M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Monsieur le sénateur, Simon Sutour a rappelé tout à l’heure avec insistance que le traité de Lisbonne accordait, ce dont nous nous réjouissons, des pouvoirs plus importants au Parlement européen, notamment pour l’approbation du cadre financier pluriannuel. Il nous revient, bien évidemment, de garantir la légitimité démocratique des grands choix budgétaires de l’Union, et je me réjouis donc que ce traité ait conforté la place du Parlement européen dans le cadre institutionnel européen.

Nous devons néanmoins conjuguer ces garanties démocratiques avec la nécessité d’une programmation pluriannuelle de l’Union européenne dans la durée, afin de définir le sens de ses grandes actions. Ce cadre financier fixe de grandes orientations pour sept ans, vous l’avez rappelé. Cette durée, longue, est aussi la condition d’une prévisibilité optimale des engagements, donc d’investissements cohérents à moyen et à long terme.

Ce cadre est l’un des facteurs qui expliquent le succès des grandes politiques européennes telles que la politique de cohésion, la PAC, que vous avez citée, ou encore la politique de la recherche.

Le nouveau Parlement européen aura toutefois son mot à dire sur les orientations de la politique budgétaire de l’Union européenne : d’une part, les budgets annuels doivent être approuvés en codécision chaque automne et, d’autre part, selon les dispositions de la clause de révision à mi-parcours de 2007, que la France accepte, le Parlement européen aura la possibilité, s’il le désire, de revoir le contenu du budget, en lien avec le Conseil et la Commission.

Concernant la fongibilité, vous savez que la possibilité de réaffecter des sommes programmées dans une rubrique vers une autre existe, mais encadrée et limitée par les plafonds du cadre financier. L’un des principaux atouts de cette règle est qu’il garantit le respect, sur une période longue, des grandes orientations politiques que fixe le cadre. Cela n’est en rien contradictoire avec une bonne utilisation de l’argent disponible, grâce à la flexibilité applicable aux marges sous plafond entre années et entre rubriques. La France accepte cela, ce n’est pas le cas de tous les pays. En outre, permettez-moi de rappeler que la mise en œuvre de cette flexibilité dans le cadre du budget annuel se fera avec l’accord du Parlement européen, qui sera codécideur.

M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour la réplique.

M. André Gattolin. Merci, monsieur le ministre, pour toutes ces précisions. Je me permets tout de même d’insister : à mon sens, il serait plus conséquent de définir une programmation à cinq ans, qui serait ainsi en cohérence avec les mandats politiques. Les pays de l’Union européenne ont tous aujourd’hui abandonné la planification, pour certains il y a quelques années, pour d’autres dès les années quatre-vingt, précisément en raison de la difficulté de bâtir des plans quinquennaux ! Établir des plans septennaux apparaît donc particulièrement compliqué.

Enfin, concernant la question de la fongibilité, je vous remercie de votre vigilance. Travaillant actuellement sur le dossier du programme de soutien à la surveillance de l’espace, je sais que la Commission européenne suggère déjà de retirer 45 millions d’euros au programme Galileo, pourtant éminemment stratégique, afin d’essayer de financer l’ensemble de la politique de soutien à la surveillance de l’espace. La volonté de la Commission de mettre en œuvre la fongibilité, souvent à l’encontre de la volonté des États et des politiques, est inquiétante et présente des risques. Nous devons effectivement être très vigilants.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a deux manières d’aborder l’accord auquel est parvenu le Conseil européen de février 2013 sur le cadre financier pluriannuel de l’Union européenne pour les années 2014 à 2020.

On peut d’un côté se réjouir de ce succès, puisque, après un premier échec en novembre 2012, les Vingt-Sept sont enfin parvenus à s’entendre. Mais on peut aussi considérer qu’il n’y a aucune raison de s’en réjouir, puisque cet accord prévoit, pour la première fois dans l’histoire de l’Union européenne, un budget en baisse, bien loin d’être à la hauteur des enjeux.

Nous sommes très favorables à la construction européenne et très conscients des difficultés que traversent actuellement nombre d’États membres, dans ce contexte de crise exceptionnelle. Nous restons convaincus que nous ne pourrons en sortir qu’à l’aide d’un budget européen ambitieux, et non au rabais.

