M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Rien que cela !

Mme Odette Terrade. Ainsi, il est prévu de revenir sur la récente déductibilité des intérêts d’emprunt, qui serait trop budgétivore. Le Pass-Foncier serait également supprimé parce que les fonds du 1 % logement ne suffisent pas à le financer.

Enfin, exit le prêt à taux zéro, dont le plafond avait pourtant doublé avec le plan de relance ; place au nouveau prêt à taux zéro, dit « PTZ+ », sorte de PTZ amélioré qui pourrait concerner 380 000 bénéficiaires en proposant des montants et des durées de prêt allant jusqu’à trente ans. Ce prêt serait universel pour les primo-accédants et sans condition de ressources.

Cette réforme aurait également le mérite principal à vos yeux de participer à l’effort de réduction des dépenses publiques puisque son coût devrait atteindre 2,6 milliards d’euros, ce qui permettrait de réaliser une économie de 1,6 milliard d’euros par an.

À ce sujet, je trouve les propos de Mme Mathilde Lemoine, directrice des études à HSBC France, particulièrement intéressants : « Il ne faudrait pas que l’argent injecté dans l’accession ne serve qu’à alimenter la hausse des prix ».

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. D’accord !

Mme Odette Terrade. Quelle lucidité !

En réalité, vos mesures ne servent que les banques et nourrissent un système pervers et pernicieux qui financiarise, spécule et prospère sur les difficultés sociales des plus démunis, exacerbant au final la fameuse « fracture sociale ».

Alors qu’il y a aujourd’hui 1,3 million de demandeurs de logement et, je le répète, 770 000 personnes en situation de surendettement, il me semble que ce débat sur l’accession à la propriété ne répond pas à l’urgence logement vécue et ressentie comme une priorité par nos concitoyens.

Soyons clairs : derrière les annonces sur l’aide à l’accession à la propriété, c’est la casse du logement social qui se confirme.

L’accès au logement social est durci, les bailleurs sont contraints de céder une partie de leur parc au nom de l’accession sociale à la propriété. Pour le logement social, on assiste à un véritable désengagement de l’État, incarné dans la période par le hold-up sur les offices d’HLM de 340 millions d’euros par an sur trois années prévu dans la loi de finances, et ce malgré le réajustement opéré en commission des finances à l’Assemblée nationale.

Pour notre part, nous estimons que le logement ne doit plus être considéré comme une marchandise. Les pouvoirs publics doivent mettre en place une politique publique et un service public du logement à la hauteur des enjeux. Cette politique devrait se caractériser par la mobilisation de l’ensemble des outils disponibles : fiscalité, politique foncière, définition du rôle des banques et intervention publique. Il nous semble primordial de revenir à un équilibre plus sain entre « aide à la pierre » et « aide à la personne ».

Dans ce cadre, afin d’inverser les logiques spéculatives, la création d’un pôle public de l’habitat se trouve réaffirmée. Celui-ci permettrait de lancer le grand programme de construction de logements, notamment sociaux, dont notre pays a besoin pour, enfin, garantir à tous le droit opposable au logement digne de notre société du XXIe siècle.

M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli.

Mme Colette Giudicelli. Monsieur le secrétaire d’État, afin de respecter les engagements du Président de la République, vous avez fait de l’accession à la propriété un objectif politique majeur.

Nous sommes tous d’accord sur ce point : accéder à la propriété est primordial pour chaque Français, car c’est un puissant ressort de promotion sociale, ainsi qu’une garantie patrimoniale essentielle, qui permet, notamment – je m’adresse ici à M. Repentin –, de sécuriser sa retraite.

Sans conteste, certaines mesures mises en œuvre par le Gouvernement, telles que la déduction des intérêts d’emprunts sous forme de crédit d’impôt et le maintien de l’éligibilité des primo-accédants au prêt à taux zéro, ont d’ores et déjà largement contribué au développement de l’accession à la propriété.

Ainsi, grâce aux mesures votées par le Parlement depuis le 1er janvier 2003, 5 millions de Français ont pu accéder à la propriété.

