D. LE RENFORCEMENT DU CONTRÔLE AU NIVEAU NATIONAL, COROLLAIRE DE L'ACCROISSEMENT DES PRÉROGATIVES DES MUNICIPALES
1. Une exigence d'identification nationale des agents et de traçabilité des actions soumises à habilitation
Il n'existe pas, à ce jour, d'autorité centrale de contrôle des polices municipales au niveau de l'État.
Certes, les agents de la police municipale sont soumis au contrôle de l'autorité préfectorale dans certaines situations précises, notamment lors de la délivrance :
- de l'agrément en vue de leur nomination110(*) ;
- de l'autorisation de port d'armes111(*) ;
- d'habilitations requises pour l'accès à certains fichiers de police (voir supra).
Ces autorisations préfectorales délivrées peuvent faire l'objet d'une enquête administrative de sécurité, et également être retirées en cas de risques pour la sécurité publique.
L'action de la police municipale est également contrôlée par le préfet lors de la réalisation de la convention de coordination.
En revanche, le suivi, au niveau national, de ces autorisations et habilitations fait défaut.
Certes, une enquête nationale est réalisée chaque année par la DLPAJ, en lien avec les préfectures, permettant de recenser certaines données par communes relatives aux effectifs, aux régimes de mutualisation éventuels ou encore à l'armement des agents. Cependant, ce dispositif n'équivaut en aucun cas à une base centrale des policiers municipaux.
À cet égard, comme l'a relevé la DGGN auprès de la rapporteure : « l'État détient paradoxalement une vision beaucoup plus précise de la sécurité privée via le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), établissement public dédié en charge de la gestion des agréments des agents et des dirigeants et investi par ailleurs de prérogatives disciplinaires vis-à-vis de la profession ».
La mission d'information considère que le renforcement des prérogatives administratives et judiciaires des polices municipales qu'elle appelle de ses voeux a pour corollaire indispensable un renforcement du contrôle par l'État de leur action, dans le strict respect des libertés locales.
Cela suppose, en premier lieu, l'établissement d'un système national d'identification anonyme et centralisé des policiers municipaux et des gardes champêtres, sur le modèle du référentiel des identités et de l'organisation (RIO) mis en place pour les forces de sécurité intérieure112(*). Celui-ci pourrait être associé à la délivrance d'une carte professionnelle nationale uniformisée.
En deuxième lieu, il convient de mettre en place en place une base centrale des policiers municipaux et des gardes champêtres, de façon à permettre une complète traçabilité des actions soumises à habilitation. Une telle mesure est indispensable dans l'hypothèse d'un accroissement des facultés d'accès aux fichiers de police tel que préconisé par la mission d'information (voir supra).
Ce système d'identification nationale et cette base centrales pourraient également permettre la mise en place d'un mécanisme de sécurisation accrue des accès aux fichiers, permettant :
- une identification personnelle des agents, afin de s'assurer que l'agent dispose bien de l'habilitation ;
- une « authentification forte », destinée à s'assurer que l'accès correspond aux cas prévus dans le cadre de son habilitation.
Proposition n° 16 - Établir un système d'identification anonyme et centralisé des policiers municipaux et des gardes champêtres, associé à la délivrance d'une carte professionnelle nationale.
Proposition n° 17 - Mettre en place une base centrale des policiers municipaux et des gardes champêtres, permettant notamment la traçabilité des habilitations et accès aux fichiers autorisés.
2. Structurer une capacité de contrôle nationale de l'action des polices municipales
Contrairement aux forces de sécurité intérieure, l'action des polices municipales n'est pas soumise au contrôle d'un service d'inspection ad hoc.
En l'état du droit, seuls des contrôles ponctuels peuvent être effectués. Ainsi, à la demande du maire, du président de l'EPCI, du préfet ou du procureur de la République, le ministre de l'intérieur peut décider de la vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale, en confiant cette mission à un service d'inspection générale de l'État, soit en pratique l'inspection générale de la police nationale (IGPN), l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), ou l'inspection générale de l'administration (IGA). Les modalités de ce contrôle sont fixées après consultation du maire ou, le cas échéant, du président de l'EPCI et de chacun des maires concernés113(*). Les agents de police municipale ont l'obligation de prêter le concours qui leur est demandé dans ce cadre114(*).
En vue de structurer une capacité de contrôle national de l'action des polices municipales et des gardes champêtres, une mission permanente commune aux trois services d'inspection du ministère de l'intérieur précités pourrait être créée. Cette mission pourrait accueillir, par ailleurs, des personnalités qualifiées.
Outre la vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale, cette mission pourrait notamment conduire des travaux sur des sujets liés à la déontologie de leur action, ou encore au développement de l'expertise dans les domaines du management et de l'organisation interne. Comme dans le dispositif actuel, elle ne pourrait conduire ses missions que dans des conditions fixées après consultation des maires et présidents d'EPCI concernés.
Une telle organisation, plus souple et reposant sur des structures d'ores et déjà opérationnelles, paraît préférable à la création, proposée par certains, d'une « inspection générale des polices municipales ».
Proposition n° 18 - Instaurer une mission nationale permanente de contrôle des polices municipales, commune aux inspections générales de la police nationale, de la gendarmerie nationale et de l'administration.
* 110 Article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure.
* 111 Article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure.
* 112 Voir l'article R. 434-15 du code de la sécurité intérieure et de l'arrêté du 24 décembre 2013 relatif aux conditions et modalités de port du numéro d'identification individuel par les fonctionnaires de la police nationale, les adjoints de sécurité et les réservistes de la police nationale.
* 113 Article L. 513-1 du code de la sécurité intérieure.
* 114 Article R. 515-21 du code de la sécurité intérieure.