Art. additionnels après l'art. 18 bis (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2004
Art. 20 (début)

Article 19

Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts à la date de dépôt de la présente loi sont confirmées pour l'année 2004. - (Adopté.)

A. - Mise en oeuvre de la loi organique relative

aux lois de finances

Art. 19
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Art. 20 (interruption de la discussion)

Article 20

I. - Il est institué, pour l'année 2004, une taxe dénommée redevance audiovisuelle.

Le produit de cette redevance est imputé à un compte d'affectation spéciale ouvert au profit des sociétés et de l'établissement public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Cette redevance est due par tout détenteur d'un appareil récepteur de télévision ou d'un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision.

La détention d'un tel dispositif de réception constitue le fait générateur de la redevance.

II. - Les dispositifs de réception mentionnés au I sont classés en deux catégories et imposables à la redevance audiovisuelle dans les conditions suivantes :

1° Pour les appareils destinés à l'usage privatif du foyer :

Le redevable doit une redevance pour sa résidence principale, dès lors qu'il y détient un ou plusieurs appareils récepteurs de télévision ou dispositifs assimilés permettant la réception de la télévision. Une redevance est également due par résidence secondaire, dès lors qu'un ou plusieurs récepteurs de télévision ou dispositifs assimilés y sont détenus de façon permanente ;

2° Pour les appareils installés dans des établissements où ils sont à la disposition du public ou d'usagers multiples ou successifs :

a) Le détenteur de ces appareils est le responsable de cet établissement. La redevance est due pour chacun des points de vision où sont installés les dispositifs de réception détenus dans l'établissement.

Un abattement est appliqué au taux de 30 % sur la redevance due pour chacun des points de vision à partir du troisième et jusqu'au trentième, puis de 35 % sur la redevance due pour chacun des points de vision à partir du trente et unième.

Les hôtels de tourisme dont la période d'activité annuelle n'excède pas neuf mois bénéficient d'une minoration de 25 % sur la redevance due conformément aux alinéas précédents ;

b) Le montant de la redevance applicable aux appareils installés dans les débits de boissons à consommer sur place de 2e, 3e et 4e catégories visés à l'article L. 3331-1 du code de la santé publique est égal à quatre fois le montant fixé au V ;

c) Lorsqu'à la même adresse, un redevable détient un dispositif de réception imposable à la fois dans un local affecté à son habitation et dans un local affecté à l'exercice de sa profession, il doit acquitter une redevance pour le ou les appareils détenus dans le local affecté à son habitation et une redevance par appareil détenu dans le local affecté à l'exercice de sa profession, dans les conditions précisées au a ;

d) Le détenteur des appareils utilisés par des personnes écrouées à l'intérieur d'un établissement pénitentiaire défini par les articles D. 53 et D. 70 du code de procédure pénale est réputé être l'établissement pénitentiaire.

III. - N'entrent pas dans le champ d'application de la redevance audiovisuelle mentionnée au I :

1° Les matériels utilisés pour les besoins des services et organismes de télévision prévus aux titres Ier, II et III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée et installés dans les véhicules ou les locaux des services ou organismes concernés, à l'exclusion des locaux affectés à l'habitation ;

2° Les matériels détenus en vue de la recherche, de la production et de la commercialisation de ces appareils ;

3° Les matériels utilisés en application des dispositions de l'article 706-52 du code de procédure pénale ;

4° Les matériels détenus par les établissements d'enseignement publics ou privés sous contrat d'association avec l'Etat, à condition qu'ils soient utilisés à des fins strictement scolaires dans les locaux où sont dispensés habituellement les enseignements ;

5° Les matériels détenus par les membres du corps diplomatique étranger en fonction en France et par les membres des délégations permanentes auprès des organisations internationales dont le siège est en France ;

6° Les matériels détenus à bord de navires et avions assurant de longs courriers ;

7° Les matériels détenus dans les locaux administratifs de l'Assemblée nationale et du Sénat ;

8° Les matériels fonctionnant en circuit fermé pour la réception de signaux autres que ceux émis par les sociétés visées par les titres II et III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée.

IV. - Sont exonérés de la redevance audiovisuelle mentionnée au I :

A. - Les personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans au 1er janvier de l'année d'exigibilité de la redevance, qui remplissent simultanément les conditions suivantes :

1° Ne pas être imposé à l'impôt sur le revenu prévu à l'article 1er du code général des impôts, au titre de l'avant-dernière année précédant l'année d'exigibilité de la redevance ;

2° Ne pas avoir été passible de l'impôt annuel de solidarité sur la fortune prévu aux articles 885 A et suivants du code général des impôts au titre de la même année ;

3° Ne pas vivre sous le même toit qu'une personne ne remplissant pas elle-même les conditions énoncées aux 1° et 2° .

B. - Quel que soit leur âge, les mutilés et invalides civils ou militaires atteints d'une infirmité ou d'une invalidité au taux minimum de 80 % lorsque sont remplies simultanément les conditions suivantes :

1° Avoir bénéficié, l'année précédant l'année d'exigibilité de la redevance, d'un montant de revenus n'excédant pas les limites prévues au I de l'article 1417 du code général des impôts ;

2° Ne pas être passible de l'impôt de solidarité sur la fortune prévu aux articles 885 A et suivants du code général des impôts au titre de la même année ;

3° Vivre seul ou avec son conjoint et, le cas échéant, avec des personnes à charge au sens des articles 6, 196 et 196 A bis du code général des impôts, avec des personnes bénéficiant, l'année précédente, d'un montant de revenus n'excédant pas la limite prévue au I de l'article 1417 du même code, avec une tierce personne chargée d'une assistance permanente, ou avec ses parents en ligne directe si ceux-ci bénéficient eux-mêmes, l'année précédente, d'un montant de revenus n'excédant pas la limite prévue au I de l'article 1417 du même code.

