N° 686

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juin 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur l'application de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes,

Par Mme Anne CHAIN-LARCHÉ,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas, présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault, secrétaires ; MM. Serge Babary, Jean-Pierre Bansard, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Françoise Férat, Amel Gacquerre, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, M. Sebastien Pla, Mme Daphné Ract-Madoux, M. Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot.

ESSENTIEL

Un an après l'adoption de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, la commission des affaires économiques a lancé une mission de suivi de l'application de cette loi.

Émanant du groupe LREM, la proposition de loi, non dénuée d'arrière-pensées électorales, n'avait pas bénéficié d'une étude d'impact et n'avait fait l'objet que de très peu de concertation avec les professionnels concernés.

Un an et demi après la promulgation, le travail de contrôle de la commission vise à s'assurer du caractère opérationnel de l'application de la loi, qui compte cinquante articles dans des champs très variés, modifiant le code rural, le code de l'environnement mais aussi le code pénal. Ce travail poursuit en particulier trois objectifs :

1) s'assurer que la parole du législateur a bien été entendue et que le fruit de la délibération parlementaire a bien été respecté par le pouvoir exécutif ;

2) aider l'administration à s'orienter dans l'interprétation de normes qui sont parfois ambiguës. Il faut rappeler en effet que députés et sénateurs étaient parvenus à un accord après de longs pourparlers. Toutes les parties prenantes ayant manifesté leur satisfaction après le vote de cette loi, c'était sans doute au prix de compromis qui pouvaient comporter des ambiguïtés ;

3) insister davantage sur le contrôle et l'application plutôt que de créer de nouvelles normes, la France disposant déjà d'un dispositif de protection animale unique au monde.

Seule parlementaire encore en fonction parmi les quatre rapporteurs de la proposition de loi à l'Assemblée nationale et au Sénat, Mme Anne Chain-Larché est rapporteure de cette mission, dans la continuité de ses travaux de l'automne 2021 lors de l'examen du texte. À l'issue d'un nouveau cycle d'auditions, la rapporteure formule seize observations et souhaite attirer l'attention en particulier sur six mesures qui lui semblent spécialement urgentes pour garantir que la loi soit pour les animaux et non pour les animalistes.

 
 
 
 

Textes réglementaires encore attendus pour l'application de la loi

« Prime à l'abandon » pour un lion ou un tigre de cirque, montant jugé dérisoire par les professionnels

Annonces de vente d'animaux de compagnie en ligne erronées ou frauduleuses

Délai de réflexion obligatoire avant l'acquisition d'un animal de compagnie

Articles de la loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes

50

dont d'application directe

39

dont appelant des mesures d'application

10

nombre de décrets en Conseil d'État

2

nombre de décrets simples

2

nombre d'arrêtés ministériels

11

Nombre total de mesures attendues

14

nombre de rapports du Gouvernement non remis

2

I. RESPECTER PLEINEMENT LES ÉCHÉANCES ET GARDE-FOUS FIXÉS PAR LE LÉGISLATEUR AFIN D'ASSURER LA TRANSITION LA PLUS SEREINE POSSIBLE VERS LA FIN DE LA DÉTENTION DE CERTAINS ANIMAUX SAUVAGES

A. SAUVEGARDER LES PARCS AQUATIQUES S'INSCRIVANT DANS UN PROGRAMME DE RECHERCHE SCIENTIFIQUE, EN DÉFINISSANT RAPIDEMENT LE CADRE APPLICABLE À LEURS ACTIVITÉS

S'agissant de la détention de cétacés par les parcs aquatiques - qui ne concerne que 23 dauphins et 4 orques, accueillis dans 2 parcs -, la loi prévoit par principe une interdiction des spectacles, mais pas des présentations pédagogiques (article 46). Les cétacés pourront en outre être conservés dans le cadre de programmes scientifiques.

La loi nécessitait trois arrêtés pour la bonne application de cet article (définition des présentations pédagogiques, définition des programmes scientifiques et relèvement des normes de détention pour le bien-être animal), qui pourraient signifier en pratique la fin de l'activité pour l'un des deux parcs. Or, aucun de ces textes n'a été pris à ce jour.

Aussi, la rapporteure appelle à les publier rapidement (d'ici la fin de l'été), et de préférence d'un bloc, pour stabiliser le cadre normatif sur plusieurs années et permettre aux parcs aquatiques de procéder aux investissements nécessaires à la mise aux normes.

B. PERMETTRE AUX PROFESSIONNELS DU CIRQUE DE POURSUIVRE LEUR ACTIVITÉ TANT QU'ELLE EST AUTORISÉE, ET PRÉVOIR UN ACCOMPAGNEMENT FINANCIER PROPORTIONNÉ À LEUR PRÉJUDICE AU-DELÀ

L'interdiction générale de la détention d'animaux sauvages par les cirques itinérants (article 46) n'a jamais été l'option privilégiée par le Sénat, qui souhaitait des interdictions au cas par cas, pour s'en tenir aux résultats de la recherche scientifique.

À moyen terme, le Gouvernement devra renforcer l'accompagnement, notamment financier, des professionnels s'il veut assurer une transition apaisée, l'enveloppe de 35 millions d'euros n'étant pas à la hauteur du préjudice subi. Le conseil pour l'établissement en cirques fixes devrait également être renforcé pour permettre aux circassiens de garder leurs animaux.

La rapporteure a tenu enfin à témoigner de sa solidarité à l'égard d'une profession qui a été profondément heurtée d'être incluse par défaut, et d'un bloc, dans une loi sur la « maltraitance animale », alors qu'elle n'a, collectivement, contrevenu à aucune loi de la République, et qu'elle a au contraire enchanté les enfants sur plusieurs générations.

« En attendant 2028, il faut appliquer la loi, toute la loi, mais rien que la loi, et veiller à ne pas interdire en fait, sous la pression d'associations, une activité qui reste autorisée en droit. La solution passera nécessairement par un surcroît de concertation locale. »

Anne Chain-Larché, rapporteure

C. EXEMPTER CLAIREMENT LES VOLERIES DES INTERDICTIONS VISANT LES SPECTACLES ITINÉRANTS AVEC ANIMAUX SAUVAGES ITINÉRANTS

Le législateur avait exprimé très clairement en commission mixte paritaire son intention d'exempter la volerie de l'interdiction d'itinérance des animaux sauvages. Composante de notre patrimoine, le vol libre devrait pouvoir avoir lieu à distance plusieurs jours d'affilée.

« Le Gouvernement doit permettre aux voleries d'exercer leur activité lors de spectacles pouvant durer plusieurs jours. »

Anne Chain-Larché, rapporteure

II. AVOIR POUR SEUL HORIZON LA PROTECTION DE NOS ANIMAUX DE COMPAGNIE

A. LE RENFORCEMENT DES CONTRÔLES SERA PLUS EFFICACE QUE L'ÉDICTION DE NOUVELLES RÈGLES OU INTERDICTIONS À MOYENS CONSTANTS

Le relèvement considérable des sanctions pénales contre les actes de maltraitance animale dans la loi du 30 novembre 2021 satisfait, aux yeux de la rapporteure, l'intention des auteurs de la proposition de loi visant à interdire la maltraitance sur les chiens et les chats par l'utilisation de colliers étrangleurs et électriques1(*).

C'est pourquoi, plutôt que d'inscrire ce texte à l'ordre du jour, et pour que l'unité dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police puisse donner toute sa mesure, la rapporteure appelle à privilégier un renforcement des moyens de contrôle des services vétérinaires en amont, et des moyens de la justice, en aval.

B. DANS LA LUTTE CONTRE L'ABANDON DES ANIMAUX DE COMPAGNIE, LES PROGRÈS À ATTENDRE NE VIENDRONT SANS DOUTE PAS DES MESURES LES PLUS MÉDIATIQUES

Les mesures réglementaires sur les animaux de compagnie, relevant du ministère chargé de l'agriculture, ont dans l'ensemble bien été prises, ce dont la rapporteure se félicite. Elle souhaite cependant observer que :

- le champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance (article 1er), ne devrait pas être étendu aux lapins et aux furets, mais limité aux chiens et chats comme le souhaitait le législateur ;

- le Gouvernement devrait communiquer davantage sur l'existence du délai de sept jours avant l'acquisition d'un animal et donner des instructions claires aux services vétérinaires pour contrôler le respect de cette obligation, y compris dans les refuges. Les bénévoles et salariés des refuges ou éleveurs subissant des pressions voire des menaces de la part d'acquéreurs trop pressés devraient également être davantage protégés ;

- l'absence de la moindre étude évaluant l'impact économique et sur le nombre d'abandons de l'interdiction de la vente des chiens et chats en animalerie (article 15) demeure toujours aussi préoccupante. Sur ce dernier point, en particulier, elle constate le risque d'un report vers la vente en ligne, en passe de devenir la plus grande animalerie de France, où près de la moitié des annonces sont fausses.

6 POINTS DE VIGILANCE DANS L'APPLICATION DE LA LOI

Les animaux sauvages captifs

Garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une pérennité de l'activité et une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans pour les parcs aquatiques (recommandation n° 2).

Augmenter l'enveloppe provisionnée pour l'accompagnement des professionnels du cirque, afin de garantir une transition la plus sereine possible en sortant les circassiens du désarroi, et exiger en contrepartie la transparence sur le nombre d'animaux sauvages captifs pour un meilleur suivi (recommandation n° 4).

Exempter clairement les voleries des interdictions visant les spectacles itinérants avec animaux sauvages en définissant pour elles un régime spécifique - soit en modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 relatif aux zoos, soit, de préférence, en prenant un arrêté spécifique à cette activité (recommandation n° 7).

Les animaux de compagnie

Retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie (recommandation n° 9).

Demander à l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie de procéder enfin à une étude évaluant l'impact de l'interdiction de la vente des chats et chiens en animalerie sur les abandons ; dans le même temps, procéder à une évaluation du coût économique de cette interdiction pour les professionnels (recommandation n° 11).

Augmenter les moyens dédiés au contrôle des services vétérinaires, pour alimenter en dossiers l'unité spécialisée dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police (recommandation n° 14).

LISTE DES PRINCIPALES PROPOSITIONS

Recommandation n° 1 : publier au plus vite l'arrêté sur la liste positive d'espèces autorisées à la détention, dans la mesure où il est nécessaire à la mise en oeuvre d'autres dispositions du texte.

Recommandation n° 2 : publier rapidement (d'ici la fin de l'été) les trois arrêtés attendus et, de préférence, de façon groupée, pour stabiliser le cadre normatif et permettre aux parcs aquatiques de procéder aux investissements nécessaires au bien-être animal.

Recommandation n° 3 : garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une pérennité de l'activité et une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans pour les parcs aquatiques.

Recommandation n° 4 : déployer sur l'ensemble du territoire les commissions départementales des professions foraines et circassiennes (CDPFC) prévues par la loi « 3DS », et prévoir une concertation systématique dans ce cadre entre collectivités territoriales et professionnels du cirque, en cas de litige sur le lieu d'installation.

Recommandation n° 5 : augmenter l'enveloppe provisionnée pour l'accompagnement des professionnels du cirque, afin de garantir une transition la plus sereine possible en sortant les circassiens du désarroi, et exiger de ces derniers en contrepartie la transparence sur le nombre d'animaux sauvages captifs pour un meilleur suivi.

Recommandation n° 6 : prendre de toute urgence le décret définissant les contours du « pas d'interdiction sans solution » satisfaisante pour le bien-être des animaux de cirque, établi dans la loi.

Recommandation n° 7 : accompagner davantage les cirques dans des projets d'établissements fixes et envisager la définition d'un statut spécifique pour les cirques fixes, distinct de celui des zoos.

Recommandation n° 8 : exempter clairement les voleries des interdictions visant les spectacles itinérants avec animaux sauvages en définissant pour elles un régime spécifique - soit en modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 relatif aux zoos, soit, de préférence, en prenant un arrêté spécifique à cette activité.

Recommandation n° 9 : donner rapidement un horizon clair aux voleries, qui vivent aujourd'hui dans l'incertitude, en leur permettant d'exercer leur activité en dehors de leur point fixe sur des périodes d'au moins sept jours consécutifs, et en accompagnant la création de points fixes pour multiplier les solutions temporaires d'hébergement.

