M. JEAN-MARIE DELARUE, DIRECTEUR DES LIBERTÉS PUBLIQUES ET DES AFFAIRES JURIDIQUES AU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR, JEUDI 7 MAI 1998

M. LE PRÉSIDENT.- Nous devons vous entendre sous la foi du serment.

( M. le Président donne lecture des dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 ; M. Jean-Marie Delarue prête serment ) .

M. LE RAPPORTEUR.- Une série de questions relatives aux demandes de régularisation.

Pouvez-vous nous indiquer combien de préfectures avaient terminé l'instruction des demandes le 30 avril ?

Quelles sont les préfectures qui n'ont pas achevé cette instruction ? Combien de dossiers sont en instance au 30 avril ?

À quelle date tous les dossiers seront terminés et toutes les décisions notifiées ?

Quel est le chiffre définitif du nombre des demandeurs ?

Avez-vous évalué le pourcentage des demandeurs qui seront régularisés ?

Quels sont les principales catégories bénéficiaires ?

M. LE PRÉSIDENT.- Comme vous le voyez, c'est une séance de synthèse. Je pense que les chiffres que vous nous donnerez seront ceux sur lesquels le rapport sera calé.

M . DELARUE.- Je vais en partie vous décevoir car je n'ai pas les chiffres définitifs au 30 avril. Je voudrais reprendre la notion de « terminer » cette opération. Qu'est-ce que cela veut dire ?

Pour moi, cela comporte plusieurs étapes. D'abord terminer dans les préfectures le premier examen de ces dossiers de demandes. Mais restent derrière, inévitablement et normalement, les recours gracieux, hiérarchiques et contentieux. Je ne voudrais pas tromper la Commission.

M. LE RAPPORTEUR.- Veuillez m'excuser de vous interrompre, mais en quatrième question j'ai un chapitre concernant les recours, c'est pourquoi je vous demanderai de donner une réponse à la question précise : combien de préfectures avaient terminé l'instruction des demandes au 30 avril ? Les recours font l'objet d'un autre chapitre.

M. DELARUE.- Permettez-moi de dire que cette opération de régularisation s'étalera nécessairement, à mon sens, sur plusieurs années, compte tenu des recours contentieux. C'est pourquoi j'indiquais que la notion de « terminer » ne peut s'entendre que...

M. LE RAPPORTEUR.- Instruction terminée.

M. DELARUE.- ... par la première décision des préfectures au vu d'un premier examen.

M. LE RAPPORTEUR.- C'est la question précise.

M. DELARUE.- Encore une fois, nous sommes le 7 mai et je n'ai pas le chiffre au 30 avril. Je ne peux que délivrer des estimations. Le Ministre sera en état, la semaine prochaine, de donner les chiffres définitifs.

Le nombre de demandes a progressé au long des mois, puis il a diminué. Les préfectures ont découvert à l'examen des dossiers qu'il y avait des doubles emplois, que certaines personnes ont demandé simultanément la régularisation dans plusieurs préfectures et que d'autres ont déposé deux dossiers dans une même préfecture.

Le nombre de demandes a atteint un maximum de 179 000 et le nombre net doit être de 145 000, sous réserve de faire le comptage définitif.

Quelles sont les préfectures qui ont terminé et celles qui n'ont pas terminé ? À priori, je dirais que deux tiers ont terminé et un tiers n'a pas terminé, mais ce tiers dans les proportions très variables. Beaucoup ont traité 90 à 95 % des dossiers et d'autres en ont traité 80 %. Tout dépend du volume des dossiers que chacune d'entre elles avait reçu. La situation peut varier d'une préfecture à autre.

Les préfectures qui n'ont pas terminé sont celles de quinze ou seize départements où la demande était la plus forte. Ce sont les préfectures du Val-de-Marne, des Bouches-du-Rhône, de la Seine-Saint-Denis, des Hauts-de-Seine, du Val-d'Oise, de Paris, du Nord et du Pas-de-Calais.

En revanche, la plupart des départements ruraux ou ceux où les étrangers sont très peu nombreux (cela se confond parfois) ont terminé.

Quels sont les dossiers en instance ?

Sous réserve de chiffres définitifs, à mon sens, il ne doit pas rester, au maximum, plus d'un quart de dossiers en instance, calculés sur le chiffre de demandes, C'est-à-dire environ 146 000. Sur ce chiffre de demandes nettes, il ne reste pas plus, en l'état actuel de mes informations, d'un quart de demandes encore en instance.

Quel est le pourcentage des régularisations ? Les chiffres varient entre 45 et 50 %.

M. LE RAPPORTEUR.- Et les principales catégories de bénéficiaires ?

M. DELARUE .- Cela n'a pas varié depuis le début. Ce sont les premières catégories définies par les circulaires, c'est-à-dire essentiellement familiales ou conjoints de français. Les catégories les moins régularisées sont les célibataires sans charge de famille.

M. LE PRÉSIDENT .- Je suis un peu surpris de ce quart de dossiers qui reste encore à régulariser. Nous tournions déjà autour de ce pourcentage il y a un mois. Ce sont les plus difficiles, ou avez-vous une explication ? Apparemment cela n'avance plus.