C. - Sous réserve que les organismes considérés ne soient pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée et que les récepteurs imposables ne soient pas destinés à l'usage privatif de leurs personnels :

1° Les associations caritatives hébergeant des personnes en situation d'exclusion ;

2° Les établissements et services sociaux et médico-sociaux visés par l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, lorsqu'ils sont gérés par une personne publique et ont été habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale en application des articles L. 313-6 et L. 313-8-1 du même code ;

3° Les établissements et services de même nature que ceux cités au 2° gérés par une personne privée, lorsqu'ils ont été habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale en application des articles L. 313-6 et L. 313-8-1 du code de l'action sociale et des familles ;

4° Les établissements de santé visés par le titre IV du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique ;

5° Les établissements de santé visés par le titre VI du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique.

V. - Le montant de la redevance audiovisuelle est :

a) Pour la France métropolitaine, de 116,50 EUR ;

b) Dans les départements d'outre-mer, de 74,31 EUR.

VI. - A. - Tout détenteur d'un appareil ou d'un dispositif de réception défini au I doit en faire la déclaration à l'administration chargée d'asseoir et de liquider la redevance audiovisuelle, dans les trente jours de l'entrée en possession de ce matériel. La déclaration précise l'identité du détenteur, sa date et son lieu de naissance et le lieu d'utilisation du matériel.

Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas au cas visé au C du VII.

B. - Les commerçants, les constructeurs et les importateurs en récepteurs imposables sont tenus de faire souscrire par leurs clients une déclaration à l'occasion de toute vente de ce matériel.

Cette obligation s'impose également aux officiers publics et ministériels à l'occasion des ventes publiques de ces matériels et aux entreprises dont l'activité consiste en la revente ou le dépôt-vente de récepteurs imposables d'occasion.

Une déclaration collective est souscrite par les personnes désignées aux deux alinéas précédents. Cette déclaration collective regroupe les déclarations individuelles de chaque acquéreur. Elle doit être adressée à l'administration chargée d'asseoir et de liquider la redevance audiovisuelle dans les trente jours à compter de la vente. Elle comporte la date d'achat, l'identité sous laquelle se déclare l'acquéreur, son nom, son prénom, son adresse, sa date et son lieu de naissance. Un double de cette déclaration doit être conservé pendant quatre ans par les professionnels désignés ci-dessus et présenté à toute réquisition des agents assermentés de l'administration.

Les opérations de vente entre professionnels sont dispensées de déclaration.

VII. - A. - La redevance audiovisuelle prévue au I fait l'objet de rôles rendus exécutoires par le chef du service de la redevance audiovisuelle et par délégation de ce dernier, aux chefs des services de gestion de cette redevance. Ces rôles sont adressés aux contribuables selon les modalités pratiques visées par les deux premiers alinéas de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales.

B. - La redevance instituée par le I est acquittée annuellement et d'avance, en une seule fois et pour une période de douze mois.

La première période de douze mois, au titre de laquelle le redevable doit la redevance, s'ouvre le premier jour du mois suivant celui au cours duquel il est entré en possession du dispositif de réception imposable.

Le rôle est mis en recouvrement à cette date. La redevance est exigible dès la mise en recouvrement du rôle.

La date limite de paiement de la redevance est fixée au dernier jour du mois de sa mise en recouvrement.

Pour les personnes déjà assujetties à la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision mentionnée à l'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, la première période de douze mois mentionnée au deuxième alinéa du présent B s'ouvre le premier jour qui suit la période au titre de laquelle a été émise cette redevance.

C. - Par exception aux dispositions du B du présent VII, lorsque l'appareil ou le dispositif de réception est loué auprès d'une entreprise, le locataire doit la redevance à raison d'un vingt-sixième du tarif fixé au V, par semaine ou fraction de semaine de location.

Le locataire paie la redevance entre les mains de l'entreprise de location en sus du loyer.

L'entreprise de location reverse le montant des redevances perçues au service de l'administration chargée de recouvrer la redevance audiovisuelle dont relève son siège au plus tard le dernier jour du mois suivant celui au cours duquel elle a encaissé les loyers.

Chaque versement est accompagné d'une déclaration du nombre de locations et de leur durée.

L'entreprise de location doit se faire immatriculer auprès du service de l'administration chargée d'asseoir et de liquider la redevance audiovisuelle dont relève son siège et lui indiquer le nombre de matériels imposables qu'elle destine à la location.

D. - 1. Par exception aux dispositions du B, la redevance audiovisuelle peut être acquittée par paiements fractionnés, sur option du redevable formulée auprès du service de l'administration chargée de recouvrer la redevance audiovisuelle dont il dépend au plus tard le 10 décembre de l'année précédant celle de la mise en recouvrement de la redevance.

L'option ne peut toutefois être formulée pour le paiement de la première redevance consécutive à l'entrée en possession du dispositif de réception imposable prévu au I.

2. Le paiement est réalisé par trois prélèvements effectués les 1er février, 1er juin et 1er octobre de l'année civile au titre de laquelle la redevance est due. Le paiement fractionné est reconduit tacitement chaque année, sauf renonciation adressée au service de gestion de la redevance au plus tard le 1er novembre, pour effet l'année suivante.

Il est mis fin au paiement fractionné en cas de décès du redevable ou en cas de rejet de deux prélèvements, consécutifs ou non.

Lorsqu'un prélèvement n'est pas opéré à la date prévue, il est appelé avec le prélèvement suivant.

3. L'option de prélèvement formulée au titre de la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision mentionnée à l'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est réputée acquise pour le paiement de la redevance audiovisuelle dans les conditions prévues au présent D.

VIII. - Une majoration de 30 % est appliquée au montant de la redevance audiovisuelle qui n'a pas été réglée à la date prévue à l'avant-dernier alinéa du B du VII.

Lorsque la redevance est acquittée dans les conditions prévues au D du VII, la majoration porte sur tout ou partie des prélèvements dont la date est postérieure à la date d'échéance et qui n'ont pas été honorés.

