CONTRIBUTION DU GROUPE ÉCOLOGISTE - SOLIDARITÉS ET TERRITOIRES
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires tient avant tout à saluer le travail rigoureux et approfondi mené par la commission d'enquête du Sénat. Pendant ces quatre mois d'auditions, elle a permis de mettre en lumière des pratiques industrielles qui posent de graves questions, tout en respectant les procédures judiciaires en cours.
Ce rapport marque une étape importante pour rétablir la vérité, évaluer les responsabilités et restaurer la confiance des citoyens dans un secteur essentiel à notre santé, notre économie et notre souveraineté environnementale : celui des eaux minérales naturelles et des eaux de source.
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires considère que la situation révélée est particulièrement préoccupante. La pureté originelle de certaines eaux a été mise à mal. Si le rapport ne conclut pas à un risque sanitaire immédiat, le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires considère que le risque sanitaire a été pris, notamment à Vergèze où les contrôles virologiques de l'État n'ont été effectifs qu'en juillet 2024, soit 12 mois après l'arrêt des traitements. Toutefois, le rapport pointe un affaiblissement préoccupant des exigences de traçabilité, notamment lorsque des installations techniques permettent le croisement d'eau potable et non potable. De plus, les pollutions aux PFAS, aux pesticides, aux microplastiques ou encore aux matières fécales ne relèvent pas de cas isolés. Ce sont là des vulnérabilités majeures pour la santé publique.
Les services décentralisés ont globalement fait leur travail - particulièrement l'ARS des Vosges et les préfets, qu'il faut saluer. Mais les décisions politiques n'ont pas suivi. On retrouve ici les mêmes constats que ceux révélés par la mission “flash” menée par Antoinette Guhl, sénatrice écologiste de Paris, et adoptée à l'unanimité le 16 octobre 2024 : un contrôle fragmenté, où les alertes existent, mais où elles sont tues ou bloquées. Il faut aussi rappeler le rôle de la Direction générale de la santé, seule à avoir exprimé une opposition claire aux dérives qui se sont produites à Vergèze, alors que, pendant douze mois, les traitements UV et au charbon actif ont été suspendus sans qu'un suivi sanitaire précis ait été assuré. Ce flou est d'ailleurs inacceptable.
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires adhère pleinement aux grandes orientations du rapport visant à renforcer les capacités de contrôle de l'État, garantir la qualité des eaux minérales, et établir des règles claires et équitables pour l'ensemble des opérateurs.
Nous soutenons notamment :
- l'obligation de transparence sur les procédés de traitement,
- la fin des dérogations discrétionnaires et opaques,
- le renforcement de la gouvernance publique sur cette ressource, qui doit être considérée comme un bien commun.
Ces orientations vont dans le sens de l'intérêt général et permettent de restaurer la confiance, tout en anticipant les défis à venir liés à la raréfaction et à la pollution des eaux souterraines.
En complément, le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires regrette vivement que les pratiques de certaines multinationales aient été tolérées aussi longtemps, malgré des alertes internes et des constats accablants. La commission d'enquête a clairement montré comment une multinationale s'est comportée comme si elle était au-dessus des lois. Elle a continué à vendre une eau qui n'était plus pure, mais traitée, avec une dérogation gouvernementale secrète, allant des ministères jusqu'à l'Élysée. Il est temps de sortir d'une logique où l'on ferme les yeux pour préserver une image de marque ou des intérêts industriels.
Ces pratiques frauduleuses constituent également une forme de concurrence déloyale. Elles entachent l'ensemble du secteur, y compris les producteurs d'eau minérale réellement pure, respectant les normes et apportant véritablement des bienfaits en oligoéléments ou en minéraux. En trichant, certains industriels affaiblissent ceux qui travaillent sérieusement et ternissent la crédibilité de toute la filière. Les consommateurs, véritables victimes de cette opacité, doivent retrouver une place centrale. Leur information ne peut plus dépendre de choix commerciaux ou d'arrangements politiques.
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires porte de longue date plusieurs propositions concrètes :
- renforcer la police de l'eau et les moyens des agences sanitaires,
- sanctuariser les nappes phréatiques les plus vulnérables,
- protéger l'appellation « eau minérale naturelle » de toute dérive.
Nous appelons également :
- à un moratoire sur les prélèvements industriels dans les zones en tension hydrique,
- à une révision complète des conditions d'exploitation des marques d'eau en bouteille.
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires estime que la préservation durable de la ressource face aux pollutions diffuses et au changement climatique méritait d'être davantage développée. Une politique de long terme est nécessaire pour protéger nos eaux souterraines, véritable patrimoine écologique de notre pays.
Par ailleurs, il existe un enjeu territorial fort. Derrière cette crise, il y a un bassin d'emploi, une ressource locale, un territoire qu'il faut accompagner dans la transition. La transformation du site de Vergèze pour produire des bouteilles de "Maison Perrier", une eau potable traitée, peut représenter une voie acceptable pour maintenir l'emploi tout en sortant d'un modèle qui n'est plus viable.
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires estime que ce rapport expose, à nouveau, des dérives graves, identifie des responsabilités et propose des pistes concrètes. Mais il doit maintenant être suivi d'effets. Car la santé publique, la transparence démocratique, la protection du consommateur et la préservation de l'eau ne peuvent plus attendre. Nous appelons à une politique publique structurelle sur l'eau, qui protège la ressource à la source, garantisse une information honnête, et mette fin à l'impunité de celles et ceux qui se croient au-dessus des lois.
C'est une question de justice environnementale, de démocratie sanitaire et d'éthique économique.