inria avait mis en place la plateforme de cours en ligne ouverts (Mooc) France Université Numérique, avec plus de 2,7 millions d'inscrits actuellement. Les formations sous licence ouverte (CC-BY) permettent aux 350 000 inscrits aux Mooc Inria de disposer de ressources pédagogiques partageables, modifiables et réutilisables.

Les activités de médiation scientifique participent elles aussi à l'engagement dans la science ouverte puisque les ressources documentaires, audio ou vidéo produites par l'institut ont vocation à être disponibles pour un large public, c'est le cas des vidéos produites dans le cadre de l'activité Class'Code 99 ( * ) ou des ressources liées aux activités dites « débranchées » 100 ( * ) . Tous les développements technologiques effectués dans le cadre des actions d'éducation et de médiation scientifiques sont disponibles en code ouvert et donc archivés dans Software Heritage avec une place importante du français, reflétant la politique linguistique de communication scientifique d'Inria, qui, en 2004, a été à l'initiative de la revue en ligne Interstices 101 ( * ) , référence francophone pour la vulgarisation des sciences du numérique, dont les articles originaux sont publiés sous licence Creative Commons .

5. Le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

Dans le cadre de son contrat d'objectifs et de performance (COP) portant sur la période 2021-2025 102 ( * ) , le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) affirme dans l'une de ses quatre thématiques transversales se conformer aux meilleures pratiques en matière de recherche, en particulier en promouvant une stratégie d'ouverture de ses publications et de ses données de la recherche, et, pour ces dernières, en respectant le principe européen « aussi ouverte que possible, aussi fermée que nécessaire ». Ces recommandations ont été formalisées dans la « charte du CEA pour une science ouverte» 103 ( * ) . Le CEA s'est par ailleurs engagé dans une politique de respect de l'intégrité scientifique, à laquelle concourt l'ouverture des résultats et des données, et a mis une organisation ad hoc en place à ce propos. Cette démarche en faveur d'une science ouverte s'inscrit dans le contexte des deux plans nationaux pour la science ouverte (PNSO1 2018-2021 et PNSO2 2021-2024), portés par le MESRI ainsi que des initiatives et programmes européens de recherche dont « Horizon Europe » qui renforce l'action en faveur de la science ouverte en mettant l'accent sur l'accès immédiat aux résultats et aux données des recherches.

Les chercheurs du CEA publient environ 5 000 articles 104 ( * ) par an dans des revues internationales avec les répartitions suivantes :

- 46 % chez les grands éditeurs commerciaux comme Elsevier, Springer Nature et Wiley ;

- 21 % chez des sociétés savantes du domaine de la physique, avec APS ( American Physical Society ), IOP ( Institute of Physics ), AIP ( American Institute of physics ), etc. ;

- 7 % chez des sociétés savantes du domaine de la chimie : ACS ( American Chemical Society ) et RSC ( Royal Society of Chemistry ) ;

- 6 % chez des éditeurs du libre accès natif (Copernicus, MDPI, Frontiers, PLOS, etc.).

Sur le total, 27 % des articles sont publiés en libre accès natif dans des revues scientifiques. Plus d'un tiers de ces articles ne nécessite pas le paiement d' Article Processing Charges (APC), principalement grâce à la licence nationale « EDP Science » et au projet SCOAP3 ( Sponsoring Consortium for Open Access Publishing in Particle Physics - Consortium de soutien à l'édition en libre accès en physique des particules) porté par le CERN, dispositifs dont on constate l'importance et l'intérêt. Selon le Baromètre de la science ouverte 2020 du CEA, 66,6 % des publications scientifiques 2019 du CEA sont disponibles en accès ouvert (natif ou pas), soit une proportion de dix points supérieure à la moyenne nationale. En 2021, la dépense auprès d'éditeurs scientifiques comprend :

- presque 5 millions d'euros par an pour l'achat de ressources documentaires (bases bibliographiques, contrats d'abonnement aux revues scientifiques, livres électroniques, etc.) dont notamment 650 000 euros chez Springer Nature et 650 000 euros chez Wiley ;

- le montant de l'abonnement CEA dans la licence nationale Elsevier financée par le MESRI, qui peut être estimé à environ 2,5 millions d'euros ;

- la dépense en APC et autres charges de publications (couleur...), qui avoisine 400 000 euros par an.

Le CEA a conscience de la nécessité d'une transition éditoriale importante pour augmenter le partage des connaissances afin que les nouveaux modèles économiques ne soient pas défavorables à la publication pour des pays ayant des budgets recherche et enseignement plus faibles. Il reconnait aussi le professionnalisme des éditeurs et leur valeur ajoutée.

Dans cette transition de l'édition scientifique, il apparait donc important que les éditeurs scientifiques réussissent à s'adapter aux besoins de la recherche avec le souhait de développement de services nouveaux : mise à disposition de la communauté des contenus dès leur publication, possibilité de reviewing ouvert pour certaines disciplines, liaison avec les données, évolution des pratiques dans un monde numérique, etc.

