C. L'ÉPINEUSE QUESTION DES PRÉROGATIVES JUDICIAIRES DES POLICES MUNICIPALES : POUR UNE EXTENSION LIMITÉE ET COHÉRENTE AVEC LEURS MISSIONS
1. Des compétences de police judiciaire nettement circonscrites
Le durcissement du contexte sécuritaire et la montée en puissance de la délinquance du quotidien appellent également une extension des prérogatives répressives des polices municipales.
En tant qu'agents de police judiciaire adjoints (APJA), les policiers municipaux ne disposent en effet pas d'une compétence générale pour constater les infractions pénales. Les infractions qu'ils peuvent constater sont limitativement fixées par la loi et par les décrets spéciaux qui leur sont propres.
En premier lieu, les policiers municipaux peuvent constater tout manquement à un arrêté du maire en vue d'assurer le bon ordre, la tranquillité, la sécurité et la salubrité publiques sur le territoire de la commune donnant lieu à une amende administrative66(*).
Ils ont également compétence pour constater un certain nombre d'infractions de nature contraventionnelle et ne nécessitant pas d'actes d'enquête, telles que :
- une partie des contraventions liées à la tranquillité publique prévues par le code de procédure pénale67(*) (divagation ou excitation d'animaux dangereux, bruits ou tapages injurieux ou nocturnes, menaces de destruction, destructions, dégradations ou détériorations légères de biens communaux, abandon de déchets ou d'autres objets, atteintes volontaires ou involontaires et mauvais traitements à animal...) ;
- la plupart des contraventions au code de la route en matière de stationnement ou de règles de circulation, dès lors que celles-ci ne nécessitent pas d'actes d'enquête et sont commises à l'intérieur du territoire communal (vitesse, dépassements, non-respect des sens interdits, stops et feux tricolores, non-port de la ceinture de sécurité...)68(*) ;
- les contraventions au code de l'environnement (bruits de voisinage et nuisances sonores, infractions à la réglementation relative aux réserves naturelles et parcs nationaux, atteintes aux espaces naturels, à leur faune et à leur flore, infractions à la réglementation sur la pêche, infractions à la réglementation sur les publicités, enseignes et pré-enseignes, infractions relatives aux déchets69(*)) ;
- certaines contraventions au code de la santé publique (interdiction de fumer ou de vapoter dans les espaces collectifs, interdiction de vendre ou d'offrir du tabac, des produits de vapotage ou du protoxyde d'azote à des mineurs, infractions à des mesures prises face à des menaces sanitaires graves70(*)).
En matière délictuelle, leurs compétences sont nettement plus limitées.
Comme tout APJA, ils peuvent également constater non seulement la contravention mais également le délit d'outrage sexiste et sexuel71(*).
Ils ont également compétence pour constater, par rapport, l'occupation illicite de hall d'immeubles, mais sans pouvoir en dresser le procès-verbal72(*).
Lorsqu'ils sont affectés par le maire à des missions de maintien du bon ordre au sein des transports publics de voyageurs, ils sont compétents pour les infractions à la police des transports73(*), parmi lesquelles certains délits (cause volontaire ou involontaire d'accident, dégradation de la voie ferrée, délit d'habitude en matière tarifaire...)74(*).
Il convient de noter à cet égard une spécificité importante des gardes champêtres : leurs compétences judiciaires sensiblement étendues par rapport aux policiers municipaux, incluant même un rôle d'enquête. Bien qu'ayant également le statut d'APJA, ils sont en capacité de rechercher et de constater par procès-verbal un nombre important d'infractions, au premier rang desquelles les délits et contraventions qui portent atteinte aux propriétés situées dans les communes pour lesquelles ils sont assermentés75(*) ainsi que les infractions, y compris les délits, à la police de l'eau et à la police de la chasse76(*).
S'ils sont tenus de rendre compte au maire, sous forme de rapports, de tout crime ou délit dont ils ont connaissance, les policiers municipaux et les gardes champêtres agissent, pour le reste, dans le cadre du régime de droit commun de la flagrance qui leur donne qualité, comme à toute personne, pour appréhender l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche77(*).
Ainsi, un grand nombre d'infractions pourtant directement liées à la tranquillité publique échappe à leur compétence. Il en va par exemple des délits liés à l'usage de stupéfiants, à la vente à la sauvette, aux dégradations de biens, au port illicite d'armes, aux « rodéos urbains » etc.
2. L'octroi du statut d'officier de police judiciaire aux policiers municipaux : une fausse bonne idée
Pour remédier à cette situation, une proposition récurrente dans le débat public consiste à octroyer aux policiers municipaux, ou à une partie d'entre eux, le statut d'officier de police judiciaire (OPJ).
Les statuts d'officiers de police judiciaire, d'agent de police judiciaire et d'agent de police judiciaire adjoints
Le statut d'officier de police judiciaire (OPJ) est régi par les articles 16 à 19-1 du code de procédure pénale. Ont la qualité d'OPJ, sur habilitation du procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle intervient leur première affectation :
- les officiers et les gradés de la gendarmerie, les gendarmes nominativement désignés par arrêté des ministres de la justice et de l'intérieur, après avis conforme d'une commission ;
- les inspecteurs généraux, sous-directeurs de police active, contrôleurs généraux, commissaires de police et les officiers de police ;
- les fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale nominativement désignés par arrêté des ministres de la justice et de l'intérieur, après avis conforme d'une commission ;
- les personnes exerçant des fonctions de directeur ou sous-directeur de la police judiciaire et de directeur ou sous-directeur de la gendarmerie.
