II. DES RESULTATS CONTRASTES

Il est aisé de brocarder la PESC et ses manquements, mais l'ironie n'est pas l'attitude la plus constructive et la plus fructueuse qui puisse être adoptée en la matière. Elle s'appuie sur une lecture tronquée de la politique étrangère qui serait résumée à la survenance des crises internationales aiguës et à l'observation de leur gestion. Sur ce terrain qui monopolise, il est vrai, l'attention de l'opinion publique, l'Europe n'a pas encore fait la preuve de son efficacité. En revanche, on ne peut lui contester de réels succès dans d'autres aspects de son action extérieure : d'aucuns considèrent même que l'Union fait parfois de la PESC sans le savoir.

A. UNE INFLUENCE POLITIQUE BIEN RÉELLE, ASSOCIEE A L'ACTION ÉCONOMIQUE

La force de l'Europe réside essentiellement dans sa capacité d'intégration : elle en a fait maintes fois la preuve, par le passé, lors de l'entrée de l'ex-Allemagne de l'Est dans l'Union, ou par son soutien au processus de démocratisation en Espagne, en Grèce, au Portugal et dans les pays d'Europe centrale et orientale. C'est cette démarche qu'elle continue de promouvoir.

1. Aux frontières de l'Europe

• L'élargissement de l'Union

S'il est un exemple d'action géostratégique de politique étrangère conduite par tous les Etats membres, c'est bien celui de l'élargissement de l'Union aux pays d'Europe centrale, baltique, et orientale . Certes, cette volonté commune n'a pas emprunté les voies et moyens de la PESC pour s'exprimer et le problème tient au fait que l'Union européenne n'a pas eu le courage d'aborder les conséquences politiques et stratégiques de ses choix : seul le Président de la République, M. Jacques Chirac, a soulevé le cas particulier de Chypre lors du Conseil européen de Luxembourg... On peut déplorer que le vrai débat n'ait jamais eu lieu. Il est inexact de considérer que la liste des candidats à l'adhésion était uniquement une considération de nature technique : au-delà des indiscutables critères objectifs, l'ordre dans lequel s'effectuera l'élargissement aura des conséquences politiques considérables sur le continent.

• La politique euro-méditerranéenne

La conférence de Barcelone de novembre 1995, organisant un partenariat entre douze pays tiers méditerranéens et l'Union européenne constitue également un axe fort de sa politique extérieure. Cet accord propose un plan de développement global comportant trois volets, politique, économique et culturel. Certes, la mise en oeuvre de ce projet avance lentement et subit des blocages et des difficultés liés, essentiellement, à la situation politique au Proche-Orient, mais elle progresse. Le volet économique, qui a fait le pari de l'instauration d'une zone de libre échange à l'horizon 2010, commence d'être préparé par certains pays -Maroc, Tunisie- ; d'autres sont encore confrontés à des difficultés trop profondes pour l'envisager déjà. Enfin le volet culturel, social et humain en est encore à ses balbutiements. Il demeure que cette approche intégrée semble pertinente et bien acceptée par les différents partenaires.

2. En matière d'action humanitaire

• Un rôle essentiel, mais ambigu

L'action humanitaire mise en oeuvre par la Commission correspond environ, à elle seule, à 25 % de l'effort mondial (4( * )) . On peut, bien sûr, n'y voir que la compensation et la conséquence des échecs de la diplomatie. En effet, l'assistance humanitaire traite, avec autant de neutralité qu'il lui est possible, les conséquences des conflits. Son rôle est également ambigu : facile et rapide à mobiliser, mieux perçue qu'une intervention armée, elle peut n'être parfois que l'unique élément de réponse apportée à la question du conflit.

Cette observation est particulièrement vraie au niveau de l'Union où l'aide humanitaire, qui est une compétence communautaire, ne connaît ni les susceptibilités, ni les contraintes décisionnelles qui sont spécifiques au domaine de la PESC.



• Un succès réel de l'Union

En dépit de certains problèmes récents -et financièrement limités-, on peut considérer que l'action humanitaire de l'Union conduite, à travers l'agence Echo (4( * )) , par le Commissaire Emma Bonino, produit des résultats positifs.

Intervenant dans plus de soixante pays répartis dans le monde, la politique d'aide humanitaire est dotée d'une visibilité que d'autres politiques n'ont pas et se trouve soutenue à la fois par les acteurs de l'intervention humanitaire et par l'opinion publique.

Sans doute pourrait-elle être mieux adaptée encore à la gestion des crises politiques ou des catastrophes naturelles : on pourrait ainsi souhaiter la constitution d'une force commune d'intervention humanitaire plus efficace que ne le sont aujourd'hui les interventions juxtaposées des pays membres, lorsqu'ils interviennent de manière bilatérale.

3. En matière d'aide au développement

L'Union européenne et ses Etats membres sont le principal fournisseur d'aide internationale, représentant près de 60 % de l'ensemble de l'aide publique au développement dans le monde , contre 4 % pour les Etats-Unis et 18 % pour le Japon. La communauté assume à elle seule plus de 10 % de l'aide fournie par les pays de l'OCDE. A travers la convention de Lomé, l'Afrique subsaharienne demeure la principale bénéficiaire -pour près de 40 % du total-, suivie des pays d'Europe centrale, de la Méditerranée, de l'Asie, et de l'Amérique latine.

La convention de Lomé reste le plus ancien et le plus ambitieux programme d'aide au développement de l'Union : elle propose une approche intégrée à soixante et onze pays ACP (dialogue politique, commerce, aide au développement). La négociation de son cinquième volet est en cours pour l'an 2000.

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