N° 807

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 juin 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux entreprises (1) relatif à la formation, aux compétences et à l'attractivité,

Par Mmes Martine BERTHET, Florence BLATRIX CONTAT
et M. Michel CANÉVET,

Sénatrices et Sénateur

(1) Cette délégation est composée de : M. Serge Babary, président ; M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Gilbert Bouchet, Emmanuel Capus, Mme Anne Chain-Larché, MM. Gilbert-Luc Devinaz, Thomas Dossus, Fabien Gay, Jacques Le Nay, Dominique Théophile, vice-présidents ; MM. Rémi Cardon, Jean Hingray, Sébastien Meurant, Vincent Segouin, secrétaires ; Mmes Cathy Apourceau-Poly, Annick Billon, Nicole Bonnefoy, MM. Michel Canévet, Daniel Chasseing, Alain Chatillon, Mme Marie-Christine Chauvin, MM. Pierre Cuypers, Michel Dagbert, Alain Duffourg, Mme Pascale Gruny, MM. Christian Klinger, Daniel Laurent, Stéphane Le Rudulier, Martin Lévrier, Didier Mandelli, Jean-Pierre Moga, Albéric de Montgolfier, Claude Nougein, Mme Guylène Pantel, M. Sebastien Pla, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, MM. Christian Redon-Sarrazy, Olivier Rietmann, Daniel Salmon.

L'ESSENTIEL

Former pour aujourd'hui et pour demain :
les compétences, enjeu de croissance et de société

présenté par Martine Berthet, Florence Blatrix Contat et Michel Canévet

En 2022 et 2023, les tensions de recrutement déclarées par les entreprises ont atteint de nouveaux sommets : près des deux tiers des entreprises françaises rencontrent des difficultés à pourvoir les postes disponibles. Malgré des différences sectorielles ou géographiques, la pénurie aigüe de compétences est désormais généralisée.

L'incapacité à enrayer ces tensions au cours des dernières années, la difficulté à mettre en relation compétences et emploi est source de fragilité économique. Ces blocages sont d'autant plus incompréhensibles que le taux de chômage de la France reste élevé parmi les pays occidentaux, s`établissant autour de 7 % - bien loin du plein emploi. Le nombre de jeunes n'étant ni en études, ni en formation, ni en emploi est encore de 13 %.

Faut-il se résigner à cette situation insatisfaisante tant du point de vue de la croissance, puisqu'elle limite le développement du tissu économique français, que du point de vue social, chaque emploi vacant étant une opportunité ratée d'insertion professionnelle ? Faut-il accepter que des métiers essentiels à la vie de la Nation, comme les professions de la santé, de l'enseignement, les métiers de l'industrie ou du commerce, peinent à susciter des vocations ?

Les rapporteurs de la délégation aux Entreprises appellent à une action résolue en faveur des compétences, de la formation et de l'attractivité des métiers, pour transformer la crise actuelle en opportunité.

Une opportunité d'abord, parce que les grandes transitions qui s'annoncent entraîneront de nouveaux besoins et verront apparaître de nouveaux métiers : la transition environnementale bien sûr, mais aussi la transition numérique ou encore la transition démographique.

Une opportunité ensuite, parce que l'aspiration des Français à une vie professionnelle plus diversifiée, à la mobilité au cours de la carrière, et à de nouveaux modes d'organisation du travail peut contribuer à créer des passerelles entre secteurs et entre métiers : le potentiel de la reconversion et des transitions professionnelles est énorme.

Une opportunité enfin, parce que la prise de conscience des enjeux de réindustrialisation, de souveraineté sanitaire ou agricole peut redorer le blason de métiers souffrant aujourd'hui d'un fort déficit d'image. La rénovation de la formation initiale et l'effort d'attractivité seront des enjeux majeurs pour engager la jeunesse française.

La délégation aux Entreprises formule, à l'issue de ses travaux, des recommandations stratégiques et concrètes pour réagir et accentuer l'effort en faveur des compétences.

I. DES DIFFICULTÉS DE RECRUTEMENT CROISSANTES ET GÉNÉRALISÉES : UN ENJEU ÉCONOMIQUE, MAIS AUSSI SOCIAL

Les difficultés de recrutement ont atteint un niveau inédit depuis plus de vingt ans, et le nombre de métiers en tension augmente drastiquement. Cette dynamique n'a pas été enrayée par les politique de l'emploi, les plans du Gouvernement, ni même par la pandémie de Covid-19.

67 % des entreprises peinent à recruter en 2023

+ 138 %

en 2015...

50 métiers
en tension

en 2019...

119 métiers
en tension

Une pénurie qui touche des activités essentielles à la vie de la Nation : métiers du soin, de l'industrie, du bâtiment, des transports... C'est un enjeu de souveraineté.

13 % des jeunes ne sont
ni en études, ni en formation,
ni en emploi

Un enjeu social, la France étant encore bien loin du plein emploi. Chaque emploi vacant est une opportunité manquée d'insertion professionnelle.

22 % des PME et ETI estiment que les difficultés de recrutement ont un impact majeur sur le chiffre d'affaires

Un enjeu économique. Les difficultés de recrutement sont identifiées comme l'un des premiers freins à la croissance des entreprises, en particulier des TPE-PME. Il n'y aura en France pas de croissance sans compétences.

À l'heure où il faut reconstruire la souveraineté de la France, développer l'internationalisation des entreprises, s'engager pleinement dans les transitions environnementales et numériques, l'accès aux compétences doit faire l'objet d'une attention toute particulière des pouvoirs publics. C'est une cause nationale : dans cette période charnière, il faut réagir rapidement.

Pourtant, les différentes mesures annoncées depuis 2018 n'ont eu qu'un impact mitigé au mieux : elles n'ont pas réussi à inverser la tendance.

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