IV. CONSOLIDER LES OUTILS DE GOUVERNANCE ET DE FINANCEMENT À L'ÉCHELLE DES BASSINS VERSANTS

 Promouvoir les regroupements à l'échelle des bassins versants et instituer un fonds de solidarité

Pour remédier aux angles morts du dispositif de financement que sont, d'une part, l'absence de mécanismes de solidarité entre les territoires d'un même bassin versant et, d'autre part, l'absence de corrélation entre potentiel fiscal et besoins des territoires, les rapporteurs recommandent d'étudier la mise en place d'un fonds de solidarité à l'échelle des bassins versants, ou à tout le moins de majorer les aides publiques destinées aux projets mutualisés portés par les établissements publics territoriaux de bassins (EPTB).

Établis à l'échelle des bassins versants, les EPTB permettent de structurer les compétences techniques, et de porter des projets à une échelle généralement pertinente.

Dans le bassin de la Loire, l'Établissement public Loire (EPL) illustre les potentialités d'un pilotage mutualisé. Cet EPTB est constitué de 60 collectivités ou groupement de collectivités : 6 Régions, 16 Départements, 18 villes et agglomérations, 10 syndicats intercommunaux départementaux. Ce modèle se heurte toutefois aujourd'hui aux limites de contributions inégalement levées en fonction du potentiel fiscal de ses membres, et plus globalement aux difficultés à établir une solidarité réelle entre les territoires de tailles et de ressources différentes

Pour que la solidarité entre l'amont et l'aval ne reste pas une incantation, l'enjeu est donc d'engager une réflexion sur une assiette de la taxe GEMAPI à l'échelle du bassin versant, plutôt que limitée au périmètre communal des EPCI-FP. Un fonds de solidarité pour la GEMAPI serait institué à l'échelle des bassins, dont les financements seraient attribués selon des critères objectivés (potentiel fiscal, linéaire de digues, montant inscrit au PAPI, exposition au risque). À l'échelle du bassin la gestion du fonds pourrait être confiée aux agences de l'eau et, lorsqu'ils sont constitués, aux EPTB.

 Pérenniser et élargir la possibilité, pour les EPTB, de lever une contribution fiscalisée à l'échelle du bassin

À ce jour, aucun EPTB ne s'est saisi de l'expérimentation ouverte par l'article 34 de la loi « 3 DS », permettant de lever le produit de contributions fiscalisées à l'échelle du bassin, car cette possibilité était limitée à un seul item7(*) de la GEMAPI et s'accompagnait d'une certaine complexité, puisqu'elle devait être reconduite chaque année par l'ensemble des EPCI membres. Les rapporteurs proposent de permettre aux EPTB de lever ce produit au titre de l'ensemble des items de la GEMAPI et de conférer une portée pluriannuelle à la décision votée par les EPCI.

 Renforcer le soutien à l'ingénierie en matière de GEMAPI

L'exercice de la compétence GEMAPI implique une forte technicité (hydrologie, génie écologique, gestion des ouvrages), dépassant souvent les capacités internes des collectivités dans les zones rurales, de montagne ou périurbaines.

Cette réalité renforce le besoin d'un appui durable de la part des opérateurs publics, parmi lesquels le Cerema, qui soutient les collectivités dans la mise en oeuvre opérationnelle de la compétence GEMAPI (actions d'expertise technique, de capitalisation de bonnes pratiques, de formation et de sensibilisation). Dans la lignée de la mission conjointe de contrôle relative aux inondations survenues en 2023 et au début de l'année 2024, les rapporteurs formulent ainsi une série de recommandations visant à renforcer les moyens d'accompagnement des collectivités via des partenariats avec le Cerema.

 Mieux retracer et identifier les flux financiers associés à la compétence GEMAPI, et rétablir la cohérence entre la surprime « CatNat » et le montant du « fonds Barnier » :

Afin de distinguer clairement les dépenses liées à la GEMAPI de celles relatives à d'autres politiques de l'eau (ruissellement, assainissement, etc.), d'établir un diagnostic aussi précis que possible des moyens nécessaires et d'assurer la transparence des affectations budgétaires, la mission propose de rétablir l'usage du budget annexe GEMAPI, à l'article 1530 bis du CGI.

Par ailleurs, toujours dans un souci de transparence et de cohérence, le montant inscrit au titre du programme « Prévention des risques » devrait correspondre, chaque année en loi de finances, au produit effectivement perçu au titre de la taxe sur les contrats d'assurance8(*).

 Explorer de nouvelles sources de financement

Au-delà de la taxe GEMAPI, la mission propose d'étudier la pertinence d'autres leviers de financement liés à la consommation d'eau et à l'urbanisation :

· une contribution des usagers de l'eau, via une fraction (de quelques centimes d'euros) prélevée sur le m d'eau distribué et affectée aux actions de prévention à l'échelle du bassin ;

· l'affectation d'une part de la taxe d'aménagement à la GEMAPI, pour tenir compte de l'impact de l'urbanisation sur l'imperméabilisation des sols et le ruissellement.


* 7 À savoir l'item 5, relatif à la « défense contre les inondations ».

* 8 Cette recommandation s'inscrit dans la lignée de la proposition du rapport d'information n° 603 (2023-2024) sur le « régime d'indemnisation des catastrophes naturelles », déposé le 15 mai 2024 par Christine Lavarde.

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