Les députés européens, toutes tendances confondues, ont fait part de leur mécontentement, menaçant de ne pas adopter ce budget. Ils demandent, avant toute décision pour l’avenir, le déblocage de 11,2 milliards d’euros dès cette année afin de faire face aux impayés de 2012, qui mettent en péril notamment les crédits dédiés aux jeunes.

Peut-être l’Europe est-elle victime de l’austérité qu’elle a elle-même imposée depuis plusieurs années ? Si la Commission semble prête à sortir de cette logique, en accordant un délai supplémentaire aux États membres menacés d’une procédure pour déficit excessif, il n’en reste pas moins que les rabais et les autres calculs égoïstes nuiront à long terme à l’ensemble des États européens.

Nous voulons, nous, que soit donnée une véritable impulsion à l'Europe, que le Président de la République a d’ailleurs initiée : le retour de la croissance et de l’emploi nécessite un budget européen significatif.

Monsieur le ministre, quels progrès pouvons-nous espérer sur la question des ressources propres ? Comment permettre à ce nouveau cadre financier de réorienter la politique européenne en faveur de la croissance ? Comment, dans le même temps, œuvrer à l’émergence d’un gouvernement économique européen, ce que souhaite désormais la France ? (M. André Gattolin applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Monsieur Mézard, je connais à la fois l’engagement de votre groupe sur les questions européennes et l’attention que vous portez, comme élu local, à la bonne consommation des fonds européens.

Or, souvent, dans ces dossiers un peu complexes, le diable est dans le détail. Il existe toutefois des solutions que l’on ne perçoit pas toujours sans une analyse précise.

Le mécanisme du cadre financier pluriannuel, tel qu’il a été adopté, garantira, en dépenses engagées, sur la période allant de 2014 à 2020, 50 milliards d’euros supplémentaires par comparaison avec la période de 2007 à 2013. Nous avons en effet placé des « cliquets » à la consommation qui permettent à nos pays d’engager plus d’argent sur un certain nombre de lignes budgétaires, celles qui sont consacrées à la croissance et à l’emploi, rassemblées dans la rubrique 1a, que je vous invite à consulter. Il s’agit de la recherche et de l’innovation, avec une augmentation de 40 %, du développement des infrastructures, avec 140 % d’augmentation par rapport à la période 2007 – 2013, et encore des infrastructures de transport, de développement de l’énergie et des télécoms, dont je sais qu’elles sont un secteur important pour les territoires de France et d’ailleurs. Cette rubrique recouvre également le programme « Erasmus pour tous », dont les crédits passeront de 8 milliards d’euros à 12 milliards d’euros, au bénéfice de la jeunesse de l’Union européenne.

Alors, bien entendu, cela nous conduit à nous demander si notre Europe se dotera un jour d’une ressource propre, au-delà de l’affectation de la TVA et, je l’espère, d’une partie du produit de la taxe sur les transactions financières. La France porte cette proposition. Elle est certes isolée, mais moins aujourd’hui qu'elle ne l’était il y a encore un an.

Peut-être verrons-nous dans les jours prochains, sinon dans les prochaines heures, certains chefs d’État ou de gouvernement rejoindre la France dans l’ambition de voir l’Union européenne se doter d’un budget assis sur des ressources propres. J’en forme devant vous le vœu, et je dispose peut-être de quelques informations qui me conduisent à l’optimisme ! (Mme Bernadette Bourzai, MM. Richard Yung et André Gattolin applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour la réplique.

M. Jacques Mézard. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos propos et de l’annonce sur laquelle vous les avez conclus. Vous nous confirmez très clairement la volonté de la France d’aller vers des ressources propres et vous laissez entendre que nous commencerions à être écoutés. Il s’agit là d’un changement fondamental, indispensable pour l’avenir de l’Europe.

Je vous remercie également d’avoir rappelé l’intérêt que notre groupe portait à l’Europe et le fait aussi qu’en tant qu’élus locaux nous avons un intérêt tout particulier à suivre le développement des crédits européens. C’est d’ailleurs, entre autres raisons, ce qui justifie notre attachement au cumul des mandats ! (Sourires.)

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Bien vu ! (Nouveaux sourires.)