Recommandation n° 10 : retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie (décret modifiant le décret n° 2022-1012 du 18 juillet 2022).

Recommandation n° 11 : communiquer davantage sur l'existence du délai de sept jours avant l'acquisition d'un animal et donner des instructions claires aux services vétérinaires pour contrôler le respect de cette obligation.

Recommandation n° 12 : demander à l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie de procéder enfin à une étude évaluant l'impact de l'interdiction de la vente des chats et chiens en animalerie sur les abandons ; dans le même temps, procéder à une évaluation du coût économique de cette interdiction pour les professionnels.

Recommandation n° 13 : augmenter les contrôles sur l'authenticité des informations d'identification fournies lors de la vente en ligne d'animaux (risque de « compliance »), et donner aux plateformes de vente en ligne tous les outils réglementaires pour se mettre en conformité avec leurs obligations, au risque sinon d'une fuite vers des canaux moins contrôlés (risque de concurrence).

Recommandation n° 14 : augmenter les moyens dédiés au contrôle des services vétérinaires, pour alimenter en dossiers l'unité spécialisée dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police.

Recommandation n° 15 : étudier la possibilité de renforcer les compétences de l'Arcom pour que les mises en demeure des hébergeurs et des fournisseurs d'accès à internet conduisent à retirer rapidement les contenus zoopornographiques.

Recommandation n° 16 : actualiser les instructions du ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse pour mettre en place rapidement les modules de sensibilisation à l'éthique et au respect des animaux de compagnie dans les cours d'enseignement moral et civique et lors du Service national universel (SNU).

RAPPORT

I. RESPECTER PLEINEMENT LES ÉCHÉANCES ET GARDE-FOUS FIXÉS PAR LE LÉGISLATEUR AFIN D'ASSURER LA TRANSITION LA PLUS SEREINE POSSIBLE VERS LA FIN DE LA DÉTENTION DE CERTAINS ANIMAUX SAUVAGES

A. LES ARRÊTÉS RELATIFS À LA FAUNE SAUVAGE CAPTIVE ONT PRIS UN RETARD PRÉJUDICIABLE AUX PROFESSIONNELS, CAR SOURCE D'INSÉCURITÉ JURIDIQUE

1. Cette loi comprend plusieurs mesures radicales par leur inspiration abolitionniste, mais en réalité bien plus nuancées dans leurs effets juridiques et concrets, justifiant l'attention portée à son application

Parmi les mesures les plus emblématiques de la loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, figurent les interdictions des chapitres 3 et 4 qui mettent fin, à certaines conditions, à la captivité de certaines espèces sauvages utilisées à des fins commerciales (articles 46 à 49), suivant une logique « abolitionniste ».

C'est dans une même logique abolitionniste que le chapitre 4 et son article unique (article 50) prévoient la fin de l'élevage de visons d'Amérique destinés à la production de fourrure, dès la promulgation de la loi (et non après un délai comme initialement prévu par cette loi). D'application directe, il a conduit à la fermeture du dernier établissement actif dans ce secteur dès la fin de l'automne 2023 (trois autres avaient été fermés par anticipation). Dans ce cas, la loi avait produit ses effets avant même d'entrer en vigueur.

Il faut noter toutefois que l'achat ou la vente de fourrures en vison n'étant, elle, pas interdite, le professionnel ayant cessé son activité pourra continuer d'écouler son stock en fonction des opportunités du marché. Par la suite, les industries textiles continueront de s'approvisionner à l'étranger, dans des conditions d'élevage qui seront, selon toute probabilité, moins-disantes.

En outre, après des débats marqués par des postures idéologiques et une prise à témoin systématique des franges les plus militantes de l'opinion publique, la commission mixte paritaire avait été conclusive au prix de divergences d'interprétations voire de malentendus sur ces dispositions, les plus emblématiques de la loi.

C'est ce qui rend le présent travail de contrôle d'autant plus important : il faut rappeler que ces interdictions ne sont pas générales et absolues, mais concernent certains animaux sauvages en captivité et si, et seulement si, certaines conditions sont réunies.

C'est ce qui rend également d'autant plus nécessaire la publication des textes réglementaires.

Or, alors que le Sénat avait été accusé, de façon factuellement inexacte, de refuser l'inscription de la proposition de loi à son ordre du jour et de « jouer la montre », la rapporteure remarque que, par contraste avec les arrêtés relevant de la compétence du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, les arrêtés du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ont pris un retard préjudiciable aux professionnels, car source d'insécurité juridique.

Elle ne souhaite cependant pas sous-estimer la difficulté, réelle, liée à la mise en oeuvre des mesures d'interdiction de la loi, qui nécessite un travail politique et technique considérable.

2. Les « dispositions parapluie » nécessaires à la mise en oeuvre d'autres dispositions de ce texte ont bien été prises, ou sont sur le point de l'être

Tout d'abord, il faut noter que l'article 47 de la loi, définissant les refuges ou sanctuaires pour animaux sauvages captifs, destinés à l'accueil des animaux retirés à leur environnement actuel (cf. infra, le B et le C du présent I), ne nécessitait pas de mesures d'application pour entrer en vigueur2(*).

Par ailleurs, les trois arrêtés sur la commission nationale consultative pour la faune sauvage captive (CNCFSC) prévus pour l'application de l'article 46 ont été pris. Ils devaient l'être prioritairement dans la mesure où il est prévu que cette commission soit consultée pour d'autres textes réglementaires pris en application de la présente loi (par exemple pour la liste d'espèces sauvages autorisées à la détention prévue à l'article 14).

Un premier porte sur les conditions d'organisation et de fonctionnement de la CNCFSC3(*), précisant notamment l'existence de deux formations, l'une plus élargie et impliquant les associations de protection animale, l'autre plus resserrée et ne laissant de place qu'aux professionnels et scientifiques. Le ministère chargé de l'écologie a indiqué qu'un arrêté modificatif serait pris dans les semaines suivant le présent bilan.

Deux autres arrêtés portent sur les nominations des membres au sein de cette commission, tant dans la formation prévue à l'article 4 du précédent arrêté (formation d'étude de la faune sauvage captive4(*)) que dans celle prévue à son article 5 (formation pour la délivrance des certificats de capacité5(*)).

Les deux arrêtés de nomination sont satisfaisants en ce qu'ils permettent une représentation équilibrée des différentes sensibilités, et donnent en particulier toute leur place aux compétences des professionnels, respectant, de ce fait, et l'esprit et la lettre de la loi. Le risque demeure, toutefois, que certaines compétences spécifiques, comme celles des circassiens, ne soient plus reconnues à leur juste valeur car davantage diluées qu'auparavant, au sein d'une instance élargie.

Enfin, à ce chapitre 3, il faut ajouter l'article 14 de la loi (chapitre Ier), créant un article L. 413-1 A au code de l'environnement, qui prévoit qu'un arrêté du ministre chargé de l'écologie fixe la liste des animaux pouvant être détenus comme animaux de compagnie ou dans le cadre d'élevages d'agrément (la « liste positive »). Ce renversement philosophique conduira à ce que, par défaut, un animal soit interdit à la détention, et à ce qu'il ne soit autorisé à la détention que par exception.

À la consultation du public, ce texte, qui a été présenté à la rapporteure de la mission de suivi, semble équilibré, alors que son principe laissait craindre des difficultés insolubles. Il s'agit désormais de le publier au plus vite pour permettre aux amateurs concernés de connaître le cadre qui leur est applicable, et pour que les plateformes de vente en ligne puissent se mettre en conformité avec leurs obligations (cf. infra, II, A, 5).

Recommandation n° 1 : publier au plus vite l'arrêté sur la liste positive d'espèces autorisées à la détention, dans la mesure où il est nécessaire à la mise en oeuvre d'autres dispositions du texte.

B. SAUVEGARDER LES PARCS AQUATIQUES S'INSCRIVANT DANS UN PROGRAMME DE RECHERCHE SCIENTIFIQUE, EN DÉFINISSANT RAPIDEMENT LE CADRE APPLICABLE À LEURS ACTIVITÉS

Lors de l'examen de cette proposition de loi, la rapporteure s'était indignée de ce qu'une loi prétendument destinée au bien-être animal puisse avoir pour effet paradoxal d'aboutir à la mort de vingt-et-un6(*) dauphins et de quatre orques, faute de solution d'accueil plus satisfaisante qu'actuellement.

En l'absence de sanctuaires marins crédibles, le précédent du Mexique, ou l'exemple de la femelle dauphin Femke du parc Astérix, qui a fini par être euthanasiée, laissait en effet présager le pire pour ces animaux ; leur cession à de riches acquéreurs des États du Golfe ou d'Extrême Orient n'offre pas de perspective plus reluisante pour ces animaux.

Le Sénat avait obtenu de haute lutte le retrait de l'obligation de contraception pour les dauphins en captivité, source, semble-t-il, de graves pathologies, ainsi qu'un délai de cinq ans avant l'entrée en vigueur de l'interdiction, et une dérogation pour les parcs aquatiques s'inscrivant dans le cadre de programmes scientifiques de recherche.

S'agissant des parcs aquatiques accueillant des cétacés, la loi nécessitait trois arrêtés pour sa bonne application. Aucun d'eux n'a été pris à ce jour. Or :

- si l'on se réfère à l'arrêté définissant les règles de fonctionnement de ces parcs aquatiques que la ministre de la transition écologique avait failli prendre en 2017, qui servirait selon toute probabilité de modèle au nouvel arrêté demandé par la loi, ce serait probablement la fin de l'activité de l'un des deux seuls parcs aujourd'hui en activité (Marineland), car les mises aux normes que cet arrêté impliquerait sont pour ce parc, déjà en difficulté financière, tout bonnement impossibles du fait de la situation de son site en zone inondable et des coûts induits. Reste à déplorer que les tergiversations du Gouvernement conduisent à la transformation, plausible, d'un parc ayant enchanté des générations au contact des cétacés, en un banal complexe immobilier ;

- un deuxième arrêté devra définir la notion de « programme scientifique », qui permettra à certains parcs de déroger à l'interdiction de détention de cétacés. Cette dérogation ne devrait pas être remise en cause à l'occasion de chaque renouvellement de programmation scientifique, mais être pérenne dans le temps afin de garantir la sécurité juridique de ces parcs ;

- un troisième arrêté, définissant les modalités de présentation au public des cétacés, nécessitera une rédaction très précise pour distinguer les animations pédagogiques de la notion de spectacle, sans donner une définition trop restrictive de ces animations.

Le ministère de la transition écologique a indiqué que ces textes seraient progressivement pris d'ici le début de l'automne. En toute logique, ils devraient être pris ensemble, d'un bloc, afin d'apporter la sécurité juridique nécessaire aux opérateurs économiques concernés.

Recommandation n° 2 : publier rapidement (d'ici la fin de l'été) les trois arrêtés attendus et, de préférence, de façon groupée, pour stabiliser le cadre normatif et permettre aux parcs aquatiques de procéder aux investissements nécessaires au bien-être animal.

Recommandation n° 3 : garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une pérennité de l'activité et une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans pour les parcs aquatiques.

C. PERMETTRE AUX PROFESSIONNELS DU CIRQUE DE POURSUIVRE LEUR ACTIVITÉ TANT QU'ELLE EST AUTORISÉE, ET PRÉVOIR UN ACCOMPAGNEMENT FINANCIER PROPORTIONNÉ À LEUR PRÉJUDICE AU-DELÀ

1. L'interdiction générale de la détention d'animaux sauvages par les cirques n'a jamais été l'option privilégiée par le Sénat

La rapporteure tient au préalable à témoigner de sa solidarité à l'égard d'une profession qui a été profondément heurtée d'être incluse par défaut, et d'un bloc, dans une loi sur la « maltraitance animale », alors qu'elle n'a, collectivement, contrevenu à aucune loi de la République, et qu'elle a au contraire enchanté les enfants sur plusieurs générations.

L'intitulé de la proposition de loi a été une première blessure pour les circassiens, tout un pan de notre patrimoine, hérité d'une tradition séculaire, ayant été réduit à ce seul aspect : si certaines dérives ont pu être observées chez certains professionnels, elles ne sont en aucun cas caractéristiques de toute une profession.

C'est la raison pour laquelle, à l'initiative du Sénat, le texte avait été renommé « proposition de loi visant à renforcer les liens entre humains et animaux », avant d'être adopté finalement sous le nom de « loi visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes ».