M. DELARUE .- Cela avance encore un peu. Ce sont des dossiers complexes en ce sens que leur instruction est difficile du fait des demandeurs. Ce sont des demandeurs que nous ne pouvons pas retrouver, dont les enveloppes de convocation sont renvoyées avec l'avis : « n'habite pas à l'adresse indiquée » ou ce sont des personnes qui n'ont pas fourni les papiers qu'on leur demandait. Leur dossier s'en trouve retardé.

Dans d'autres préfectures et celles que vous connaissez bien, et pour ne pas les dissimuler : les Bouches-du-Rhône, la Préfecture de police et Bobigny, c'est simplement l'importance du volume des affaires qui fait que nous sommes retardés.

M. LE PRÉSIDENT .- Vous allez arriver à un pourcentage incompressible. Qu'allez-vous en faire ? Les classer ?

M. DELARUE .- Non. Nous avons donné des instructions précises aux préfets. Dans le cas où une enveloppe reviendrait avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée », nous leur demandons de faire quelques recherches s'ils en ont la possibilité et d'effectuer une deuxième relance. Si après l'étranger ne s'est toujours pas manifesté, nous demandons que le dossier soit classé.

M. LE PRÉSIDENT .- Vous allez éviter qu'on traîne une queue de régularisations pendant des semestres.

M. DELARUE .- Oui. Nous nous sommes fixés plusieurs conditions pour éviter qu'un déménagement reste hors d'atteinte du fait de circonstances extérieures, mais nous considérons qu'au bout de deux relances, le préfet ne peut pas faire l'impossible.

M. LE RAPPORTEUR.- Deuxième série de questions concernant les moyens mis en oeuvre pour réaliser cette opération de régularisation.

Pouvez-vous nous indiquer le montant définitif des moyens budgétaires dégagés pour l'opération ?

Quel est le nombre total des personnels supplémentaires affectés à ces régularisations, c'est-à-dire les agents de l'OMI, les vacataires et fonctionnaires titulaires ?

Quelle utilisation ferez-vous des équipements supplémentaires mis en place pour l'opération après la fin de celle-ci ?

Les régularisations et leurs suites prévisibles (traitement des recours, accroissement des titres à renouveler) n'auront-elles pas trop perturbé le fonctionnement normal des services des étrangers ?

M. LE PRÉSIDENT.- Si vous avez des documents écrits, pourriez-vous nous les envoyer ?

M. DELARUE.- Je n'ai pas de chiffres précis pour la même raison que précédemment, mais je vous enverrai ces chiffres.

Quant au montant définitif des moyens budgétaires, je ne suis pas en état de vous le donner pour les raisons indiquées par vous-même antérieurement. L'opération n'étant pas tout à fait terminée, je ne peux pas vous dire quels seront les moyens budgétaires consacrés à cette opération.

Ce sont essentiellement des moyens en personnel et ils ont consisté à embaucher un certain nombre de vacataires dans les préfectures qui nous le demandaient. Pour vous donner un ordre de grandeur, c'est de l'ordre de la douzaine de millions de francs, à la fois en rémunérations pour des vacataires et en indemnités données l'année dernière au personnel titulaire.

Toutefois, certaines préfectures ont encore besoin de vacataires dans un délai qui n'est pas déterminé. Par exemple, une préfecture de la Petite Couronne souhaite que le personnel de l'OMI - il y a douze personnes dans cette préfecture - reste jusqu'à l'automne et peut-être même jusqu'à la fin de l'année. Par conséquent, je ne peux répondre précisément à votre question. Même chose pour les vacataires, je crois que monsieur NUTTE vous a indiqué le nombre de personnes qu'il avait engagé pour ces circonstances. Ce personnel est en train d'être réduit au fur et à mesure de l'achèvement de la première opération, mais il en demeure encore dans les préfectures les plus importantes. Je ne sais donc pas à quelle date précise ils quitteront leurs fonctions.

S'agissant des titulaires, je ne peux pas vous dire combien sont affectés à la fonction. Leur nombre est très variable selon les préfectures et les modalités de travail arrêtées par elles. Dans certains services on a pris des personnes affectées à temps plein à cette opération. Dans les préfectures que je voyais encore en début de semaine, les personnes étaient à temps partiel pour l'opération de régularisation et sur le travail normal de leur service.

Je ne suis pas en état de vous donner un découpage aussi fin, mais je peux vous donner une approximation.

M. LE PRÉSIDENT.- Il nous le faudrait assez tôt pour boucler le rapport.

M. DELARUE.- D'accord, mais pour les titulaires ce sera certainement un chiffre approché.

Pour les équipements, il n'y a eu pratiquement aucun équipement supplémentaire. Les fichiers informatiques que certaines préfectures ont constitués l'ont été avec les moyens dont elles disposaient et rien de plus.

À ma connaissance, il n'y a pas d'équipements supplémentaires. Ceux qui auraient été financés, par la Préfecture de police, par exemple, restent entre ses mains, elle en fera l'usage qu'elle souhaite.

Pour répondre à votre dernière question, ce travail a perturbé le fonctionnement normal. Il est très clair que le renouvellement de cartes de séjour est quelquefois un peu long dans les préfectures. Les étrangers s'en plaignent d'ailleurs et c'est une de nos difficultés.

