II. LES USAGES DE L'EAU ET LES OUTILS DE GESTION DE LA RESSOURCE

A. LES USAGES DE L'EAU EN FRANCE

En 2017, 32 km 3 d'eau ont été prélevés 21 ( * ) sur les 180 km 3 transitant en moyenne annuellement en France métropolitaine 22 ( * ) (soit 18 % du volume en transit). Il faut cependant distinguer les prélèvements bruts des prélèvements nets ( i.e. la consommation) : en effet, une partie des prélèvements est rapidement restituée au milieu naturel et n'a donc que peu d'impact, d'un point de vue quantitatif, sur la ressource à l'échelle globale, puisque les quantités concernées sont à nouveau disponibles pour d'autres usages. Ainsi, en France, l'irrigation ne représente qu'une faible part des prélèvements bruts, largement inférieure à ceux nécessaires à la production d'énergie, principalement dus au refroidissement des centrales thermiques. Toutefois, une part très importante de cette eau de refroidissement est restituée au milieu naturel à proximité du lieu de prélèvement, ce qui fait que l'agriculture représente une part bien plus importante des prélèvements nets (voir Figures 7 et 8). La part des différents usages est cependant très variable selon les régions : dans le bassin Adour-Garonne, par exemple, l'agriculture représente 78 % de la consommation d'eau 23 ( * ) .

Figure 7 : Volumes des prélèvements bruts et nets par usage en France en 2009 (en km 3 ) 24 ( * )

Figure 8 : Répartition des prélèvements bruts et nets par usage en France en 2009 24

Pour apprécier plus justement la consommation d'eau française, il ne faut pas la réduire aux usages du territoire national mais considérer la quantité d'eau ayant été nécessaire pour la production des biens et services importés et exportés (on parle alors d'eau « virtuelle » 25 ( * ) ). À titre d'exemple, en 2007, 15 km 3 d'eau ont été utilisés à l'étranger pour produire les biens importés en France, alors que 6,6 km 3 ont été nécessaires pour produire des biens exportés par la France 26 ( * ) . Ainsi, la France était importatrice de l'équivalent de 8,4 km 3 d'eau en 2007 27 ( * ) . Alors que les prélèvements nationaux s'élevaient en moyenne à 519 m 3 par habitant en 2007, l'empreinte eau des Français était de 650 m 3 par habitant cette même année 28 ( * ) en intégrant l'eau « virtuelle » 29 ( * ) .

À l'heure actuelle, les ressources dont dispose la France suffisent globalement à couvrir ses besoins. Cependant, la ressource et les prélèvements en eau se caractérisent par leur variabilité spatiale et temporelle. Durant la période estivale, où les précipitations sont plus faibles, la majorité des cours d'eau connaissent un étiage et les nappes phréatiques voient leur niveau baisser, tandis que les besoins sont plus importants : de juin à août (soit une quart de l'année), 15 % seulement du volume annuel d'eau douce transitent sur le territoire métropolitain alors que la consommation en eau correspond à 60 % de la consommation annuelle. Des situations de pénurie peuvent alors exister localement et ponctuellement et nécessiter des restrictions d'usages dans certains départements. Le changement climatique accroîtra la fréquence et l'intensité de ces situations de tension, ce qui appelle à faire évoluer les modalités de gestion de l'eau.


* 21 Service des données et études statistiques (SDES), « Eau et milieux aquatiques - Les chiffres clés - Édition 2020 » ( https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2021-02/datalab_80_chiffres_cles_eau_edition_2020_decembre2020v2.pdf ).

* 22 Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), « Les acteurs économiques et l'environnement », 2017

( https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/les-acteurs-economiques-et-lenvironnement-edition-2017 ).

* 23 Commissariat général au Développement durable (CGDD), « L'environnement en France en 2019 : rapport de synthèse » ( https://www.vie-publique.fr/catalogue/271414-lenvironnement-en-france-en-2019-rapport-de-synthese ).

* 24 Il existe cependant une certaine incertitude quant à la part d'eau prélevée pour l'agriculture qui est restituée au milieu naturel. Voir : BRL Ingénierie, « Ressources et besoins en eau en France à l'horizon 2030 », 2012

( http://archives.strategie.gouv.fr/cas/system/files/rapport_france_version_finale.pdf ).

* 25 L'eau est qualifiée de « virtuelle » car invisible au niveau du produit fini mais elle correspond cependant bel et bien à de l'eau « réelle » lors du processus de production.

* 26 Commissariat général au développement durable, « L'eau et les milieux aquatiques - Chiffres clés - Édition 2016 »

( https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2018-10/reperes-2016-eau-milieux-aquatiques-b.pdf ).

* 27 Cette situation n'est pas nécessairement problématique dès lors que les produits importés ayant une forte « empreinte eau » proviennent de pays où la ressource n'est pas sous tension. Le principe d'eau « virtuelle » permettrait d'ailleurs d'équilibrer le bilan hydrologique de pays sous tension : si le transport d'eau « réelle » est coûteux par rapport à sa valeur volumique, il est possible de transférer de l'eau « virtuelle » grâce à des produits ayant une forte « empreinte eau » et une importante valeur marchande. Pour une carte des flux nets d'eau « virtuelle » sur la période 1996-2005, voir : A. Y. Hoekstra et al., PNAS 2012, 109, 3232

( http://www.pnas.org/content/early/2012/02/06/1109936109 ).

* 28 Cette estimation ne prend en compte que les prélèvements bruts d'eau « bleue » (l'eau prélevée dans les eaux souterraines et superficielles pour les usages domestiques, agricoles et industriels) mais pas l'eau « verte » (l'eau pluviale qui va irriguer naturellement les cultures et retourner à l'atmosphère par évapotranspiration) ni l'eau « grise » (l'eau nécessaire pour diluer les eaux usées). Au niveau global (eau « bleue », « verte » et « grise »), l'empreinte eau est estimée en France à 1 875 m 3 /personne/an (contre 1 243 m 3 /personne/an en moyenne dans le monde). Voir : A. Y. Hoekstra et al., Water Resour. Manag. 2007, 21, 35

( https://link.springer.com/article/10.1007/s11269-006-9039-x ).

* 29 Ce volume est à comparer aux 53 m 3 d'eau consommés en moyenne annuellement par un Français pour ses usages domestiques (donnée obtenue en 2017). Il existe cependant des disparités importantes entre les différents départements. Voir : Service des données et études statistiques (SDES), « Eau et milieux aquatiques - Les chiffres clés - Édition 2020 » ( https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2021-02/datalab_80_chiffres_cles_eau_edition_2020_decembre2020v2.pdf ).

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