La seconde blessure est malheureusement moins symbolique et a des implications concrètes radicales. Nul ne conteste, en effet, que les circassiens sont profondément attachés à leurs animaux, et nul n'ignore que l'itinérance est dans la grande majorité des cas, pour ces circassiens, un mode de vie.

Aussi l'article 46 de la loi les conduit-il à opérer un choix déchirant entre leurs animaux ou l'itinérance, participant, nolens volens, de la stigmatisation des gens du voyage et de leur culture.

Si l'évolution des attentes sociétales justifiait un relèvement des normes en matière de bien-être animal, en particulier s'agissant du transport, la rapporteure déplore qu'une approche indiscriminée ait finalement été retenue, aboutissant à une interdiction identique quelle que soit l'espèce. Les professionnels du cirque sont détenteurs d'un certificat de capacité attestant de leurs qualifications, et venaient en outre de procéder à de coûteux réaménagements dans la suite de relèvements successifs des normes7(*).

En outre, cette interdiction générale traduit, aux yeux de la rapporteure, une insuffisante prise en compte des avis scientifiques, qui auraient dû conduire le législateur à privilégier l'approche retenue par le Sénat - une liste d'interdictions progressives, espèce par espèce, voire par individus, puisqu'il est difficile, par exemple, d'assimiler des félins nés en captivité à des animaux sauvages8(*).

2. À court terme, il faut appliquer « la loi, toute la loi, mais rien que la loi » et permettre aux cirques avec animaux sauvages de continuer leur activité jusqu'à l'interdiction fixée à 2028

Le délai de sept ans obtenu de haute lutte par le Sénat pour l'interdiction de détention, de transport et de spectacles, pour les animaux sauvages itinérants9(*), était la moindre des choses pour laisser aux professionnels le temps de se préparer. C'est, du reste, cette période de transition qui garantit que la responsabilité de l'État du fait des lois ne soit pas engagée en raison d'un préjudice anormal et spécial10(*) causé aux professionnels du cirque.

En dépit de ce délai de sept ans, la rapporteure entend alerter les pouvoirs publics sur le fait que les circassiens connaissent d'ores et déjà des difficultés chroniques pour exercer leur activité, de nombreuses mairies refusant leur installation sur un terrain de la commune sous la pression d'administrés eux-mêmes invités, par des associations de protection animale, à manifester leur désapprobation.

Il est essentiel pour la bonne acceptabilité des interdictions fixées à 2028 que les ministres chargés de l'application de ces interdictions accompagnent les professionnels du cirque et, d'ici à cette date, s'engagent à user de tous les moyens légaux pour faciliter leur activité.

La rapporteure constate que la responsabilité de cette impasse est collective et juge, par conséquent, que l'issue à cette impasse ne peut être également que collective :

- elle est d'abord celle de l'État, qui se montre incapable de faire respecter l'État de droit s'agissant pourtant d'une activité légale, contrôlée et encadrée, jusqu'en 2027 ;

- elle est également celle des associations de protection animale, dont la rapporteure regrette qu'elles aient communiqué avec trop d'entrain sur « l'interdiction des animaux dans les cirques » sans mentionner le délai de sept ans avant son entrée en vigueur, ni la possibilité, maintenue, de faire participer des animaux domestiques ou de rente à des spectacles itinérants - des spectacles de chiens savants, par exemple au Havre, ou de camélidés n'ont pu se tenir dans plusieurs communes ;

- cette responsabilité est ensuite celle de certains maires, qui ont pris pour certains des délibérations illégales par anticipation de l'entrée en vigueur de l'interdiction du 1er décembre 2028 ;

- enfin, certains circassiens eux-mêmes ont pu occasionner des dommages, en particulier sur les pelouses, ou en se raccordant illégalement au réseau d'eau ou d'électricité, suscitant la méfiance des maires.

C'est pourquoi l'obligation de médiation créée à l'article 157 de la loi 3DS11(*), dans le cadre des commissions départementales des professions foraines et circassiennes12(*) (CDPFC), en ce qu'elle « force » la concertation entre professionnels, État et collectivités territoriales, sous l'autorité du préfet, semble une voie plus prometteuse qu'une nouvelle circulaire aux préfets. Elles sont la bonne enceinte pour résoudre les différends au plus près des réalités locales, tout en respectant la libre administration des collectivités territoriales et sans aller jusqu'à des actions juridiques, telles que des déférés préfectoraux sur les délibérations jugées illégales.

Leur déploiement, qui n'était encore effectif que dans 30 % des départements au début de l'année 2023, doit se poursuivre, en lien avec l'Assemblée des départements de France (ADF) et l'Assemblée des maires de France (AMF).

Recommandation n° 4 : déployer sur l'ensemble du territoire les commissions départementales des professions foraines et circassiennes (CDPFC) prévues par la loi « 3DS », et prévoir une concertation systématique dans ce cadre entre collectivités territoriales et professionnels du cirque, en cas de litige sur le lieu d'installation.

Si cette solution reposant sur l'intelligence collective n'aboutissait pas, il conviendrait de remettre à l'ordre du jour des deux assemblées la proposition de loi sénatoriale sur le délit d'entrave13(*).

3. À moyen terme, le Gouvernement devra renforcer l'accompagnement des professionnels s'il veut assurer une transition apaisée

La rapporteure déplore en outre qu'il n'y ait toujours pas, à ce jour, de plan d'accompagnement sérieux des professionnels du cirque. Les changements politiques intervenus en 2022 ont pu expliquer une partie du retard pris, mais les auditions ont également permis de mettre au jour une priorisation délibérée d'autres dossiers, qui peut certes s'entendre, mais qui a des répercussions concrètes sur les cirques. Déboussolés, déjà contraints à cesser leur activité pour certains, ils sont en attente d'un véritable itinéraire d'accompagnement.

La loi ne prévoit pas explicitement d'indemnisation - mais ne l'exclut pas non plus - pour l'arrêt de l'activité de la majorité des cirques qui résultera nécessairement de l'interdiction de l'itinérance de la faune sauvage captive, l'itinérance et les animaux sauvages étant deux composantes indissolubles de leur modèle économique. Tenu au respect de l'article 40 de la Constitution, le Parlement n'avait pu prévoir une telle indemnisation, mais le Sénat avait appelé au déploiement d'un accompagnement à la hauteur.

Le Gouvernement mentionne régulièrement les 2,4 millions d'euros d'aide au nourrissage et au soin des animaux accordés pendant la pandémie de Covid-19, comme s'il s'était agi d'une première étape du plan d'accompagnement, une façon de raisonner qui n'est évidemment pas acceptable pour ces professionnels.

L'enveloppe prévue initialement, de l'ordre de 20 millions d'euros, a finalement été portée à 35 millions d'euros sur trois ans, soit une hausse significative, mais qui reste largement sous-dimensionnée. Deux difficultés techniques compliquent le calibrage de ces aides :

- premièrement, le Gouvernement semble vouloir appliquer le régime de minimis, alors ces plans ne correspondent pas à une aide sectorielle, mais à l'indemnisation d'un dommage ;

- deuxièmement, plusieurs cirques n'ont pas tenu de comptabilité.

À nouveau rencontrés par la rapporteure, les circassiens ont témoigné du caractère dérisoire des montants proposés des « primes à l'abandon », de l'ordre de 3 000 € pour un lion ou un tigre, à mettre en regard avec les années d'apprentissage perdues et avec la forte valeur sentimentale de ces animaux pour leurs propriétaires.

Pour autant, il faut souligner que cette enveloppe doit servir à indemniser à la fois le dommage économique pour tous les détenteurs d'un certificat de capacité faune sauvage captive pour une ou plusieurs espèces (les « capacitaires »), la reconversion éventuelle de ces mêmes personnes, et la perte de leurs animaux, qui seront confiés à des refuges, pour les professionnels qui ne souhaitent ou ne peuvent continuer leur activité sur un site fixe.

Il va de soi qu'en contrepartie, le délai fixé à deux ans après le vote de la loi (1er décembre 2023) pour l'interdiction d'acquisition, de commercialisation et de reproduction doit être pleinement respecté par les circassiens, la discussion avec les services de l'État les engageant à ne pas contourner la loi par des naissances ou des ventes non enregistrées dans le fichier i-Fap.

Recommandation n° 5 : augmenter l'enveloppe provisionnée pour l'accompagnement des professionnels du cirque, afin de garantir une transition la plus sereine possible en sortant les circassiens du désarroi, et exiger de ces derniers en contrepartie la transparence sur le nombre d'animaux sauvages captifs pour un meilleur suivi.

4. Des conditions d'accueil satisfaisantes pour l'ensemble des parties prenantes doivent être trouvées pour les animaux

Le décret en Conseil d'État devant préciser les conditions dans lesquelles le ministre chargé de la protection de la nature peut déroger aux interdictions i) d'acquisition, de commercialisation et de reproduction, ainsi que ii) de détention, de transport et de spectacles, pour les animaux sauvages itinérants des cirques, n'a pas encore été pris.

Si le Gouvernement indique dans son échéancier préparer ce texte pour novembre 2023, il serait préférable de le prendre rapidement, pour permettre, en bonne logique, de définir les contours concrets du principe « pas d'interdiction sans solution » fixé dans la loi, avant l'entrée en vigueur des premières interdictions.

Cette condition avait été introduite dans la loi à l'initiative du Sénat, pour que ne s'ajoute pas, pour les circassiens, à la perte de leurs animaux vécue par eux comme un « arrachement », la crainte que ces animaux soient accueillis dans des conditions non satisfaisantes du point de vue du bien-être animal, en particulier s'ils sont cédés à l'étranger voire s'ils sont menacés d'euthanasie.

Recommandation n° 6 : prendre de toute urgence le décret définissant les contours du « pas d'interdiction sans solution » satisfaisante pour le bien-être des animaux de cirque, établi dans la loi.

Il est également à déplorer que, dans l'appel à manifestation d'intérêt lancé par le Gouvernement pour trouver des solutions d'accueil aux animaux, aucun dossier présenté par des professionnels du cirque n'ait été retenu.

D'après les services du ministère de l'écologie, cet AMI « refuges » a été un succès, vingt-trois dossiers ayant été déposés, et neuf ayant été sélectionnés, pour un montant total de quatre millions d'euros. Il serait la preuve qu'il sera possible de trouver des places pour héberger ces animaux, soit dans des refuges tenus par des associations, soit dans des zoos - à supposer que ces derniers soient intéressés par des animaux de cirque au patrimoine génétique moins contrôlé.

Il est en outre dommage que la dizaine de cirques se disant prêts à se fixer n'aient pas eu cette possibilité ou ne soient pas davantage accompagnés pour des études de marché sur l'opportunité de s'établir dans tel ou tel bassin de population. De nombreux circassiens n'imaginent pas de confier leurs animaux à des associations « animalistes ».

Enfin, le Gouvernement a jugé que le cadre juridique applicable aux cirques fixes (art. L. 413-11 code de l'environnement) ne nécessitait pas l'arrêté d'application prévu à l'article 46, un tel cadre, qui s'étendrait désormais à ces cirques fixes, étant selon lui déjà établi dans le droit existant pour les zoos. Il est toutefois permis de douter de la pertinence de maintenir un cadre unique pour des activités aussi différentes, bien qu'il faille veiller également à ne pas bousculer l'équilibre économique des zoos en créant un statut « au rabais » avec des règles plus souples.

Recommandation n° 7 : accompagner davantage les cirques dans des projets d'établissements fixes et envisager la définition d'un statut spécifique pour les cirques fixes, distinct de celui des zoos.

D. EXEMPTER CLAIREMENT LES VOLERIES DES INTERDICTIONS VISANT LES SPECTACLES ITINÉRANTS AVEC ANIMAUX SAUVAGES

Il convient de s'arrêter un instant sur la situation particulière de la volerie, victime collatérale de l'interdiction de l'itinérance des animaux d'espèces non domestiques en captivité.

L'interprétation gouvernementale de la loi vient en effet fragiliser cette activité héritée de la fauconnerie, composante encore très vivace de notre patrimoine culturel, en particulier dans plusieurs sites médiévaux, et qui comporte une vocation à la fois pédagogique et de divertissement du grand public.