M. Roger Karoutchi. C’est bien amené !

M. Jacques Mézard. Mais, au-delà, je vous remercie de nous avoir confirmé que les dépenses engagées seront supérieures à ce qu’elles avaient été dans la dernière période, depuis 2007. Je sais que vous y serez particulièrement attentif. Il est en effet important que nous puissions aller plus loin, en particulier sur la recherche, l’innovation et les infrastructures, parce que c’est cela qui montrera à nos concitoyens que l’Europe présente un avantage réel et qu’il est indispensable de toujours mieux la construire.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd’hui, sur l’initiative du Parlement européen, qui remplit là pleinement le rôle qui lui est dévolu par les traités, une vraie négociation est engagée avec le Conseil sur le budget 2013 et le cadre financier pluriannuel 2014-2020.

Comme toute négociation, elle est longue et difficile. Pour la première fois, toutefois, le budget européen ne se décide pas à huis clos. C’est un bon point pour la démocratie et un bon point pour la crédibilité des institutions européennes. À ce titre, nous tenons à saluer les propositions équilibrées et courageuses des eurodéputés, en particulier des membres du parti majoritaire, le Parti populaire européen, sous l’autorité de son président, M. Joseph Daul.

Nous souhaiterions tout d’abord, monsieur le ministre, connaître votre objectif en ce qui concerne le calendrier de la négociation. Visez-vous un accord sur le cadre financier pluriannuel avant l’été, comme semble le souhaiter la présidence irlandaise ?

Les conséquences de la négociation du budget européen sur la réforme de la PAC seront importantes, notamment en termes de calendrier. Comment les anticipez-vous ? La nouvelle PAC entrera-t-elle en vigueur en 2014 ? Pourrait-il y avoir un accord politique sur la réforme de la PAC avant le vote définitif du cadre financier pluriannuel ?

Par ailleurs, le gouvernement français a déclaré que l’essentiel de la PAC était préservé.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Oui !

M. Jean Bizet. Or, ce n’est pas tout à fait vrai,…

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Si !

M. Jean Bizet. … puisque l’agriculture, dans son ensemble, perd, et ce n’est pas négligeable, 52 milliards d’euros.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Non !

M. Jean Bizet. Pour la France, la baisse est de 10 % et les pertes du premier pilier ne sont pas compensées au niveau où vous l’avez laissé entendre, ou, plus exactement, comme l’ont laissé entendre le Président de la République lui-même et le ministre de l’agriculture, qui ont été assez affirmatifs sur le sujet. La contrepartie est en effet non pas de 1 milliard d’euros par an mais de 1 milliard d’euros sur sept ans.

Dans ces conditions, comment comptez-vous préserver notre politique d’installation des jeunes ? Comment allez-vous soutenir le verdissement, auquel nous sommes tous favorables, mais qui nécessite un accompagnement des producteurs ? Les financements disponibles pour la gestion des crises seront-ils suffisants ?

Les agriculteurs français, monsieur le ministre, ont besoin de connaître ces orientations ainsi que de disposer d’un échéancier et d’un budget clairs. Je vous remercie par avance de votre réponse.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Il est difficile dans le temps qui m’est imparti de vous répondre à la fois sur les négociations du budget pluriannuel et sur la PAC. Je vais donc aller à l’essentiel.

La position de la France quant aux demandes exprimées par le Parlement européen afin de trouver un accord nous donne bon espoir. La France a, de surcroît, accepté, il y a quelques jours, l’adoption du budget rectificatif demandé par le Parlement européen, qui souhaitait « solder » les dépenses du passé, estimées à 11,2 milliards d’euros. Après vérification des comptes, nous sommes tombés d’accord sur 7,3 milliards d’euros dès cette année. La France va donc verser un chèque de 960 millions d’euros à l’Union européenne, au titre de sa quote-part de ces dépenses du passé.

Les discussions avec le Parlement européen nous conduisent à être optimistes quant à une adoption du budget de l’Union européenne, sans doute durant la session de ce mois de juillet. C’est ma conviction, mais, bien entendu, personne, aujourd’hui, ne peut assurer que les choses se passeront bien ainsi.

La France, notamment, a fait preuve d’une grande ouverture afin de trouver un accord. Dans le cadre financier pluriannuel, il y a en effet des avancées qui sont pour nous essentielles, notamment la politique liée à l’emploi des jeunes et à la lutte contre le chômage. Faute d’accord, si nous ne votons pas le budget, nous n’aurons ni avancées ni plan d’aide alimentaire aux plus démunis.

