M. Claude Dilain, rapporteur. Tout à fait ! J’ai même essayé !

M. François Lamy, ministre délégué. Mais cela n’a pas été possible… De même, dans mon département, tout le monde trouve parfaitement normal que Grigny et Viry-Châtillon, deux communes en grande difficulté, se trouvent dans la même intercommunalité, à proximité de la communauté d’agglomération d’Évry, qui comprend, certes, des quartiers prioritaires de la politique de la ville, mais qui jouit d’un dynamisme économique beaucoup plus important. Cela n’est plus acceptable.

La loi d’affirmation des métropoles provoque des évolutions. Je propose que, dans les métropoles qui seront mises en place avec des conseils de territoire, la politique de la ville et les crédits afférents soient délégués à ces derniers. Ce terrain est cependant encore un peu mouvant, et évoluera peut-être.

Je vous soumets donc l’idée suivante : les préfets de région, en Île-de-France et dans les Bouches-du-Rhône, pourraient arrêter les périmètres pertinents sans attendre la création des métropoles, de façon à construire des territoires plus larges au plus tôt tout en tenant compte de la réalité, particulièrement à Marseille.

Je ne suis en effet pas certain, après avoir échangé avec plusieurs élus de la ville et du département, que le conseil de territoire soit le bon échelon, compte tenu des grandes difficultés que rencontre cette ville. Nous serions sans doute plus efficaces en y établissant des contrats de ville infracommunaux. J’évoquais ce matin même avec le président Gaudin la possibilité de mettre en place deux ou trois contrats de ville spécifiques à l’intérieur du périmètre de la ville.

Pour ces deux métropoles, les préfets de région, en concertation avec les élus, bien entendu, auraient donc la possibilité d’adopter des périmètres différents de ceux des intercommunalités actuelles, voire des futurs conseils de territoire.

Monsieur Bécot, je vous ai répondu en ce qui concerne la liste des quartiers, mais je ne veux pas vous laisser dire que les financements baisseraient. Cela constituera également ma réponse à Mme Schurch. Depuis l’entrée en fonctions du Gouvernement, les financements de la politique de la ville ne sont pas en baisse. Ils ont été sanctuarisés, en 2013 et en 2014, au niveau de l’année 2012. Sans chercher la polémique, je rappellerai tout de même qu’il n’en allait pas ainsi les années précédentes : ces crédits ont baissé de 35 % entre 2009 et 2012.

Malgré les contraintes financières auxquelles nous sommes confrontés, le Gouvernement a décidé de maintenir le niveau des crédits, tout en diminuant le nombre de quartiers concernés, afin d’en faire plus pour les futurs quartiers sélectionnés. Je ferai tout pour qu’il en soit de même en 2015, en 2016 et en 2017 : j’ai déjà entamé les discussions à cette fin avec le ministre du budget. Je compte sur votre soutien unanime pour que cette dotation puisse être maintenue voire, à terme, augmente à nouveau.

La réforme que je présente, j’y insiste, n’a toutefois rien à voir avec la question du montant des crédits de la politique de la ville. Indépendamment de ce montant, il était indispensable de clarifier la question des territoires bénéficiaires, afin de concentrer l’action sur un certain nombre de quartiers prioritaires.

Monsieur Dallier, je vous ai répondu sur le Grand Paris. Concernant les nouvelles missions de l’ANRU, grâce aux crédits du plan d’investissements d’avenir, l’agence sera en capacité d’entrer au capital de sociétés dédiées à la rénovation urbaine. J’insiste sur le point suivant : il n’est pas question que l’ANRU s’aventure sur d’autres terrains. Nous savons toutefois que, dans certains territoires, une meilleure articulation entre capitaux privés et capitaux publics permettra d’accélérer le développement économique des quartiers.

Rassurez-vous, la méthodologie que je propose au travers de ce texte est précise et bien bornée, et comporte des crédits affectés à des missions spécifiques.

Je n’aurais pas accepté qu’il en soit autrement : l’ANRU ne doit pas tout d’un coup se détourner de sa mission originelle, à savoir la rénovation des quartiers. Toutefois, il nous faudra, à l’avenir, examiner la situation de la région parisienne, avec, tout particulièrement, le Grand Paris et les quartiers situés aux abords des gares. En effet, la moitié des gares du Grand Paris se trouvent actuellement dans des zones urbaines sensibles.

