B. LE COÛT DE CERTAINES PRESTATIONS EST SOUMIS À DES TARIFS RÉGLEMENTÉS
De nombreuses prestations demandées à des professionnels par l'autorité judiciaire présentent un caractère suffisamment standardisé pour permettre d'en fixer un tarif, déterminé par arrêté5(*).
La tarification présente plusieurs avantages : les coûts sont connus a priori et sont prévisibles pour autant que le nombre d'actes puisse être estimé à l'avance ; ils sont harmonisés entre les juridictions et ils empêchent les prestataires de facturer des montants excessifs. Enfin, la tarification permet une mise en paiement plus rapide.
Pour autant, toutes les prestations ne peuvent pas être soumises à un tarif réglementaire : selon la direction des services judiciaires (DSJ), les trois quarts du montant total des frais de justice relèveraient de prestations tarifées.
Pour les prestations non tarifées, il est demandé aux magistrats d'établir au moins deux à trois devis, mais les besoins de l'enquête peuvent pousser à choisir le prestataire qui est en mesure de réaliser le plus rapidement la prestation, ou celui dont la qualité est reconnue.
Exemples de prestations tarifées et non tarifées
Prestations tarifées |
interprétariat-traduction actes de médecine légale actes de psychiatrie et de psychologie légale diverses analyses toxicologiques gardiennage mesures judiciaires : DPR6(*), contrôle judiciaire, enquête sociale rapide, enquête de personnalité |
Prestations non tarifées |
conservation et transport de corps expertise informatique expertise financière ou comptable |
Source : direction des services judiciaires
Un tarif insuffisant risque de rendre les experts plus réticents à offrir leurs services et les évolutions technologiques peuvent réduire le coût réel d'une prestation : les tarifs doivent alors être adaptés à l'évolution des coûts. À l'inverse, les progrès des technologies peuvent réduire le coût réel d'une prestation pour le professionnel.
Or la modification d'un tarif nécessite la prise d'un arrêté ministériel et de nombreux tarifs ne prennent en compte l'évolution des coûts, y compris les effets de l'inflation, que par à-coups. À cet égard, si l'existence d'un tarif réglementé protège le prescripteur contre la tentative d'un professionnel de facturer un montant excessif, la révision du tarif, elle, peut dépendre de l'importance et de l'efficacité des revendications des organisations professionnelles et pas uniquement de l'évolution réelle des coûts.
À titre d'exemple, le tarif d'une expertise psychiatrique réalisée par un expert ne relevant pas du statut COSP, qui était de 429 euros entre 1er juillet 2017 et le 31 août 2021, est passé à 507 euros le 1er septembre 2021, puis à 552,5 euros à compter du 1er avril 2022, soit une hausse de 28,7 % en moins de cinq ans7(*).
En revanche, le tarif de l'autopsie avant inhumation est demeuré stable sur la période (138 euros). Ce montant remonte même à 1979.
Une étude relative à un centre hospitalo-universitaire8(*) a montré en 2011 que, en incluant l'examen interne (33 euros) et la radioscopie (33,40 euros), le tarif total versé au titre des frais de justice était de 204,40 euros9(*). Or la même étude estimait entre 426 et 470 euros, voire 1 000 euros dans certains cas, le coût réel moyen de l'autopsie dans un centre hospitalier universitaire, compte tenu du temps passé et du matériel utilisé. Sur une année, l'activité d'autopsie et de levée de corps était, dans cet établissement, déficitaire de près de 126 613 euros, pour des dépenses totales de 256 863 euros. Il convient toutefois de noter que, depuis 2011, les autopsies médico-légales sont financées sur dotation budgétaire lorsqu'une juridiction est rattachée à une structure hospitalière dédiée à la médecine légale ; elles restent toutefois payées à l'acte au tarif des frais de justice dans le cas contraire10(*).
* 5 La plupart des tarifs de prestations liées aux frais de justice sont inscrits aux articles A. 43-4 et suivants du code de procédure pénale.
* 6 Les délégués du procureur de la République (DPR) sont des citoyens ou des associations habilités par le procureur de la République pour participer à la mise en oeuvre de la politique pénale, à la demande et sous le contrôle du procureur (site du ministère de la justice, Le délégué du procureur de la République).
* 7 Ministère de la justice, Frais de justice : les tarifs applicables pour les médecins et psychologues, mis à jour le 27 mars 2025.
* 8 L. Benali, F. Abriat, C. Chevalier, S. Gromb, Coût des opérations thanatologiques au centre hospitalo-universitaire de Bordeaux, La revue de médecine légale (2011) 2, p. 125-131.
* 9 Tarif pour un cadavre frais (321,45 euros pour un corps en état de décomposition avancée).
* 10 Circulaire du 28 décembre 2010 relative à la mise en oeuvre de la réforme de la médecine légale.