Il est un fait avéré : aujourd’hui, comme tous les orateurs qui m’ont précédée l’ont rappelé, 57 % des Français sont propriétaires. La moyenne européenne se situe à 66 %. Le Président de la République a fixé comme objectif 70 % de propriétaires ; je suis convaincue que nous parviendrons à le réaliser.

Il est en effet incontestable que les conséquences de la crise ont freiné de manière notable – on ne peut pas le nier – la possibilité d’une telle accession. Une part trop importante de nos concitoyens se retrouve en effet exclue du parcours résidentiel auquel ces derniers aspirent pourtant. Les conséquences économiques et sociales qu’une crise structurelle du marché pourrait avoir en matière de tensions sur le marché locatif privé, au gré des reports d’accession enregistrés, ne doivent pas être ignorées.

Les classes moyennes en particulier ont subi fortement les effets de cette crise et la pression immobilière : leurs dépenses contraintes moyennes ont quasiment doublé pour atteindre 40 % de leur budget ; le logement représente en moyenne plus de 20 % du budget d’un foyer, ce qui est tout de même un poste très important !

Afin de rendre plus efficace le dispositif d’accession à la propriété, le Gouvernement a donc décidé de réformer celui-ci. La multiplicité des outils créés au fil du temps a, il est vrai, rendu peu lisible et très coûteuse la politique d’accession. Pourtant, ces mesures sont essentielles pour lutter contre la précarisation des classes moyennes et modestes. La réforme est donc nécessaire et permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de saluer le travail effectué par vous-mêmes et par vos services.

L’ensemble des mesures qui figurent dans cette réforme nous seront présentées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, que le Sénat examinera à partir du 18 novembre prochain. Nous serons très attentifs, monsieur le secrétaire d’État, au dispositif qui nous sera proposé.

Dans les faits, le prêt à taux zéro plus, dit « PTZ+ », aide phare réservée aux nouveaux propriétaires d’une résidence principale, doit remplacer, à partir du 1er janvier, les trois grandes aides actuelles d’accession à la propriété.

Lancé en 1995, le prêt à 0 % demeure, aujourd’hui encore, un outil primordial pour l’accession à la propriété. En sécurisant l’apport personnel des ménages modestes et des jeunes primo-accédants, et par conséquent les banques elles-mêmes, il constitue un puissant soutien de la solvabilité de la demande. C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons qu’approuver la création du PTZ+.

J’aimerais cependant savoir, monsieur le secrétaire d’État, si les aides personnelles au logement, comme l’APL accession, ainsi que le plan d’épargne logement et l’avantage de la TVA à 5,5 % pour les constructions à moins de 500 mètres des zones de rénovation urbaine, cumulable avec le PTZ, seront maintenus ? Nous savons, en effet, que les plafonds de prix d’achat de logement vont plus que doubler dans certains cas, en raison de la crise qui sévit dans le secteur de l’immobilier, neuf et ancien.

Il est essentiel, également, que la nouvelle aide soit supérieure pour les ménages à revenus modestes et pour ceux des classes moyennes, insuffisamment aidés par les dispositifs actuels.

Il serait vain de penser qu’il existe des solutions miracles et que tout peut se résoudre grâce aux bailleurs sociaux.

Parmi ces bailleurs, il en est d’excellents, d’autres moyens, et d’autres encore moins bons. Certains lancent des opérations de construction et entretiennent correctement leurs immeubles, et d’autres non. Nous disions justement ce matin, lors d’une réunion, que nous devions nous battre face à certains bailleurs qui ne rénovent pas suffisamment les logements dont ils ont la charge ; ces appartements étant dans un état lamentable, ils restent vacants : on ne peut tout de même pas accepter de loger des enfants dans des chambres aux plafonds moisis...

Monsieur le secrétaire d’État, il faudrait aussi aider les petits propriétaires ! Je ne parle pas des patrons du CAC 40, mais de ceux qui ont économisé pour acheter, cinq ans avant de partir en retraite, un petit appartement qu’ils comptent mettre en location.