Quant à la suite prévisible, nous pensons que, bien entendu, il y aura une lourde charge pour les renouvellements de cartes de séjour, puisque les premières cartes renouvelées vont arriver dès l'été prochain, alors que l'opération, dans les plus grosses préfectures, ne sera pas achevée en ce qui concerne la partie recours. Ce sera peut-être un peu difficile. S'il le faut, nous dégagerons quelques moyens, des vacataires supplémentaires.

M. LE RAPPORTEUR.- Le traitement des difficultés rencontrées :

Pouvez-vous nous exprimer, de manière succincte, les principales difficultés qui vous ont été communiquées par M. Galabert, par les préfectures et les associations ?

Quelle suite leur a été donnée ?

Quelles sont les principales conclusions des missions de l'inspection générale de l'administration sur l'opération de régularisation ?

M. DELARUE .- Les difficultés sont de toutes natures, elles sont assez convergentes de la part de M. Galabert, des préfectures et des associations.

On peut synthétiser la situation comme suit : ce dont se plaignent, s'inquiètent les uns et les autres, c'est de l'éventuelle différence de traitement d'une préfecture à une autre. Certains estiment que quelques préfectures sont laxistes et d'autres beaucoup trop rigides. Je suis très sensible à cela et je me permets de vous rappeler ce que je vous ai indiqué, c'est-à-dire deux éléments :

D'une part que l'immigration n'était pas la même dans tous les départements. Il est clair qu'entre des départements, où les personnes arrivent dans des conditions irrégulières et de façon plutôt momentanée et ceux où existe une vieille immigration laborieuse, notamment celle qui est entrée sous condition de travail dans les années 1950 et 1960, il y a d'énormes différences et les écarts s'expliquent largement de cette manière.

D'autre part, j'ai dit que nous nous étions efforcés de suivre le plus attentivement possible le déroulement des opérations dans chaque préfecture. J'avais indiqué un certain nombre de moyens que nous avions pris à cet égard.

Globalement, nous constatons qu'en dépit de ce qu'imaginent les associations en particulier, il n'y a pas beaucoup d'écarts d'une préfecture à une autre. Les personnels des préfectures accomplissent leur travail aussi consciencieusement que possible. Ce qui me paraît déterminant dans cette affaire, c'est que je ne connais pas une décision sur ces questions difficiles qui ne soit prise par au moins trois personnes successivement.

En clair : le chef de bureau fait une proposition, le directeur de la réglementation en fait une autre et le secrétaire-général à la signature. Ces trois personnes voient le dossier après la phase d'instruction et sont à même d'émettre un jugement de fond sur la portée de ce qu'elles décident. On a gommé ainsi, autant que possible, les aspérités individuelles.

Je ne suis pas sûr que nous n'ayons pas pris des moyens suffisants ni que les situations soient aussi tendues à cet égard que ne l'ont dit beaucoup de nos interlocuteurs. Le reste, à mon sens, sont des reproches qui sont hors circulaire ou qui concernent des points de détail, ou plutôt des points mineurs.

Les critiques générales : ce sont celles que chacun peut faire dans sa conscience et je laisse à chacun cette évidente liberté. D'aucuns nous reprochent de ne pas régulariser la totalité des demandes. Je crois que sur ce point il n'y a pas d'ambiguïté. Nous avons eu, de la part des associations que nous avons rencontrées, à l'initiative du cabinet du ministre de l'Intérieur il y a trois semaines, de vives récriminations sur l'évolution qui conduisait à la non régularisation de la moitié des étrangers demandeurs au bout du premier examen.

Nous avons eu des réactions très vives à cet égard, je dois vous le dire, mais il leur a été rappelé que sur ce point la circulaire ne comportait d'emblée aucune ambiguïté. Puis d'autres peuvent penser que nous en avons régularisé 50 % de trop. Mais je laisse tous ces commentaires à des personnes plus disertes que moi sur ces points.

Les secteurs plus précis de la circulaire : nous avons sûrement commis des fautes et j'en suis le premier responsable. J'ai noté par exemple, ce que j'ai trouvé fort dommageable, que dans un certain nombre de préfectures on avait mis beaucoup de temps pour régulariser les étrangers malades. Or, s'il y a bien une catégorie incontestable qui devait normalement avoir une carte rapidement afin que l'état de santé des personnes en faisant partie soit aussi sauvegardé que possible, c'était celle en état de justifier de maladie grave. Si cela a fait difficulté, c'est notamment parce qu'il a été difficile de mobiliser des médecins de santé publique dans telle ou telle DDASS.

Une autre difficulté nullement imputable à quelque fonctionnaire que ce soit, est celle qui concerne les déboutés du droit d'asile, ou les étrangers qui affirment avoir été persécutés ou qui risquaient des persécutions dans leur pays.

Pour les avoir examinés à titre personnel, puisque nous avions demandé que ces dossiers remontent au Ministère de l'Intérieur, je peux vous dire que l'appréciation est très difficile à porter. De surcroît, nous-mêmes Direction des libertés publiques, avons tellement été envahis de dossiers à cet égard que nous avons pris du retard. Je ne suis pas fier de ce qu'un certain nombre de dossiers soient restés chez moi trois à quatre mois.