IX. - A. - Les infractions aux obligations incombant aux personnes désignées au A et au B du VI et aux bailleurs désignés au C du VII sont constatées au moyen de procès-verbaux dressés en application du A du X par les agents assermentés de l'administration chargée d'asseoir, de liquider ou de recouvrer la redevance audiovisuelle et font l'objet de l'émission d'une amende fiscale, dont le recouvrement se fait sur la base d'un titre rendu exécutoire par le chef de service de gestion de la redevance audiovisuelle ou, sur sa délégation, des chefs des services de gestion.

Les personnes qui ne se conforment pas à l'obligation prévue au A du VI sont personnellement redevables d'une amende fiscale de 300 EUR.

Les personnes qui ne se conforment pas aux obligations posées au B du VI et au C du VII sont personnellement redevables d'une amende fiscale de 10 000 EUR.

En cas de récidive, dans le délai de cinq ans, l'amende est doublée.

B. - 1. Sous réserve des dispositions particulières du présent article, le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties, sanctions, sûretés et privilèges sont régis comme en matière d'impôts directs.

2. L'administration chargée d'asseoir, de liquider ou de recouvrer la redevance audiovisuelle peut obtenir de l'administration des impôts communication de tous les renseignements et documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

X. - A. - Les agents commissionnés et assermentés de l'administration chargée d'asseoir, de liquider ou de recouvrer la redevance audiovisuelle sont chargés de vérifier que les personnes soumises à l'obligation de déclaration, prévue au A du VI, s'y sont conformées. Ils vérifient également que les personnes soumises à l'obligation de déclaration, prévue au B du VI, ainsi que celles qui sont chargées de collecter la redevance dans les conditions prévues au C du VII respectent leurs obligations.

Lorsqu'ils constatent une infraction à ces obligations, ils peuvent dresser un procès-verbal faisant foi jusqu'à preuve du contraire, qui doit être apportée selon les modalités prévues par le dernier alinéa de l'article 537 du code de procédure pénale.

Ces agents ont, dans l'exercice de leurs fonctions, le droit de se faire communiquer par les commerçants, constructeurs, importateurs, réparateurs et bailleurs de dispositifs de réception, les livres dont la tenue est prescrite par le titre II du livre Ier du code de commerce ainsi que tous les livres de comptabilité, documents annexes, pièces de recettes et de dépenses.

Les officiers ministériels sont tenus, à l'occasion des ventes publiques de dispositifs de réception, à la même obligation de communication en ce qui concerne les documents comptables qu'ils tiennent et les pièces justificatives y afférentes.

B. - Les agents mentionnés au A sont tenus de présenter à la personne contrôlée leur commission.

C. - En cas de défaut de déclaration ou de déclaration inexacte ou incomplète en matière de redevance audiovisuelle, le redevable, à défaut d'avoir régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure, est taxé d'office.

Les droits omis ou éludés, en tout ou partie, sont rappelés pour l'année en cours et l'année précédente, sans préjudice de l'amende fiscale prévue au A du IX.

D. - Le recouvrement de la redevance prévue au I et de la majoration prévue au VIII est confié au comptable du service de gestion de la redevance audiovisuelle et aux chefs des services de gestion territorialement compétents, constitués régisseurs de recettes.

Le comptable du service de gestion de la redevance audiovisuelle, les régisseurs de recettes du même service ainsi qu'à leur demande, les autres comptables du Trésor sont compétents pour engager les poursuites, y compris le commandement de payer, tendant au recouvrement de la redevance.

XI. - A. - Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 18° de l'article 257 est ainsi rédigé :

« 18° La redevance audiovisuelle ; »

2° A l'article 281 nonies, les mots : « redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision » sont remplacés par les mots : « redevance audiovisuelle ».

B. - Sont abrogés les articles 94, 95 et 96 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.

C. - Le III de l'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « autorise la perception de la taxe dénommée redevance pour droit d'usage, assise sur les appareils récepteurs de télévision, et » sont supprimés ;

2° Le dernier alinéa est supprimé.

D. - Dans l'article 33 de la loi de finances pour 1975 (n° 74-1129 du 30 décembre 1974), les mots : « de la radiodiffusion télévision française » et « pour droit d'usage des postes récepteurs de radiodiffusion et de télévision » sont remplacés par le mot : « audiovisuelle ».

XII. - Un décret en Conseil d'Etat précise, en tant que de besoin, les modalités d'application des I à X et les obligations déclaratives relatives à l'assiette et nécessaires au contrôle de la redevance audiovisuelle.

M. le président. L'amendement n° I-150, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et rattachée, est ainsi libellé :

« I. - Au troisième alinéa du I de cet article, supprimer les mots : "ou d'un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision".

« « II. - Dans le quatrième alinéa, les mots : "un tel dispositif de réception" sont remplacés par les mots : "un appareil récepteur de télévision".

« « III. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... Nonobstant le V de l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la perte de recettes résultant de l'exclusion des ordinateurs personnels de l'assiette de la redevance audiovisuelle est compensée à due concurrence par une majoration de la redevance. »

La parole est à M. Michel Moreigne.

M. Michel Moreigne. A l'occasion de la consolidation juridique de la redevance audiovisuelle programmée par la loi de finances, le Gouvernement nous indique son intention de procéder également à des modifications de l'assiette de cette taxe. Toutefois, la nouvelle rédaction, plus large que celle du décret de 1992, laisse planer une ambiguïté sur l'éventuel assujettissement des ordinateurs personnels.

Nous pensons indispensable de préciser dès maintenant que l'assiette de la taxe n'inclut pas les ordinateurs personnels.

Vous allez sans doute nous répondre, monsieur le ministre, que la pratique du service de la redevance audiovisuelle a toujours été de ne taxer que les postes de télévision, et jamais les ordinateurs, et qu'il ne saurait en être autrement à l'avenir. Cependant, accordez-moi que les techniques évoluent vite et que, par ailleurs, les besoins financiers d'un gouvernement peuvent avoir leurs exigences.

