IV. LA MULTIPLICATION DES PLANS SOCIAUX ET DES VERSEMENTS DE DIVIDENDES GÉNÉREUX RELANCE LE DÉBAT SUR LA CONDITIONNALITÉ DES AIDES PUBLIQUES AUX GRANDES ENTREPRISES

A. LA MULTIPLICATION DES PLANS SOCIAUX ET DES PLANS DE DÉPARTS VOLONTAIRES...

Lorsqu'une entreprise employant plus de 50 salariés envisage de licencier au moins dix salariés sur une période de trente jours pour un motif économique, elle est tenue d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), plus communément appelé plan social.

Le nombre PSE augmente continûment depuis 2022 selon les chiffres communiqués par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle : il a été multiplié par deux entre 2022 et 2024.

Dans le même temps, les plans de départs volontaires, qui n'ont de volontaires que le nom et qui peuvent être mis en place indépendamment d'un PSE, connaissent un fort regain, de même que les défaillances d'entreprises (64 000 en 2024).

B. ... CHOQUE L'OPINION SURTOUT QUAND LES ENTREPRISES ONT PERÇU DES AIDES PUBLIQUES ET VERSENT SIMULTANÉMENT DES DIVIDENDES...

Le groupe Auchan a annoncé mardi 4 novembre 2024 son intention de procéder à un PSE concernant 2 384 de ses 54 000 salariés employés en France. Le groupe a bénéficié entre 2013 et 2023 de 636 millions d'euros d'aides fiscales et de 1,3 milliard d'euros d'allègements de cotisations sociales.

Le 5 novembre 2024, le groupe Michelin a annoncé la mise en place d'un PSE concernant 1 254 salariés parmi les 19 000 collaborateurs du groupe en France. Le groupe a bénéficié d'aides publiques, notamment 32,4 millions d'exonérations de cotisations sociales en 2023 et 40,4 millions d'euros de crédit d'impôt recherche (CIR) en 2024, tout en versant selon les calculs du rapporteur environ 1,4 milliard d'euros de dividendes la même année.

Le groupe ArcelorMittal a annoncé le 23 avril 2025 son intention de mettre en place un PSE qui devrait concerner près de 600 salariés parmi les 15 400 employés en France. Le groupe a versé en moyenne 200 millions d'euros de dividendes chaque année depuis dix ans au niveau mondial, alors qu'il a bénéficié en 2023 en France de 298 millions d'euros d'aides, dont 195 millions d'euros en raison du prix de l'énergie, 41 millions d'euros d'allègements de cotisations sociales et 40 millions d'euros de CIR.

Le 30 avril 2025, le fabricant de semi-conducteurs franco-italien STMicroelectronics, qui emploie 11 500 personnes en France, a annoncé un plan de départs volontaires sur trois ans concernant 1 000 postes, alors que l'entreprise a bénéficié en 2023 de 487 millions d'euros d'aides (dont 334 millions d'euros de subventions, 119 millions d'euros de crédit d'impôt recherche et 34 millions d'euros de remboursements ou allègements de cotisations). En 2023, la société a versé 212 millions d'euros de dividendes.

Le même jour, le groupe LVMH a fait part de son intention de supprimer 1 200 postes, en ne remplaçant pas les départs à la retraite notamment, dans sa filiale Moët Hennessy qui regroupe ses activités vins et spiritueux, soit plus de 12 % de ses effectifs. En 2023, les aides publiques versées à ce groupe ont atteint 275 millions d'euros, tandis que 20 % de la valeur ajoutée du groupe en 2024 (37 milliards d'euros) ont été affectés aux dividendes en 2024.

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