M. LE PRÉSIDENT.- Pour quelles raisons ?

M. DELARUE.- Je n'ai pas les moyens de faire face à l'afflux de dossiers individuels. Les directions, comme la mienne, ne sont pas faites pour examiner des milliers de dossiers qui transitent. Je suis sûr que le Sénat, dans sa sagesse, augmentera les dotations budgétaires du ministère de l'Intérieur.

M. LE PRÉSIDENT.- Et par-dessus le marché vous avez l'Europe.

M. DELARUE.- Oui et notamment le système Dublin qui nous mobilise aussi.

Sur les autres points, je crois que l'on nous a fait un troisième grief, s'agissant des étrangers célibataires dépourvus de charge de famille, on a dit que nous avons été plutôt rigoureux, dans le sens que, par exemple, pour la durée de séjours réguliers nous n'avons pas pris en compte les autorisations provisoires de séjour données aux demandeurs d'asile.

Nous avons répondu aux associations que c'était un choix tout à fait délibéré et que pour nous ces récépissés ou autorisations provisoires ne valaient pas séjour régulier au sens où l'entendait la circulaire. Il nous a été dit aussi que le critère d'insertion qui nécessitait, pour les mêmes célibataires dépourvus de charge de famille, une présence de sept ans en France était trop rigoureux et qu'il aurait fallu l'accommoder à une sauce plus modeste. Nous avons répondu de la même manière que tout cela était inscrit noir sur blanc dans la circulaire.

Voilà pour les principales critiques. Il y en a eu bien d'autres. Je trouve que pour une opération qui met en jeu des personnes, la critique est nécessaire. Nous y avons répondu au mieux, je prends l'exemple que j'indiquais sur les médecins de santé publique. Nous nous sommes rapprochés du ministère des Affaires sociales pour qu'il soit mis un terme à ces désagréments.

Nous avons essayé de pallier les inconvénients au fur et à mesure du déroulement de l'opération. Les préfets qui avaient reçu des consignes assez strictes et nous-mêmes, nous sommes efforcés de rencontrer, au fur et à mesure de l'opération, les personnes impliquées et notamment les associations.

M. LE RAPPORTEUR.- Concernant la deuxième question, les conclusions des missions de l'inspection générale. Y a-t-il eu des missions ?

M. DELARUE.- Il y en a eu deux.

M. LE PRÉSIDENT.- Sur quelles préfectures ?

M. DELARUE.- Deux missions d'inspection ont été effectuées, en septembre et en décembre. Ces missions d'inspection sont décidées à la demande du ministre et leurs conclusions sont rendues exclusivement à lui-même. Donc je vous renvoie au ministre sur ce point.

M. LE PRÉSIDENT.- Nous le demanderons au ministre.

M. LE RAPPORTEUR.- Concernant les recours :

De combien de recours gracieux, administratifs et contentieux avez-vous eu connaissance ?

Quels sont les principaux motifs de ces recours ?

Dans quels délais les recours administratifs et gracieux seront-ils traités ?

Quelle évaluation faites-vous du nombre de recours administratifs et gracieux qui seront satisfaits ?

M. DELARUE.- Jusqu'à présent nous n'avons pas demandé aux préfectures de comptage sur les recours gracieux. Je souhaitais attendre la fin de la phase de première instruction pour réunir, dans une dizaine de jours, les quinze préfectures les plus intéressées, avec l'accord de mon cabinet, pour examiner avec elles l'ampleur, le volume et les moyens de répondre.

Sur les recours gracieux, je ferai une remarque très générale. Dans le droit commun, c'est-à-dire les refus de séjour et les arrêtés de reconduite qui sont pris en temps normal, nous avons des taux de recours à la fois gracieux, hiérarchiques et contentieux, qui sont de l'ordre de 20 %. Je pense que ce taux va être assez largement dépassé dans les mois qui viennent.

Les étrangers ont senti qu'ils avaient davantage de chance que dans le passé et certains d'entre eux sont aidés, à bon droit, par des associations pour rédiger ce type de recours, à tel point d'ailleurs que nous avons souvent des formules un peu toute faites, puisque vous m'interrogez sur les motifs.

Je peux vous parler surtout des recours hiérarchiques que nous avons au Ministère de l'Intérieur. Nous en avons actuellement entre 5 000 et 6 000, et il y en a de deux sortes : ceux qui émanent des personnes elles-mêmes, qui ont fait l'objet de décisions négatives par les préfectures, et ceux qui émanent des personnes qui soutiennent ces demandeurs.

Très généralement, les motifs sont de pur fait, c'est-à-dire que l'on nous dit : j'estime que ma situation n'a pas été examinée comme il convenait. Et on nous apporte soit les mêmes faits que ceux indiqués devant la préfecture pour dire qu'ils n'ont pas été pris en considération, que l'on n'a pas bien compris ce qu'on a voulu dire ; ou bien on nous apporte des faits nouveaux et ce sont ces dossiers qui retiennent le plus notre attention.

Dans quel délai va-t-on statuer ? Dans des délais tels qu'au bout de quatre mois si nous n'avons pas tranché, ce seront des refus implicites, nécessairement.