En effet, l'interdiction générale « d'acquérir, de commercialiser et de faire se reproduire des animaux appartenant aux espèces non domestiques en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants » (article 4614(*)), qui visait selon ses instigateurs les circassiens et leurs animaux15(*), aurait pu emporter l'interdiction, pour les professionnels et amateurs de la volerie, d'exercer au-delà d'un périmètre pouvant être parcouru en une journée.

Ces passionnés se déplacent en effet régulièrement pour des événements festifs afin d'effectuer des démonstrations qui s'échelonnent généralement sur plusieurs jours.

Pour autant, la notion d'itinérance implique une permanence qui ne correspond en rien au mode d'exercice de la volerie, fait de prestations ponctuelles, correspondant généralement à des festivités locales à des moments précis de l'année.

Il a en outre été rappelé à de multiples reprises lors de l'examen de la proposition de loi, que les rapaces - faucons, buses et autres chouettes - n'avaient pas les mêmes besoins physiologiques que des animaux sauvages aquatiques (hippopotames) ou même que les félins. Ils semblent en effet mieux supporter le transport et la captivité.

C'est pourquoi le législateur s'est exprimé en commission mixte paritaire pour préciser son intention, qui ne souffre aucune ambiguïté : ces voleries ne relèvent pas de la notion d' « itinérance », mais de celle de « transport » ou de « mobilité ».

Des intentions clairement exprimées par le législateur
lors de la commission mixte paritaire

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour le Sénat. Les rapporteurs que nous sommes estiment que les voleries ne sauraient être concernées par l'interdiction de détention des animaux sauvages à l'article 12, dans la mesure où les spectacles de fauconniers qu'elles proposent ne relèvent pas de l'itinérance. Les animaux partent d'une volière, participent à un spectacle puis retournent dans leur volière : il s'agit davantage de transport ou de mobilité que d'itinérance. Il me paraît important d'apporter cette précision, qui a fait l'objet de nombreuses discussions la nuit dernière, afin de sécuriser les spectacles concernés, notamment ceux évoqués par M. Thiériot.

Mme Aurore Bergé, députée. Je souscris aux propos de Mme Chain-Larché afin de lever toute ambiguïté quant aux intentions du Sénat comme de l'Assemblée nationale. La fauconnerie ne saurait être concernée par l'interdiction posée à l'article 12. En exposant ces animaux et en allant les montrer, par exemple, dans des EHPAD, l'Espace Rambouillet, géré par l'Office national des forêts (ONF), participe à la protection de la biodiversité. Les soins sont dispensés aux faucons par des professionnels soucieux du bien-être de l'animal.

Extrait des débats de la commission mixte paritaire sur l'article 14 de la proposition de loi [devenu article 49 de la loi].

Pour lever toute ambiguïté, s'il en était besoin, la rapporteure avait bien rappelé lors de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire au Sénat, sans être contestée par le Gouvernement, que « les voleries ne relèvent pas de l'interdiction prévue, car elles sont non pas itinérantes, mais mobiles ».

Les équipes de la direction de l'eau et de la biodiversité, comme d'ailleurs la ministre chargée de l'écologie elle-même, ont reconnu en audition l'existence de cette dérogation pour les voleries, en évoquant la possibilité de modifier l'arrêté du 25 mars 200416(*) fixant les règles générales de fonctionnement et les caractéristiques générales des installations des établissements zoologiques à caractère fixe et permanent, présentant au public des spécimens vivants de la faune locale ou étrangère.

Il s'agit déjà d'une première étape importante qui évitera la fin de cette activité, et d'un signe très encourageant pour la volerie, que la rapporteure tient à saluer haut et fort.

Recommandation n° 8 : exempter clairement les voleries des interdictions visant les spectacles itinérants avec animaux sauvages en définissant pour elles un régime spécifique - soit en modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 relatif aux zoos, soit, de préférence, en prenant un arrêté spécifique à cette activité.

En revanche, s'agissant du nombre de jours de présentation, les négociations continuent, la sénatrice ayant clairement fait part du souhait du législateur que les voleries puissent exercer leur activité plusieurs jours d'affilée sur un site en dehors de leur point fixe.

L'interprétation par les services du ministère chargé de l'écologie tendait au contraire à considérer que la dérogation ne vaudrait que pour un événement journalier, avec retour au point fixe le soir même, au motif que le verbatim de la commission mixte paritaire fait état d'« un spectacle ».

La rapporteure considère que cela revient à faire dire au législateur ce qu'il n'a pas dit, « un spectacle » pouvant évidemment s'échelonner sur plusieurs jours, et parfois même sur un mois.

Elle constate, du reste, que cette interprétation serait contraire au but recherché, qui reste, est-il besoin de le rappeler, le bien-être animal. En effet, imposer un trajet retour, potentiellement sur longue distance, la même journée, serait dans la plupart des cas plus contraignant pour les animaux que de rester sur place.

Ce serait en outre fragiliser l'équilibre économique des voleries, qui seraient contraintes de choisir un jour sur un week-end avec des coûts fixes de transport et d'installation inéluctablement accrus.

Il semble que le secrétariat d'État à l'Écologie soit finalement disposé à permettre l'activité sur plus d'une journée, ce pour quoi la rapporteure, qui a bien entendu les assurances du Gouvernement, se montre reconnaissante. Elle considère que la mobilité pourrait raisonnablement être autorisée pour une semaine et que la liberté devrait être laissée à ces professionnels d'héberger leurs animaux sur le site du spectacle ou sur un point fixe à proximité, en fonction de ce qui semble plus favorable sur le plan du bien-être animal.

Recommandation n° 9 : donner rapidement un horizon clair aux voleries, qui vivent aujourd'hui dans l'incertitude, en leur permettant d'exercer leur activité en dehors de leur point fixe sur des périodes d'au moins sept jours consécutifs, et en accompagnant la création de points fixes pour multiplier les solutions temporaires d'hébergement.

II. AVOIR POUR SEUL HORIZON LA PROTECTION DE NOS ANIMAUX DE COMPAGNIE

A. DANS LA LUTTE CONTRE L'ABANDON DES ANIMAUX DE COMPAGNIE, LES PROGRÈS À ATTENDRE NE VIENDRONT SANS DOUTE PAS DES MESURES LES PLUS MÉDIATIQUES

1. Les mesures réglementaires sur les animaux de compagnie, relevant du ministère chargé de l'agriculture, ont dans l'ensemble bien été prises

Le premier chapitre de la loi, portant sur les conditions de détention des animaux de compagnie et des équidés, contient vingt-cinq articles ayant pour but principal de responsabiliser les propriétaires d'animaux afin de lutter contre l'abandon de ces derniers.

Il comprend des mesures aussi diverses que l'interdiction de la vente des chiens et chats en animalerie, l'encadrement des associations sans refuge qui confient des animaux à des familles d'accueil, l'encadrement de la vente en ligne des animaux de compagnie.

Quinze de ces articles (articles 2 à 6, 8, 12 et 13, 16 et 17, et 20 à 24), parmi lesquels certains des plus emblématiques de la loi, sont d'application directe, soit qu'ils formulent une interdiction, soit qu'ils fixent une obligation, suffisamment précise dans les deux cas.

A contrario, neuf articles nécessitent des mesures d'application. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, chargé de l'application de huit de ces articles17(*), a pris les textes suivants :

- le décret n° 2022-1012 du 18 juillet 2022 relatif à la protection des animaux de compagnie et des équidés contre la maltraitance animale18(*) définit les modalités du certificat d'engagement et de connaissance des détenteurs d'un équidé, des acquéreurs de certains animaux de compagnie. Ce texte permet l'application complète de quatre articles, à savoir les articles 1er (sur ledit certificat), 10 (sur les modalités dans lesquelles des refuges ou associations sans refuge peuvent confier des animaux de compagnie à des familles d'accueil), 18 (sur le cadre juridique de la cession en ligne d'animaux de compagnie) et 19 (sur les modalités de contrôle des informations d'identification des animaux) ;

- le décret n° 2022-1179 du 24 août 2022 relatif à la formation des gestionnaires de fourrière relative en matière de bien-être des chiens et des chats19(*) permet l'application partielle de l'article 7, apportant une garantie supplémentaire en matière de bien-être animal à l'accueil des animaux en fourrière. Il renvoie, pour les équivalences à cette formation, à un arrêté, qui avait été pris préalablement, le 14 janvier 202220(*). En revanche, le Conseil d'État a, dans son avis sur le projet de décret, conseillé au Gouvernement d'appliquer le droit existant, sans mesure d'application particulière, pour concrétiser la possibilité pour une commune de confier la gestion de la fourrière à des associations de protection des animaux avec refuges ;

- enfin, le décret en Conseil d'État n° 2022-1354 du 24 octobre 2022 relatif à la protection des animaux de compagnie21(*) permet l'application partielle de l'article 7 (en fixant les modalités de l'amende forfaitaire dont est passible le propriétaire d'animaux en cas de non-paiement des frais de garde de la fourrière) et l'application totale de l'article 9 (modalités d'enregistrement et de suivi des refuges ou associations sans refuge).

Initialement prévue, la compétence obligatoire du maire en matière de prise en charge des chats errants (capture, identification, stérilisation) s'est muée, à l'initiative du Sénat, en une demande de rapport du Gouvernement pour mieux quantifier ce phénomène et identifier les coûts de la stérilisation (article 11).

Un autre article, d'application directe (article 12), prévoit également un rapport pour évaluer l'expérimentation sur cinq ans de conventions État-EPCI-communes portant sur la gestion des populations de chats errants. Il n'a par définition pas pu être rendu, la période d'expérimentation n'étant pas échue.

2. L'extension du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance, au-delà des chiens et chats, doit encore faire la preuve de sa nécessité

Le certificat d'engagement et de connaissance (article 1er) était une mesure équilibrée du texte initial pour concilier la liberté du commerce des animaux de compagnie et la lutte contre l'abandon de ces mêmes animaux. En effet, il eût été mal compris par nos concitoyens d'exiger d'eux davantage qu'un engagement volontaire - par exemple une formation - avant d'acheter un chien ou un chat, quand dans le même temps la naissance d'un enfant ne s'accompagne d'aucun préavis, alors qu'elle implique évidemment de plus grandes responsabilités.

L'inclusion, par le décret du 18 juillet 2022, du furet et des lagomorphes (lapins) dans le champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance (article D. 214-32-4) a surpris les professionnels. Non explicitement prévue par la loi même si elle est en effet une possibilité (« Les animaux de compagnie mentionnés au deuxième alinéa du présent V sont les chats et les chiens ainsi que les animaux de compagnie précisés par décret »), cette extension doit encore faire la preuve de sa nécessité.

Si cette inclusion peut s'entendre, à la limite, pour les furets, par cohérence avec les chiens et les chats, dans la mesure où ils appartiennent à la même catégorie des carnivores domestiques, l'inclusion du lapin apparaît davantage comme un satisfecit donné aux associations de protection animale, qui, lors de l'examen de la proposition de loi au Sénat, avaient fait de la restriction voire de l'interdiction de la vente de cette espèce leur nouvelle cause, après avoir obtenu des restrictions voire des interdictions sur le commerce des chats et des chiens à l'Assemblée nationale.

Pourtant, en l'absence des premières données de l'observatoire statistique sur l'abandon des animaux, qui avait été annoncé par le précédent ministre chargé de l'agriculture, il demeure difficile d'évaluer la proportionnalité de l'extension de cette mesure à de nouvelles espèces au but recherché, à savoir la diminution du nombre d'animaux abandonnés.

Recommandation n° 10 : retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie (décret modifiant le décret n° 2022-1012 du 18 juillet 2022).

3. Si l'objectif de la loi est véritablement de lutter contre l'abandon, le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie ne devrait souffrir d'aucune dérogation

Calqué sur des règles existant déjà pour le crédit à la consommation, le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal a constitué l'apport-phare du Sénat lors de l'examen de la proposition de loi pour lutter contre les achats d'impulsion, phénomène inquiétant dont le texte initial tirait prétexte pour apporter des réponses hors-sol, voire hors-sujet, comme l'interdiction de la vente en animalerie.

Les associations de protection animale ont cependant alerté sur deux possibles effets pervers du délai de sept jours, qui s'impose en effet à elles comme aux autres :

- premièrement, les bénévoles opérant dans les refuges pourraient être soumis à des pressions, voire à des menaces, de la part de particuliers peu disposés à attendre une semaine avant de satisfaire leur désir ;

- secondement, ce délai pourrait causer des problèmes d'engorgement contraignant, dans les cas les plus extrêmes, certaines fourrières à des euthanasies.