Ces propriétaires, qui souhaitent vraiment louer, se retrouvent avec des locataires pas très honnêtes qui, parfois, ne leur paient pas de loyer pendant deux, trois ou quatre ans, et qu’ils ont les plus grandes difficultés à faire expulser. Voilà pourquoi certaines villes se retrouvent avec un nombre phénoménal d’appartements vacants. Nous devons absolument agir pour résoudre ce problème.

Les maires devraient aussi prendre l’initiative, dans leur commune, d’imposer à un promoteur privé la construction d’un certain pourcentage de logements sociaux. Ce système, en vigueur dans ma ville, fonctionne très bien : les promoteurs récalcitrants doivent s’acquitter d’une amende de 80 000 euros s’ils ne construisent pas, dans leur parc privé, 20 % de logement sociaux. La légalité de cette décision a été examinée par la préfecture, qui l’a jugée recevable ; je tiens les documents à votre disposition, monsieur le secrétaire d’État.

Vous devez nous aider, monsieur le secrétaire d’État, pour mettre en place ces petites mesures, qui peuvent varier d’une région à l’autre.

Ainsi, lorsqu’une commune dispose de nombreux terrains, le maire a le devoir d’agir ! Et, lorsqu’un promoteur privé réclame en mairie le permis de construire 60 logements sur un terrain qu’il a déjà acquis, il convient de ne le lui délivrer que s’il s’engage à respecter ses obligations.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Colette Giudicelli. Vous pouvez compter, monsieur le secrétaire d’État, sur le soutien du groupe UMP pour la réalisation de cet objectif ambitieux, grâce auquel la France ne devrait plus être à la traîne des autres pays européens. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot.

M. Claude Jeannerot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 56 du projet de loi de finances pour 2011 tend à créer un nouveau prêt à taux zéro renforcé, au service d’une ambition portée par le Président de la République : la France des propriétaires.

Trois aspects positifs éclairent ce projet.

D’abord, il permet de simplifier le dispositif des aides de l’État en matière de logement, qui se caractérise par une complexité croissante des circuits de financement. On peut en espérer une lisibilité et une efficacité accrues.

Ensuite, le nouveau système recentre l’aide là où elle est nécessaire et s’inscrit dans un souci écologique. L’aide sera en effet renforcée pour les achats en zone tendue et les montants varieront selon qu’il s’agit, ou non, d’un logement respectueux de l’environnement.

Bien sûr, il convient d’en savoir plus sur les modalités de mise en œuvre, et je ne doute pas, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous en direz plus sur ce point. Nous savons tous que ces modalités sont décisives et conditionnent la réussite d’un dispositif.

Enfin, on ne peut que se réjouir de la suppression du crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt. Je rappelle, à cet égard, que les socialistes réclament depuis bien longtemps la fin des niches fiscales.

Cette suppression était souhaitable, car ce crédit d’impôt a un double effet pervers : il coûte de plus en plus cher à l’État – de 280 millions d’euros en 2008, il passerait, selon nos estimations, à près de 3 milliards en 2013 ! – et il ne bénéficie pas à ceux qui en ont vraiment besoin. Pour une aide qui n’a aucune influence sur la décision d’achat, vous conviendrez que c’est très coûteux. D’autant qu’elle ne correspond finalement qu’à une baisse de 0,6 % du taux d’intérêt contracté par les acheteurs...

Nous ne pouvons que partager votre intention de favoriser l’accession à la propriété. Il est normal que l’État crée les conditions les plus favorables à la réalisation d’un tel objectif. L’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne dispose-t-il pas que la propriété est l’un des droits naturels et imprescriptibles de l’homme ? Je peux d’ailleurs témoigner, en tant que président de l’Agence nationale pour l’information sur le logement, que l’accès à la propriété correspond à une aspiration majoritaire des ménages, et tout particulièrement des ménages modestes.