Nous l'avons demandé aux préfectures et nous le pratiquons nous-mêmes : nous lisons attentivement tous les recours qui nous sont adressés. Un certain nombre d'entre eux, au premier examen, se révèlent identiques en tous points à ce qui a été présenté aux préfectures déjà. À ceux-là, il y a toute chance de répondre par un refus implicite. En revanche, à ceux qui apportent des faits nouveaux, où qui sont signalés par telle ou telle personne, nous répondrons de façon expresse et de telle sorte que les personnes soient prévenues, mais avant le délai de quatre mois indiqué il y a un instant.

Quelles sont les chances de succès ? Je dois vous dire que cela dépend beaucoup des catégories. Nous avons des recours qui portent essentiellement sur la catégorie dite 1-6, c'est-à-dire les célibataires sans charge de famille. Les autres, et notamment les familles, ont reçu assez largement satisfaction. Pour ceux-là, compte tenu des critères de la circulaire, il y a assez peu de chance que ces recours soient couronnés de succès. Sans préjuger, car nous n'avons là-dessus aucun objectif d'aucune sorte, j'imagine mal que le pourcentage de succès de ces recours aille au-delà de 20 %. C'est un ordre de grandeur que je donne et je ne voudrais pas que vous preniez ce chiffre comme une indication d'objectif car ce n'est nullement dans l'état d'esprit. À priori, la très grande majorité de ces recours n'a guère de chance de succès.

Un mot sur les recours contentieux qui ne manqueront pas de s'ensuivre. Ceux-ci, sauf erreur matérielle ou méconnaissance de conventions internationales, ont très peu de chance de prospérer. La circulaire sur laquelle se sont fondés les préfectures et le ministre ne peut pas être utilement invoquée à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, puisque ce n'est pas une circulaire réglementaire.

Un recours contentieux, déposé en invoquant tel ou tel aspect de la circulaire qui aurait été méconnu, serait voué à l'échec. Les premiers jugements du tribunal administratif qui s'est prononcé sur ce point le confirment. J'en connais deux.

M. LE PRÉSIDENT.- Récents ?

M. DELARUE.- La semaine dernière.

M. LE PRÉSIDENT.- Les instructions de ces recours sont-elles faites par votre service ?

M. DELARUE.- Oui.

M. LE PRÉSIDENT.- Les 400 dossiers en instance, est-ce cela ?

M. DELARUE.- Non, ce sont les dossiers de première instruction envoyés par les préfectures pour les déboutés du droit d'asile. Les recours dont je parle, sont au nombre de 5 000 à 6 000. Si certains recours gracieux sont suivis d'un recours hiérarchique, je m'attends à avoir, d'ici à quelques mois, environ 25 000 recours hiérarchiques au ministère de l'Intérieur.

M. LE RAPPORTEUR.- Vous faites état de deux décisions du tribunal administratif. Concernent-elles la catégorie des risques vitaux ?

M. DELARUE.- Je ne me rappelle plus et je crains de dire des sottises. Mon souvenir est plutôt vague sur ce point, mais il me semble que cela ne concernait pas les risques vitaux.

M. LE RAPPORTEUR.- Pourriez-vous nous les adresser ?

M. DELARUE.- Naturellement.

M. LE RAPPORTEUR.- Maintenant le traitement des personnes à qui la régularisation a été refusée : Quel bilan peut-on faire du nouveau dispositif d'aide au retour ?

S'adressant à des personnes venant d'effectuer des démarches pour être autorisées à séjourner, le faible impact de cette aide n'était-il pas prévisible ?

M. DELARUE.- Je serais plus nuancé que vous sur cette affaire de l'aide au retour, on peut en dire ce que l'on veut, on peut penser que l'on aurait pu aller plus loin, mais elle est là.

J'indique que c'est un peu en corollaire avec ce que nous venons de dire. Pour avoir entendu cela de la part de plusieurs personnes, et c'est aussi un peu mon sentiment, je dirais que pour les étrangers qui ne sont pas régularisés, il n'y a pas aujourd'hui de décision franche que tout est fini et qu'il faut partir car il existe précisément les recours dont nous parlions il y a un instant.

Quand les personnes auront fait le choix de partir, et un certain nombre d'entre elles feront ce choix, le dispositif d'aide au retour montera assez vite en puissance.

Je pense que l'on ne peut pas apprécier le dispositif de l'aide au retour en trois ou quatre mois, il prendra son véritable poids seulement vers la fin de l'année, quand une première vague de recours sera passée et que les personnes seront très concrètement confrontées à la nécessité d'avoir à choisir entre l'irrégularité ou le départ. Je ne suis pas très inquiet sur ce point.

Je sais que c'est une question difficile, peut-être n'avons-nous pas assez fait connaître le dispositif, mais je suis surtout persuadé que les personnes hésitent encore, de bonne foi. Elles ont à peser un certain nombre d'inconvénients des deux côtés et elles finiront par choisir. La maigre montée en puissance pour moi a des raisons un peu plus compliquées à évaluer que le simple fait brut de dire : au bout de trois mois il y en a 200, donc c'est mauvais.