La rapporteure tend à penser - le premier effet pervers en atteste - que les acquisitions d'impulsion sont possibles dans les refuges tout autant, si ce n'est plus, que dans les animaleries, en raison de motivations compassionnelles, auxquelles il faut ajouter des frais relativement limités, de l'ordre des dizaines ou centaines d'euros, par contraste avec un prix qui dépasse fréquemment les 1 000 € en animalerie ou chez un éleveur.

En l'absence d'étude établissant avec certitude une propension à l'abandon moindre des chats et chiens achetés en refuge par rapport aux chats et chiens achetés en élevage ou en ligne, la rapporteure s'étonne toutefois des instructions qui, à en croire les associations de protection animale elles-mêmes, auraient été données par les services vétérinaires du ministère de l'Agriculture aux services déconcentrés, dans le sens de contrôles moins stricts dans l'application de cette disposition aux refuges.

Elle appelle toutefois l'État à mettre toute l'énergie nécessaire à la protection des éleveurs et bénévoles ou salariés des refuges confrontés à de telles instances, par des instructions en ce sens aux services de police et de justice.

C'est pourquoi elle juge opportun de ne pas prévoir de dérogation à ce stade : tous les acteurs n'ayant pas encore eu le temps de s'approprier cette mesure, une telle dérogation aurait pour effet d'introduire de brouiller le message de la loi et d'en affaiblir l'effectivité, en créant du reste une distorsion non justifiée entre élevages et refuges.

Recommandation n° 11 : communiquer davantage sur l'existence du délai de sept jours avant l'acquisition d'un animal et donner des instructions claires aux services vétérinaires pour contrôler le respect de cette obligation.

Par ailleurs, si cette problématique d'encombrement était relevée de façon plus systématique, une solution pourrait être de retirer les furets et les lapins du décret du 18 juillet 2022 (cf. recommandation n° 9), qui conduit à leur appliquer ce délai de sept jours alors qu'ils n'étaient pas explicitement visés lors de l'élaboration et du vote de la loi.

4. L'absence toujours préoccupante de toute étude évaluant l'impact économique et sur le bien-être animal de l'interdiction de la vente des chiens et chats en animalerie

L'interdiction de la vente des chiens et chats en animalerie au 1er janvier 2024 (article 15) a été, sans conteste, la mesure la plus symbolique du premier chapitre de la loi.

Son efficacité sur le terrain pour lutter contre l'abandon des animaux de compagnie n'a cependant pas été formellement démontrée, aucune étude d'impact n'ayant été fournie au législateur avant qu'il ne se prononce sur cette mesure.

Et pour cause : l'une des raisons profondes ayant motivé cette interdiction, de nature davantage philosophique que pragmatique, était en réalité l'idée, défendue par de nombreuses associations, selon laquelle les animaux ne sont pas des biens ou, du moins, pas des biens comme les autres. De ce fait, ils ne devraient pas être commercialisés, au risque sinon de constituer une marchandisation du vivant.

De la même façon qu'aucune étude d'impact n'avait été fournie a priori, les acteurs rencontrés par la rapporteure pour contrôler l'application de cette loi n'ont pas été en mesure d'en chiffrer l'impact, tant en perte de résultat pour les professionnels qu'en nombre d'abandons d'animaux de compagnie.

Sur ce premier point, il faut souligner que plusieurs professionnels avaient déjà cessé la vente de chiots et chatons et que, pour les autres, ces animaux ne constituaient guère plus qu'un « produit d'appel », les accessoires et l'alimentation animale représentant désormais en réalité la majeure partie du chiffre d'affaires de ces professionnels.

S'agissant du bien-être animal, la mesure pourrait en revanche s'avérer contre-productive, illustrant l'adage selon lequel l'enfer est pavé de bonnes intentions, puisqu'elle pourrait détourner les transactions d'un canal géré par des professionnels formés et aisément contrôlables par les services vétérinaires, vers des réseaux plus décentralisés et, ipso facto, plus difficiles à surveiller, pouvant de ce fait donner lieu plus facilement à des trafics.

Recommandation n° 12 : demander à l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie de procéder enfin à une étude évaluant l'impact de l'interdiction de la vente des chats et chiens en animalerie sur les abandons ; dans le même temps, procéder à une évaluation du coût économique de cette interdiction pour les professionnels.

5. Internet, et en particulier Facebook, sont en passe de devenir la plus grande animalerie de France

Sur l'encadrement de la cession des animaux de compagnie, suivant une éthique de responsabilité, la rapporteure avait souhaité lors de l'examen de ce texte :

- maintenir l'autorisation de la vente de chiens et chats dans les animaleries, canal identifié et contrôlé par les services vétérinaires ;

- prévoir une labellisation des plateformes, qui seraient responsables de la légalité des annonces qu'elles hébergent ;

- lutter plus fermement contre les trafics, en particulier issus de l'introduction sur le territoire national d'animaux d'Europe de l'Est.

Les députés avaient souhaité maintenir une interdiction de vente pour certaines espèces dans les animaleries. Au sujet des cessions en ligne, la commission mixte paritaire a permis d'aboutir à l'article 18 de la loi, qui interdit la vente en ligne sauf en cas de rubrique spécifique, afin de bien marquer la spécificité des animaux par opposition à d'autres biens marchands, ce qui aurait pour effet psychologique de limiter les achats d'impulsion. Le décret du 18 juillet 2022 a détaillé les modalités de cette séparation entre animaux et autres objets.

L'audition du Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL) a permis de rappeler que la vente des animaux sur internet est insuffisamment appréhendée par les pouvoirs publics, internet étant devenu la première animalerie de France.

Or, selon I-CAD, près de 50 % des annonces de vente en ligne sont erronées et, dans bien des cas, frauduleuses. Les fraudes les plus souvent repérées sont les abus d'identité, le piratage de photos et l'erreur de numéro d'identification.

Outre cette limite majeure qui compromet gravement l'application du texte, Le Bon Coin a souligné en audition les difficultés liées à l'absence de synchronisation de textes réglementaires pour se mettre en conformité avec ses obligations :

- l'interface de programmation d'application (« API ») que la délégation I-CAD est censée fournir avant juin 2023 a tardé à être mise à disposition de ces plateformes  ;

- l'arrêté sur la liste positive d'espèces autorisées à la détention (article 14) n'ayant pas été pris, lesdites plateformes sont dans l'impossibilité d'afficher les noms scientifiques et vernaculaires des espèces, qui doivent figurer sur le site lors de la vente.

Le risque que cause cette impréparation est celui d'une fuite des annonces vers la place de marché de Facebook, voire sur des groupes ou discussions Facebook ou Whatsapp, où la vente n'est pas contrôlée.

Recommandation n° 13 : augmenter les contrôles sur l'authenticité des informations d'identification fournies lors de la vente en ligne d'animaux (risque de « compliance »), et donner aux plateformes de vente en ligne tous les outils réglementaires pour se mettre en conformité avec leurs obligations, au risque sinon d'une fuite vers des canaux moins contrôlés (risque de concurrence).

B. PLUTÔT QU'UNE FUITE EN AVANT DANS LE RELÈVEMENT DES SANCTIONS PÉNALES, IL FAUT MAINTENANT SE DONNER LES MOYENS DE LES APPLIQUER

Le deuxième chapitre de la loi (article 26 à 45) vise à renforcer les sanctions pénales afin de renforcer la lutte contre la maltraitance - à laquelle l'abandon est assimilé - à l'encontre des animaux domestiques et des animaux sauvages captifs, soumis au même régime juridique.

Ce volet, qui traduit le plus directement l'intention des auteurs de la proposition de loi exprimée par son intitulé (« lutte contre la maltraitance animale »), a été adopté de façon consensuelle entre l'Assemblée nationale et le Sénat - à la différence des deux autres volets qui ont nécessité davantage de pourparlers entre les deux chambres.

Si ce chapitre est en grande partie d'application directe, la définition des délits relevant du domaine de la loi, il n'est pas à exclure que quelques dispositions nécessitent des mesures réglementaires ou infra-réglementaires22(*) pour leur bonne application.

1. Le renforcement des contrôles et la bonne application de la loi seront plus efficaces que la transformation de la loi en un outil de communication

La rapporteure considère qu'il lui revient, dans son travail de contrôle de l'application de la loi, de porter ses principales dispositions à la connaissance des parlementaires, afin d'en favoriser la bonne appropriation et donc d'améliorer leur effectivité.

C'est d'autant plus vrai pour les mesures qui satisfont déjà, dans le droit existant, des propositions de loi en cours d'examen. Ainsi, il semble à la rapporteure que la proposition de loi visant à interdire la maltraitance sur les chiens et les chats par l'utilisation de colliers étrangleurs et électriques23(*) est déjà satisfaite par le droit, à plus forte raison depuis la loi du 30 novembre 2021 qui rehausse considérablement les sanctions contre la maltraitance animale. Si des progrès supplémentaires devaient intervenir, ce serait par le biais des normes et des contrôles sur l'usage de ces colliers, et non par une interdiction générale de la vente, qui peut paraître disproportionnée.

Elle appelle à se montrer d'autant plus vigilante sur ce texte que certaines associations de protection animale ont alerté sur un possible effet pervers de cette interdiction : ces colliers peuvent en effet être utiles pour maîtriser les chiens dangereux de la police et de la gendarmerie. Sans ce moyen de contrôle, les brigades pourraient être contraintes de se séparer de ces chiens, qui ne trouvent généralement pas preneurs chez les particuliers et risqueraient de ce fait l'euthanasie.

2. Le volet répressif, qui a été significativement renforcé par la loi, reste tributaire des moyens alloués à la justice et à la police

Ce volet prévoit notamment le rehaussement des sanctions maximales applicables aux auteurs de maltraitance ou de sévices graves - auxquels sont assimilés les abandons -, passant de deux à trois ans d'emprisonnement et de 30 000 € à 45 000 € d'amende (article 26), et la création de plusieurs circonstances aggravantes :

- article 26 si ces actes sont commis devant un mineur ;

- article 28 si un abandon présente un risque de mort immédiat ou imminent pour l'animal ;

- article 29 lorsque ces actes de maltraitance sont commis par le propriétaire ou le gardien de l'animal ;

- article 30 lorsqu'ils sont commis sur un animal détenu par des agents dans l'exercice de missions de service public (brigades cynophiles, chiens sauveteurs...).

Des peines complémentaires d'interdiction d'exercer des activités professionnelles ou sociales en lien avec les animaux, dès lors que ces activités ont facilité des actes de maltraitance (article 32), le cas échéant définitives, pourront également être prononcées.

Les prochains bilans statistiques devront permettre de vérifier l'effectivité de ces dispositions devant le juge, l'effet dissuasif des sanctions découlant des peines prononcées et non des peines maximales théoriques.

La rapporteure appelle en tout état de cause à ne pas se contenter de l'augmentation formelle des peines actée dans cette loi, et souhaite poser la question des moyens financiers et humains de la justice, ainsi que de la police et de la gendarmerie, pour traiter de ces affaires qui, pendant trop longtemps, se sont retrouvées en bas de la pile des priorités.

C'est pourquoi elle a accueilli très favorablement la création, en 2022, de référents protection animale dans les commissariats et les gendarmeries, coordonnés par une unité spécialisée de quinze agents, au sein de l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) à l'échelle nationale. Cette organisation est à même d'améliorer la compréhension des enjeux de maltraitance animale par les agents publics, facilitant l'enregistrement des plaintes et le lancement d'enquêtes.

Cette nouvelle unité dédiée ne pourra toutefois prétendre résoudre à elle les problématiques auxquelles sont confrontés les commissariats et tribunaux, dans leur quotidien, pour traiter des dossiers de maltraitance animale. Il faut en outre rappeler que les poursuites pénales seraient impossibles sans le concours des signalements des associations de protection animale et des services vétérinaires. C'est pourquoi, en complément de cette réforme utile, la rapporteure appelle à renforcer les moyens de contrôle et d'enquête de droit commun.

Recommandation n° 14 : augmenter les moyens dédiés au contrôle des services vétérinaires, pour alimenter en dossiers l'unité spécialisée dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police.