M. François Lamy, ministre délégué. L’intervention de capitaux privés dans le domaine de la construction de logements permettrait d’accélérer la mixité fonctionnelle, la mixité urbaine et la mixité sociale autour de ces gares. Cela favoriserait cette action et éviterait que chacun s’en tienne à agir de son côté. Avoir des sociétés spécialement dédiées à cet effet présenterait l’avantage de mieux coordonner les actions entre capitaux privés et capitaux publics.

Par ailleurs, j’ai bien entendu vos inquiétudes quant aux compétences de l’ANRU au niveau international. En la matière, je suis à la fois ambitieux et modeste.

Les compétences de l’ANRU concernant le renouvellement urbain sont internationalement reconnues, et nous sommes sollicités. Vous avez cité la Tunisie, mais il en est de même pour l’Algérie, pays dans lequel je me suis rendu avec le Premier ministre.

Les autorités algériennes souhaitent que nous créions une agence algéro-française traitant des questions urbaines. Elles demandent à la France d’apporter non pas de l’argent –l’Algérie n’en a pas besoin ! –, mais des compétences, afin de fixer des standards et des normes communs de nature à accroître la qualité de la construction, qu’il s’agisse du logement neuf ou du renouvellement urbain. Il y a des besoins énormes en la matière. Or, avec des moyens limités, l’ANRU peut apporter des compétences : outre des techniciens, elle regroupe aussi des urbanistes, des architectes, et les entreprises qui travaillent avec elle peuvent aussi accompagner le mouvement.

Avec des moyens limités, je le répète, nous pouvons apporter un plus à nos entreprises et au savoir-faire français, qui, face à une forte concurrence émanant, entre autres, de certains pays asiatiques, notamment du plus grand d’entre eux, doivent conserver les parts de marchés qu’elles détiennent dans certains pays. Nous comptons d’ailleurs étendre l’action de l’agence que nous prévoyons de mettre en place en Algérie à l’ensemble du bassin méditerranéen, à l’Espagne, au Maroc et à la Tunisie. Tout cela n’est pas sans lien avec la politique de la ville.

Soyez donc rassurés sur ce point, mesdames, messieurs les sénateurs. D’ailleurs, les moyens humains consacrés à l’action internationale de l’ANRU seront forcément limités. Nous n’avons pas besoin de beaucoup d’argent pour faire beaucoup.

Mme Létard a évoqué la question des moyens consacrés au deuxième PNRU ; nous aurons peut-être l’occasion d’y revenir au cours du débat.

À ma prise de fonctions, j’ai constaté que le financement du premier programme n’était pas sécurisé. Il a fallu entamer des discussions avec l’ensemble des partenaires financiers de l’ANRU pour assurer le financement jusqu’à la fin de l’année 2015. C’est chose faite : nous avons trouvé avec l’ensemble de nos partenaires, tout particulièrement avec ceux du secteur du logement, les moyens de clore ce premier programme et de faire monter en puissance le nouveau plan de renouvellement urbain.

Là encore, nous le savons par expérience, il faudra tout à la fois prévoir une montée en régime du plan de construction des nouveaux quartiers, dont la liste sera déterminée au mois de septembre prochain, en coordination entre l’ANRU et les collectivités, et cibler les quartiers qui nécessitent une restructuration urbaine importante, ceux n’ayant pas été retenus dans le premier programme ou méritant d’être achevés, voire organiser de petites opérations de proximité, qui seront une sorte de rotule entre les quartiers déjà rénovés et les quartiers actuels.

Dans le cadre du contrat de ville, les nouvelles équipes municipales devront se lancer dans de nouvelles études avec leurs intercommunalités, ce qui prendra du temps. Comme ils savent qu’ils doivent cofinancer ces investissements, les élus ont besoin d’élaborer leurs plans pluriannuels d’investissement. Je n’ai donc pas d’inquiétude sur le fait que l’on arrive à bien « tuiler » les deux programmes.

En revanche, il aurait été dommageable d’attendre la fin du premier programme pour commencer un nouveau plan de renouvellement urbain. Je me suis battu au sein du Gouvernement pour qu’il n’en soit pas ainsi.

Concernant la comparaison des 5 milliards d’euros avec les 12 milliards d’euros du programme national de rénovation urbaine, je vous rappelle que M. Borloo avait annoncé au démarrage 2,5 milliards d’euros,…

M. Claude Dilain, rapporteur. Deux milliards !

M. François Lamy, ministre délégué. … et que l’opération est, petit à petit, montée en puissance. Moi, dès le départ, je vous propose le double. Avec la politique menée par le Gouvernement, notamment en termes de redressement de nos finances publiques, nous pouvons espérer une forte montée en puissance au cours des prochaines années.