En ce qui concerne la PAC, sachez, monsieur Bizet, que le retour attendu de la PAC pour les agriculteurs français sera assuré au niveau obtenu pour la période allant de 2007 à 2013. Simplement, mais vous connaissez excellemment ces sujets, certaines sommes seront réaffectées entre le premier et le deuxième pilier, qui sera renforcé par rapport à ce que nous obtenions par le passé.

Que recouvre le verdissement ? Toutes les adaptations de la politique agricole qui sont permises par le second pilier, c'est-à-dire la rotation des cultures, les prairies permanentes, les surfaces d’intérêt écologique, comme les haies. Ces indications sont présentes, aujourd’hui, dans le règlement que nous sommes en train de discuter en trilogue. Stéphane Le Foll, qui négociait encore en début de semaine durant une réunion informelle à Dublin, m’a assuré que nous étions proches d’un accord sur la partie agricole dès cette année, pour une application au 1er janvier 2015, 2014 étant une année de transition.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour la réplique.

M. Jean Bizet. Monsieur le ministre, je vous remercie de vos réponses. Je me permettrai, n’y voyez aucune malice, de considérer malgré tout que, si mes questions étaient claires, vos réponses l’étaient un petit peu moins…

Sur la partie budgétaire, par exemple, vous avez évoqué effectivement l’impasse de 11,2 milliards d’euros, héritée de la période précédente. Pour le moment, seuls 7,1 milliards ou 7,2 milliards d’euros ont été sécurisés, il en manque donc quelques-uns !

Pour ce qui concerne la politique agricole commune, le compte n’y est pas.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Mais si !

M. Jean Bizet. Le rattrapage de 1 milliard d’euros pour le deuxième pilier n’est pas annuel ; il porte sur sept ans, comme je l’ai précisé. Les agriculteurs français ont donc tout lieu d’être inquiets.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Non !

M. Jean Bizet. L’agriculture française ne sera pas aussi bien accompagnée par les fonds européens sur la période 2014-2020 que sur la période précédente. C’est qu’elle se trouve confrontée à une concurrence intra-européenne, avec l’augmentation de plus en plus importante des charges et des normes, notamment en matière environnementale - je ne dis pas que cette situation date de 2012,…

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Je vous le concède !

M. Jean Bizet. … mais l’accumulation commence à devenir préoccupante -, et à une concurrence avec les pays tiers rendue plus intense encore du fait du manque de compétitivité découlant du surcroît de charges subies par les professions agricoles. (M. René-Paul Savary applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis.

M. Jean Arthuis. Monsieur le ministre, le Conseil européen qui s’est tenu les 7 et 8 février dernier est parvenu à un accord sur le cadre budgétaire pluriannuel 2014-2020, au terme d’âpres discussions pour contenir l’évolution des crédits, notamment des dépenses administratives.

La Commission européenne a dû accepter de réduire sa proposition, qui était d’un peu plus de 63 milliards d’euros, à 61,6 milliards d’euros. Les chefs d’État et de gouvernement ont exercé une pression forte sur la Commission européenne pour qu’elle réduise ses dépenses administratives, notamment les frais de personnel, qui comptent pour 75 % du total de ces dépenses.

Pour mener à bien cette mission délicate, la Commission propose de porter la durée du temps de travail hebdomadaire de 37,30 heures à 40 heures, sans compensation salariale, et de relever l’âge légal de départ à la retraite de soixante-trois ans à soixante-cinq ans. Ces mesures doivent être engagées dans les plus brefs délais pour réduire de 54 % les frais de personnel d’ici à 2018.

Monsieur le ministre, je souhaite connaître la position du gouvernement français sur ce sujet. Pouvez-vous nous confirmer qu’il soutient l’augmentation de la durée du temps de travail hebdomadaire pour l’ensemble des 50 000 fonctionnaires européens ainsi que le relèvement de l’âge légal du départ à la retraite ? (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous avez raison de le souligner, le cadre financier pluriannuel a été négocié dans des conditions très difficiles dans la mesure où plusieurs pays voulaient s’en tenir à un budget de 820 milliards d’euros. Après discussion, nous sommes parvenus à 960 milliards d’euros.

Nous considérons en effet que l’Europe doit se doter d’un budget qui lui permette d’agir concrètement à l’égard des pays qui plaident aujourd'hui en faveur d’une relance par l’économie. Toutefois, cela signifie que nous devons en quelque sorte négocier des efforts pour toutes les parties prenantes.

Je le dis ici, nous voulons que la fonction publique européenne soit forte et de qualité, car la mise en place de politiques structurelles cohérentes en dépend aussi.

