III. ASSURER LA TRANSPARENCE ET RENFORCER LES MOYENS D'ACTIONS DU CONSOMMATEUR

A. PRÉCISER L'INFORMATION DU CONSOMMATEUR SUR LE CONTENU DES EAUX MINÉRALES NATURELLES ET DE SOURCE

1. Informer le consommateur sur le recours à des traitements de microfiltration et sur les demandes de mises en conformités formulées auprès des exploitants

Comme le rappelle Antoinette Guhl dans son rapport120(*), l'information du consommateur sur le contenu des eaux minérales naturelles et de source est régie par le règlement UE° n° 1169/2011 concernant l'information du consommateur sur les denrées alimentaires, directement applicable en droit interne.

À ce cadre général s'ajoutent des règles définies par la directive 2009/54/CE relative à l'exploitation et à la mise dans le commerce des eaux minérales naturelles. L'article 7 de cette directive précise ainsi la dénomination de vente des eaux minérales naturelles et les mentions obligatoirement contenues sur son étiquetage, parmi lesquelles figure l'indication des traitements éventuels.

Le rapporteur estime indispensable de renforcer l'information du consommateur par la DGCCRF via la communication sur son site internet, et par des affichages en magasin, sur les demandes de mise en conformité qu'elle forme auprès des exploitants d'eau minérale naturelle.

Une telle proposition est actuellement à l'étude parmi les services de la DGCCRF, comme en témoigne une note rédigée le 13 décembre 2024 par Sarah Lacoche, directrice générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, à destination du ministre de l'économie, et transmise au directeur de cabinet de ce dernier, Emmanuel Monnet.

Sarah Lacoche relève la difficile « articulation des conclusions des ARS à l'issue de leurs contrôles [...] avec les mesures que la DGCCRF est susceptible de prendre pour la protection des consommateurs. En effet, un fois le contrôle réalisé par l'ARS, une phase contradictoire s'ouvre avec l'opérateur contrôle et un délai parfois long s'écoule avant que l'ARS adopte des constats définitifs et décide, le cas échéant, des suites effectives à donner en conséquence. Pendant ce délai, les eaux, dont le statut peut être interrogé continuent d'être mises sur le marché, sans qu'une non-conformité soit formellement établie par l'ARS bien que le contrôle ait déjà eu lieu. La longueur de ce délai est d'autant plus sensible que la presse s'est emparée de l'affaire ».

Il pourrait ainsi être envisagé qu'une fois qu'un contrôle sanitaire d'une usine de captage et d'embouteillement a été diligenté par une ARS, comme cela a été le cas dans les Vosges et le Gard pour les usines de Nestlé Waters, et qu'un premier rapport relève des difficultés qui seraient susceptibles de donner lieu à de demandes de mise en conformité, la DGCCRF en informe le public lorsqu'elle en formule effectivement, dans la limite toutefois du respect du principe du contradictoire et du caractère non définitif du contrôle.

Recommandations

Libellé

Destinataire

Échéancier

Support

25

Préciser parmi les mentions devant figurer sur l'étiquette des eaux minérales naturelles le recours à des traitements de filtration

Ministère de l'économie pour porter une telle demande devant la Commission européenne et les États membres

 

Modification de la directive 2009/54/CE

26

Communiquer sur les demandes de mise en conformité effectuées par la DGCCRF

DGCCRF

 

Instruction

2. Mieux préciser le contenu des eaux de boisson et des eaux « atypiques » sucrées sur les étiquettes

Pour les minéraliers qui ne sont plus en mesure de commercialiser une eau en tant qu'eau minérale naturelle, une des solutions peut être la commercialisation de cette eau sans l'appellation « eau minérale naturelle », sous la forme d'une « eau de boisson » qui peut faire l'objet de traitements.

Ce constat a toutefois amené la commission d'enquête à s'intéresser plus avant aux différentes difficultés qui se posent relativement à la bonne information du consommateur de l'eau embouteillée, qu'elle soit minérale, de source, de boisson, ou encore une eau dite « atypique ».