Ne soyez donc pas inquiets, mesdames, messieurs les sénateurs, quant à notre capacité à répondre à la demande au cours des dix prochaines années. Deux quinquennats, c’est le laps de temps minimal que la majorité s’est fixée pour mener son action ! Nous serons en mesure de monter en puissance à la fin du premier quinquennat ou au début du second.

J’ai bien compris, madame Benbassa, que la participation des habitants constituait un plus, mais que ce n’était pas suffisant.

Il faut se rendre compte de la réalité des choses. J’en ai beaucoup parlé avec Mohamed Mechmache et Marie-Hélène Bacqué, les auteurs de ce magnifique rapport. Ceux-ci sont d’ailleurs allés au-delà de la mission que je leur avais confiée, à savoir la participation des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville, en traitant assez naturellement des questions de l’éducation nationale, des relations entre la police et les citoyens, voire du droit de vote des ressortissants étrangers à l’intérieur non seulement de ces quartiers, mais également sur l’ensemble du territoire.

Pour ma part, je me concentre sur ma mission, à savoir la politique de la ville, tout en étant conscient de la petite révolution culturelle et du changement de logiciel, si je puis dire, qui seront nécessaires pour mettre en œuvre cette politique. Je ne mets personne en cause : tous les élus mènent des concertations, ainsi que l’a souligné M. Dallier.

M. François Lamy, ministre délégué. Pour avoir visité quelque 70 villes et 150 quartiers, je puis vous dire que de la concertation et de la participation, j’en ai vu de toutes les couleurs et sous toutes les formes, de la maison de projet, dans laquelle les habitants s’impliquent totalement au travers d’outils leur permettant de mesurer l’évolution de leur quartier, au plan affiché dans le hall de la mairie après la tenue d’une réunion de quartier à 21 heures, à laquelle n’ont pu assister que les habitants qui ne se lèvent pas à 5 heures du matin…

M. Marc Daunis. Exactement !

M. Claude Dilain, rapporteur. Tout à fait !

M. François Lamy, ministre délégué. Voilà un changement total, qui exige une expérimentation et une réflexion. Il conviendra également de former nos concitoyens : on ne lit pas facilement un plan, pas plus qu’on ne lit spontanément un plan de financement.

Dès cette année, l’ACSÉ a déjà réservé des crédits pour commencer à former les citoyens dans les douze sites expérimentaux retenus. S’il n’est pas nécessaire de former les élus, former les techniciens l’est certainement. Là encore, je ne mets personne en cause, mais nos techniciens n’ont pas toujours été formés au contact avec les citoyens. Parfois, il en est de même pour certains de nos fonctionnaires territoriaux. Ce n’est pas remettre en cause leurs compétences que de leur demander de se former. Au vu de la situation prévalant dans nos quartiers et, plus largement, à l’intérieur de notre pays, il nous faut tous agir, comme je l’ai dit à la tribune, quelle que soit notre orientation politique, pour combler le décalage existant entre nos concitoyens et le monde politique en général.

L’étude publiée hier par le CEVIPOF, le Centre de recherches politiques de Sciences Po, montre que nos concitoyens éprouvent encore une grande confiance à l’égard des conseils municipaux – même si la proportion est en baisse –, tandis que les élus politiques nationaux, les députés, les sénateurs, les ministres, voire le Président de la République, voient leur cote de confiance décroître au fil des années. Je vous le dis, les prochains seront les maires ! Nous le savons, certains élus sont tentés de ne plus informer les habitants et de prendre les décisions à leur place, au motif que le monde public est devenu très complexe. Cette situation n’est pas acceptable, ni tolérable.

C’est pour cette raison que je souhaite étendre les conseils citoyens, proposés dans le rapport Bacqué-Mechmache, à tous les quartiers de la politique de la ville. Il ne faut pas attendre que cela émane du terrain. C’est l’un des sujets sur lesquels je me suis entretenu avec Mohamed Mechmache et Marie-Hélène Bacqué, qui trouvaient étrange d’imposer des conseils citoyens et de ne pas attendre. Mais si l’on attend que cette initiative émane du terrain, on risque d’attendre longtemps.