C’est ce à quoi nous nous attachons dans le cadre des négociations en cours sur le statut de la fonction publique européenne. Il est indispensable que la Commission européenne elle-même, qui avait proposé une hausse de plus de 10 % de la rubrique des dépenses administratives, ne s’exonère pas des efforts qu’elle demande aux fonctions publiques nationales, des efforts que la France réalise, me semble-t-il, en parfaite conformité avec ses responsabilités. C’est ce que nous avons plaidé, lors de la négociation du cadre financier pluriannuel.

C’est dans ce contexte qu’est engagée, depuis quelques semaines, une réforme de la fonction publique européenne, et un accord devrait aboutir d’ici au vote du budget, en juillet prochain ; c’est en tout cas ce que nous espérons.

M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour la réplique.

M. Jean Arthuis. Je veux rendre hommage au Gouvernement pour le courage qu’il manifeste en proposant de porter l’âge légal de départ à la retraite de soixante-trois à soixante-cinq ans et d’augmenter la durée du temps de travail hebdomadaire de 37,3 heures à 40 heures. (Rires sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

Monsieur le ministre, je vous assure du soutien de l’UDI-UC.

Je me suis étonné des commentaires du Président de la République lorsque la Commission européenne a fait connaître ses recommandations pour permettre à la France de respecter la trajectoire et de ramener ses déficits publics sous le seuil de 3 % du PIB.

Dans un souci de cette cohérence qui est une autre des vertus du Gouvernement –, il serait peut-être souhaitable d’ouvrir des négociations dans notre pays pour revoir la durée du temps de travail hebdomadaire dans les trois fonctions publiques et peut-être d’être audacieux s’agissant de la réforme des retraites et de l’âge légal de départ. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le ministre, ma question porte sur le budget de la future politique agricole commune dans le cadre financier pluriannuel de l’Union européenne. Par ailleurs, j’évoquerai aussi la politique de cohésion. Ces deux politiques étant les plus visibles de l’Union européenne, elles sont naturellement au cœur des préoccupations de nos territoires.

Le gouvernement français, à l’instar des gouvernements des vingt-six autres États membres, est entré depuis le 13 mai dernier dans un trilogue entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, y compris pour ce qui concerne la politique agricole commune.

Je relève que M. Bizet pose, de manière inlassable, d’ailleurs, la question du montant du budget de la PAC à chaque fois qu’une séance de questions cribles thématiques lui en fournit l’occasion. En tant qu’ancienne députée européenne, membre de la commission de l’agriculture et du développement durable, je veux lui dire que tout le monde savait à Bruxelles que les crédits de la PAC allaient décroître sur la période 2007-2013.

Comme M. Cazeneuve vous l’avait fait observer à de nombreuses reprises, cher collègue, je vous rappelle que le montant dévolu à la PAC correspond exactement au montant de la dernière année, en l’occurrence celle de 2013, multiplié par sept.

Il fallait donc se préparer à cette évolution, et je pense que la France a particulièrement bien tiré son épingle du jeu, en obtenant 1 milliard d’euros supplémentaire pour le développement rural.

Monsieur le ministre, qu’en sera-t-il du développement rural au titre du cadre stratégique plurifonds qui sera désormais le nôtre ? Par ailleurs, comment peut-on s’assurer que les zones rurales pourront accéder dans de bonnes conditions au Fonds européen de développement régional, le FEDER, et au Fonds social européen, le FSE ?

Enfin, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir plaider en faveur du Fonds européen d’aide aux plus démunis, auquel il manque manifestement 1 milliard d’euros. (M. André Gattolin applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Madame la sénatrice, votre question me permet de réaffirmer à l’intention de tous vos collègues qui m’ont interrogé sur les questions agricoles que les retours espérés pour la France au titre de la politique agricole commune seront, pour la période 2014-2020, identiques à ceux qui avaient été actés pour la période 2007-2013, c'est-à-dire 47,6 milliards d’euros au titre du premier pilier et 8,8 milliards d’euros au titre du deuxième pilier, ce dernier étant renforcé dans la prochaine programmation. Vous y serez sensible, madame la sénatrice, en tant que défenseur inlassable de la montagne, car cela signifie que des massifs seront plus aidés que par le passé.