Il faut enfin mentionner l'article 6 de la loi (chapitre 1er), qui prévoit que les contraventions relevant du livre II du code rural puissent faire l'objet d'un traitement automatisé confié à l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions, pour permettre aux agents habilités de constater et de relever les infractions par procès-verbal électronique (« PVé24(*) »). Dans la mesure où, comme le Sénat l'avait souligné lors de l'examen de la proposition de loi, cet article était déjà satisfait par les dispositions générales du code de procédure pénale25(*), il n'y avait pas lieu de prendre de mesures d'application.

3. La répression des atteintes sexuelles sur les animaux progresse, lentement mais sûrement

Les articles 39, 40, 43 et 44 créant les délits d'atteinte sexuelle sur animal, de sollicitation et d'enregistrement et de diffusion de ces sévices, viennent combler un vide juridique. Les atteintes sexuelles sur un animal ne pouvaient être soumises à la justice que lorsqu'elles étaient accompagnées de sévices graves, ou lorsqu'il y avait contrainte ou pénétration, mais n'étaient pas toutes pénalement répréhensibles en tant que telles.

Plusieurs affaires de « zoophilie », médiatisées dans la presse quotidienne régionale, ont été portées devant les tribunaux depuis la promulgation de la loi26(*). Le chef d'inculpation retenu a toujours été pour l'heure celui de « sévices graves » (article 521-1 du code pénal) et non celui d'« atteintes sexuelles » (article 521-1-1 du code pénal), soit parce que les faits étaient antérieurs à la promulgation de la loi27(*), soit parce qu'ils étaient couverts par la notion de sévices graves (en cas, par exemple, de pénétration ou de violence).

Il y a lieu de se satisfaire de cette évolution, qui permet de mettre en lumière des faits souvent tabous et pourtant bien réels. Il est à noter que les atteintes sexuelles font désormais l'objet d'un relevé spécifique dans les statistiques du ministère de l'Intérieur28(*).

Source : viepublique.fr

En revanche, il faut déplorer que les dispositions relatives à la zoopornographie soient difficilement applicables en pratique, alors que 413 signalements se rapportant à des faits de sévices sur animaux ont été reçus par la plateforme Pharos en 202229(*).

Ainsi, la répression de la diffusion de l'enregistrement de tels contenus sur internet (article 521-1-2 du code pénal) et de la sollicitation ou de la proposition d'actes de zoophilie par des « petites annonces » (article 521-1-3) est freinée par la difficulté à réguler internet. Il faut en effet mettre en demeure les hébergeurs, puis les fournisseurs d'accès à internet, pour chaque site voire chaque contenu, ce qui rend en pratique le retrait de ces contenus quasi impossible.

L'article 40 de la loi, réprimant explicitement la diffusion de contenus zoopornographiques aux mineurs (article 227-24 du code pénal) est, pour la même raison, inapplicable.

Recommandation n° 15 : étudier la possibilité de renforcer les compétences de l'Arcom pour que les mises en demeure des hébergeurs et des fournisseurs d'accès à internet conduisent à retirer rapidement les contenus zoopornographiques.

4. Le Sénat a également souhaité encourager une approche préventive, voire pédagogique, qui n'a pas été pleinement mise en oeuvre par le Gouvernement

Le chapitre III contient également des mesures tendant à renforcer la dimension préventive, voire pédagogique, de la justice, en prévoyant des stages de sensibilisation à la prévention et à la lutte contre la maltraitance animale (article 31), un ajout des interdictions de détention d'un animal au fichier des personnes recherchées (article 35), une enquête sociale pour protéger les mineurs en cas de signalement de maltraitance animale au sein d'un foyer (article 36)... Si ces mesures sont également d'application directe, il n'existe pas encore de recensement statistique de leur mise en oeuvre. Elles sont pourtant, aux yeux de la rapporteure, tout aussi importantes, si ce n'est plus, que les mesures répressives.

L'article 35 a été critiqué par certaines associations de protection animale30(*) au motif que les bénévoles et professionnels des associations et des refuges ne peuvent s'appuyer sur ce fichier pour éloigner des personnes ayant été condamnées pour maltraitance des animaux. Il faut toutefois souligner que cette restriction de l'habilitation aux seuls agents publics résulte d'un impératif constitutionnel.

L'article 25 prévoit, dans le respect de la liberté pédagogique des enseignants, des modules de sensibilisation à l'éthique animale au sein de l'enseignement moral et civique et du service national universel. Ces modules avaient été recentrés sur les seuls animaux de compagnie lors de la commission mixte paritaire en raison de craintes exprimées par le monde agricole au sujet des animaux de rente. Il faut souligner que ni pour l'enseignement primaire31(*), ni pour l'enseignement secondaire32(*), ni même pour le service national universel, cette mesure, pourtant essentielle aux yeux de la rapporteure, n'a été mise en place.

Recommandation n° 16 : actualiser les instructions du ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse pour mettre en place rapidement les modules de sensibilisation à l'éthique et au respect des animaux de compagnie, dans les cours d'enseignement moral et civique et lors du Service national universel (SNU).

EXAMEN EN COMMISSION

(Mercredi 7 juin 2023)

Mme Sophie Primas, présidente. - Je vous propose de commencer par la présentation du rapport de notre collègue Anne Chain-Larché sur l'application de la loi. Voilà une façon de contrôler le Gouvernement que nous aimons bien : après avoir légiféré, prendre le temps de regarder comment s'applique la loi, et en particulier cette loi de novembre 2021 dont nous nous souvenons bien, visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.

Mme Anne Chain-Larché. - Merci madame la présidente. Je dirais même que c'est une façon que nous aimons bien de contrôler le Gouvernement !

Un an après l'adoption de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, Madame la Présidente et le bureau de la commission ont bien voulu me confier une mission de suivi de l'application de cette loi, sur le fondement de l'article 19 bis B du règlement du Sénat.

Cela s'inscrit dans la continuité de mes travaux à l'automne 2021 lors de l'examen du texte, et en cohérence avec le rapport de la vice-présidente Pascale Gruny, dont l'une des lignes directrices est que « les commissions et, le cas échéant, les délégations, évaluent la mise en oeuvre d'une loi emblématique promulguée au cours des 10 dernières années, ce travail se traduisant par la publication d'un rapport d'information ».

Je poursuis donc l'aventure qui m'avait conduite à rencontrer des acteurs de terrain, tous plus formidables les uns que les autres : les éleveurs, les vétérinaires, les bénévoles et salariés des associations de protection animale, les parcs animaliers, les circassiens, les refuges, les fourrières, les élus locaux et les administrations des ministères concernés. Ce sont des passionnés, qui mènent un travail remarquable, bien souvent dans l'ombre, avec le souci du bien-être des 80 millions d'animaux domestiques, et qui contribuent grandement au maintien d'un monde dans lequel les animaux ne sont pas hors de nos vies.

La réflexion générale que j'ai tirée d'un nouveau cycle d'auditions mené sur les six derniers mois, et que je voudrais partager avec vous, est qu'après le temps médiatique - très médiatique ! - de la législation, vient le temps, plus ingrat sans doute, et pourtant ô combien important, de son application. Or, il faut rappeler que ce texte, dans la mesure où il s'agissait d'une proposition de loi, n'avait pas bénéficié d'une étude d'impact. En outre, il n'avait fait l'objet que de très peu de concertation avec les professionnels concernés, pourtant chargés de son application. Malheureusement, il est à déplorer qu'ici, au Sénat, nous ayons l'habitude de ce type de méthodes.

Un an et demi après la promulgation, le travail de contrôle de la commission vise donc à s'assurer de la bonne application de la loi, qui compte cinquante articles dans des champs très variés, modifiant le code rural, le code de l'environnement mais aussi le code pénal. Ce travail poursuit en particulier trois objectifs.

Celui, d'abord, de s'assurer que la parole du législateur a bien été entendue et que le fruit de la délibération parlementaire a bien été respecté par le pouvoir exécutif.

Ensuite, celui d'aider l'administration à s'orienter dans l'interprétation de normes qui sont parfois ambiguës. Il faut rappeler, en effet, que députés et sénateurs étaient parvenus à un accord après de longs pourparlers. Toutes les parties prenantes ayant manifesté leur satisfaction après le vote de cette loi, c'était sans doute au prix de compromis qui pouvaient comporter certaines ambiguïtés.

Et celui d'insister davantage, enfin, sur le contrôle et l'application des normes existantes plutôt que de créer de nouvelles normes, la France disposant déjà d'un dispositif de protection animale unique au monde par son exigence, dont la principale faiblesse réside dans les moyens de contrôle.

Je n'ai donc pas cherché à « rejouer le match », qui s'était d'ailleurs conclu par un accord entre sénateurs et députés en commission mixte paritaire. J'ai simplement souhaité formuler des observations, seize en tout, et attirer l'attention en particulier sur six mesures qui me semblent urgentes pour garantir que cette loi, qui avait convenu aux associations de protection animale lors de son adoption, soit satisfaisante et opérationnelle pour les animaux et pour leur bien-être.

Je présenterai ces six mesures urgentes en deux temps, en me concentrant d'abord sur trois mesures pour les animaux sauvages captifs, pour lesquels subsistent plusieurs difficultés d'application, et en m'arrêtant ensuite sur trois mesures au sujet des animaux de compagnie, pour lesquels le bilan réglementaire est plus satisfaisant, mais nécessiterait des moyens renforcés pour donner toute sa mesure.

J'en viens donc à la faune sauvage captive et aux chapitres 3 et 4 de la loi, qui contenaient seulement cinq articles, mais sans doute les plus emblématiques et polémiques de la loi parce qu'ils suivaient une logique « abolitionniste ».

Cela concerne notamment les delphinariums, les cirques et les voleries, ainsi que l'élevage de visons d'Amérique destinés à la production de fourrure. Pour l'ensemble de ces professionnels, j'appelle à respecter pleinement les échéances et garde-fous fixés par le législateur afin d'assurer la transition la plus sereine possible vers la fin de la détention de certains animaux sauvages - car seule la détention de certains animaux, et à certaines conditions seulement, sera interdite, dans la logique du « pas d'interdiction sans solution » que j'avais souhaitée, et pour lequel le Sénat avait amplement insisté.

Je ne m'attarde pas sur les visons, car en ce domaine la loi avait produit ses effets avant même d'entrer en vigueur : trois établissements avaient été fermés par anticipation. Le dernier qui était actif dans ce secteur a fermé dès la fin de l'automne 2023, l'interdiction étant d'application directe.

Je ferai simplement remarquer toutefois que l'achat ou la vente de fourrures en vison n'étant, elle, pas interdite, ce professionnel pourra continuer d'écouler son stock en fonction des opportunités du marché. Et, par la suite, les industries textiles continueront de s'approvisionner à l'étranger, dans des conditions d'élevage qui seront, selon toute probabilité, moins-disantes. Un cas de figure auquel nous sommes malheureusement habitués dans notre commission...

S'agissant de la détention de cétacés dans des parcs aquatiques - qui, je le rappelle, ne concerne que vingt-trois dauphins et quatre orques, accueillis dans deux parcs -, la loi prévoit par principe, à l'article 46, une interdiction des spectacles, mais pas des « présentations pédagogiques » - il est vrai que nous avons beaucoup oeuvré dans la sémantique. Les cétacés pourront en outre être conservés dans le cadre de programmes scientifiques.

La loi nécessitait trois arrêtés pour la bonne application de cette mesure, sur le relèvement des normes de détention au regard du bien-être animal, sur la définition des programmes scientifiques et sur la définition des présentations pédagogiques. Or, aucun de ces textes n'a été pris à ce jour.

Aussi, et c'est mon premier point d'alerte, j'appelle à les publier rapidement, d'ici la fin de l'été et, de préférence, en un bloc, pour stabiliser le cadre normatif une fois pour toutes et permettre aux parcs aquatiques de procéder aux investissements nécessaires à la mise aux normes pour l'amélioration des conditions d'accueil, tout en ayant l'assurance d'un équilibre économique à long terme.

Il y a urgence : ces mises aux normes pourraient signifier en pratique la fin de l'activité pour l'un des deux parcs, le Marineland d'Antibes, situé en zone inondable et qui ne pourra probablement pas supporter les travaux à venir, ce qui rend la situation inextricable pour ce parc.