Pour la phase de transition éditoriale, le CEA n'impose pas de modèle de publication aux chercheurs et soutient un modèle de développement de la bibliodiversité permettant une communication scientifique adaptée à chaque discipline : il ne promeut pas un modèle unique pour atteindre la publication ouverte. Le CEA encourage l'expérimentation de nouveaux modèles économiques permettant l'ouverture des résultats et dans lesquels les éditeurs vont trouver leur source de revenus tels que des modèles d'accords associant les droits de lecture et des droits de publications en libre accès. Le CEA au travers du consortium Couperin mène une expérimentation chez un grand éditeur d'un accord de ce type ( Publish & Read ). La dépense globale (accès aux revues et aux archives, paiement des APC, nouveaux services numériques) devra être nécessairement contrôlée.

La Charte du CEA pour la Science ouverte déconseille fortement le paiement d'APC dans des revues hybrides (hors accord de type Publish & Read ), mais autorise celui-ci dans les revues nativement en Open Access .

Le CEA n'a pas eu à déplorer de cas de contestation de dépôts d'articles après la durée d'embargo de six ou douze mois dans une archive ouverte, ni du côté des éditeurs ni du côté des auteurs.


* 91 Cf. la feuille de route du CNRS pour la science ouverte : https://www.cnrs.fr/sites/default/files/press_info/2019-11/Plaquette_ScienceOuverte.pdf

* 92 Cf. https://www.quae.com

* 93 Cf. le site dédié aux revues de l'Institut https://www.inrae.fr/inrae-engage-science-ouverte/revues-scientifiques-techniques-portees-inrae et le nouveau site https://open.u-bordeaux.fr/journals/

* 94 Cf. https://peercommunityin.org/

* 95 Quatre principes y régissent la gouvernance des données : partager et réutiliser les données en respectant les valeurs de la science ; les données doivent être gérées en vue de les rendre FAIR (faciles à retrouver ; accessibles ; interopérables et réutilisables) ; les données doivent être « aussi ouvertes que possible, aussi fermées que nécessaire » ; l'ouverture des données contribue à l'innovation et à la création de valeur pour la société.

* 96 Cf. https://www.ouvrirlascience.fr/recherche-data-gouv-plateforme-nationale-federee-des-donnees-de-la-recherche/

* 97 Cf. https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/Politique_INRAE_Science_Ouverte.pdf

* 98 Extrait du projet stratégique Inrae 2030 : « Montée de la démocratie participative, augmentation du niveau d'éducation, perception ambiguë de la science, accès facilité à l'information, volonté et capacité accrues de la société civile d'intervenir dans les débats scientifiques - ces évolutions appellent un rapprochement entre science et société. Les démarches participatives s'inscrivent dans ce contexte. Elles renouvellent la vision et les pratiques de recherches par l'échange et la valorisation de différentes formes de savoirs, via une reconnaissance et une implication élargies de la société civile. Elles sont pratiquées avec succès à Inrae avec une grande diversité de parties prenantes (associations, élus, enseignants, élèves, séniors, agriculteurs, éleveurs, forestiers...) et de formes. Inrae renforcera progressivement leur montée en puissance selon quatre axes d'action complémentaires : 1) développement et structuration des relations avec la société civile non marchande ; 2) soutien et accompagnement des équipes scientifiques et techniques et des projets participatifs ; 3) contribution aux évolutions et à la reconnaissance de ces pratiques de recherche, au niveau national, européen et international ; 4) communication et mise en visibilité des démarches et réalisations de l'institut dans ce domaine, en interne et à l'extérieur ». Par ailleurs, Inrae est un des partenaires actifs de l'ALLISS, « Pour une alliance sciences sociétés » ( http://www.alliss.org/ ), a lancé le prix de la recherche participative en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, et s'est doté d'un site dédié aux sciences participatives : https://ist.blogs.inrae.fr/sciencesparticipatives/

* 99 Cf. https://classcode.fr

* 100 Cf. http://people.irisa.fr/Martin.Quinson/Mediation/SMN/ pour des exemples concrets, et https://www.lemonde.fr/blog/binaire/tag/activites-debranchees/ pour une perspective plus générale.

* 101 Cf. https://interstices.info

* 102 Cf. https://www.cea.fr/presse/Documents/230720201_COP_CEA_2021_2025_VF.pdf

* 103 Cf. https://www.cea.fr/chercheurs/Pages/information-scientifique/charte-science-ouverte.aspx

* 104 La production scientifique et technique du CEA est variée. Elle comprend notamment : plus de 5 000 articles scientifiques/an publiés dans des revues scientifiques internationales à comité de lecture (47 % en collaborations européennes, 65 % en collaborations internationales comprenant les collaborations européennes) ; quelques milliers de comptes rendus de conférences, très importantes dans certaines disciplines (STIC, ingénierie, ...) ; des preprints dans des archives ouvertes (ArXiv, bioarxiv, medArxiv,...), sachant que dans les disciplines du Domaine « Physique », l'utilisation de la base ArXiv fait partie du processus de communication scientifique ; plus de 3 000 documents/an en texte intégral déposés sur la plateforme nationale HAL via l'archive ouverte institutionnelle HAL-CEA (souvent des versions « manuscrit auteur accepté »), plus de 700 dépôts de brevets. Le contenu des brevets, même s'ils ne sont pas ouverts avant 18 mois, constitue une richesse patrimoniale ; des rapports internes et externes en grand nombre et parfois présentant un certain degré de confidentialité industrielle ou défense ; des ouvrages à destination de la communauté scientifique ou dédiés à la diffusion de la culture scientifique et technique.

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