M. LE RAPPORTEUR.- Je poursuis mes questions :

Le ministre avait donné des instructions pour que l'éloignement des étrangers dont la régularisation a été refusée ne soient pas éloignés du territoire avant le 24 avril 1998.

Depuis, d'autres instructions ont-elles été données pour la période postérieure ?

M. DELARUE.- Pas du tout. Je vous rappelle que cette date du 24 avril avait été fixée en fonction d'un délai de trois mois écoulés après la publication de la circulaire sur l'aide au retour, qui a été publiée le 24 janvier au Journal Officiel. Nous avions dit, pour des raisons d'égalité entre les demandeurs, qu'il fallait laisser le temps aux personnes d'en prendre connaissance. Nous avons donc demandé, sous réserve de cas particuliers, qu'il n'y ait pas d'arrêté de reconduite avant le 24 avril.

Je ne voudrais pas qu'il y ait confusion sur ce point : cela signifie que pour les étrangers qui entraient dans le circuit de la régularisation, en principe, aucun arrêté de reconduite n'a été pris avant le 24 avril et que depuis cette date des arrêtés de reconduite ont été pris.

Je n'en connais pas le nombre à ce stade, mais les préfets que j'ai interrogés sur ce point m'ont dit que la mécanique était relancée. Est-ce à dire qu'il n'y a pas eu du tout d'arrêtés de reconduite depuis le mois de janvier ? Pas du tout.

M. LE RAPPORTEUR.- Dans le cadre seulement de la circulaire.

M. LE PRÉSIDENT.- Donc, depuis le 25 avril les arrêtés de reconduite à la frontière, concernant ces étrangers visés par la circulaire de juin, sont possibles ?

M. DELARUE.- Certainement.

M. LE PRÉSIDENT.- Ils sont non seulement possibles mais en cours ?

Les préfets ont remis la mécanique en marche, n'est-ce pas trahir la vérité de le dire ?

M. DELARUE.- Ce n'est pas la trahir.

M. LE PRÉSIDENT.- N'y a-t-il plus d'instruction ministérielle de stopper la machine ?

M. DELARUE.- Il n'y a pas eu d'instruction ministérielle depuis celle indiquant qu'il n'y aurait pas d'arrêté de reconduite avant le 24 avril.

M. LE RAPPORTEUR.- À votre connaissance, y en a-t-il eu un M. DELARUE.- Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est qu'il y a des arrêtés de reconduite tous les jours. Exécutés ? Je l'ignore. Au niveau de la DICCILEC qui reçoit des étrangers qu'elle doit reconduire, il est difficile de faire la distinction, au seul vu d'un arrêté de reconduite, sur le point de savoir si l'étranger est dans le cadre de l'opération régularisation ou non.

M. LE PRÉSIDENT.- Vous comprenez bien la connotation de communication que représente une information comme celle-là. Il est tout à fait normal que nous posions cette question au ministre et qu'il puisse y répondre. La question qui lui sera posée est la suivante : Monsieur le Ministre, depuis le 24 avril des arrêtés de reconduite à la frontière ont-ils été pris concernant les étrangers visés par la circulaire de juin, oui ou non ? Et si oui, combien ont été exécutés ?

M. DELARUE.- Je crains qu'il ne soit pas davantage en mesure de vous répondre que moi.

M. LE PRÉSIDENT.- S'il est prévenu, je pense qu'il pourra répondre.

M. DELARUE.- Non, pour une raison matérielle très simple. Quand vous avez un arrêté de reconduite en main, il n'y a pas écrit dessus en gros « régularisation » ou pas. On ne fait pas la distinction, parmi les étrangers reconduits, entre ceux de « droit commun » et les autres.

M. LE PRÉSIDENT.- Je fais confiance au Cabinet du ministre. Je connais sa qualité et son efficacité et je suis sûr qu'il saura répondre à cette question qui n'est pas une question piège.

M. DELARUE.- Pas du tout.

M. LE RAPPORTEUR.- Comment ferez-vous concrètement pour retrouver des personnes habituées à séjourner irrégulièrement et sachant depuis plusieurs mois qu'elles ne seront pas régularisées ?

M. DELARUE.- Là aussi, nous rentrons parfaitement dans le droit commun.

Pardonnez-moi d'insister et je vais être sans doute au-delà des limites de la bienséance. S'agissant de reconduite, il n'y a pas de problème de philosophie à cet égard. Ceux qui sont en situation irrégulière, qu'ils soient issus de l'opération régularisation ou du non renouvellement de la carte de séjour, seront traités de la même manière.

Nous n'allons pas séparer les étrangers qui n'auraient pas été régularisés à la suite de l'opération de juin 1997 et les autres. Nous allons les traiter de la même façon, c'est-à-dire interpellation sur la voie publique avec les conséquences que cela entraîne. Nous avons dit déjà qu'il n'y aurait pas de recherche des étrangers à l'aide des fichiers constitués en préfecture à l'occasion des régularisations. Nous retombons dans le cadre normal de la reconduite à la frontière, telle qu'elle se pratique depuis des années, depuis que cette mesure existe.

M. LE RAPPORTEUR.- Nous avons noté qu'il n'y aurait pas de recherches à partir des dossiers de demandes qui ont été rejetées.