Pour le parc aquatique restant, Planète sauvage, il convient de garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans et ainsi éviter une remise en cause régulière qui freinerait les investissements favorables au bien-être animal. Je rappelle que des recherches prometteuses portent sur le moyen de sauver des accidents de pêche des milliers de dauphins du golfe de Gascogne.

Le sort des cirques est un sujet douloureux, qu'il m'est pénible d'évoquer, parce que lorsque l'on rencontre ces professionnels, je peux vous assurer que c'est poignant. Le monde du cirque a été profondément heurté d'être inclus par défaut dans une loi sur la « maltraitance animale » alors qu'il n'a, collectivement, contrevenu à aucune loi de la République, et qu'il a au contraire enchanté les enfants que nous étions et ceux d'aujourd'hui, sur plusieurs générations. Je me souviens qu'ils me disaient : nous sommes coincés entre la zoopornographie et les fourrières, allez comprendre ce qu'est devenue aujourd'hui la lecture de notre métier !

Soyez sûrs que l'interdiction générale de la détention d'animaux sauvages par les cirques itinérants n'a jamais été l'option privilégiée par le Sénat ; nous souhaitions des interdictions ciblées, au cas par cas, comme cela se fait, du reste, dans de nombreux pays, comme en Allemagne, pour s'en tenir aux résultats de la recherche scientifique.

À moyen terme, le Gouvernement devra évidemment renforcer l'accompagnement, notamment financier, des professionnels s'il veut assurer une transition apaisée d'ici à l'interdiction en 2028, la prime à l'abandon de 3 000 euros par tigre ou par lion n'étant pas à la hauteur du préjudice subi, et frisant même, je dois le dire, l'irrespect. Le conseil pour l'établissement en cirques fixes devrait également être renforcé pour permettre aux circassiens qui le souhaitent de garder leurs animaux.

Mais mon deuxième point d'alerte porte sur un problème plus grave encore : les cirques éprouvent toutes les peines du monde à trouver des emplacements d'accueil, si bien qu'ils vivent dès à présent une situation de quasi-interdiction de fait. On a même vu des spectacles de chiens savants empêchés, alors que les animaux de compagnie ne sont pas visés par la loi. Certains dégâts ont pu être constatés sur ces emplacements ; ils ne doivent pas jeter le discrédit sur toute une profession, qui aujourd'hui est empêchée.

En attendant 2028, il faut appliquer la loi, toute la loi, mais rien que la loi, et veiller à ce que les maires n'interdisent pas en fait, sous la pression d'associations, une activité qui reste autorisée en droit. La solution passera évidemment par un surcroît de concertation locale, dans le cadre des commissions départementales des professions foraines et circassiennes instituées par la loi « 3DS » et coordonnées par le préfet Jean-Yves Caullet à l'échelon national.

J'en viens à un sujet qui me tient tout particulièrement à coeur, venant d'un département où cette activité est encore très vivace, je veux parler des voleries.

Nous avions exprimé très clairement en commission mixte paritaire, Aurore Bergé et moi-même, notre intention d'exempter le vol libre de l'interdiction d'itinérance des animaux sauvages, car l'activité de ces professionnels et amateurs relève de la mobilité ou du transport, ponctuels, et non de l'itinérance, par essence permanente. Le ministère chargé de l'écologie nous a entendus sur ce point mais ne semble pas décidé à permettre aux voleries d'exercer à distance lors de spectacles pouvant durer plusieurs jours, vidant cette dérogation de sa substance. C'est ma troisième alerte, et non des moindres, sur ce chapitre.

J'en viens maintenant aux chapitres 1 et 2 de la loi et aux animaux de compagnie, dont la protection devrait être notre seul horizon, de façon pragmatique et responsable, par-delà toute considération militante ou idéologique.

Les mesures d'application du chapitre 1er sur la lutte contre l'abandon, qui relevaient du ministère de l'agriculture, ont, dans l'ensemble, bien été prises.

Je souhaite cependant observer que dans la lutte contre l'abandon des animaux de compagnie, les progrès à attendre ne viendront sans doute pas des mesures les plus médiatiques.

Ainsi, je m'étonne toujours autant de l'absence de la moindre étude évaluant l'impact économique et sur le nombre d'abandons de l'interdiction de la vente des chiens et chats en animalerie prévue à l'article 15. Il s'agit de ma quatrième alerte : l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie devrait enfin procéder à cette étude, d'autant que le risque me paraît réel d'un report de ce circuit contrôlé vers la vente en ligne, en passe de devenir la plus grande animalerie de France, et où près de la moitié des annonces sont fausses ! Encore une difficulté que nous avions signalée lors de l'examen de ce texte.

Par contraste, il me semble que le Gouvernement ne communique pas suffisamment sur l'existence du délai de sept jours avant l'acquisition d'un animal, apport moins médiatique mais majeur du Sénat dans la lutte contre les achats d'impulsion et contre l'abandon, et qui est bien embarrassant pour certains.

Là se situe ma cinquième et avant-dernière alerte : il semble que le ministère ait donné des instructions aux services vétérinaires pour qu'ils se montrent plus tolérants dans le contrôle de cette obligation dans les refuges, au prétexte que leur engorgement pourrait conduire, dans les cas les plus extrêmes, à des euthanasies dans les fourrières.

Je crois que les bénévoles et salariés des refuges subissent autant, si ce n'est plus que les éleveurs, de pressions de la part d'acquéreurs trop pressés. À ce titre, ils devraient être protégés des éventuelles menaces, et l'intransigeance de l'État sur le délai de sept jours participerait de cette protection, en favorisant l'appropriation de cette règle par tous les acquéreurs. Nous ne pouvons pas, là non plus, rester dans le « en même temps ».

Si toutefois le problème de l'engorgement se confirmait, une solution pourrait être de retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours, l'article 1er de la loi ne l'ayant prévu explicitement que pour les chiens et les chats. Par excès de zèle, cela s'est propagé aux lapins et aux furets.

Le chapitre 2, relevant considérablement les sanctions pénales contre les actes de maltraitance animale, dont l'abandon et les actes de zoophilie, avec la création du délit d'atteintes sexuelles sur animal, s'est accompagné de la création d'une unité dédiée à la maltraitance animale au sein de la police et d'un réseau de référents protection animale dans les commissariats. Il y a lieu de s'en féliciter. Le Sénat l'avait demandé.

Seulement, pour que cette nouvelle organisation puisse donner toute sa mesure, il faut que les moyens de contrôle des services vétérinaires, en amont, et les moyens de la justice, en aval, soient véritablement à la hauteur, afin d'alimenter en dossiers cette unité. Ce sera ma sixième et dernière alerte, et ma modeste contribution aux débats budgétaires de l'automne : plutôt que l'édiction de nouvelles règles ou interdictions à moyens constants, je pense qu'il sera beaucoup plus efficace de se donner les moyens d'appliquer le corpus existant des règles relatives à la protection animale, qui est déjà unique au monde par son exigence. Ces règles sont davantage contrôlées dans les autres pays, ce qui les a amenés à ne pas être obligés d'interdire.

M. Pierre Louault. - Ne serait-ce pas le moment d'interdire aux loups la maltraitance de leurs proies, quand on voit les agriculteurs qui trouvent la moitié de leur troupeau sauvagement agressé, éventré, quand on voit les veaux retirés de leur mère avant leur naissance ? On est dans la bêtise organisée, par idéologie, et cela me choque : je pense que quand on parle de maltraitance animale, on pourrait avoir un minimum de pensées pour les agriculteurs, qui voient leurs troupeaux dépecés par les animaux sauvages qui se développent à grande vitesse.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. - Comment expliquer un tel décalage entre l'intention du législateur, qui a voulu réprimer plus sévèrement les abandons d'animaux et faire de la cause animale une cause nationale, et les sanctions que l'on ne voit pas tellement apparaître dans les tribunaux ? Il n'y a même pas 10 % de sanctions, ce qui laisse de nombreux comportements non sanctionnés ?

M. Daniel Salmon. - Merci, madame la rapporteure, pour votre travail. Il est toujours intéressant de se pencher sur ce qui se passe après l'adoption d'une loi.

Par ailleurs, j'ai eu écho d'une problématique, celle du dressage des chiens de défense, qui est souvent l'occasion de nombreuses maltraitances pour les rendre beaucoup plus agressifs. Je pense qu'il faudrait avoir un oeil sur ces pratiques, qui m'ont été rapportées par des chenils.

Enfin, je voudrais mettre la focale sur le milliard deux cent millions d'animaux d'élevage qui sont abattus tous les ans, même si ce n'était pas dans l'objet de cette loi. Il faut aussi avoir en tête le bien-être de ces animaux-là.

Mme Anne Chain-Larché. - S'agissant des sanctions contre les actes de maltraitance, le problème est bien entendu celui que j'ai soulevé, c'est-à-dire le manque de moyens. En France, on ne se donne pas les moyens de contrôler, ni de sanctionner. C'est ce qui fait qu'on arrive à des interdictions. C'est d'ailleurs ce que nous avions soulevé au moment de la discussion de la proposition de loi. Nous ne pouvons que le déplorer. Nous avons renforcé les sanctions pénales dans le très important chapitre 2 de la loi, mais pour autant nous ne nous donnons pas les moyens de les appliquer. Les propositions de loi se multiplient alors que toute forme de maltraitance ou de cruauté, entraînant ou non la mort, est passible de sanctions, celles-ci ayant été relevées. Il faut se donner les moyens d'agir.

Mme Sophie Primas, présidente. - Le rapport ainsi que ses recommandations sont adoptés. Il me reste à remercier Anne Chain-Larché pour son implication sur ce sujet. La proposition de loi était médiatique mais je dois dire qu'elle n'a pas porté bonheur à ses auteurs...

Mme Anne Chain-Larché. - Je voudrais juste ajouter une remarque. L'une des préconisations que vous avez sous les yeux me paraît très importante et il me semble que vous devriez y être vigilants dans tous vos départements. La loi « 3DS » a créé des commissions départementales des professions foraines et circassiennes (CDPFC), qui ne sont pas encore déployées dans tous les départements. J'y tiens parce que c'est au sein de ces commissions que les maires peuvent avoir la bonne information sur ce qui est légal ou ce qui ne l'est pas et, d'une certaine façon, se rassurer face à la pression des associations.

Les recommandations sont adoptées.

La commission adopte le rapport d'information et en autorise la publication.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Jeudi 10 novembre 2022

- Association des voleries itinérantes : MM. Simon THURIET, président et gérant de l'entreprise SARL Vol en scène, Simon POTIER, vice-président, chercheur en écologie comportementale et sensorielle des rapaces, et Patrice POTIER, vice-président

- Fédération des capacitaires d'animaux de cirque et spectacle : M. William KERWICH, président

- Table ronde cétacés : Mme Cécile ERNY, directrice de l'association française des parcs zoologiques (AFDPZ) et M. Martin BOYE, directeur scientifique de la cité marine à Planète sauvage

- Personnalité qualifiée : M. Bernard DE FROMENT, avocat, ancien député de la Creuse

Jeudi 26 janvier 2023

- Personnalité qualifiée : Mme Florence OLLIVET-COURTOIS, docteur vétérinaire spécialiste des animaux sauvages

- Table ronde « associations de protection animale » : Mmes Lorène JACQUET, responsable campagnes et plaidoyer de la fondation Brigitte Bardot, Tamara GUELTON, responsable du pôle juridique protection animale de la SPA, et M. Milton FEDERICI, responsable des affaires publiques de Convergence animaux politique.