À nos yeux, une bonne enveloppe était la condition nécessaire pour pouvoir moderniser et réformer la PAC, en la rendant plus juste, notamment au profit des jeunes agriculteurs et des petites exploitations d’élevage notamment, et plus verte aussi, afin de répondre à ce qui correspond aussi à une demande de la société.

S’agissant du développement rural, dont vous savez qu’il relève autant de la PAC que de la politique de cohésion, le renforcement du deuxième pilier de la PAC, avec le Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, y contribuera directement.

Quant à la politique de cohésion, nous nous sommes attachés à faire en sorte que la prochaine programmation permette l’action conjointe de tous les fonds structurels, qu’il s’agisse du FEDER, du FSE, du FEADER ou du FEAGA, le Fonds européen agricole de garantie.

Vous m’avez interrogé sur la question des régions en transition, une innovation que le gouvernement précédent n’avait pas souhaité défendre.

M. Simon Sutour. C’est vrai !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Ces régions en transition ont dorénavant la garantie d’obtenir des aides d’un montant supérieur.

Enfin, vous souhaitez, madame la sénatrice, que le Fonds européen d’aide aux plus démunis soit réévalué de 1 milliard d’euros.

Vous auriez pu rappeler que le Conseil européen avait pris la décision de le supprimer au 31 décembre 2013. C’était écrit noir sur blanc ! Le Président de la République française a demandé en février dernier que les associations caritatives qui œuvrent à nos côtés sur les territoires puissent bénéficier de ce fonds. Il a été pérennisé à hauteur de 2,5 milliards d’euros, et nous sommes ouverts à la demande du Parlement de le porter à 3,5 milliards d’euros.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour la réplique.

Mme Bernadette Bourzai. Je salue la détermination du Président de la République et du Gouvernement, la vôtre et celle de Stéphane Le Foll, qui, dans le trilogue agricole, mène, me semble-t-il, de façon tout à fait magistrale, des négociations dans l’intérêt de l’agriculture française et, plus particulièrement, des secteurs qui en ont le plus besoin.

Pour ma part, j’estime que la répartition des aides doit être plus juste pour les populations des zones défavorisées et des zones d’élevage.

Je vous remercie des éléments de réponse que vous m’avez apportés quant au Fonds européen d’aide aux plus démunis. La commission des affaires européennes a adopté, ce matin, une proposition de résolution pour faire de 2014 l’année de lutte contre le gaspillage alimentaire. Certes, il faut produire, mais il faut aussi respecter les produits agricoles et les consommer convenablement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Comme l’a dit mon collègue Jean Bizet, nous nous réjouissons de l’engagement réaliste et responsable du Parlement européen, en particulier celui de nos collègues du PPE. La négociation budgétaire, qui a été difficile, peut paraître complexe, mais elle conforte la démocratie européenne, dans l’esprit du traité de Lisbonne.

Je ne reviendrai pas sur le niveau du budget, en baisse – certes, de manière moindre qu’on aurait pu le craindre –, mais c’est le résultat, il faut bien l’accepter, de la crise économique que traversent la plupart des pays européens.

Cette situation ne doit pas nous faire douter de l’avenir. Plus que jamais, nous devons afficher nos convictions européennes et notre ambition politique pour l’Europe, en maintenant l’objectif d’un budget plus élevé à terme, lorsque cela sera possible, mais, peut-être et surtout, plus efficace.

Le Gouvernement évoque, de manière assez incantatoire, le retour à la croissance. Je m’interroge, car je ne comprends pas bien quelles en sont les conséquences en matière budgétaire, et pour cause.

Le Gouvernement est-il l’avocat d’une politique de stimulation de la dépense au niveau européen ? Défend-il des programmes qui conforteraient la croissance potentielle ? Soutient-il des projets transfrontaliers à forte plus-value ? Il me semble qu’il serait nécessaire de s’entendre avec nos partenaires européens sur ces questions, en préalable à toute utilisation des financements européens.

Par ailleurs, dans la négociation en cours sur le budget, le Parlement européen a mis sur la table des propositions concrètes et courageuses. Je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur ces propositions.

Êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à accepter une clause de revoyure, qui est une manière d’adapter le budget européen à l’évolution de la situation économique ?

Êtes-vous prêt à accepter plus de flexibilité ou de fongibilité dans la gestion des crédits ?

Enfin, êtes-vous prêt à garantir une gestion rigoureuse, grâce, par exemple, à une révision générale des politiques publiques adaptée au niveau européen ?