Pour cette raison, nous préférons que certaines choses soient gravées dans le marbre d'un texte de loi plutôt qu'entre les lignes d'un éventuel décret. Monsieur le président, l'amendement vise donc à éviter toute ambiguïté dans la rédaction de l'article en précisant que les ordinateurs personnels ne sont pas inclus dans l'assiette de la taxe.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il convient d'observer que nous entamons l'examen des amendements concernant le dispositif de ladite redevance audiovisuelle et que nous avons à traiter cette année de redevance en vertu de la loi organique qui impose de restructurer le régime issu des taxes parafiscales.

Pour répondre à l'observation ou au souhait - je ne sais plus - qui était émis dans Le Guépard par M. de Lampedusa, vous nous proposez en quelque sorte, monsieur le ministre, que tout change pour que tout reste identique ! (Sourires.) Il faut donc reconstruire le régime juridique de la redevance pour qu'elle devienne conforme à la loi organique du 1er août 2001. C'est ce à quoi nous allons nous employer au travers de toute une série d'amendements que la remise en place de la redevance fait surgir au détour de notre discussion parlementaire.

Le premier d'entre eux, présenté par nos collègues du groupe socialiste, concerne l'exclusion des ordinateurs personnels.

J'ai le sentiment que cette préoccupation est satisfaite et que le présent amendement n'est pas strictement nécessaire. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous le confirmer, de telle sorte que nos collègues puissent le retirer sans regret ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le rapporteur général, en effet, le fait générateur de la redevance n'a pas été modifié. Le décret du 30 mars 1992 prévoit que le fait générateur est constitué par la détention d'un appareil récepteur de télévision. Ce même décret précise également que tout dispositif permettant la réception de la télévision est considéré comme appareil récepteur de télévision.

L'amendement présenté par Michel Moreigne n'est donc ni utile ni même souhaitable. Je confirme, comme je l'ai indiqué très clairement à l'Assemblée nationale s'agissant de l'assujettissement des micro-ordinateurs à la redevance, que ceux-ci ne seront pas taxés.

Pourquoi cet amendement ne me paraît-il pas souhaitable, cher monsieur Moreigne ? Tout simplement parce que les technologies évoluent considérablement. Et, si vous commencez à introduire dans la loi le nom d'une technologie donnée, vous risquez par la suite de vous retrouver avec un inventaire à la Prévert.

La parole du Gouvernement, qui vaut pour l'interprétation de la loi en vigueur, me semble être la meilleure source de droit pour l'instant. C'est pourquoi je vous demande, après vous avoir répondu, je l'espère, sans ambiguïté, de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Moreigne, l'amendement est-il maintenu ?

M. Michel Moreigne. La parole du Gouvernement me suffit, monsieur le président, et je retire l'amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. L'amendement n° I-150 est retiré.

M. Michel Charasse. Il y a des républicains dans la Creuse !

M. le président. L'amendement n° I-102 rectifié, présenté par MM. Belot, de Broissia, Gouteyron, Fréville, Valade, Richert, Nogrix, Eckenspieller et Duvernois, est ainsi libellé :

« Dans le deuxième alinéa (a) du V de cet article, remplacer la somme : "116,50" par la somme : "118". »

La parole est à M. Claude Belot.

M. Claude Belot. Cet amendement a été cosigné par tous ceux qui sont au front de l'audiovisuel, qu'il s'agisse des administrateurs de chaînes, des représentants du Parlement qui siègent au sein des différentes instances participant au paysage audiovisuel français ou du président de la commission des affaires culturelles. Cela tient tout simplement au fait que nous sommes assez inquiets quant à l'évolution actuelle de la situation financière du paysage audiovisuel français.

Si le problème de la télévision a été à peu près convenablement réglé dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens, qui entraîne une augmentation contractuelle, chaque année, de 3 % des moyens provenant de la redevance, tel n'est pas le cas des autres utilisateurs. Cela est dû au fait que, à partir d'une somme qui est parfaitement identifiée, à savoir la recette de la redevance audiovisuelle, si l'on donne beaucoup plus à la télévision, cela signifie que les autres deviennent les variables d'ajustement, qu'il s'agisse de Radio France ou de l'Institut national de l'audiovisuel. Or ce dernier doit faire face, en ce moment, à une véritable urgence : la numérisation de l'ensemble des supports de l'ancien Office de radiodiffusion télévision française, l'ORTF, lesquels seront perdus d'ici peu si l'on ne réussit pas à les conserver intégralement. Il convient de régler ce problème dans des délais extrêmements brefs.

Radio France internationale, RFI, réalise un superbe travail. On peut discuter de son contenu, ici ou là, mais RFI représente la voix de la France pour nombre de personnes dans le monde entier. Pourtant, elle n'a pas les moyens de se développer. Elle n'a même plus les moyens d'exister dans un certain nombre de cas, je l'ai vérifié il n'y a pas très longtemps au Brésil.

Il y a aussi cette idée que je trouve superbe : créer une télévision qui soit diffusée dans le monde entier, une télévision différente de CNN, qui fasse entendre une autre voix. Cette création nécessite des moyens. Or le projet de budget pour 2004 ne prévoit pas un seul centime pour mettre en place cette voix de l'Europe, notamment de la France, qui est très attendue.

Cela signifie que la variable d'ajustement ne fait que comprimer les moyens des utilisateurs autres que la télévision.

J'en ai discuté longuement avec différents collègues. Manifestement, ils pensaient - je m'expliquais mal, sans doute - qu'il fallait davantage de moyens pour la télévision. Ce n'est pas le sujet ! Ce sont précisément les autres utilisateurs qui sont très importants en France : très importants pour la fonction de mémoire et très importants pour la fonction internationale de l'audiovisuel public français.

Voilà quatre ans que la redevance audiovisuelle n'a pas augmenté. C'est une recette qui a longtemps évolué favorablement, car le Sénat avait eu le courage, en 1995, de décider le recoupement des fichiers de la taxe d'habitation ceux de la redevance. Cette disposition avait rendu cette recette beaucoup plus dynamique, mais c'est du passé. Maintenant, la redevance évolue peu. Il y a là une situation dont il faut prendre acte.

