b) Des évolutions jugées nécessaires par la mission d'information

La réforme du régime d'indemnisation des calamités agricoles est depuis longtemps souhaité. Pour les uns, ce ne sont pas les principes sur lesquels repose la loi du 10 juillet 1964 qui sont en cause mais plutôt la mauvaise application qui en a été faite, dans un contexte de désengagement financier de l'Etat. Pour d'autres, le système de protection, dans son ensemble, ne répond plus aux besoins de l'agriculture.

En France, deux évolutions peuvent légitimer la demande d'une réforme du dispositif français de protection . La première tient à l'agriculture elle-même qui, en se modernisant, semble avoir besoin de dispositifs financiers et juridiques nouveaux. La seconde évolution concerne l'adaptation qui doit être la sienne en période de restrictions budgétaires. C'est ainsi que le financement du Fonds des calamités se trouvent placé sous le signe de la précarité, l'Etat accumulant un retard de plus de 850 millions de francs.

Le contexte international et, notamment, le mouvement de libéralisation des marchés, qui implique un plus grand découplage nécessite la mise en place d'un véritable mécanisme de prévoyance pour les agriculteurs. Par ailleurs, la réforme de la PAC proposée par la Commission Européenne renforce le besoin d'un dispositif nouveau (national et/ou communautaire) de protection contre, au minimum, les risques naturels. Dans cette optique, le recours à l'assurance se trouve incontestablement favorisé par le discours actuel, qui tend à responsabiliser davantage l'exploitant.

Les dispositions de l'article 92 du Traité de l'Union permettent aux Etats membres de l'Union Européenne de mettre en place des régimes publics favorisant la protection des exploitants contre une baisse des revenus provoquée par les dommages climatiques. Certains pays, l'Espagne bien sûr, mais aussi le Portugal, l'Autriche ou l'Italie, sont à la recherche de solutions. Ces dispositifs pourront certainement permettre aux exploitants de ces pays, pour peu qu'ils soient assurés bien entendu, de mieux faire face à la baisse des soutiens Européens.

Ce constat devrait, comme l'indique l'APCA, convaincre les professionnels français de l'urgence qu'il y a à mettre au point un dispositif de protection adapté à cet environnement économique et politique nouveau.

Les instances communautaires ne se sont que rarement prononcées officiellement sur le sujet. L'action de l'Union en vue de faire face aux dommages causés à la production et à l'investissement par des calamités naturelles, ou d'autres circonstances exceptionnelles, s'est principalement exercée sous forme de contrôle des aides accordées au niveau national.

Si l'initiative en la matière appartient aux Etats membres, une participation plus active des instances communautaires n'est pas exclue. C'est ce qui ressort de l'avis relatif au régime communautaire d'assurances agricoles du Comité économique et social en date du 23 septembre 1992 et des conclusions de la réunion des ministres de l'agriculture qui s'est tenue à Burgos en septembre 1995.

Au niveau français, de très nombreuses instances dont le Sénat se sont prononcées pour une refonte de la loi de 1964.

Les compagnies d'assurance se sont en outre déclarées à de nombreuses reprises favorables à la mise en place de l'assurance " récoltés ".

En 1995, 1996 et 1997, Groupama a conduit une étude de terrain dont le but était de mettre au point une méthode d'expertise adaptée à chaque type de culture et à chaque aléa climatique.

Cette étude s'inscrit dans le cadre d'une réflexion d'ensemble, puisqu'elle porte tout à la fois sur la connaissance des expériences étrangères et sur ce que pourrait être l'organisation d'un régime de protection rénové. Mais elle touche aussi à ce qui intéresse plus particulièrement un assureur, à savoir l'expertise des dommages.

En la matière, tout est à découvrir et à définir. C'est pourquoi Groupama a décidé de tester, pendant trois ans et sur quelques 220 exploitations volontaires, des méthodes d'expertise d'assurance des dommages climatiques aux récoltes.

Groupama insiste sur le fait que ce sont les connaissances acquises en matière d'expérimentation qui ont le plus d'importance. La compagnie estime qu'il lui sera bientôt possible de proposer aux exploitants spécialisés dans les grandes cultures des formules d'assurance " récoltes " à caractère multirisques.

Par ailleurs, le Crédit agricole a mené plusieurs études sur ces outils de réduction des aléas en agriculture. Selon les informations obtenues par le Président et les rapporteurs de la mission, le Crédit agricole sera largement partie prenante si un tel système se mettant effectivement en place au cours des prochaines années.

La mission d'information estime qu'un rééquilibrage du système de protection français paraît de plus en plus nécessaire, et ce même malgré le bon fonctionnement du régime des calamités agricoles.

Certes, la France dispose, en effet, d'une panoplie d'instruments qui rappellent les dispositifs étrangers :

- son assurance " grêle " est une assurance " récoltes " mais limitée à un risque particulier ;

- son régime des catastrophes naturelles rassemble, sur le plan organisationnel, en particulier pour tout ce qui touche aux relations entre Pouvoirs publics et assurances, aux régimes d'assurance " récoltes " canadien et américain ;

- l'option " capital à l'hectare " mise au point par Groupama Ile-de-France, dans le cadre de son contrat forfaitaire Assurit, est un dispositif qui va au-delà des garanties de rendement habituelles en matière d'assurance " grêle " ;

- le principe de la déduction pour investissement (DPI) est très proche de celui du Compte de stabilisation du revenu net (CSRN) canadien ;

- l'étude " terrain " de Groupama correspond tout à fait à la logique espagnole d'étude des phénomènes naturels sur le terrain avant tout lancement d'une nouvelle garantie.

Seulement, ces initiatives dispersées ne constituent pas une politique. Bien au contraire, il s'agit d'initiatives dispersées. Par ailleurs, la multiplication du nombre des produits proposés risque d'entraîner une certaine confusion.

L'agriculture doit éviter deux écueils : ignorer les expériences étrangers et les copier.


Ainsi, il convient en la matière de mettre en place rapidement des expérimentations et d'instaurer une coopération entre personnes publiques et personnes privées.

La mission d'information souhaite que :

- la mise en oeuvre d'une garantie partielle des recettes fasse l'objet d'un véritable débat dans le cadre de la réforme de la PAC, celle-ci pouvant participer au financement de ce dispositif ;

- la réforme de la loi de 1964 fasse partie intégrante du projet de loi d'orientation agricole.

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