M. DELARUE.- À partir des fichiers des préfectures.

M. LE RAPPORTEUR.- Je poursuis les questions :

Quel coût global représente chaque année pour le budget de l'État, l'éloignement des étrangers en situation irrégulière ?

M. DELARUE.- Je ne sais pas, c'est financé par la Direction administrative de la Police nationale. C'est un budget sur lequel je n'ai aucune maîtrise et c'est une question à laquelle M. OTTAVI aurait pu vous répondre.

Mais je peux m'engager à vous fournir la donnée si elle vous intéresse.

M. LE RAPPORTEUR.- À combien avez-vous évalué le coût supplémentaire des mesures transitoires adoptées le 22 avril et concernant la reconduite par voie aérienne ?

M. LE PRÉSIDENT.- C'est-à-dire la multiplication des fonctionnaires qui doivent escorter les étrangers reconduits au Mali, on m'a parlé de sept.

M. DELARUE.- Sept pour aller au Mali, pour une personne, l'augmentation est moindre sur les autres destinations. Ce n'est pas ma tâche, mais d'autres l'ont calculé certainement et nous serons en mesure de vous le donner. Nous sommes loin de l'opération régularisation stricto sensu, n'est-ce pas ?

M. LE RAPPORTEUR.- Cela fait partie de l'éloignement.

M. DELARUE.- Encore une fois, il n'y a pas de différence dans la reconduite entre ceux qui sont issus de l'opération de régularisation et les autres, Par conséquent, nous sommes un peu loin de l'opération de régularisation elle-même.

M. LE RAPPORTEUR.- Vous pourrez nous donner le renseignement, par exemple pour un éloigné, car depuis l'adoption de la convention avec les compagnies aériennes, vous savez fort bien qu'il y a un coût supplémentaire, à mon avis très important, qui va incomber au budget.

M. DELARUE.- Bien sûr, on ne peut le nier. Je voulais vous dire, mais vous le savez, que la convention que vous évoquez, datée du 22 avril, est temporaire, pour six mois. Nous ne savons donc pas quelle sera la situation dans ce laps de temps. Il a été convenu avec Air France que nous reverrions la situation dans six mois. J'ai eu l'honneur de rencontrer les représentants d'Air France et je leur ai dit que je n'attendrai pas autant pour leur reposer la question. En conséquence, les chiffres éventuels que nous pourrions vous donner seraient encore aléatoires.

M. LE RAPPORTEUR.- Pouvez-vous nous donner le chiffre des mesures transitoires ? Par exemple pour un Malien, cela coûte tant de plus que jusqu'à présent. Quel est le coût pour un Roumain ? Ce n'est pas en dehors des prérogatives de notre Commission.

M. LE RAPPORTEUR.- Je poursuis.

Les incidents survenus récemment à Roissy vous paraissent-ils avoir un caractère ponctuel où traduisent-ils des difficultés structurelles ?

M. DELARUE.- Le commentaire est nécessairement difficile. Il suppose une appréciation de l'État de l'opinion qu'il n'est pas dans ma pratique d'avoir à faire. Par conséquent, sur ce point, les variations de l'opinion peuvent être très fortes. En tout état de cause, je constate que ce qui s'est passé ces dernières semaines à Roissy, ou même à la gare de Lyon, est le fait de personnes très peu nombreuses.

Mais je ne veux rien préjuger de la suite. En d'autres temps il y avait eu des manifestations de ce type. Ce qui s'est passé là ne me paraît ni fondamentalement nouveau ni trahir une évolution de fond de notre société. Cette réaction était prévisible compte tenu du fait que certaines personnes s'attendaient à ce que nous régularisions la totalité des demandeurs. Ce n'est pas le cas, et donc certains manifestent leur opposition.

Je ne suis pas sûr que ce soit structurel ou conjoncturel. Je suis embarrassé pour vous répondre. Mais, pour l'instant, j'observe que ces mouvements ont des conséquences assez limitées sur les mesures d'éloignement.

M. LE RAPPORTEUR.- Nous passons aux questions suivantes :

Dans quel cadre juridique s'inscrivent les mesures transitoires arrêtées le 22 avril entre Air France et le ministère de l'intérieur ?

Ces mesures sont-elles susceptibles d'être maintenues au delà de la durée prévue de six mois ?

Vous avez déjà répondu et vous dites que d'ici à six mois le ministère reconsidérerait ces accords.

M. DELARUE.- Je vous ai même dit que j'espérais bien revoir la question avant six mois.

M. LE RAPPORTEUR.- Cela fait-il partie de la convention ?

M. DELARUE.- Cela fait partie aussi de mon métier. C'est un avenant à la convention.

M. LE RAPPORTEUR.- Cela fait-il partie du texte de la convention ?

M. DELARUE.- Il s'agit d'une lettre envoyée par Air France qui confirme les termes de la séance que nous avons eue ensemble et qui s'analyse comme un avenant à la convention de 1994.

M. LE RAPPORTEUR.- Donc, c'est un avenant concrétisé par un échange de lettres. Nous vous demandons de nous les faire parvenir.

Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les incidents qui viennent de se produire à la gare de Lyon le 5 mai à l'occasion d'un éloignement groupé d'étrangers en situation irrégulière ?