La réponse aux besoins que j'évoquais tout à l'heure représente une augmentation d'environ 1,2 % sur quatre ans.

Les bases de tous les impôts locaux ont été actualisées : sur quatre ans, ceux-ci ont crû de 5 à 6 %, et nous n'avons pas protesté. Il faut quand même être logique !

Je suis convaincu qu'il nous faut trouver des moyens. Ou alors, nous ne sommes crédibles ni pour RFI ni pour la chaîne de télévision à diffusion internationale. Il faut le dire très clairement !

Il existe bien une autre solution s'agissant de cette augmentation. Nous sommes tous convaincus que nombreux sont les fraudeurs à la redevance.

M. Michel Charasse. Ah oui !

M. Claude Belot. Voilà trois ans, je me suis rendu à Rennes pour effectuer un contrôle sur place et sur pièces, et j'ai rencontré des personnes qui faisaient au mieux leur métier, compte tenu des moyens que leur donnait la loi.

Il faut débusquer les fraudeurs ! Je vous souhaite d'y parvenir.

J'ai lu attentivement tous les amendements, y compris celui du Gouvernement. Il faudrait que les commerçants soient complices de l'Etat ! Ils n'aiment pas beaucoup cela, mais ils le sont parfois.

Il conviendrait aussi de trouver un moyen de contrôler les décodeurs. Sur Internet, vous pouvez trouver, à partir d'Eutelsat, toutes les adresses d'officines, à Londres ou à la frontière espagnole, où l'on peut acheter des décodeurs, ce qui évite de les louer. La fraude non pas à la redevance, mais aux de décodeurs existe en France, et ce à une échelle significative. Nous n'avons aucun moyen sérieux de contrôler tout cela.

J'aimerais bien, moi aussi, que la morale soit sauve et que tous les fraudeurs puissent être appréhendés. Cela représenterait sans doute plus que l'augmentation de 1,2 % qui vous est proposée aujourd'hui. Mais je doute que nous y parvenions.

Je crois être le porte-parole de tous ceux qui, dans le domaine de l'audiovisuel, connaissent les urgences et les moyens à mettre en oeuvre.

Je vous lance donc un appel solennel, mes chers collègues, pour que vous nous suiviez dans cette affaire. La solution réside soit dans cette augmentation de 1,2 % sur quatre ans, c'est-à-dire 1,5 euro - c'est donc très peu pour une année, soit dans la traque des fraudeurs, mais je suis vraiment très sceptique à cet égard.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est très reconnaissante à Claude Belot d'avoir posé cette question. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Paul Loridant. Cela commence mal !

M. le président. Il a déjà parlé sept minutes : ne le provoquez pas !

M. Michel Charasse. Mais il parle rarement ! Et c'était bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je répète que la commission est reconnaissante à Claude Belot d'avoir posé cette question, avec toute la compétence qui est la sienne, en tant que rapporteur spécial du budget de la communication d'audiovisuelle.

M. Paul Loridant. Mais...

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous en prie, mon cher collègue, ne faites pas mon intervention à ma place !

M. Michel Charasse. Il n'a pas cette prétention ! Il n'y arriverait pas !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ayez la bonté de m'écouter jusqu'au bout : certains propos vont peut-être vous surprendre.

Notre excellent collègue Claude Belot, qui, depuis de nombreuses années, a pris le relais de Jean Cluzel avec efficacité - une grande tradition de la commission des finances s'affirme dans le secteur de l'audiovisuel au travers des rapporteurs spéciaux - nous invite à mener une réflexion sur la redevance et sur son utilisation.

Mes chers collègues, nous devons tout mettre à plat. C'est notre rôle, c'est notre responsabilité. Mais il faudrait d'abord être en mesure de savoir ce que cette redevance va et doit devenir. Faut-il conserver durablement un tel outil financier spécifique avec une administration particulière pour son recouvrement ? La question est posée depuis de nombreuses années.

Mes chers collègue, du groupe socialiste, vous n'avez sans doute pas oublié que mon ancien homologue de l'Assemblée nationale, Didier Migaud, souhaitait, au nom de votre formation, la disparition de ladite redevance. Les réflexions en ce domaine ne sont pas nécessairement absurdes.

Monsieur le ministre, dans l'optique d'une meilleure gestion de l'Etat, d'une réforme de l'Etat, faut-il conserver de façon indéfinie une administration spécifique chargée de recouvrer ce prélèvement ?

Ensuite, comme Claude Belot l'a très exactement indiqué, se pose la question des utilisateurs qui viennent en concurrence sur le produit de la redevance. Il nous a dit, à juste titre, que l'essentiel de ce financement était aujourd'hui rigidifié par ce que l'on appelle des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels passés entre l'Etat et les principales sociétés de l'audiovisuel public.

Dès lors que le coeur est rigide, les marges sont de plus en plus limitées chaque année, et nous nous trouvons donc dans la situation qui a été décrite par notre collègue : tout ce qui peut apparaître comme nouveau et particulièrement digne de retenir l'attention du Parlement en matière d'action culturelle ou d'information internationale se situe hors de ces contrats d'objectifs et de moyen et, par conséquent, est traité de façon marginale au moment où il faut répartir la manne issue de la redevance. Telle est précisément la question qui a été posée et nous devons, mes chers collègues, la traiter en toute transparence et en toute rigueur.

Peut-être faut-il se demander si, dans notre République, à un moment si difficile pour nos finances publiques, les mêmes exigences ne devraient pas s'appliquer partout, c'est-à-dire en termes d'économie, de bonne gestion ou de suppression de moyens redondants ?

M. Michel Charasse. De rigueur !

M. Philippe Marini, rapporteur général. La République comporte-t-elle des sanctuaires qui échapperaient à ces principes de bonne et de saine gestion ? Que chacun, en son âme et conscience, se pose ce type de question !