Les maires et leurs adjoints se voient également octroyer, ès qualités, le statut d'OPJ.
Les OPJ ont pour mission de constater les infractions à la loi pénale, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs tant qu'une information judiciaire n'est pas ouverte. Lorsqu'une information est ouverte, ils sont chargés de l'exécution des délégations des juridictions d'instruction et défèrent à leurs réquisitions. À cet égard, le procureur de la République et le juge d'instruction ont le libre choix, pour la conduite de leurs enquêtes, des formations auxquelles appartiennent les OPJ. Ils reçoivent les plaintes et dénonciations et procèdent à des enquêtes préliminaires ainsi qu'à des enquêtes de flagrance. Pour l'exécution de ces missions, ils ont le droit de requérir directement le concours de la force publique. S'ils ont par principe compétence dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles, ils peuvent se transporter sur toute l'étendue du territoire national, à l'effet d'y poursuivre leurs investigations. Dans le cadre de leur carrière la notation par le procureur général des fonctionnaires ayant le statut d'OPJ est prise en compte pour toute décision d'avancement.
Le statut d'agent de police judiciaire (APJ) est régi par les articles 20, 21-1 et 21-2 du code de procédure pénale. Ont cette qualité les militaires de la gendarmerie nationale autres que les volontaires ainsi que les fonctionnaires des services actifs de la police nationale titulaires ou stagiaires n'ayant pas le statut d'OPJ. Leur mission est de seconder les OPJ. Dans ce cadre, ils ont compétence pour constater les crimes, délits ou contraventions, ainsi que d'en dresser procès-verbal.
Enfin, le statut d'agent de police judiciaire adjoint (APJA) est régi par les articles 21 et suivants du même code. Ont notamment cette qualité, outre certains fonctionnaires de la police nationale et volontaires de la gendarmerie nationale, les policiers municipaux et les gardes champêtres. Comme les APJ, ils ont pour mission de seconder les OPJ. Ils ont compétence pour constater, en se conformant aux ordres de leurs chefs, les infractions à la loi pénale et recueillir tous les renseignements en vue de découvrir les auteurs de ces infractions, le tout dans le cadre et dans les formes prévues par les lois organiques ou spéciales qui leur sont propres. Ils ont également compétence constater par procès-verbal les contraventions aux dispositions du code de la route dont la liste est fixée par décret ainsi que la contravention et le délit d'outrage sexiste et sexuel.
Source : commission des lois du Sénat
La mission d'information est fermement opposée à cette solution. Elle considère que le fait de conférer aux polices municipales des missions de police judiciaire trop étendues conduirait à dénaturer profondément leur rôle, et ce à deux titres au moins.
Au plan opérationnel, la police judiciaire implique un travail d'enquête assorti de lourdes exigences procédurales, qui aurait pour effet de détourner les policiers municipaux de la voie publique, qui doit demeurer leur terrain d'action essentiel.
Au plan politique, surtout, une telle évolution imposerait de les placer de façon accrue sous la direction du procureur de la République, en substitution du maire.
Cette seconde conséquence découle en effet directement des exigences découlant des exigences constitutionnelles de placement de la police judiciaire sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire en application de l'article 66 de la Constitution. Ainsi, des pouvoirs généraux d'enquête criminelle ou délictuelle ne sauraient être confiés à des agents qui, relevant des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition d'OPJ ou de personnes présentant des garanties équivalentes.
Ces exigences ont été rappelées avec force par le Conseil constitutionnel78(*) à l'occasion de sa décision sur l'article 1er de la loi « Sécurité globale »79(*), qui visait précisément à élargir les compétences judiciaires des directeurs et chefs de service de polices municipales et qui a été intégralement censuré. À l'appui de sa décision d'inconstitutionnalité, il a notamment relevé :
- l'absence contrôle direct et effectif du procureur de la République sur les agents visés ;
- l'absence de possibilité pour le procureur de la République d'adresser des instructions à ces derniers ;
- l'absence d'obligation pour ceux-ci de le tenir informé sans délai des infractions dont ils ont connaissance ;
- le défaut d'association de l'autorité judiciaire aux enquêtes administratives relatives à leur comportement, ainsi que l'absence de notation par le procureur général.
- le fait de ne pas présenter, en termes de formation notamment, des garanties équivalentes à celles exigées pour avoir la qualité d'OPJ.
Dans une tentative pour surmonter ces difficultés, une récente proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale préconise d'accorder, à titre expérimental et sur demande des communes dotées d'une police municipale qui y seraient éligibles, le statut d'officier de police judiciaire pour permettre la constatation de certaines infractions limitativement énumérées, directement liées à la tranquillité publique (vente à la sauvette, dégradations...) dès lors qu'elle ne nécessite pas d'acte d'enquête80(*). Il n'en reste pas moins qu'une telle évolution aurait pour effet immédiat de placer les policiers municipaux sous l'autorité du procureur de la République pour un pan tout à fait significatif de leur activité.