Nous devons cependant être conscients, mes chers collègues, que la situation du marché immobilier n’a jamais été aussi défavorable. La baisse du taux, conjuguée à l’allongement de la durée des prêts ne suffit pas à résoudre cette crise et l’envolée des prix crée nombre de désillusions, y compris au sein de la classe moyenne.

Thierry Debrand écrivait récemment dans L’Express qu’il existait au sein de cette classe « une vraie peur du déclassement » : le logement, marqueur social par excellence, deviendrait ainsi un facteur de paupérisation des classes moyennes, car celles-ci continuent de choisir parmi les offres les plus coûteuses du marché, pour tenter de progresser socialement, quitte à s’endetter au-delà du raisonnable ou à acheter trop petit.

C’est pourquoi il ne me paraît pas réaliste, dans le contexte actuel, de fixer cet objectif de 68 % à 70 % de propriétaires. Je doute de l’effet dynamique d’un tel chiffre. Pire : une telle annonce risque de décourager ceux qui sont loin de pouvoir accéder à la propriété.

Si les besoins étaient satisfaits par ailleurs, on pourrait considérer que ce chiffre traduit une volonté. Mais, dans un contexte où la question du logement, dans son ensemble, nécessite un grand « plan Marshall », votre objectif paraît dérisoire et décalé.

J’ai souligné les aspects positifs de votre projet : simplification renforcée, dimension écologique et réalisation d’économies par la suppression du crédit d’impôt. Or, comme Janus, votre projet a un visage double, dont voici le versant négatif : le fait de rendre universel le prêt à taux zéro est lourdement dommageable et, par certains aspects, inopportun, inefficace et injuste. En effet, ce nouveau prêt à taux zéro renforcé, destiné aux primo-accédants pour leur résidence principale, n’est soumis à aucune condition de ressources, bien que les modalités du prêt – je vous le concède ! – diffèrent en fonction des revenus et de la nature du bien acheté.

Dans le contexte actuel de restrictions budgétaires, votre proposition nous paraît inopportune. À l’heure où la ministre de l’économie déclare que les gouvernements doivent désormais s’orienter vers des politiques de réduction des dépenses pour contrebalancer les mesures de soutien à l’économie mises en œuvre pendant la crise économique, n’est-il pas contradictoire d’ouvrir le bénéfice du prêt à taux zéro à des personnes dont les revenus ne le justifient pas ? Vous rendez-vous compte, monsieur le secrétaire d’État, que la perte de recettes fiscales pour l’État, due aux deux tranches supérieures du barème du prêt à taux zéro, est évaluée à 400 millions d’euros ?

Sous cet aspect, votre projet me semble inefficace, car il ne peut avoir aucun impact sur la décision d’accéder à la propriété des ménages aisés ; vous ne créez qu’un effet d’aubaine. Ce dispositif s’inscrit dans une politique qui tend à favoriser les plus prospères et à créer des avantages pour ceux qui n’en ont pas besoin.

Enfin, votre proposition est injuste – et j’ai l’impression que M. Mayet partage cette opinion – à l’égard de ceux qui n’ont pas de revenus suffisants pour accéder à la propriété. Je note que nombre de ces personnes, dont les revenus ne leur permettent pas de devenir propriétaires, sont logées dans ce parc social auquel le Gouvernement voulait imposer un nouveau prélèvement.

Il était en effet prévu, à l’article 99 du projet de loi de finances, d’instituer un prélèvement sur les ressources financières des organismes d’HLM, fondé sur leur assujettissement à la contribution sur les revenus locatifs. Or la non-extension du nouveau prêt à taux zéro aux revenus les plus élevés aurait permis de réaliser l’économie recherchée à travers le prélèvement sur les loyers HLM. Ce nouveau prêt à taux zéro est donc un cadeau sans efficacité pour les plus aisés et un pied de nez pour les locataires d’HLM, ce qui est profondément choquant.

Au-delà de ces critiques, votre réforme continue de soulever un certain nombre d’interrogations.