Enfin, Claude Belot a évoqué les difficultés de recouvrement de la redevance. Ce débat a déjà largement eu lieu à l'Assemblée nationale et des dispositions doivent être prises pour garantir l'effectivité et l'équité de la redevance. Il faut appréhender toutes les situations dans lesquelles il est nécessaire, du fait de la détention d'un appareil de télévision, de payer ladite redevance. Des perfectionnements sont à apporter en matière de contrôle et de recoupement de fichiers. Ils seront sans doute de nature à permettre une gestion plus efficace et un meilleur rendement de cette redevance au profit de l'ensemble des utilisateurs de la ressource.

En conclusion, mes chers collègues, que faut-il faire s'agissant du taux de la redevance ?

Bien entendu, vous pouvez suivre la recommandation qui vous a été faite par Claude Belot. Vous aurez ainsi la satisfaction d'aller dans le sens des demandes justifiées, par exemple, de RFI ou de celles qui sont liées à la création de la chaîne d'information internationale voulue par le Président de la République et qui a fait l'objet du récent rapport de notre collègue député, Bernard Brochand.

Ceux qui feront ce choix, je comprends bien quelles peuvent être leurs motivations. Je ne voudrais pas les caricaturer, je les respecte par avance. Toutefois, mes chers collègues, du point de vue de la commission des finances et des principes qu'elle défend, s'il faut, pour faire face à certains besoins nouveaux, non pas réexaminer l'adéquation des sommes consacrées aux besoins anciens, mais toujours ajouter un peu plus de prélèvements, ne souscrit-on pas à un système tout à fait critiquable ? Ne cède-t-on pas à une certaine forme de facilité en considérant que les besoins marginaux se règlent par un tout petit mouvement du curseur ?

Certes, c'est toujours un soulagement de pouvoir dire que les besoins nouveaux sont satisfaits par un tout petit incrément d'une taxe, en espérant que personne n'en ressente la douleur. N'est-ce pas une facilité coupable à laquelle on aurait recours une nouvelle fois ?

M. Jean Chérioux. C'est sûr !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ayant tâché d'aborder tous les aspects de la question et de le faire de la manière la plus objective possible, mes chers collègues, je ne peux que vous dire que la commission des finances, fidèle à ses principes, a émis un avis défavorable à l'égard de l'amendement présenté, avec clarté et conviction, par notre collègue Claude Belot. (M. Paul Loridant s'exclame.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous dire, sans ambiguïté, que le Gouvernement a fait le choix de ne pas augmenter le taux de la redevance audiovisuelle.

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Alain Lambert, ministre délégué. C'est un choix réfléchi, affirmé, et sur lequel le Gouvernement n'entend pas revenir.

Je veux être franc avec vous : je demanderai un scrutin public sur cet amendement. (Très bien ! Sur plusieurs travées de l'UMP.) Sur un tel sujet, il est nécessaire que chacun prenne ses responsabilités. Je préfère vous prévenir en cet instant, car vous aurez ainsi le temps d'y réfléchir.

En effet, à un moment donné, un secteur doit pouvoir, en affinant sa gestion et en accroissant ses gains de productivité, dégager des marges de manoeuvre qui lui permettent de financer des actions nouvelles tout à fait intéressantes.

Si nous acceptons l'idée que chaque action nouvelle appelle de nouveaux financements, donc de nouveaux impôts, alors, mesdames, messieurs les sénateurs, la marche en avant vers des prélèvements obligatoires en hausse constante deviendra impossible à interrompre.

Arrêtons la marche infernale ! De bonnes raisons d'augmenter les prélèvements surgissent, jaillissent, bondissent en permanence ! N'y cédons plus jamais ! (Très bien ! et applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Les actions nouvelles dont M. Belot fait état sont d'un très grand intérêt pour la conservation, pour la mémoire et pour nous permettre de nous lancer à la conquête du monde, dans le domaine de l'information s'entend.

Le Gouvernement, qui compte sur des gains de productivité, fera tout pour améliorer les ressources de l'audiovisuel. Il va ainsi aller au devant des voeux des parlementaires en déposant un amendement qui tendra à accroître le rendement de la redevance acquittée par tous les Français. Les ressources supplémentaires ainsi dégagées pourront contribuer au financement de nouveaux projets, naturellement sans accroître le taux de la redevance.

Je le dis simplement, mais fermement, le Gouvernement souhaite que ses intentions soient connues de tous et demande à M. Belot de retirer son amendement. A défaut, le Gouvernement émettra, avec regret, un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

Les actions nouvelles dont M. Belot fait état sont d'un très grand intérêt pour la conservation, pour la mémoire et pour nous permettre de nous lancer à la conquête du monde, dans le domaine de l'information s'entend.

Le Gouvernement, qui compte sur des gains de productivité, fera tout pour améliorer les ressources de l'audiovisuel. Il va ainsi aller au devant des voeux des parlementaires en déposant un amendement qui tendra à accroître le rendement de la redevance acquittée par tous les Français. Les ressources supplémentaires ainsi dégagées pourront contribuer au financement de nouveaux projets, naturellement sans accroître le taux de la redevance.

Je le dis simplement, mais fermement, le Gouvernement souhaite que ses intentions soient connues de tous et demande à M. Belot de retirer son amendement. A défaut, le Gouvernement émettra, avec regret, un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. A titre personnel, je ne suis pas, par principe, opposé à la proposition de M. Belot de donner un petit « coup de pouce » à la redevance. Et notre collègue connaît bien le sujet, puisqu'il est rapporteur spécial du budget de la communication, depuis déjà plusieurs années.

La mesure proposée peut aboutir effectivement à une augmentation de la redevance, mais pas si l'on procède à une analyse un peu fine des choses.

Dans le service public actuel, qui « pompe » l'essentiel des ressources de la redevance - tout le monde comprend ce que je veux dire -, on est dans une situation où aucun ministre, quel qu'il soit, ne peut prendre la moindre mesure d'économie sans déclencher des hurlements de tout un tas de gens qui se prétendent des intellectuels ou de petits groupuscules qui sont ceux qui profitent du système. Il faut savoir que, dans le service public, aucune économie n'est jamais possible !