M. François Lamy, ministre délégué. Je vous présenterai donc un amendement en ce sens. À la suite de la concertation et des discussions que j’ai eues, je propose la mise en place d’un conseil citoyen dans chacun des quartiers de la politique de la ville, constitué, pour moitié, de représentants des associations de proximité et des acteurs économiques – le président de l’association des commerçants, les artisans du quartier –, et, pour l’autre moitié, de représentants de la population, dont je propose qu’ils soient tirés au sort.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques, et M. Claude Dilain, rapporteur. Très bien !

M. Marc Daunis. Bonne idée !

Mme Mireille Schurch. Tout à fait !

M. François Lamy, ministre délégué. Cela me semble être la meilleure des méthodologies. On verra si l’on se réfère aux listes de clients d’EDF. Il faut susciter les vocations, à l’instar de ce qui se fait pour les jurés d’assises,…

Mme Maryvonne Blondin. Cela fonctionne très bien !

M. François Lamy, ministre délégué. … de façon à s’assurer que personne ne préempte la parole publique au sein de ces quartiers, ce qui peut se produire.

Dans le cadre de cet amendement gouvernemental, je proposerai de préciser que l’action des conseils citoyens sera menée conformément aux valeurs de la République : liberté, égalité, fraternité et laïcité,…

Mme Mireille Schurch. Très bien !

M. François Lamy, ministre délégué. … en respectant bien sûr les principes de neutralité politique.

Ces conseils citoyens fonctionneront de manière indépendante – c’est la différence avec les conseils de quartier –, dans la mesure où ils ne seront pas présidés par les élus. Ils mèneront leur propre vie et l’État garantira l’indépendance de leur fonctionnement au moyen d’une subvention, en faisant confiance à l’initiative citoyenne. Tel est le sens de l’amendement que je présenterai.

Après le débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale et en commission au Sénat, j’ai senti la nécessité de préciser les choses en la matière. Les conseils citoyens constituent une avancée considérable. Je sens bien que nous rencontrerons des difficultés, madame Benbassa. Il est vrai que l’on pourrait vouloir plus, mais si, dans trois ans, 1 300 conseils citoyens sont en place au sein des quartiers de la politique de la ville, ce sera un grand progrès.

M. Philippe Dallier. Tout à fait !

M. François Lamy, ministre délégué. Dans vos interventions, vous n’avez pas parlé du projet gouvernemental de créer une fondation.

Le Gouvernement a l’obligation de remettre un rapport sur la possibilité de créer une fondation destinée à lever des capitaux privés et publics en faveur de l’innovation sociale et du développement économique, secteurs qui vont de pair à l’intérieur des quartiers populaires, comme je l’ai indiqué précédemment. Cette initiative émane du terrain, et il revient au Gouvernement non seulement de l’accompagner, mais également de créer les conditions permettant de faire exister cette fondation.

Marie-Hélène Bacqué et Mohamed Mechmache proposaient, je le rappelle, que le financement de cette fondation soit en partie assuré par les crédits de la réserve parlementaire. Bien entendu, il n’appartient pas au Gouvernement de décider, mais je me permets néanmoins d’attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur cette proposition…

Dans une période de méfiance à l’égard du monde politique, que chaque parlementaire consacre 10 % des crédits de la réserve qui lui sont attribués au financement d’une fondation d’innovation sociale et de développement économique dans ces quartiers me semble une bonne idée. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) Mais je n’en dirai pas davantage ; il y va de la responsabilité des parlementaires, à qui il incombera de prendre la décision dans les prochains mois.

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est une suggestion !

M. François Lamy, ministre délégué. Je vous invite simplement à y réfléchir !

Monsieur Mirassou, je crois vous avoir répondu au sujet de la participation citoyenne.

En ce qui concerne le développement économique, le Conseil économique, social et environnemental rendra public, lors de sa séance plénière de demain, le rapport que je lui ai commandé sur l’évaluation des zones franches urbaines ; l’avenir des ZFU va donc redevenir un sujet d’actualité.

Même si je n’ai pas eu connaissance de ce rapport, je pressens qu’il proposera que le dispositif soit maintenu, mais davantage encadré.

De fait, pour un coût d’environ 420 millions d’euros, les zones franches urbaines entraînent, selon les estimations dont nous disposons, la création de 5 000 emplois par an ; plus de 80 000 euros par emploi, cela fait peut-être un peu cher ! (M. le rapporteur acquiesce.) En tout cas, il est certainement nécessaire que le dispositif soit recentré : j’en ai déjà parlé à Bernard Cazeneuve, ministre du budget.

