B. DES TEXTES SUSCEPTIBLES DE QUELQUES AMÉLIORATIONS
La loi littoral et la loi montagne sont désormais deux " blocs de granit " de notre droit de l'urbanisme. Les améliorations susceptibles d'y être apportées ne sauraient, en conséquence, qu'être mineures et destinées à en parfaire l'application.
1. Dispositions applicables au littoral
a) Amender la loi littoral
Trois
sujets ont retenu l'attention de votre groupe de travail. Ils concernent
respectivement le passage des piétons le long du littoral, la notion
d'équipements exigeant la proximité immédiate de l'eau et,
enfin, la réutilisation des bâtiments existants dans la bande de
100 mètres qui, dès lors qu'elle n'est pas
intégralement urbanisée, est totalement inconstructible.
L'extension de la servitude de passage des piétons.
La loi littoral s'applique aux espaces maritimes, ainsi qu'aux plans d'eau
intérieurs de plus de 1.000 hectares de surface. Or, la servitude
de passage des piétons le long du littoral sur une bande de
trois mètres ne s'applique, aux termes de la loi du
31 décembre 1978 codifiée à l'article L.160-6 du code
de l'urbanisme, qu'aux propriétés riveraines du
domaine public
maritime
. Elle ne concerne donc pas les étendues lacustres. La
même observation vaut d'ailleurs pour la servitude d'accès
"
perpendiculaire
" au rivage destinée à relier,
en tant que de besoin, le rivage aux voies publiques existantes.
Votre groupe de travail estime souhaitable d'envisager l'application des
deux servitudes précitées aux plans d'eau intérieurs de
plus de 1.000 hectares, sous réserve que celle-ci ne porte pas
atteinte à la faune et à la flore.
Préciser la notion d'équipements publics exigeant la
proximité immédiate de l'eau.
Aux termes de l'article L.146-4-II du code de l'urbanisme, seules les
activités économiques exigeant la proximité
immédiate de l'eau sont susceptibles d'être autorisées dans
les parties urbanisées des espaces proches du rivage
. C'est sur
ce fondement qu'ont été interdites les installations
d'équipements (sanitaires, aires de stationnement, buvettes, points
d'information), alors même qu'ils pourraient être utiles au
fonctionnement de plages ou de centres nautiques.
C'est pourquoi votre groupe de travail estime souhaitable de prévoir que
les équipements publics utiles à la pratique des activités
nautiques et sportives puissent, à titre exceptionnel, être
autorisés. Cette autorisation supposerait, au surplus , l'avis
conforme de la Commission des sites, chargée de s'assurer que les
équipements précités ne portent atteinte ni au paysage, ni
à un site remarquable.
Réutilisation des bâtiments existants dans la bande des
100 mètres.
Actuellement, l'article L. 146-4-III du code de l'urbanisme interdit de
façon absolue les constructions ou installations dans une bande de
100 mètres de large à partir du rivage. Une
interprétation stricte de ce texte interdit la réutilisation de
bâtiments existants, même par la puissance publique, dès
lors qu'un permis de construire est nécessaire. En conséquence,
une commune propriétaire d'un ancien hôtel
désaffecté, dont la réfection supposerait l'obtention d'un
permis de construire, n'a pas le droit de le transformer en bâtiment
d'accueil ou en musée, au motif que ces activités n'exigent pas
la proximité immédiate de l'eau et qu'elles constitueraient un
changement de destination du bâtiment. Il serait, tout au contraire,
souhaitable que, sous réserve de l'accord de la Commission des sites,
une commune ou une personne publique (telle que le Conservatoire du littoral)
puisse réutiliser les bâtiments existants, sous réserve de
ne pas en modifier le volume et l'aspect extérieur, mais de pouvoir en
changer la destination, sous réserve qu'elle contribue à la mise
en valeur du site.
b) Améliorer la protection du domaine du conservatoire du littoral
Mieux protéger le domaine du conservatoire du littoral
Votre groupe de travail est particulièrement soucieux de favoriser la
protection du domaine géré par le Conservatoire de l'espace
littoral et des rivages lacustres. Le patrimoine de ce dernier comprend
60.000 hectares d'espaces naturels fragiles ou menacés,
situés dans 430 sites localisés sur
800 kilomètres de rivages. Le Conservatoire du littoral est
présent dans 43 départements différents et dans
1046 communes littorales. En outre, son patrimoine s'accroît
régulièrement puisqu'il acquiert chaque année près
de 3.000 nouveaux hectares.