Lundi 30 janvier 2023

- Table ronde « acquisition des animaux de compagnie » : MM. Clément REIX, responsable des affaires réglementaires LBC France (société éditrice du site Leboncoin), Jean-Philippe DARNAULT, président-directeur général d'Animalis, Jean-Pascal GIRAUD, vétérinaire spécialiste de l'animalerie d'Animalis, Mme Nathalie HIBAL FARAON, responsable vivant (Jardineries et animaleries de France), et M. Thomas LE RUDULIER, responsable des affaires techniques et réglementaires (Jardineries et animaleries de France)

- Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL) : M. Laurent PERRIN, président, et Mme Anne DAUMAS-MARCHANDET, directrice

- Collectif des cirques : M. Solovich DUMAS, président

- Commission nationale des professions foraines et circassiennes : M. Jean-Yves CAULLET, préfet, président

Mardi 7 février 2023

Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA) : MM. Emmanuel HONORÉ, conseiller chargé des élus et des discours, Hadrien JACQUET, conseiller filières animales, santé et bien-être animal, Mme Caroline CORNUAU, chef du bureau du bien-être animal, et M. Gaëtan GOEURIOT, chargé des affaires juridiques et financières

- Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (MTECT) : M. Olivier THIBAULT, directeur de l'eau et de la biodiversité, Mme Hélène COLAS, conseillère biodiversité, paysage et mobilisation de la jeunesse au cabinet, M. Olivier DEBAERE, adjoint de la sous-directrice Écosystèmes terrestres, Mmes Léa TERRAUBE, chargée de mission Faune sauvage captive, et Lyslou GAILHAGUET, stagiaire Faune sauvage captive

Mercredi 19 avril 2023

- Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires : Mme Bérangère COUILLARD, secrétaire d'État chargée de l'écologie, M. Olivier DEBAERE, conseiller Faune sauvage, Biodiversité et Paysage, et Mme Marie-Ange BADIN, conseillère parlementaire et élus locaux

TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

La faune sauvage captive

1

Publier au plus vite l'arrêté sur la liste positive d'espèces autorisées à la détention, dans la mesure où il est nécessaire à la mise en oeuvre d'autres dispositions du texte

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

Juin 2023

1 arrêté

Cétacés détenus dans des parcs aquatiques

2

Publier rapidement les trois arrêtés attendus et, de préférence, de façon groupée, pour stabiliser le cadre normatif et permettre aux parcs aquatiques de procéder aux investissements nécessaires au bien-être animal

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, en lien avec les professionnels, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

D'ici la fin de l'été 2023

3 arrêtés

3

Garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une pérennité de l'activité et une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans pour les parcs aquatiques

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, en lien avec les professionnels, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

D'ici la fin de l'été 2023

1 arrêté (parmi les 3 précédents)

Animaux sauvages détenus dans les cirques itinérants

4

Déployer sur l'ensemble du territoire les commissions départementales des professions foraines et circassiennes (CDPFC) prévues par la loi « 3DS », et prévoir une concertation systématique dans ce cadre entre collectivités territoriales et professionnels du cirque, en cas de litige sur le lieu d'installation

Ministère de l'Intérieur, préfets, collectivités territoriales

Au plus vite

Action territoriale de l'État

5

Augmenter l'enveloppe provisionnée pour l'accompagnement des professionnels du cirque, afin de garantir une transition la plus sereine possible en sortant les circassiens du désarroi, et exiger de ces derniers en contrepartie la transparence sur le nombre d'animaux sauvages captifs pour un meilleur suivi

Ministère délégué chargé des comptes publics, ministère délégué chargé des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, Secrétariat d'État chargé de l'écologie et Commission nationale des professions foraines et circassiennes (CNPFC), professionnels du cirque

Avant l'entrée en vigueur de l'interdiction d'acquisition et de reproduction desdits animaux (d'ici au 1er décembre 2023)

Plan d'accompagnement

6

Prendre de toute urgence le décret définissant les contours du « pas d'interdiction sans solution » satisfaisante pour le bien-être des animaux de cirques, établi dans la loi

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, CNCFSC, en lien avec les professionnels du cirque

1 arrêté

7

Accompagner davantage les cirques dans des projets d'établissements fixes et envisager la définition d'un statut spécifique pour les cirques, distinct de celui des zoos

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, en lien avec les professionnels, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

1 arrêté

Cahiers des charges des appels à manifestation d'intérêt et appels à projets

Voleries

8

Exempter clairement les voleries des interdictions visant les spectacles itinérants avec animaux sauvages en définissant pour elles un régime spécifique - soit en modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 relatif aux zoos, soit, de préférence, en prenant un arrêté spécifique à cette activité

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, en lien avec les professionnels, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

Avant l'entrée en vigueur de l'interdiction d'acquisition et de reproduction des animaux sauvages itinérants (d'ici au 1er décembre 2023)

1 arrêté spécifique ou modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 pour les 2 dispositions

9

Donner rapidement un horizon clair aux voleries, qui vivent aujourd'hui dans l'incertitude, en leur permettant d'exercer leur activité en dehors de leur point fixe sur des périodes d'au moins sept jours consécutifs, et en accompagnant la création de points fixes pour multiplier les solutions temporaires d'hébergement

Secrétariat d'État chargé de l'écologie, en lien avec les professionnels, commission nationale consultative pour la faune sauvage captive

Les animaux de compagnie

Encadrement des conditions de cession

10

Retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie.

Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Au plus vite

Décret modifiant le décret n° 2022-1012 du 18 juillet 2022

11

Communiquer davantage sur l'existence du délai de sept jours avant l'acquisition d'un animal et donner des instructions claires aux services vétérinaires pour contrôler le respect de cette obligation

Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, associations de protection animale

Au plus vite

Campagne de communication, instruction aux directions départementales de la protection des populations

12

Demander à l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie de procéder enfin à une étude évaluant l'impact de l'interdiction de la vente des chats et chiens en animalerie sur les abandons ; dans le même temps, procéder à une évaluation du coût économique de cette interdiction pour les professionnels

Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, Observatoire de la protection des animaux de compagnie

D'ici l'entrée en vigueur de l'article 15,

soit le 1er janvier 2024

Rapport

13

Augmenter les contrôles sur l'authenticité des informations d'identification fournies lors de la vente en ligne d'animaux (risque de « compliance »), et donner aux plateformes de vente en ligne tous les outils réglementaires pour se mettre en conformité avec leurs obligations, au risque sinon d'une fuite vers des canaux moins contrôlés (risque de concurrence)

Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, opérateurs économiques concernés, délégation i-Cad, associations de protection animale

Dès que le nouveau cadre sur la cession des animaux en ligne sera stabilisé

Arrêtés ; instructions aux directions départementales de la protection des populations

Répression des actes de maltraitance animale

14

Augmenter les moyens dédiés au contrôle des services vétérinaires, pour alimenter en dossiers l'unité spécialisée dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police

Parlement ; ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, associations de protection animale

Dès 2023

Loi de finances

15

Étudier la possibilité de renforcer les compétences de l'Arcom pour que les mises en demeure des hébergeurs et des fournisseurs d'accès à internet conduisent à retirer rapidement les contenus zoopornographiques

Parlement ; Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcom)

Après étude d'opportunité

Véhicule législatif

Sensibilisation au respect des animaux

16

Actualiser les instructions du ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse pour mettre en place rapidement les modules de sensibilisation à l'éthique et au respect des animaux de compagnie dans les cours d'enseignement moral et civique et lors du Service national universel (SNU)

ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, en lien avec le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, et des associations de protection animale

Dès la rentrée scolaire 2023-2024

Arrêté modifiant l'arrêté 12-6-2015 portant sur le programme d'enseignement moral et civique


* 1 Voir le dossier législatif : https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-243.html

* 2 Ce n'est pas pour autant que le problème du manque de place pour les animaux sauvages retirés à leur environnement actuel est résolu.

* 3 Arrêté du 9 mars 2023 fixant les conditions d'organisation et de fonctionnement de la Commission nationale consultative pour la faune sauvage captive. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 047 351 079

* 4 Arrêté du 27 mars 2023 portant nomination à la Commission nationale consultative pour la faune sauvage captive en formation d'étude de la faune sauvage captive. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 047 351 226

* 5 Arrêté du 27 mars 2023 portant nomination à la Commission nationale consultative pour la faune sauvage captive en formation pour la délivrance des certificats de capacité. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 047 351 224

* 6 Il faut noter la naissance de deux delphineaux depuis la promulgation de la loi, ce qui porte le total à vingt-trois.

* 7 Arrêté du 18 mars 2011 fixant les conditions de détention et d'utilisation des animaux vivants d'espèces non domestiques dans les établissements de spectacles itinérants. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000 023 816 607/

* 8 C'est, du reste, la raison pour laquelle les animaux sauvages en captivité sont protégés par le même régime pénal que les animaux domestiques en matière de sévices graves ou d'actes de cruauté (article 521-1 du code pénal).

* 9 Art. L. 413-10 du code de l'environnement

* 10 Selon la jurisprudence CE, 14 janvier 1938 - Société anonyme des produits laitiers « La Fleurette », complétée par la jurisprudence CE, 30 juillet 2003 - Association pour le développement de l'aquaculture en région Centre.

* 11 Article 157  de la loi dite « 3DS » : « Lorsque l'exploitant d'un cirque itinérant rencontre des difficultés pour s'établir sur le domaine public d'une commune, le représentant de l'État dans le département, saisi d'une demande en ce sens, organise une médiation entre l'exploitant et la commune concernée. La médiation tend à rechercher un terrain d'établissement pour l'exploitant. »

* 12 Décret n° 2022-376 du 17 mars 2022 modifiant le décret n° 2017-1501 du 27 octobre 2017 relatif à la Commission nationale des professions foraines et circassiennes.

* 13 Proposition de loi n° 23 (2018-2019) de M. Jean-Noël Cardoux et plusieurs de ses collègues, tendant à réprimer les entraves à l'exercice des libertés ainsi qu'à la tenue des évènements et à l'exercice d'activités autorisés par la loi. En ligne :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl18-023.html

* 14 Créant un article L. 413-10 du code de l'environnement.

* 15 De façon plus spécifique, l'article 49 (créant un article L. 413-14 du code de l'environnement) interdit les mêmes activités pour les montreurs d'ours et de loups.

* 16 Arrêté du 25 mars 2004 fixant les règles générales de fonctionnement et les caractéristiques générales des installations des établissements zoologiques à caractère fixe et permanent, présentant au public des spécimens vivants de la faune locale ou étrangère. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000 000 610 915/

* 17 Pour l'article 14, qui relève du ministère chargé de l'environnement, se référer au I.

* 18 En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 046 056 772

* 19 En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 046 216 822

* 20 Arrêté du 14 janvier 2022 relatif à l'action de formation et à l'actualisation des connaissances nécessaires aux personnes exerçant des activités liées aux animaux de compagnie d'espèces domestiques et à l'habilitation des organismes de formation. En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGITEXT000 045 048 062/2022-01-21/#LEGITEXT000 045 048 062

* 21 En ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 046 488 798

* 22 Par exemple, les articles 42 et 41 ont, pour le premier, inscrit le secret professionnel du vétérinaire dans la loi, et pour le second, prévu une dérogation à ce secret professionnel pour signaler des sévices graves, de nature sexuelle ou des actes de cruauté. Le champ de ces dérogations pourrait faire l'objet d'un texte réglementaire.

* 23 Voir le dossier législatif : https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-243.html

* 24 Défini par le décret n° 2011-348 du 29 mars 2011 portant création de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions.

* 25 Article 530-6 du code de procédure pénale, qui autorise le traitement automatisé des infractions donnant lieu à une amende forfaitaire, et article R. 48-1 dudit code, fixant la liste des contraventions réglées par amende forfaitaire, incluant les infractions du livre II du code rural et de la pêche maritime.

* 26 Deux adolescents sur plusieurs chevaux et poneys dans un poney-club puis dans un centre équestre dans l'Ouest de la France, un couple de sexagénaires sur leur chien dans le Sud de la France, une dame isolée sur plusieurs chiens à Marseille, un homme de 23 ans sur une jument dans l'Est de la France, un jeune couple sur sa chienne dans le bassin parisien, un homme de 55 ans sur son chat, qui en est mort...

* 27 Le droit pénal est assujetti par principe à la non-rétroactivité.

* 28 « Les atteintes envers les animaux domestiques enregistrées par la police et la gendarmerie depuis 2016 », Interstats, Analyse N° 51. En ligne : https://mobile.interieur.gouv.fr/Interstats/Actualites/Les-atteintes-envers-les-animaux-domestiques-enregistrees-par-la-police-et-la-gendarmerie-depuis-2016-Interstats-Analyse-N-51

* 29 Voir la réponse du ministère de la Justice à la question écrite n° 04 367 (16e législature) du sénateur Arnaud Bazin : https://www.senat.fr/questions/base/2022/qSEQ221 204 367.html.

* 30  https://www.fondation-droit-animal.org/113-le-fichage-judiciaire-des-personnes-accusees-de-maltraitance-animale/

* 31 https://www.education.gouv.fr/bo/15/Special6/MENE1511645A.htm ?cid_bo=90 158

* 32 https://www.education.gouv.fr/bo/15/Special6/MENE1511646A.htm ?cid_bo=90 243