Elle s'est notamment intéressée aux eaux qui ne sont ni minérales naturelles, ni de source sans pour autant être des eaux traitées embouteillées : ces eaux entrent dans la catégorie des BRSA, présentée dans la première partie de ce rapport.

Les BRSA relèvent du contrôle sanitaire de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, alors même que, comme le relève Marie-Pierre Sauvant-Rochat, responsable du laboratoire santé publique et environnement à l'université Clermont-Auvergne121(*), elles peuvent avoir un effet néfaste sur la santé, notamment des jeunes enfants, eu égard aux quantités de sucre présentes dans les eaux aromatisées qui peuvent s'apparenter à celles présentes dans les sodas.

Le rapporteur préconise en conséquence de préciser très explicitement sur l'étiquette des eaux aromatisées le fait qu'elles ne peuvent s'apparenter à de l'eau minérale naturelle, même si cette dernière en est un composant, dans la mesure où elles contiennent de fortes quantités de sucre. En effet, elle peut induire le consommateur en erreur en lui faisant miroiter les bénéfices de l'eau minérale et oublier les effets néfastes du sucre et autres additifs. Il pourrait être également décidé de ne pas commercialiser ces eaux dans les rayons d'eau minérale naturelle, mais de les regrouper avec les sodas.

Recommandation

Libellé

Destinataire

Échéancier

Support

27

Préciser parmi les mentions devant figurer sur l'étiquette des eaux aromatisées le fait qu'elles ne peuvent s'apparenter à des eaux minérales naturelles et ne pas commercialiser ces eaux dans les rayons d'eau minérale naturelle

Ministère de l'économie,
direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

 

Dispositions réglementaires

3. Informer le consommateur sur les évènements relatifs aux aquifères et aux forages

Les différentes contaminations qui ont été mises en lumière par les travaux de la commission d'enquête ont donné lieu à des décisions de suspension qui n'avaient jusqu'à ce jour pas fait l'objet de publicité et étaient méconnues du grand public122(*).

Or, même si le risque sanitaire sur les eaux commercialisées sous ces dénominations ne s'est pas réalisé, il apparaît nécessaire à la commission d'enquête que les consommateurs d'eau minérale naturelle, attachés à la notion de sa pureté originelle, qui justifie la différence de prix entre l'eau minérale naturelle et l'eau du robinet, soient informés de tels évènements.

La bonne information des consommateurs passe par une transparence accrue sur la qualité et la quantité d'eau disponible dans les aquifères, afin d'encourager la responsabilisation dans la gestion de la ressource, et par une publicité des décisions prises par les autorités nationales et locales de suspension momentanée ou définitive d'exploitation de certains forages.

Recommandation

Libellé

Destinataire

Échéancier

Support

28

Mettre en oeuvre une information des consommateurs sur la qualité et la quantité d'eau disponible dans les aquifères via un site internet cogéré par les administrations compétentes

Ministère de la santé, direction générale de la santé

Ministère de l'économie, direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Ministère chargé de l'environnement, direction de l'eau et de la biodiversité

Second semestre 2025

Site internet


* 120 Rapport d'information de Mme Antoinette Guhl, Sénatrice, sur les politiques publiques en matière de contrôle et de traitement des eaux minérales naturelles et de source, p.57.

* 121 Audition du 15 janvier 2025.

* 122 Par exemple, l'arrêté de suspension de l'exploitation du forage Romaine VIII sur le site de Vergèze dans le Gard ainsi que de la suspension par Nestlé des forages Thierry Lorraine et Belle Lorraine (Contrex) fin novembre 2022 à la demande de l'ARS Grand Est et de deux forages Hépar Nord et Essar (Hépar) en mai 2023, à la suite d'une décision conjointe des ministères de l'industrie et de Matignon le 16 février 2023.

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