Interrogée sur ce point par la rapporteure, la DLPAJ du ministère de l'intérieur partage cette analyse, considérant que : « la possibilité d'octroyer, aux directeurs de police ou aux chefs de service de police municipale la qualité d'OPJ définie à l'article 16 du code de procédure pénale peut apparaître excessive, les compétences de police judiciaire des OPJ étant particulièrement étendues. Un tel accroissement dépasserait le cadre d'action traditionnel de la police municipale. Un octroi de compétences au cas par cas apparaît plus adéquat ».
La mission d'information relève également que la solution de l'octroi du statut d'OPJ est largement rejetée par les élus locaux comme par les policiers municipaux. À de rares exceptions près, l'ensemble des acteurs entendus par la mission d'information au cours de ses auditions et déplacements partage cet avis.
En outre, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalités (AMF) a notamment indiqué à la rapporteure que « la transposition du modèle du garde champêtre », caractérisé par des prérogatives judiciaires renforcées sur un spectre réduit d'infraction tout en restant APJA semble « davantage rassurante », par contraste avec le saut dans l'inconnu qu'un octroi du statut d'OPJ représenterait.
Enfin, la solution, parfois avancée, consistant à octroyer aux policiers municipaux le statut d'agent de police judiciaire (APJ) se heurte aux mêmes difficultés, eu égard aux compétences générales en matière de constatation des infractions pénales qui en découlent.
3. Permettre aux policiers municipaux de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles
Pour concilier la volonté de renforcer les prérogatives répressives de la police municipale et le souci de préserver la cohérence de leur cadre d'action, la mission d'information propose de permettre aux policiers municipaux de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles (AFD).
Les amendes forfaitaires délictuelles
Créée par l'article 36 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, la procédure de l'amende forfaitaire délictuelle (AFD) est régie par les articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale.
Cette procédure permet, pour la répression de certains délits lorsque la loi le prévoit expressément, d'éteindre l'action publique par le paiement d'une amende forfaitaire, dont le montant ne peut pas excéder 3 000 euros. Cette procédure est applicable aux délits lorsque la loi le prévoit expressément. La liste de ces délits a été largement étendue depuis la création de cette procédure.
Elle est notamment prévue pour les délits suivants : usage illicite de stupéfiants, conduite sans assurance ou sans permis, occupation illicite d'un terrain appartenant à autrui, vol à l'étalage sous certaines conditions, vente à la sauvette, dégradations, occupation illicite de halls d'immeuble...
Par ailleurs, cette procédure est entourée de plusieurs garanties :
- elle n'est pas applicable aux mineurs ;
- elle n'est pas applicable si plusieurs infractions, dont l'une au moins ne peut donner lieu à une amende forfaitaire, ont été constatées simultanément ;
- elle ne peut constituer le premier terme de la récidive ;
- elle est exclue, sauf exception prévue par la loi, lorsque la personne concernée se trouve en état de récidive légale.
En outre, les doctrines d'emploi de la police et de la gendarmerie nationales prévoient que cette procédure est écartée en cas de contestation du mis en cause.
Source : commission des lois du Sénat
En ce qu'elle permet d'apporter une réponse pénale rapide et est réservée à des faits aisément constatables qui ne nécessitent pas d'actes d'enquête, la procédure de l'AFD est particulièrement adaptée aux besoins des polices municipales.
La quasi-totalité des élus et agents de police municipale entendus par la mission d'information dans le cadre des auditions et des déplacements qu'elle a organisés soutiennent fortement une telle évolution. Ce consensus se retrouve dans les résultats de la consultation menée auprès des élus locaux sur la plateforme dédiée du Sénat, selon lesquels 89 % des 790 répondants déclarent y être favorables.
Au plan juridique, il existe un débat sur la nécessité, pour permettre à un agent de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles, d'être OPJ ou mis à la disposition d'un OPJ.
C'est notamment la position qu'a soutenue le ministre auprès du ministre de l'intérieur, François-Noël Buffet, lors de son audition devant la commission des lois, indiquant : « Nous pensons qu'une voie de passage pourra être trouvée, en permettant à un policier municipal - devenant OPJ - de délivrer une AFD, sans aller à l'encontre de la jurisprudence constitutionnelle »81(*).
La mission d'information considère au contraire que, eu égard à la nature du dispositif, qui ne peut concerner que des délits ne nécessitant pas d'enquête, et à condition de réserver sa mise en oeuvre à un nombre restreint d'infractions cohérentes avec la compétence des polices municipales, il serait loisible au législateur de leur ouvrir cette faculté sans remettre en cause leur statut d'APJA. Une telle évolution procède de la même logique que les prérogatives existantes des policiers municipaux et des gardes champêtres en matière délictuelle (voir supra). À titre d'exemple, le fait de permettre aux policiers municipaux de constater le délit d'outrage sexiste et sexuel créé par la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) n'a pas été déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel.
La DLPAJ partage d'ailleurs cette analyse, indiquant que, « au regard des caractéristiques de cette procédure, réservée aux délits aisément constatables et des garanties qui l'entourent, il paraît possible, pour certains délits, de permettre aux agents de police municipale de faire usage de la procédure d'amende forfaitaire délictuelle ».
La mission d'information identifie en particulier trois infractions pour la répression desquelles il serait particulièrement pertinent de permettre aux policiers municipaux de prononcer des AFD : l'usage illicite de stupéfiants82(*), la vente à la sauvette83(*), et l'occupation illicite de halls d'immeuble (qu'ils peuvent d'ores et déjà constater par rapport)84(*).