Ne serait-il pas envisageable, comme le préconise un
spécialiste entendu par votre groupe de travail, d'étendre au
patrimoine du Conservatoire du littoral un régime de protection analogue
à celui applicable au domaine public grâce aux contraventions de
grande voirie ?
Cette solution permettrait en effet au juge
administratif de condamner les contrevenants à une amende et d'ordonner
la remise en état des parties du domaine lorsqu'il y a été
porté atteinte. Ceci faciliterait la répression des dommages
occasionnés au domaine du Conservatoire du littoral qui sont,
actuellement sanctionnés avec difficulté.
L'action en réparation du domaine public étant imprescriptible
(comme le domaine public), une telle réforme permettrait d'unifier le
régime de protection du littoral. Celui-ci est actuellement
distinct : le domaine public maritime jouxtant les terrains du
Conservatoire du littoral est protégé par le régime des
contraventions de grande voirie, en revanche, les terrains du
Conservatoire , situés en contiguïté, n'en
bénéficient pas.
Votre groupe de travail s'interroge cependant sur les conséquences d'une
telle unification et estime souhaitable qu'une réflexion
spécifique soit conduite sur ce point
Au demeurant,
une meilleure protection des biens du Conservatoire du
littoral passe avant tout par l'accroissement du nombre des gardes dont il
dispose.
Ces agents sont commissionnés au titre de la loi
n° 76-629 du 10 juillet 1976 sur la protection de la
nature. Ils peuvent, en conséquence, constater les infractions, dresser
les procès verbaux et les transmettre au procureur de la
République. Or, leur nombre ne s'élève actuellement
qu'à 145, assistés de 200 agents recrutés au titre de
contrats de type " emploi-jeune ".
Avant même de procéder à des modifications
législatives et réglementaires compliquées, il importe
donc de renforcer les moyens humains dont dispose le Conservatoire du
littoral.
La protection des fonds marins qui jouxtent le littoral
Il est nécessaire d'améliorer la protection des milieux naturels
marins situés à proximité du rivage dont la flore est
notamment composée d'herbiers de posidonies (
Posidonia oceanica
)
et de cymodocées (
Cymodocea nodosa
), qui figurent au nombre des
espèces protégées
47(
*
)
au titre de la loi n° 76-629
du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature.
Dans la mesure où le Conseil d'Etat reconnaît, sous certaines
conditions, aux POS la possibilité de s'appliquer aux espaces
marins
48(
*
)
, il serait
envisageable d'appliquer à ces espaces la procédure de classement
au titre des espaces boisés qui permet, en vertu de
l'article L.130-1 du code de l'urbanisme, d'interdire tout changement
d'affectation ou mode d'occupation de nature à compromettre la
conservation et la protection du milieu.
On notera, au surplus, que des espaces boisés classés peuvent
être créés par le département au titre de la
politique de protection des espaces naturels sensibles, dans les conditions
prévues par l'article L.142-11 du code de l'urbanisme. Un usage
plus fréquent de cette faculté serait de nature à
faciliter la protection des espèces précitées.
2. Dispositions applicables à la loi montagne
L'application de la loi montagne peut conduire à
interdire
tout développement à certaines localités. C'est pourquoi
il serait souhaitable de préciser son champ d'application en astreignant
l'Etat à produire, lorsqu'une commune voit son développement
presque totalement entravé par cette loi, une étude sur la
constructibilité résiduelle.
Sur la base de ces études, la commune pourrait demander au préfet
d'autoriser, après avis de la commission des sites, la création
d'une ou de zones de " mutations foncières " destinées
à accueillir de nouvelles activités, en fonction des besoins.