Je me souviens d'une époque où j'étais membre du Gouvernement et où Michel Rocard arbitrait en me demandant d'accorder 1 milliard de francs de plus à l'audiovisuel. Je donnais 1 milliard de plus à l'audiovisuel ; je lui demandais pour quoi faire ; il me disait que c'était pour fabriquer des programmes ; et, en fin d'année, quand je faisais les comptes, il y avait 100 millions de francs de programmes, mais 900 millions de francs de fantaisies, d'achats divers et d'embauches variées. Du milliard de francs pour les programmes, on était passé à 10 % de la somme !

Dès que l'on essaie de s'en prendre à cet état des choses, dès que l'on fait mine, comme disait Alain Lambert, de regarder à l'intérieur, la grande presse nationale s'en empare et les politiques de droite et de gauche se couchent.

M. Jean Chérioux. Eh oui !

M. Michel Charasse. A partir du moment où Le Monde écrit que nous sommes des crétins et des illettrés, on le croit, ou plutôt on a peur que les autres le croient, et, comme on a sans doute des complexes, on se couche et on ne fait rien. (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

Je me souviens encore d'une époque où j'avais accordé des crédits supplémentaires à France 2 qui m'en demandait pour l'achat de moyens audiovisuels, notamment dans la région Bourgogne. Eh bien on avait alors acheté des cars de reportage qui avaient pour particularité de ne passer pratiquement dans aucune des rues des villages de Bourgogne : les rues étaient bien trop étroites et les cars bien trop larges. (Sourires.) M. de Broissia doit se rappeler cette époque.

Cela dit, monsieur le ministre, sur la création de la chaîne internationale, personnellement je n'ai pas d'opinion. Après tout, il n'est sans doute pas mal qu'il y ait un concurrent pour CNN. Pourquoi pas ? Et que ce concurrent soit français, tant mieux !

M. Alain Lambert n'est pas en cause, mais il sera toujours arbitré contre lui par le Premier ministre, quel qu'il soit, parce qu'il y aura dans Le Monde ou dans Libération des articles désagréables, des menaces ou des pressions. Donc, à partir du moment où l'on est incapable de dégager de l'intérieur des ressources, il faudra bien trouver le minimum de ce que Claude Belot trouve indispensable pour donner à la chaîne internationale, si elle voit le jour, les moyens qui lui sont nécessaires.

Pour RFI, c'est justifié, et ô combien, car cette radio a une importance formidable dans le monde. Mais je dirai à notre ami Claude Belot que RFI doit être financée principalement, ou pour une grande partie, en tout cas, par le ministère des affaires étrangères. Or, cher ami, vous êtes rapporteur spécial du budget de l'audiovisuel, mais Jacques Chaumont, qui est rapporteur du budget des affaires étrangères, pourrait en témoigner, il y a des économies à faire, aux affaires étrangères, dans le secteur culturel. Pour voyager beaucoup à l'étranger afin de contrôler sur place l'exécution du budget de la coopération, je le sais bien.

Pensez aux expositions qu'organise à travers la France l'AFAA, l'Association française d'action artistique, avec un regroupement d'oeuvres d'art qui n'en sont pas, fabriquées souvent par des ratés ou des médiocres à Paris et qu'on présente dans le monde entier à grands frais ! (M. le rapporteur général rit.) On pourrait supprimer tout cela, et, à mon avis, RFI ferait plus pour la culture française que ce petit groupuscule où l'on se répartit les choses, à trois ou à quatre, entre amis.

Quant à l'INA, monsieur Belot, j'émets les plus expresses réserves, parce que, comme maison de gabegies et de gaspillages, on ne fait pas mieux ! Il y a là de sérieuses économies à faire.

M. Belot a raison quand il fait état d'une menace de destruction irrémédiable. C'est vrai et c'est grave, parce que ce qui est en train de se détruire, à l'INA, ce sont les oeuvres audiovisuelles en dépôt, et notamment les oeuvres les plus anciennes, qui n'étaient pas numérisées. Il faut savoir qu'un certain nombre de bandes d'enregistrements télévisés antérieures à 1958 ou de l'époque que j'appellerai « gaulliste », après 1958, sont en train de s'effacer, ainsi qu'une partie des bandes des débuts du premier septennat de François Mitterrand.

Voilà ce que l'INA ne conserve pas, et tout cela pour payer des voitures, des chauffeurs et beaucoup de parasites qui ne servent pas à grand-chose ! (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. Michel Charasse. Par conséquent, moi, monsieur le ministre, je suis un peu sceptique sur ces questions, mais je voulais faire part de mon avis.

Il faudra sans doute - je crois que c'est ce que mes amis politiques demandent - ajuster légèrement la redevance à un moment ou à un autre, mais il faudra savoir aussi faire de réelles économies là où il y a du grain à moudre, comme disait l'autre, là où il y a des tas de noisettes. (Sourires.) D'ailleurs, si vous voulez des adresses, monsieur Belot, je suis prêt à vous en donner !

M. Jean Chérioux. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, pour explication de vote.

M. Louis de Broissia. Mon collègue Claude Belot, pour la commission des finances, et moi-même, au titre de la commission des affaires culturelles, avons rapporté l'opinion que nous avions sur les propositions inscrites en première partie du projet de loi de finances.

Pour ce qui me concerne, je ne tomberai pas dans la même facilité que ceux qui sont intervenus avant moi. Je le dis à la fois au rapporteur général, avec lequel j'aurai forcément des divergences de vues, mais aussi à M. Michel Charasse, même si j'éprouve pour eux de l'amitié. Après tout, je ne suis pas ici pour suivre les uns et les autres.

Monsieur Charasse, j'ai commencé ma vie publique au sein de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale. Je me souviens d'un cours de droit public dispensé par un ancien ministre, Jack Lang, un spécialiste en la matière. Je suis convaincu que le principe de la redevance n'a jamais été expliqué aux Français. En somme, monsieur le ministre, les Français ne savent pas pourquoi ils payent une redevance audiovisuelle.