Cette liste n'est pas exhaustive et pourrait éventuellement être élargie à d'autres infractions (par exemple la conduite sans permis ou sans assurance), sous réserve de les maintenir en nombre limité.
Dans le cadre de la répression du délit de vente à la sauvette par la voie de l'AFD, qui constitue une atteinte importante à la tranquillité publique selon un grand nombre d'acteurs auditionnés, il serait également opportun de permettre aux policiers municipaux, à l'instar de ce qui peut être mis en oeuvre dans le cadre de la police des transports publics de voyageurs85(*), d'appréhender les marchandises en vue de leur confiscation par le tribunal, à condition d'en rendre compte à l'OPJ territorialement compétent86(*). À cet égard, il peut être relevé que le Conseil constitutionnel a récemment déclaré conforme à la Constitution87(*) une disposition tendant à ouvrir cette faculté aux agents assermentés des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP sur la voie publique, aux abords immédiats de leurs emprises88(*).
En revanche, dès lors que le maire affecterait les agents de sa police municipale à des missions impliquant la délivrance d'AFD, ces agents seraient également placés, dans le seul cadre de ces missions et dans les limites strictement nécessaires à la satisfaction des exigences constitutionnelles applicables, sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire. En pratique, le procureur de la République compétent pourrait notamment leur adresser des instructions de politique pénale propres à la répression par la voie d'AFD des infractions concernées et devrait être tenu informé de leur action.
Pour la mission d'information, une telle solution est nettement préférable à celle consistant à octroyer, y compris à titre optionnel, le statut d'OPJ, qui paraît disproportionnée eu égard à la finalité poursuivie, limitée à la délivrance d'AFD pour un petit nombre d'infractions.
Une telle option aurait pour effet de créer un système « à deux vitesses ». D'un côté, les polices municipales de communes refusant le statut d'OPJ resteraient cantonnées à des compétences judiciaires devenues inadaptées aux enjeux actuels de la tranquillité publique. De l'autre, les polices municipales des communes qui feraient le choix d'octroyer le statut d'OPJ à ses agents, soit par adhésion à cette solution - le cas serait vraisemblablement minoritaire -, soit parce que les réalités du terrain lui imposent à tout prix de renforcer ses compétences répressives, basculeraient dans un tout autre système, dans lequel les agents se trouveraient structurellement placés sous les autorités croisées du maire et du procureur de la République.
La mission d'information privilégie une logique de « boîte à outils », ciblés et strictement proportionnés, dans laquelle toute commune pourrait « puiser » des ressources adaptées à sa situation, tout en acceptant, le cas échéant, une autorité du procureur de la République sur un domaine bien délimité de l'action des polices municipales.
Proposition n° 10 - Permettre aux policiers municipaux de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles pour un nombre limité d'infractions, notamment la vente à la sauvette, l'usage illicite de stupéfiants et l'occupation de halls d'immeuble.
4. Ajuster et harmoniser les compétences des policiers municipaux et des gardes champêtres dans le domaine contraventionnel
Les compétences des policiers municipaux et des gardes champêtres dans le domaine contraventionnel, éparpillées entre plusieurs codes et issus d'une sédimentation historique de mesures pénales hétérogènes, méritent d'être passées en revue, harmonisées et ajustées aux besoins opérationnels résultant des nouvelles réalités du terrain.
Une lacune importante concerne la conduite sous l'influence de l'alcool. Pour mémoire, celle-ci est passible d'une contravention lorsque la concentration d'alcool dans le sang du conducteur est comprise entre 0,5 et 0,8 grammes par litre ou que la concentration d'alcool dans l'air expiré est comprise entre 0,25 et 0,40 grammes par litre89(*). Au-delà de ces seuils, elle constitue un délit90(*).
En l'état du droit, les policiers municipaux et les gardes champêtres n'ont pas la possibilité de constater cette contravention91(*), dont la répression semble pourtant pleinement cohérente avec leurs attributions.
Tout au plus, ils peuvent procéder à un dépistage de l'imprégnation alcoolique par éthylotest sur un conducteur impliqué dans un accident de circulation ayant occasionné un dommage corporel, mais uniquement sur l'ordre et sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire92(*). L'inefficacité et la lourdeur de cette procédure sont manifestes, à plus forte raison dans un contexte où la charge administrative des OPJ est par ailleurs croissante. Dans les faits, cela conduit l'agent de police municipale à téléphoner à l'OPJ compétent, parfois en pleine nuit, pour demander l'autorisation de faire souffler le conducteur dans le ballon, laquelle autorisation lui est, en pratique, toujours accordée. Il en va de même, au demeurant, s'agissant du dépistage de la consommation de stupéfiants par test salivaire93(*).
En cas de résultat positif à l'éthylotest, les policiers municipaux et les gardes champêtres n'ont pas la possibilité de procéder à la vérification de l'état alcoolique, y compris par éthylomètre. Si une telle vérification constitue certes, stricto sensu, un acte d'enquête, la faculté ouverte par la loi d'utiliser un éthylomètre en lieu et place d'un prélèvement sanguin94(*) permet d'y procéder de façon immédiate et sur la voie publique, et serait ainsi compatible avec le cadre d'action des polices municipales. Il en va différemment, par exemple, de la vérification de la consommation de stupéfiants, pour laquelle la loi impose des analyses ou examens médicaux, cliniques et biologiques95(*).
