B. DES DIVERGENCES D'APPRÉCIATION SUR LES MARGES DE MANOEUVRE FINANCIÈRES DES UNIVERSITÉS

1. Les déterminants d'un diagnostic non partagé

La dégradation de la situation financière des universités ne fait pas l'objet d'un diagnostic entièrement partagé entre les universités et l'État. Cette divergence résulte en partie de la faible lisibilité de l'état des lieux disponible, dont les données sont partiellement hétérogènes, tandis que la comptabilité des établissements demeure insuffisamment fiable et analytique. Les indicateurs comptables retenus par l'État pour apprécier la soutenabilité financière des établissements sont en outre contestés par ces derniers.

Elle est également à mettre en lien avec la défiance marquée et réciproque qui s'est installée entre les acteurs du triptyque constitué par les établissements, la Dgesip et la direction du budget du ministère de l'économie et des finances. Les rapporteurs ont pu le mesurer au cours de leurs auditions, ainsi qu'au travers des réponses écrites de la Dgesip, formulées en termes inhabituellement sévères mettant en cause la « posture » de certains présidents d'université.

2. Une indubitable fragilisation financière

Sous l'effet de la hausse de leurs coûts de fonctionnement, de la progression limitée de leurs recettes et de l'accroissement de leur besoin d'investissement, la situation financière des universités, en dégradation marquée depuis 2021, est indubitablement préoccupante. Si leurs situations individuelles sont très diverses, le résultat consolidé des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) est devenu déficitaire en 2024, tandis que leur capacité d'autofinancement (CAF) s'est réduite des deux tiers depuis 2021. La dynamique d'évolution très négative de ces indicateurs ne peut aboutir qu'à une érosion de l'autonomie des universités.

3. Le débat mal posé de la trésorerie « fléchée »

Le débat budgétaire tend à se focaliser sur le montant très élevé de la trésorerie agrégée des établissements, qui fonde l'appréciation portée sur leur capacité à absorber les mesures d'économies inscrites en lois de finances ainsi que le passage à un régime de gestion dynamique. Les établissements relèvent quant à eux la faiblesse de son montant « libre d'emploi ».

Relevant que la hausse de cet indicateur résulte du cycle d'encaissement des issues des appels à projets et non d'un excès d'épargne, les rapporteurs relèvent que la notion de trésorerie « fléchée », dont aucune évaluation fiable n'est aujourd'hui disponible, ne constitue pas un outil de gestion pertinent. L'affectation juridique de fonds à un usage prédéterminé ne signifie pas, en effet, l'impossibilité pour les établissements de disposer de la trésorerie correspondante, sauf à rigidifier à l'excès la gestion budgétaire.

Pour autant, les conditions du passage à un régime de gestion dynamique n'apparaissent pas réunies. Alors que cette évolution impliquerait une réduction des marges de sécurité financières des établissements, les modalités actuelles de l'allocation budgétaire par l'État, qui présente un caractère erratique et n'assure pas une articulation fine entre les situations agrégée et individuelle, conjuguées aux insuffisances du pilotage assuré par les établissements, feraient courir un risque important de compromettre gravement la soutenabilité financière des universités au profit d'un gain budgétaire de court terme.

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