Quelles associations ou groupements ont été impliqués ? Des poursuites ont-elles étaient engagées ? Des mesures ont-elles été prises pour prévenir de tels incidents ?

M. DELARUE.- Là aussi nous sommes à la limite du sujet. Sauf erreur, la personne reconduite à la Gare de Lyon, qui était un Tunisien, n'entrait pas dans le cadre de la régularisation. Nous sommes au-delà de la limite, mais je peux vous répondre tranquillement.

M. HYEST.- Comme vous ne pouvez pas faire la distinction.

M. DELARUE.- Je peux la faire en termes de calendrier.

M. LE PRÉSIDENT.- Vous venez de nous expliquer qu'il n'y avait pas de discrimination et que les procédures de reconduite se faisaient indistinctement. Nous sommes fondés à être aussi indistincts que vous l'êtes.

J'ai cru déceler une sorte d'insinuation qui nous laisserait penser que nous nous mêlons de ce de ce qui ne nous regarde pas.

M. DELARUE.- J'ai dit que j'étais sûr que, pour des raisons de calendrier, le Tunisien en cause dans l'opération de la Gare de Lyon qui a eu lieu avant hier n'était pas quelqu'un qui entrait dans la procédure de régularisation.

M. LE PRÉSIDENT.- Et ceux de Marseille, du bateau ?

M. DELARUE.- Il y a eu plusieurs incidents à Marseille. Je ne peux pas savoir. Nous sommes encore une fois à la limite, mais sur le cas de la Gare de Lyon, la Préfecture de police a recensé 200 à 300 personnes qui souhaitaient empêcher le départ du train. Certaines sont montées à bord, d'autres sont redescendues. À ma connaissance aucune organisation n'a revendiqué la présence de ces militants à la Gare de Lyon ce jour-là.

M. LE RAPPORTEUR.- Encore une autre question :

Compte tenu, d'une part, des difficultés rencontrées récemment pour l'éloignement par voie aérienne d'étrangers en situation irrégulière et, d'autre part, du nombre habituel d'étrangers éloignés chaque année, quel dispositif précis a été mis en place pour procéder à l'éloignement de plusieurs dizaines de milliers de personnes supplémentaires ?

M. DELARUE.- À l'heure actuelle, aucun. Nous avons aujourd'hui environ vingt reconduites par jour. Nous pouvons, en l'état actuel de la situation, augmenter cette cadence, la doubler et même la tripler sans difficulté.

M. LE RAPPORTEUR.- Sur les vingt, quelle est la ventilation entre voie aérienne, train ou bateau ?

M. DELARUE.- Je ne peux pas donner de chiffres. En gros, je suppose qu'il y a un quart par voie maritime et trois quarts par voie aérienne.

Le train est utilisé essentiellement pour du transit d'un endroit à un autre de la France. Nous ne reconduisons pratiquement personne y compris dans les zones européennes par train, sauf en effet à l'intérieur de l'espace Schengen.

M. LE RAPPORTEUR.- Et pour la Roumanie ?

M. DELARUE.- C'est toujours par avion.

M. LE PRÉSIDENT.- Les collègues ont-ils des questions à vous poser, même si parfois, Monsieur le Directeur, vous avez eu l'impression que nous nous égarions ?

M. DELARUE.- Absolument.

M. LE PRÉSIDENT.- Bien que nous nous soyons égarés, ce qui est tout à fait notre droit, il est intéressant que vous soyez resté.

M. DELARUE.- J'ai juré de vous dire toute la vérité. Je vous l'ai dite.

M. LE PRÉSIDENT.- Vous direz au ministre que nous comptons bien qu'il dise toute ta vérité s'agissant de la reconduite à la frontière. Nous allons lui demander si le premier acte de la nouvelle série a commencé. Y a-t-il des questions ?

M. DEBARGE.- Même observation que ce matin. Pour les irréguliers, avant que la question ne soit réglée, cela prendra beaucoup de temps.

Je reste neutre sur la prise de position, Monsieur le Directeur a le mérite de la franchise, à la limite ce serait 18 000 par an, si je comprends bien.

M. DELARUE.- Reconduites ?

M. DEBARGE.- Indistinctement.

M. LE PRÉSIDENT.- Vingt par jour, vous pouvez passer à soixante.

M. DELARUE.- En 1997, il y a eu environ 9 200 reconduites exécutées, et nous étions dans des fourchettes assez basses en effet. Je crois que même au plus fort des reconduites dans ce pays, nous n'avons pas dépassé les 12 000 reconduites exécutées.

Il y a la question de l'alimentation et la question des moyens matériels. Je crois que nous pouvons, sans difficultés majeures et sans moyens exceptionnels, arriver facilement, par hypothèse, à 15 000, vous allez me dire que nous ne reconduirons pas 60 000 personnes en 24 heures hors de ce pays.

M. LE PRÉSIDENT.- Pas en 24 heures, en un an. Ce qui est intéressant dans ces entretiens, c'est que la DICCILEC n'est pas à la limite de potentiel, et que, par ailleurs, vous n'avez prévu aucune mesure nouvelle pour faire face à la détection d'irréguliers supplémentaires.

C'est une question à laquelle également Monsieur le Ministre devra s'attendre. Je vous remercie.

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