Toujours en matière de sécurité routière, il existe également des divergences entre les champs de compétence des policiers municipaux et des gardes champêtres96(*), dont le bien-fondé n'est pas évident. Ainsi, les gardes champêtres ont compétence pour constater la contravention liée au transport ou à la détention d'un avertisseur de radar97(*), mais pas les policiers municipaux. À l'inverse, les policiers municipaux peuvent constater la contravention liée au non-respect des voies de circulation réservées sur l'autoroute lorsqu'elles sont commises à l'intérieur du territoire communal98(*), mais pas les gardes champêtres.
De même, les gardes champêtres n'ont pas la faculté de prescrire la mise en fourrière d'un véhicule en cas d'infraction aux règles de stationnement, alors même que cette compétence est prévue pour les chefs de service de la police municipale. Tout au plus, ils peuvent constater la contravention et conduire ou faire conduire le véhicule jusqu'au lieu de la mise en fourrière lorsque celle-ci a été prescrite par un OPJ, un APJ ou un agent de police municipale compétent99(*). Interrogée sur ce point par la rapporteure, la Fédération nationale des gardes champêtres juge cette situation « aberrante », dans la mesure où ces enjeux, peu traités par les OPJ des brigades de gendarmerie dans les faits, relèvent pleinement de la police du quotidien (enlèvement dans le cadre de marchés, de véhicules ventouses, abandon d'épaves sur la voie publique...).
Proposition n° 11 - Ajuster le champ des contraventions pouvant être prononcées par les policiers municipaux et les gardes champêtres, en cohérence avec leurs missions de sécurité du quotidien.
Proposition n° 12 - Autoriser les policiers municipaux et les gardes champêtres à procéder d'initiative à des dépistages d'imprégnation alcoolique ou de consommation de stupéfiants en cas d'accident de la route, ainsi qu'à des vérifications de l'imprégnation alcoolique par éthylomètre.
Proposition n° 13 - Permettre aux gardes champêtres de prescrire la mise en fourrière de véhicules.
En tout état de cause, ces propositions ne feraient qu'étoffer la « boîte à outils » mise à la disposition des communes et des intercommunalités. Les nouvelles compétences et prérogatives ainsi esquissées par la mission d'information n'auraient vocation à être effectivement exercées que là où elles correspondent à la doctrine d'emploi de la police municipale ou des gardes champêtres qu'il appartient à chaque maire de déterminer.
5. La nécessité d'étendre les possibilités de procéder à des relevés d'identité
Les compétences des policiers municipaux en matière de relevés d'identité sont extrêmement limitées. Cette situation constitue un frein majeur dans le cadre de leurs missions de sécurité du quotidien.
En l'état du droit, en application de l'article 78-6 du code de procédure pénale, ils ne disposent en effet que de la faculté de relever l'identité de contrevenants aux seules fins de dresser le procès-verbal des contraventions relevant de leur compétence.
En cas de refus ou d'impossibilité pour la personne de justifier son identité, contrairement aux forces de sécurité intérieure dans le cadre des contrôles d'identité, ils ne disposent d'aucun pouvoir de contrainte propre aux fins de vérification de leur identité. Sur ordre d'un OPJ de la police ou de la gendarmerie nationales, il peut uniquement présenter sur-le-champ le contrevenant à ce dernier ou bien retenir celui-ci pendant le temps nécessaire à son arrivée ou à celle d'un APJ agissant sous son contrôle.
Ce régime est vécu comme une aberration par un grand nombre d'acteurs de terrain entendus par la mission d'information. En effet, il a autorisé un policier municipal à relever l'identité d'une personne coupable de tapage nocturne, mais pas de l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant, d'une gravité bien supérieure.
Contrôles, vérifications, relevés et recueils d'identité
Les contrôles, vérifications et relevés d'identité sont des opérations de police régies par les articles 78-1 et suivants du code de procédure pénale. Ce même article précise que ces opérations sont soumises au contrôle de l'autorité judiciaire.
Les contrôles d'identité peuvent être réalisés par des officiers de police judiciaire ou, sur leur ordre, par des agents de police judiciaire et par certains agents de police judiciaire adjoints, mais non les policiers municipaux ou les gardes champêtres. Ils s'inscrivent soit dans un cadre judiciaire, pour la recherche de l'auteur d'une infraction, soit dans un cadre administratif, aux fins de prévenir une atteinte à l'ordre public100(*). Toute personne se trouvant sur le territoire national est tenue de s'y prêter101(*).
Si la personne refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier son identité, elle peut, en cas de nécessité, être retenue sur place ou dans le local de police où elle est conduite aux fins de vérification de son identité. Dans tous les cas, il est présenté immédiatement à un officier de police judiciaire qui le met en mesure de fournir par tout moyen les éléments permettant d'établir son identité et qui procède, s'il y a lieu, aux opérations de vérification nécessaires102(*).
Les relevés d'identité peuvent être réalisés par certains agents de police judiciaire adjoints, parmi lesquels les policiers municipaux mais non les gardes champêtres, aux seules fins de dresser les procès-verbaux concernant des contraventions aux arrêtés de police du maire, des contraventions au code de la route que la loi et les règlements les autorisent à verbaliser ou des contraventions qu'ils peuvent constater en vertu d'une disposition législative expresse103(*). Cette faculté est également ouverte, dans le cadre de leurs missions, par certains agents chargés de la police des transports publics de voyageurs104(*).
