10.4 La Commission, promotrice des projets de corridors de fret

Depuis quelques mois, les corridors internationaux de fret appelés « freight freeways » ou « freightways » sont à l'ordre du jour des transports européens car ils constituent une étape pour poursuivre la politique de libéralisation du transport ferroviaire. L'objectif poursuivi par le Commissaire européen des transports est de faciliter l'accès d'opérateurs autorisés aux différents réseaux ferroviaires et d'accélérer les franchissements de frontières à la fois sur les plans administratif et technique (voir une description plus précise dans le chapitre 6 de la première partie sur l'importance de la desserte des hinterlands).

Le premier schéma avancé par la Commission, qui pourrait être opérationnel dès 1998, concerne directement le secteur portuaire puisqu'il présente des itinéraires reliant trois grands ports de l'Europe du Nord, Rotterdam, Hambourg et Bremerhaven à ceux de l'Italie du Sud en traversant l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse. Cette présentation a soulevé une certaine émotion à la fois dans le milieu portuaire français, car on se rendait compte que les ports français étaient laissés à l'écart et dans le monde ferroviaire, en raison de l'engagement implicite que ce schéma implique d'aller au-delà de la fameuse directive 91-440 fixant des mesures de libéralisation du secteur ferroviaire européen.

La position française est très inconfortable car on ne peut à la fois vouloir freiner sur l'ouverture à la concurrence et empêcher nos voisins européens d'aller de l'avant. Néanmoins, la SNCF, qui est tenue par ailleurs d'équilibrer rapidement son compte d'activité de fret, ne peut se désintéresser de ces liaisons nord-sud correspondant aux flux dominants susceptibles d'améliorer ses bénéfices. Sera créée, dès 1998, sur un principe de coopération avec les réseaux belges et luxembourgeois, une liaison entre Muizen près d'Anvers, Vénissieux et le sud de l'Italie 77 ( * ) . La Commission européenne aurait préféré la constitution de « couloirs de circulation libre » ouverts à tous les opérateurs. Mais les monopoles nationaux ont opté pour une formule moins ouverte que celle de l'autre projet entre les Pays-Bas, l'Allemagne, l'Autriche et l'Italie, qui s'inscrit davantage dans la doctrine européenne de libre accès. La logique défavorable à la façade Atlantique des axes nord-sud perdure donc.

Cependant, à l'instigation des ports français, soutenus par la direction des transports terrestres, des liaisons de fret est-ouest sont demandées. Pour le moment, la SNCF envisage de créer une liaison Le Havre-Metz-Strasbourg, destinée plus tard à être prolongée vers l'Europe centrale, sachant que jusqu'à présent les pays étrangers concernés ne sont pas demandeurs de tels corridors est-ouest. Cet objectif de promouvoir les axes est-ouest relève d'un fort volontarisme dans la mesure où le marché dominant est orienté différemment ; il nécessiterait un effort financier substantiel pour contrebalancer ce handicap.

Enfin, un autre projet de corridor est-ouest est envisagé entre l'Angleterre, Dunkerque et le sud-est de l'Europe, destiné principalement à améliorer la situation d'Eurotunnel. On rappelle également la proposition du port de Marseille d'établir un corridor Marseille-Le Havre via Lyon et Paris.

* 77 Accord du 26 novembre 1997 entre les chemins de fer français, luxembourgeois, belges et italiens.

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