Tout d’abord, répond-elle au besoin de sécurisation financière, en particulier sous l’angle des risques de surendettement ? Dans un contexte de dégradation du marché de l’emploi, l’accès au crédit ne risque-t-il pas, mécaniquement, de majorer les risques techniques de surendettement des ménages ?

Quels sont les garde-fous ? J’observe que seuls 5 % des emprunteurs en cours de remboursement sont couverts par une assurance chômage...

Même si je salue le rôle des agences départementales pour l’information sur le logement et la grande compétence de leurs personnels, dans la mesure où elles jouent un rôle essentiel dans la sécurisation des projets immobiliers, je me demande s’il ne conviendrait pas d’aller plus loin dans la recherche de mesures concrètes et opérationnelles.

Enfin, il convient de s’interroger sur l’efficacité de vos propositions en matière de mobilité résidentielle.

Je ne reviendrai pas sur les propositions du Centre d’analyse stratégique, évoquées par Thierry Repentin, concernant le champ fiscal. Quelle suite entendez-vous leur donner ?

Nous avons l’opportunité, aujourd’hui, d’examiner votre projet de loi tendant à favoriser l’accession à la propriété. Mais, au-delà de cet aspect du problème, le secteur du logement a besoin d’une grande politique de relance, d’un grand « plan Marshall », qui permettrait de résoudre son déséquilibre persistant et d’éviter que la crise ne devienne irréversible.

J’ai pu entendre récemment l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin réclamer un « plan de relance sociale » pour l’emploi et le logement. Tout se tient ! C’est là que se situe l’urgence pour notre avenir, car le logement constitue, avec l’emploi, la préoccupation première de nos concitoyens : ce sont deux préalables absolus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est vrai que le Président de la République a adressé au Gouvernement une feuille de route ambitieuse en matière d’accession à la propriété. J’ai été sensible aux propos tenus par les orateurs précédents, cependant je souhaite insister non seulement sur le caractère ambitieux de cet objectif, mais aussi sur sa valeur sociale.

En effet, il me semble que le Président de la République défend là un véritable projet de société, susceptible précisément de renforcer la cohésion sociale. C’est ainsi qu’il convient, me semble-t-il, de l’analyser.

Cet objectif est mobilisateur, même si certaines étapes restent à franchir pour l’atteindre, nous le savons bien. Tout d’abord, il convient de redonner confiance à l’ensemble des ménages, dans un climat économique encore dégradé et affaibli par la timide reprise de la croissance, la faible progression anticipée du pouvoir d’achat, la pression du chômage et l’augmentation des déficits publics. Ensuite, il importe de développer une offre de logements économiquement accessible, diversifiée et équilibrée.

Le contexte actuel impose naturellement de réformer les aides à l’accession à la propriété, notamment dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 que nous allons bientôt examiner. Tout en tenant compte de la rigueur budgétaire imposée par le poids des déficits publics, la reconfiguration des aides existantes doit permettre de réconcilier les ménages avec l’investissement dans la pierre et de développer l’accession à la propriété, notamment sociale, afin de rénover le parc HLM.

Je souhaiterais cependant évoquer la situation du marché de l’immobilier ancien, en particulier en zone rurale, monsieur le secrétaire d’État.

M. Adrien Gouteyron. Le marché de l’ancien ne doit pas être le parent pauvre de la réforme et j’aimerais, sans vouloir me montrer trop insistant, monsieur le secrétaire d’État, vous demander des précisions quant aux intentions du Gouvernement sur ce point.

Comme nombre de nos collègues, je suis maire d’une petite commune rurale. Je constate que, dans nos bourgs, de nombreux immeubles, non habités, sont désaffectés. Les organismes d’HLM, auxquels nous avons généralement recours, ont malheureusement atteint leurs limites et considèrent bien souvent qu’ils ne peuvent plus prendre en charge la réhabilitation de ces logements.

Or, de plus en plus d’habitants de nos communes souhaiteraient ardemment devenir propriétaires, mais n’y parviennent pas, faute de moyens suffisants pour faire face à une charge trop lourde.

