B. VERS UN RENFORCEMENT DES VOIES D'ACTION EN JUSTICE OUVERTES AUX CONSOMMATEURS ?

Le consommateur lésé dispose déjà en droit français de moyens d'actions pour faire valoir ses droits.

En matière pénale, le fait pour un industriel minéralier de commercialiser sous l'appellation d'eau minérale naturelle une eau qui subit des traitements qui ne sont pas expressément autorisés par la réglementation pourrait être constitutif du délit de tromperie, défini à l'article L.441-1 du Code de la consommation.

Le délit de tromperie sanctionne toute personne qui, de mauvaise foi, induit ou tente d'induire en erreur un cocontractant (en l'espèce, le consommateur) sur les caractéristiques essentielles d'un bien ou d'un service (en l'espèce, la minéralité de l'eau) lors d'un contrat à titre onéreux, notamment une vente.

Ce délit, de nature intentionnelle, est puni de deux ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende, peines aggravées en cas de circonstances particulières. Il vise à garantir la loyauté des transactions et la protection des contractants contre toute forme de manipulation frauduleuse.

Tout consommateur qui s'estimerait lésé peut agir suivant les différents modes de saisines prévus par le code de procédure pénale.

Il peut ainsi déposer plainte auprès des services de police ou de gendarmerie d'une part, ou directement du procureur de la République d'autre part. Il reviendra alors à ce dernier de décider de poursuivre ou non les faits devant un tribunal.

Il peut également saisir directement le tribunal en citant l'auteur présumé des faits devant la juridiction compétente (en l'espèce, comme il s'agit d'un délit de tromperie, le tribunal correctionnel). La citation directe permet d'engager l'action publique sans passer par le procureur de la République.

Si la plainte n'aboutit pas, soit que le procureur de la République ait fait connaître au consommateur son intention de ne pas poursuivre l'infraction dénoncée ou qu'un délai de trois mois se soit écoulé depuis sa saisine, alors le consommateur est recevable à se constituer directement partie civile devant le doyen des juges d'instruction compétent123(*).

En matière civile, le mécanisme de l'action de groupe, introduit en droit de la consommation par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, peut être exercé par des associations qui remplissent certaines conditions posées par le législateur, au nom de plusieurs personnes, placées dans une même situation et qui subissent un dommage causé par une même personne, résultant d'un manquement à ses obligations légales ou contractuelles.

Le régime de l'action de groupe est défini aux articles L. 623-1 et suivants du code de la consommation. Aux termes de ces dispositions, seules les associations représentatives des consommateurs au niveau national et agréées selon des modalités précisées par le législateur peuvent agir devant une juridiction civile au nom des consommateurs lésés pour obtenir réparation de leur préjudice individuel. Jusqu'à la loi n° n° 2025-391 du 30 avril 2025 portant diverses adaptations au droit de l'Union européenne, l'indemnisation du consommateur se limitait aux préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis dans le cadre d'une vente de biens ou de la fourniture de services.

Concrètement, cela signifiait que cette action de groupe en droit de la consommation ne pouvait être exercée que lorsque le manquement reproché a causé un dommage aux biens des consommateurs, ce qui excluait la réparation du préjudice corporel des consommateurs d'une part, et de leur préjudice moral d'autre part. Elle fonctionne selon le régime de l'opt-in, à savoir que pour y participer, chaque consommateur doit manifester son adhésion dans un certain délai fixé par le juge124(*).

En l'espèce, le préjudice matériel subi individuellement par les consommateurs apparaît réduit si le juge devait estimer que celui-ci correspond à la différence de prix entre une eau minérale naturelle et une eau rendue potable par traitement.

Aux termes de la loi n° 2025-391 du 30 avril 2025 portant diverses adaptations au droit de l'Union européenne, le législateur a élargi l'objet de l'action de groupe en matière de droit de la consommation à la réparation de tous les préjudices, quelle que soit leur nature. Les consommateurs lésés pourront désormais voir indemniser leur préjudice moral et corporel et non plus seulement matériel. Par ailleurs, ils pourront désormais être représentés par des associations agréées dont l'objet comporte la défense d'intérêts plus large que les seuls intérêts économiques qui étaient jusqu'alors retenus.


* 123 Article 85 du code de procédure pénale.

* 124 Article L. 623-9 du code de la consommation.

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