AVANT-PROPOS
La création, par la loi dite MAPTAM9(*), d'une compétence relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations (GEMAPI) devait marquer « une nouvelle étape dans la gouvernance de l'eau et des cours d'eau en France »10(*). Onze ans après, pourtant, les modalités d'exercice de la compétence suscitent les incompréhensions et les inquiétudes des élus locaux confrontés à des impasses techniques, financières et réglementaires.
Tel est le constat qui s'est imposé aux yeux de vos rapporteurs à l'issue des 35 auditions qu'ils ont conduites et des déplacements qu'ils ont effectués dans quatre départements, à la rencontre des acteurs de la GEMAPI. L'analyse et les propositions du présent rapport se nourrissent ainsi des témoignages de 120 interlocuteurs issus d'horizons variés.
Trois principaux objectifs ont guidé ces travaux, consistant à :
- évaluer les conséquences de la mise en oeuvre de la compétence GEMAPI, onze ans après sa création par la loi « MAPTAM » ;
- étudier les conditions dans lesquelles s'est opéré le transfert de la gestion des digues domaniales de l'État aux groupements de collectivités compétents (les « autorités gémapiennes ») ;
- proposer des pistes pour un cadre de refonte du financement et de la gouvernance de la compétence GEMAPI.
Le bilan de la GEMAPI - compétence obligatoire depuis le 1er janvier 2018 pour les intercommunalités - apparaît décidément « contrasté, pour ne pas dire mitigé »11(*). Ces lacunes sont d'autant plus préoccupantes que la compétence emporte des enjeux majeurs pour la sécurité des personnes et des biens : plus de 17 millions de personnes vivent dans des zones inondables, tandis que la préservation de la continuité écologique revêt un caractère urgent dans le contexte de dérèglement climatique12(*).
De fortes inégalités persistent entre les territoires d'amont - souvent exposés, mais peu dotés - et ceux d'aval - généralement plus urbanisés et plus riches. Dans les territoires particulièrement affectés par le risque inondation, l'exercice de la compétence GEMAPI fait peser de lourdes charges liées, notamment, aux travaux de réparation et de consolidation des systèmes d'endiguement. Les procédures et les normes techniques restent quant à elles lourdes et trop souvent inadaptées aux réalités territoriales.
Dans ce contexte, la mission formule 13 recommandations pour promouvoir un cadre de gouvernance et de financement solidaire, conciliant la proximité et la souplesse de l'action locale avec une gestion à l'échelle de territoires hydrologiques cohérents.
* 9 Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM ».
* 10 Philippe Marc, Compétence GEMAPI : maîtriser les enjeux et les risques liés aux milieux aquatiques et aux inondations, Éditions législatives, 2019.
* 11 Contribution écrite de Maître Philippe Marc à la mission.
* 12 La directive-cadre sur l'eau 2000/60/CE du 23 octobre 2000 impose aux États membres de l'Union européenne des obligations en matière de préservation des milieux aquatiques.