M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. C’est précisément pour eux que nous faisons la réforme !

M. Adrien Gouteyron. De la même façon, certains propriétaires seraient prêts à vendre leurs biens immobiliers, mais ceux-ci ne sont plus valorisables du fait de leur vétusté. Pourtant, malgré l’attachement patrimonial qu’ils peuvent avoir pour leur bien, ces propriétaires accepteraient volontiers de s’en défaire. La situation est donc parfaitement bloquée.

Monsieur le secrétaire d’État, vous devez donner aux habitants des communes semblables à celle dont j’ai la charge, la possibilité de devenir propriétaires et de trouver des sources de financements !

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Adrien Gouteyron. J’en reviens à la réforme proposée par le Gouvernement. Le prêt à taux zéro renforcé, qui doit remplacer, à compter du 1er janvier prochain, les trois grandes aides actuelles d’accession à la propriété, mérite bien entendu d’être plébiscité. J’observe d’ailleurs que, si des réserves sont émises, les critiques ne portent pas sur le principe même de ce nouveau prêt.

En effet, ce financement demeure indispensable pour permettre aux jeunes de moins de 35 ans, qui représentent 50 % des bénéficiaires, aux catégories socioprofessionnelles les moins aisées et aux catégories intermédiaires d’accéder à la propriété. Depuis sa création, en 1995, le prêt à taux zéro reste un puissant levier pour la relance de l’activité de construction. Pour autant, c’est dans l’immobilier ancien que la mesure est le plus efficace et permet au plus grand nombre de Français d’être propriétaires de leur logement.

La mise en place d’un prêt à taux zéro renforcé, ou PTZ+, apparaît comme une évidence aujourd’hui pour remplir pleinement son rôle social, pour déclencher et encourager véritablement des projets d’accession à la propriété, notamment au sein des ménages modestes. Ainsi, il importe, pour garantir l’efficacité et la justice sociale du dispositif, que ce prêt puisse être modulé en fonction de la taille et des ressources des ménages, de la typologie des accédants et de la zone géographique des opérations financées.

J’ai pris bonne note des propos, d’ailleurs tout à fait équilibrés, de notre collègue Claude Jeannerot : il a estimé que certains ménages considérés comme aisés n’avaient peut-être pas besoin du prêt à taux zéro renforcé. Toutefois, les prix élevés de l’immobilier dans certaines zones géographiques rendent nécessaires la mise en place de ce dispositif en faveur de ménages même relativement aisés, afin de leur permettre d’accéder à la propriété. Il me semble donc que cette appréciation pourrait être opportunément nuancée. Mon cher collègue, je me permets de vous interpeller, car vos propos méritent d’être pris en considération. Puisque nous entretenons un véritable dialogue, je me permets de vous objecter qu’il me paraît nécessaire de tenir compte du zonage pour moduler l’aide en conséquence.

Notre économie a été mise à mal, et il est vrai que la construction de logements neufs peine à sortir de la crise. Les promoteurs, comme les particuliers, restent prudents. Cependant, il faut rester confiant sur l’évolution à terme du secteur du bâtiment, car les mesures prises depuis deux ans ont heureusement permis aux entreprises de conserver un outil de production performant, nécessaire à un redémarrage à moyen terme de l’activité. Je tiens d’ailleurs à saluer les entreprises de mon département, qui ont « tenu le coup » et traversé la crise dans des conditions, certes douloureuses, mais qui leur permettront de faire face à la reprise.

Je salue également la réforme des aides à l’accession à la propriété, bienvenue en cette période de sortie de crise. Bien entendu, monsieur le secrétaire d’État, comme l’a dit Mme Colette Giudicelli, les membres du groupe UMP apporteront tout leur soutien à cette réforme lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, oblige les communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants, en Île-de-France, et à 3 500 habitants, dans les autres régions, à atteindre une proportion de 20 % de logements sociaux sur leur territoire.