M. Michel Charasse. C'est un droit d'usage !

M. Louis de Broissia. C'est un droit d'usage de l'espace hertzien ou de l'espace numérique.

M. Michel Charasse. Voilà !

M. Louis de Broissia. C'est la possibilité, pour chaque foyer de France, d'avoir accès à une télévision, qu'elle soit publique ou privée.

Mes chers collègues, c'est la première année que le Parlement français vote le montant de la redevance. Avant, on votait un « paquet » et l'on nous disait : « Débrouillez-vous avec cela ! »

M. Michel Charasse. On « autorisait » la perception.

M. Louis de Broissia. Comme M. Belot, j'estime que, par rapport aux discussions entamées à l'Assemblée nationale, qui, hélas ! ne se sont pas déroulées, monsieur le ministre, comme vous et moi le souhaitions, les propositions budgétaires faites sur la base d'une reconduction, pour la troisième année consécutive, d'une redevance à 116,50 euros aboutissent à une diminution de la redevance en euros constants.

Adjoint dans une toute petite commune rurale, je sais pertinemment que, les impôts n'augmentant pas une année, ils risquent d'augmenter lourdement l'année suivante.

Donc, les deux rapporteurs des deux commissions estiment - après tout, ils sont là pour rapporter...

M. Alain Gournac. C'est le minimum !

M. Louis de Broissia. ... l'état de l'audiovisuel français - que nous avons, avec ce premier vote de la redevance, l'occasion de réévaluer la redevance.

M. Belot a parlé de l'INA et de son patrimoine argentique en péril. Quoi qu'en aient dit d'autres intervenants auparavant, ce n'est pas avec la reconduction de crédits - plus 1,5 % - que l'INA rattrapera le retard accumulé !

Il en va de même pour RFI, dont le budget est en augmentation de 1,7 %.

Il en va de même pour la chaîne internationale, au titre de laquelle on trouve zéro centime d'euro inscrit.

S'agissant de RFI, l'augmentation prévue est totalement incompatible avec la vision que nous avons de la voix de la France dans le monde et sur le monde.

Le produit de cette réévaluation de la redevance que nous proposons ne sera pas affecté à accroître le confort des chauffeurs de France Télévision, monsieur Charasse ! (M. Michel Charasse fait un signe dubitatif.)

Il se trouve que je siège au conseil d'administration de France Télévision...

M. Michel Charasse. Eh bien, je vous plains !

M. Louis de Broissia. ... et que donc vous m'avez en quelque sorte désigné dans vos propos. Vous avez l'air d'ignorer, monsieur Charasse, que les gouvernements précédents ont proposé un contrat d'objectifs et de moyens.

M. Philippe Marini, rapporteur général. On en a parlé !

M. Louis de Broissia. Avec les représentants du Gouvernement, le directeur du développement des médias, le représentant de Bercy, nous veillons lors de chaque conseil d'administration - le prochain se réunit demain - à ce que ce contrat d'objectifs et de moyens soit respecté dans chaque maison de l'audiovisuel public. (M. Michel Charasse fait un nouveau signe dubitatif.)

Vous en doutez peut-être, mais nous rendons compte - les documents sont à votre disposition - chaque année, à chaque fin d'exercice, de la manière dont les économies ont été réalisées et comment la qualité a été améliorée.

Monsieur le ministre, vous demandez un vote par scrutin public sur l'amendement I-102 rectifié. Vous nous soumettrez par ailleurs des amendements qui, par rapport aux propositions de l'Assemblée nationale, amélioreront légèrement la perception de la redevance.

Qu'il me soit permis de dire que les rapports parlementaires ne sont jamais lus. Je m'adresse au Gouvernement : c'est la troisième année consécutive que je rédige un rapport sur la redevance et que je le présente à la commission des affaires culturelles. Il manque une pédagogie de la redevance, mais la télévision publique s'engage enfin dans cette voie cette année.

Je rappelle que la fraude à la redevance, si elle est faible pour la résidence principale - 6 % à 7 % -, est considérable pour la résidence secondaire - 65 % - (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP), ce qui signifie bien que le principe même de la redevance n'a pas été expliqué aux Français. Puisque, pour la première fois, nous allons voter un montant de redevance, il faut que nous fixions un montant qui responsabilise les Français.

J'ai défendu ce principe avec M. Claude Belot et, on ne peut pas l'ignorer, avec le président de la commission des affaires culturelles, M. Jacques Valade, et avec l'ancien président de la commission des affaires culturelles, notre collègue et ami M. Adrien Gouteyron.

Monsieur le ministre, faute de voter cet amendement, je vous le dis tout net, vous nous proposerez, en 2004, d'autres mesures budgétaires dont je connais déjà le sens : vous reviendrez sur le principe de la publicité à la télévision, alors que nous avions introduit une clause restrictive. Pour trouver des recettes nouvelles au cours de l'année 2004, vous nous proposerez - je prends date - des augmentations qui seront contraires aux intérêts de la presse - elle traverse pourtant une passe difficile - et qui ne seront pas forcément très bien vues par l'ensemble des acteurs du paysage audiovisuel.

Monsieur le ministre, je sais que le scrutin public vous permettra d'obtenir une majorité. Je le regrette. Pour une fois que le Parlement propose un montant juste, adapté aux justes besoins d'un service public, j'aurais souhaité - je souhaite - que mes collègues puissent, en conscience, voter l'amendement que mon ami Claude Belot et moi-même avons déposé. (M. Jean-René Lecerf et M. Claude Belot applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan.

M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'une quinzaine de minutes, avant le vote de l'amendement n° I-102 rectifié et le débat sur les recettes des collectivités locales.

M. le président. Ne serait-il pas préférable d'entamer immédiatement le débat sur les recettes des collectivités locales ?

M. Josselin de Rohan. Nous allons nous réunir rapidement, monsieur le président, et cette brève suspension ne retardera pas trop le débat.

M. le président. Le Sénat va donc accéder à votre demande, monsieur de Rohan.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures quarante, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)