Si la personne refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier son identité, l'agent concerné ne dispose pas des pouvoirs de contrainte prévus dans le cadre du régime de la vérification d'identité. Le cas échéant, il est prévu qu'il en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors lui ordonner sans délai de lui présenter sur-le-champ le contrevenant ou de retenir celui-ci pendant le temps nécessaire à son arrivée ou à celle d'un agent de police judiciaire agissant sous son contrôle. Toutefois, à défaut de cet ordre, l'agent de police judiciaire adjoint mentionné au premier alinéa ne peut retenir le contrevenant.
Enfin, comme tout agent auquel un texte législatif ou règlementaire confère des pouvoirs de police judiciaire, les policiers municipaux et gardes champêtres peuvent procéder à un recueil d'identité, soit le fait de demander à un contrevenant de décliner son identité, sans toutefois pouvoir exiger la présentation d'un document justifiant de celle-ci105(*). Cette faculté existe même sans texte.
Source : commission des lois du Sénat
Pour cette raison, la mission d'information préconise d'étendre les prérogatives des policiers municipaux en matière de relevés d'identité.
A minima, ces derniers pourraient être autorisés à relever l'identité de tout auteur d'un crime ou d'un délit flagrant.
Une réflexion pourrait également être menée afin d'autoriser les policiers municipaux, dans des conditions strictement encadrées et en cohérence avec leurs missions de prévention de la délinquance et de maintien du bon ordre et de la tranquillité publique, à procéder à des relevés d'identité dans un cadre de police administrative, aux fins de prévenir des atteintes à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens. Une telle faculté est déjà ouverte dans le cadre du régime des contrôles d'identité pouvant être réalisés par les forces de sécurité intérieure106(*). En tout état de cause, cette évolution supposerait de déterminer des conditions de formation et de contrôle spécifiques et renforcées, notamment pour prévenir toute discrimination dans le cadre de ces opérations, sur le modèle des dispositifs mis en place à cette fin par la police et la gendarmerie nationales.
En revanche, eu égard à la nature de leurs missions, les policiers municipaux n'auraient aucunement vocation à procéder à des relevés d'identité dans le cadre de la recherche d'auteurs ou de complices d'infractions, que ce soit d'initiative ou sur réquisition du procureur de la République, à l'instar de ce qui est prévu dans le cadre du régime des contrôles d'identité107(*).
Certains vont toutefois jusqu'à préconiser d'autoriser les policiers municipaux à réaliser des contrôles d'identité, stricto sensu. Une telle piste n'est pas retenue par la mission d'information, dès lors qu'elle aurait pour conséquence d'octroyer à certains agents des services de police municipale le statut d'OPJ. En effet, dans une décision de 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution une disposition tendant à permettre aux policiers municipaux de procéder à des contrôles d'identité, considérant que cela reviendrait à confier des pouvoirs généraux d'enquête criminelle à des agents qui ne sont pas mis à la disposition d'OPJ, en méconnaissance des exigences de placement de la police judiciaire sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire découlant de l'article 66 de la Constitution108(*).
Ainsi, le débat autour de l'autorisation pour les policiers municipaux de procéder à des contrôles d'identité se pose dans des termes comparables à celui qui concerne leurs compétences en matière délictuelle (voir supra). La mission d'information n'est pas favorable à un système « à deux vitesses » dans lequel certaines polices municipales dont les agents se verraient octroyer le statut d'OPJ pourraient mettre en oeuvre le régime complet des contrôles d'identité au sens de l'article 78-2 du code de procédure pénale, tandis que les autres seraient cantonnées au régime actuel des relevés d'identité dans les conditions restrictives précitées, posées à l'article 78-6 du même code. La mission d'information juge préférable de définir un régime de relevés d'identité élargi et susceptible d'être appliqué par toute police municipale, dans le respect des exigences constitutionnelles.
À nouveau, il appartiendrait au seul maire de donner ou non instruction aux agents de sa police municipale de se saisir de ces nouvelles prérogatives.
Proposition n° 14 - Étendre les possibilités pour les policiers municipaux de procéder à des relevés d'identité.
6. L'accès élargi aux fichiers de police : une demande forte exprimée par l'ensemble des acteurs de terrain
Il existe un consensus parmi l'ensemble des acteurs entendus par la mission d'information, aussi bien les élus locaux, les agents de police municipale et les gardes champêtres que les administrations des ministères de l'intérieur et de la justice, pour étendre l'accès des policiers municipaux et des gardes champêtres aux fichiers de police.
En l'état, ils disposent d'un accès direct, complet ou partiel, à un nombre limité de fichiers, comme l'indique le tableau ci-dessous.