En 2006, le législateur, alors favorable à une évolution de la loi et à la prise en compte, dans ce pourcentage, des efforts des communes pour aider les ménages les plus modestes à devenir propriétaires, a estimé souhaitable que les logements bénéficiant du dispositif d’accession sociale à la propriété soient pris en compte dans le quota de 20 %, mais uniquement pour une période de cinq ans.

Le législateur de 2006 a donc considéré que ces logements sociaux pouvaient tout à fait légitimement continuer à être comptabilisés dans le quota des 20 %, puisqu’ils ne perdent en aucun cas leur caractère social, en dépit du changement de statut de leurs occupants. Il a cependant souhaité limiter dans le temps cette possibilité.

Il me paraîtrait souhaitable d’établir une nette distinction entre les logements initialement construits dans le but de faciliter l’accession à la propriété et les logements HLM acquis par leurs occupants dans des conditions précises, par exemple une durée d’occupation de plus de dix ans. En effet, ces deux cas de figure sont tout à fait différents. Il y aurait beaucoup à dire sur le premier d’entre eux, mais je me concentrerai sur le second : l’acquisition par l’occupant de son logement au terme d’un certain délai.

En effet, favoriser l’accession sociale à la propriété, en permettant à des personnes de conditions modestes, locataires d’un logement HLM, de devenir propriétaires, améliorant ainsi la mixité sociale de la commune, est un objectif noble, qui répond à une demande de la population, mais également au souhait du Président de la République, qui s’est déclaré en faveur de l’encouragement de l’accession à la propriété pour la résidence principale.

Or, les communes qui acceptent la demande de leurs habitants d’acquérir leur logement – et comment le refuser ? – sont de ce fait financièrement pénalisées à l’issue d’un délai de cinq ans par la diminution automatique du quota de logements sociaux résultant de ces ventes.

Cette situation me semble bien étrange. Pourquoi pénaliser ainsi les communes, parfaitement extérieures à la transaction, puisque la demande d’acquisition émane soit de l’organisme HLM, soit de l’occupant ?

L’occupant y trouve naturellement son compte, puisqu’il devient propriétaire : c’est le rêve de toutes les familles et la première des sécurités. Par ailleurs, je tiens à souligner que, si le logement social n’a pas vocation à être l’habitat de toute une vie, il l’est bien souvent dans les faits.

L’organisme d’HLM y trouve lui aussi son compte, puisqu’il reçoit en contrepartie le prix de vente, ce qui assure la rotation des logements sociaux, à laquelle vous semblez très attaché, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous vous êtes exprimé en ce sens dans cet hémicycle. La rotation des logements sociaux peut, dans ce cadre, être parfaitement respectée ! En effet, le bailleur social peut réinvestir les fruits de la vente dans la construction de nouveaux logements sociaux. Il serait d’ailleurs sain de l’obliger à le faire !

Pourquoi donc pénaliser la commune ? En plus de l’objectif difficile qu’elle s’efforce d’atteindre, on lui impose des paramètres sur lesquels elle n’a pas d’influence. J’utilise le verbe « imposer » à bon escient : en effet, comment imaginer que les communes refusent à leurs habitants de devenir acquéreurs ? C’est impossible, car ces personnes ont bien souvent réalisé et financé des investissements dans leur logement. Concevez-vous qu’un maire refuse de leur accorder l’autorisation d’acquérir leur logement, au motif que cette acquisition ferait diminuer le quota de logements sociaux de la commune ? C’est tout simplement absurde !

C’est la raison pour laquelle je souhaiterais que l’on établisse une distinction claire entre les logements construits dans le but de l’accession à la propriété, d’une part, et les logements du secteur social locatif, d’autre part.

Le maire fait généralement beaucoup pour son parc locatif social, car il a payé une surcote foncière, cédé des terrains, réalisé un travail considérable. Il me semble donc parfaitement absurde de le pénaliser, alors que personne ne peut lui reprocher son action, en faisant disparaître ce logement du quota de logements sociaux !