Droits d'accès des policiers municipaux et
gardes champêtres
aux principaux fichiers de police
Fichier |
Principales informations |
Accès des policiers municipaux et des gardes champêtres |
Base juridique |
Système national des permis de conduire (SNPC) |
Informations relatives aux permis de conduire et aux décisions administratives et judiciaires afférentes |
Accès direct limité des agents individuellement désignés et habilités par le préfet, sur proposition du maire de la commune, aux seules fins d'identifier les auteurs des infractions au code de la route qu'ils sont habilités à constater. Ces droits leur permettent d'accéder au relevé d'information dit « restreint » (numéro de dossier, état civil du titulaire du permis, état de validité et, le cas échéant, cause de validité). |
Article R. 225-5 du code de la route Arrêté du 3 janvier 2019 du ministre de l'intérieur |
Système d'immatriculation des véhicules (SIV) |
Informations concernant les pièces administratives exigées pour la circulation des véhicules ou affectant la disponibilité de ceux-ci |
Accès direct limité des agents individuellement désignés et habilités par le préfet, sur proposition du maire de la commune, aux seules fins d'identifier les auteurs des infractions au code de la route et des infractions relatives à l'abandon ou au dépôt illégal de déchets qu'ils sont habilités à constater. Ces droits leur permettent d'accéder au titulaire du certificat d'immatriculation, à l'acquéreur en cas de cession du véhicule et aux données du locataire en cas de location du véhicule. |
Article R. 330-2 du code de la route Arrêté du 3 janvier 2019 du ministre de l'intérieur |
Système d'information (SI) « Fourrières » |
Enregistrement, gestion et suivi par les autorités compétentes des procédures relatives aux véhicules mis en fourrière |
Accès direct complet, uniquement pour les policiers municipaux compétents pour prescrire la mise en fourrière de véhicules. |
Article R. 325-12-1 du code de la route |
Déclaration d'identification de certains engins motorisés (DICEM) |
Identification des éventuels propriétaires contrevenants d'engins motorisés |
Accès direct complet, uniquement pour les policiers municipaux individuellement désignés et spécialement habilités par le maire de la commune |
Arrêté du 15 mai 2009 du ministre de l'intérieur |
Fichier des objets et des véhicules signalés (FOVES) |
Découverte et restitution de véhicules volés ainsi que d'objets perdus ou volés, surveillance des véhicules et des objets signalés |
Absence d'accès direct Les agents de la police municipale peuvent être destinataires, dans le cadre de leurs attributions légales et dans la limite du besoin d'en connaître, de tout ou partie des informations qu'il contient |
Arrêté du 7 juillet 2017 du ministre de l'intérieur |
Fichier des véhicules assurés (FVA) |
Informations relatives au contrat d'assurance de véhicules et à l'entreprise d'assurance concernée |
Absence d'accès |
Articles L. 451-1-1 et L. 451-1-2 du code des assurances |
Fichier national unique des cycles identifiés (FNUCI) |
Données d'identification d'un cycle et de son propriétaire |
Accès direct complet aux policiers municipaux et aux gardes champêtres, dans la limite de leurs attributions et aux seules fins de la lutte contre le vol, le recel et la revente de cycles |
Article R. 1271-22 du code des transports |
Fichier national du permis de chasse (FNC) |
Informations relatives au permis de chasser |
Absence d'accès |
Article D. 423-1-3 du code de l'environnement |
DOCVERIF |
Validité des documents émis par les autorités françaises et de lutter contre l'utilisation indue de tels documents, leur falsification ou leur contrefaçon |
Absence d'accès |
Arrêté du 10 août 2016 du ministre de l'intérieur |
Fichiers des personnes recherchées (FPR) |
Large gamme d'informations relatives à des motifs judiciaires (mandats, condamnations, contrôle judiciaire...), administratifs (police des étrangers, personnes disparues, menaces contre la sécurité publique ou la sûreté de l'État...) |
Absence d'accès direct Les agents de la police municipale peuvent être destinataires de tout ou partie des données à caractère personnel et informations enregistrées, dans le cadre de leurs attributions légales à l'initiative des agents des services de la police nationale ou des militaires des unités de la gendarmerie nationale, aux fins et dans les limites fixées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, dans le cadre des recherches des personnes disparues. En outre, afin de parer à un danger pour la population, les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale peuvent, à titre exceptionnel, transmettre oralement aux agents de police municipale certaines informations relatives à une personne inscrite dans le présent fichier. |
Décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées |
Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FPSRT) |
Informations relatives aux personnes engagées dans un dans un processus de radicalisation terroriste, identification du service de renseignement assurant le suivi des individus |
Absence d'accès direct Possibilité pour les préfets de communiquer des informations confidentielles dans le cas où le maire a à en connaître au regard de ses missions |
Décret du 5 mars 2015 Instruction du ministre de l'intérieur du 13 novembre 2018 |
Traitement des antécédents judiciaires (TAJ) |
Informations relatives aux personnes mises en cause au titre d'une infraction, et aux victimes d'une infraction |
Absence d'accès |
Article 230-10 du code de procédure pénale |
Source : commission des lois du Sénat
Au regard des compétences des polices municipales et des gardes champêtres, notamment en matière de sécurité routière, il apparaît justifié d'octroyer à leurs agents individuellement désignés un accès direct et complet aux fichiers pertinents, sous réserve de disposer des habilitations et autorisations requises au SIV, au SNPC. De même, l'accès au FVA devrait leur être ouvert, en particulier dans l'hypothèse où les policiers municipaux se verraient conférer la compétence de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles (AFD) pour conduite sans assurance (voir supra). S'agissant du FOVES, eu égard à la sensibilité de certaines informations qu'il contient, des conditions d'habilitation renforcées pourraient être exigées en vue d'un accès direct, qui pourrait n'être que partiel.
L'octroi de la compétence de prescription de mise en fourrière préconisé par la mission d'information (voir supra) doit avoir pour corollaire l'accès des gardes champêtres au SI « Fourrières ». En outre, leurs compétences actuelles en matière de police de la chasse109(*) justifient d'ores et déjà leur accès au FNC.
Il en va différemment du FPR et du FSPRT, qui contiennent informations relatives à la sûreté de l'État ou qui ont trait au renseignement (telles que les « fiches S »), pour lesquelles un accès direct des policiers municipaux est, pour la mission d'information, absolument inenvisageable.
Une réflexion pourrait néanmoins être engagée en vue de permettre un accès de certains policiers municipaux dûment formés et habilités au FPR, strictement limité à des informations pertinentes dans le cadre de son action (le cas échéant, selon un format dit « hit / no hit »), telles que les mineurs disparus ou encore les interdictions de séjour sur le territoire de la commune. Certains agents de police municipale auditionnés ont également exprimé, pour leur protection, un besoin d'accéder à une information, le cas échéant sous la forme d'une alerte sans plus de détails, sur la dangerosité de l'individu concerné.
De même, les informations contenues dans le TAJ ne sont, en l'état, pas nécessaires à l'exercice des missions des polices municipales. Cependant, dans l'hypothèse où, comme le préconise la mission d'information, ces derniers pourraient prononcer des AFD, un accès restreint aux informations sur l'éventuel état de récidive sur les délits concernés pourrait être nécessaire, en ce qu'un tel état rend la procédure inapplicable.
En tout état de cause, ces accès ont vocation, d'une part, à être gratuit pour les communes concernées et, d'autre part, à pouvoir être effectués sur un terminal mobile, eu égard au fait que les agents ont essentiellement vocation à les consulter sur la voie publique.
Proposition n° 15 - Étendre les accès des policiers municipaux et des gardes champêtres aux fichiers de police liés à l'exercice de leurs missions et le cas échéant selon des modalités adaptées à la sensibilité des informations qu'ils contiennent.
* 66 Articles L. 2212-2 et L. 2212-2-1 du code général des collectivités territoriales.
* 67 Article R. 15-33-29-3 du code de procédure pénale.
* 68 Articles L. 130-4 et R. 130-2 du code de la route.
* 69 Articles L. 331-20, L. 332-20, L. 415-1 ; L. 437-1, L. 541-44, L. 571-8 et L. 581-40 du code de l'environnement.
* 70 Articles L. 3515-2, L. 3136-1 et L. 3631-2 du code de la santé publique.
* 71 Article 21 du code de procédure pénale.
* 72 Article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure.
* 73 Article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure.
* 74 Articles L. 2242-1 à L. 2242-10 du code des transports.
* 75 Article 24 du code de procédure pénale
* 76 Articles L. 216-3 et L. 428-20 du code de l'environnement.
* 77 Article 73 du code de procédure pénale.
* 78 Conseil constitutionnel, décision n° 2021-817 DC du 20 mai 2021.
* 79 Loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés.
* 80 Proposition de loi n° 236 (XVIIème législature) élargissant les compétences judiciaires des polices municipales, déposée par Éric Pauget et plusieurs de ses collègues, 17 septembre 2024.
* 81 Audition du 21 mai 2025.
* 82 Article L. 3421-1 du code de la santé publique.
* 83 Article 446-1 du code pénal.
* 84 Article L. 272-4 du code de la sécurité intérieure.
* 85 Article L. 2241-5 du code des transports.
* 86 Il est également prévu que les marchandises saisies sont détruites lorsqu'il s'agit de denrées impropres à la consommation et sont remises à des organisations caritatives ou humanitaires d'intérêt général lorsqu'il s'agit de denrées périssables.
* 87 Conseil constitutionnel, décision n° 2025-878 DC du 24 avril 2025.
* 88 Article L. 2251-1-4 du code des transports.
* 89 Article R. 234-1 du code de la route.
* 90 Article L. 234-1 du code de la route.
* 91 Articles R. 130-2 et R. 130-3 du code de la route.
* 92 Article L. 234-3 du code de la route.
* 93 Article L. 235-2 du code de la route.
* 94 Article L. 234-4 du code de la route.
* 95 Article L. 235-2 du code de la route.
* 96 Articles R. 132-2 et R. 132-3 du code de la route.
* 97 Article R. 413-15 du code de la route.
* 98 Article R. 412-7 du code de la route.
* 99 Article L. 325-2 du code de la route.
* 100 Article 78-2 du code de procédure pénale.
* 101 Article 78-1 du code de procédure pénale.
* 102 Article 78-3 du code de procédure pénale.
* 103 Article 78-6 du code de procédure pénale.
* 104 Article L. 2241-2 du code des transports, visant les agents mentionnés aux 3° à 5° du I de l'article L. 2241-1 du même code.
* 105 Cette faculté existe même sans texte spécifique le prévoyant, comme le rappelle l'Inspection générale de la police nationale dans le cadre de son rapport sur les contrôles d'identité après avis du comité d'évaluation de déontologie de la police nationale 2022-2023 (pp. 9 et 10), figurant en annexe du rapport annuel de l'inspection générale de la police nationale 2023 (novembre 2024).
* 106 Articles 78-2 du code de procédure pénale, alinéa 8.
* 107 Articles 78-2 du code de procédure pénale, alinéas 1 à 7.
* 108 Conseil constitutionnel, décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011.
* 109 Article L. 428-20 du code de l'environnement.