C’est pourquoi, avant que les ZFU ne disparaissent, en vertu d’une décision du précédent gouvernement, à la fin de 2014, je souhaite que nous trouvions ensemble les moyens de financer, au travers du projet de loi de finances pour 2015, un nouveau dispositif, peut-être plus réduit, mais concentré sur les territoires où les conditions sont créées pour que des entreprises s’installent.

En effet, si un quartier n’est pas sécurisé ni desservi par des transports en commun, s’il n’offre pas de logements aux salariés et si l’espace public y est de mauvaise qualité, quels que soient les dispositifs d’exemption, aucune entreprise ne s’y implantera. Il faut donc créer des obligations pour les collectivités territoriales.

Assurément, il faut aussi exclure du dispositif certaines professions, car il est des concentrations de notaires ou de médecins généralistes, voire spécialistes, qui ne sont pas souhaitables, sans parler des regroupements de cabinets de radiologie, qui entraînent une désertification dans certains territoires.

Enfin, je souhaite que le nouveau dispositif permette le financement de l’artisanat et du commerce de proximité à l’intérieur des quartiers éligibles, car ces activités sont un facteur majeur de lien social ! (M. Martial Bourquin acquiesce.) Or, aujourd’hui, elles ne bénéficient d’aucun dispositif, alors qu’elles emploient le plus souvent des habitants du quartier.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les pistes de travail suivant lesquelles je souhaite engager, avec les parlementaires qui le souhaitent, la réflexion sur le remplacement des ZFU ; l’objectif est de proposer au ministre du budget, qu’un dispositif aussi coûteux préoccupe nécessairement, un nouveau système aussi consensuel que possible.

Madame Schurch, j’ai bien entendu vos inquiétudes au sujet du financement de la politique de la ville : je vous rappelle que non seulement les crédits alloués à cette politique ont été sanctuarisés, mais que les autres ministères ont accru les moyens qu’ils affectent aux quartiers prioritaires.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. François Lamy, ministre délégué. C’est ainsi que Vincent Peillon a orienté vers ces quartiers le plus grand nombre possible des postes créés dans l’éducation nationale.

M. Jean-Jacques Mirassou. Absolument, ce n’est pas rien !

M. François Lamy, ministre délégué. J’ai déjà parlé de la scolarisation des enfants de 2 à 3 ans ; j’aurais pu mentionner également le dispositif « plus de maîtres que de classes », lui aussi mis en place prioritairement dans ces quartiers. D’autres ministères ont appliqué le même principe.

Sans doute, un petit problème se pose au sujet de l’écotaxe et du financement de l’appel à projets, lancé par Frédéric Cuvillier, sur les transports en commun en site propre, mais une bonification est prévue pour les projets qui permettront la desserte de quartiers relevant de la politique de la ville.

De même, en ce qui concerne le service civique, nous souhaitons, comme François Chérèque l’a récemment rappelé, que 25 % des jeunes bénéficiaires soient issus de ces quartiers.

Je pourrais multiplier les exemples, tant sont nombreux les ministères avec lesquels j’ai conclu une convention. Il est vrai que je n’ai pas encore signé de convention avec l’ensemble d’entre eux, mais les discussions se poursuivent. Ces conventions et leur application dans le cadre des contrats de ville permettront la mobilisation du droit commun, qui est essentielle.

À cet égard, M. Vandierendonck a parlé de l’éducation nationale : monsieur le sénateur, chaque acteur des contrats de ville, dès lors qu’il sera partie à la négociation, aura l’obligation de mettre quelque chose sur la table. En effet, il est peut-être plus difficile à un recteur ou à un directeur des services académiques d’annoncer à un élu qu’il ne mobilisera pas davantage de moyens pour faire face à une situation.

J’ai conscience que cette mobilisation sera difficile, et qu’elle ne se fera pas du jour au lendemain. Il faudra insister encore, y compris auprès de mes collègues ministres : leur volonté et leur enthousiasme sont entiers, mais ils ont parfois un peu de mal à obtenir que l’ensemble de leurs administrations mettent en œuvre leurs décisions.

C’est la raison pour laquelle le comité interministériel des villes assurera un suivi régulier de la politique menée. Sur ma demande, le Premier ministre a réuni ce comité au mois de février dernier. J’ai demandé qu’il le soit de nouveau au mois de juin, afin d’établir un premier bilan de la mise en œuvre des conventions interministérielles signées. D’ailleurs, les préfets devront dresser, d’ici à la fin du mois de février, un bilan d’étape de cette application sur le terrain.

Ces efforts en faveur de la mise en œuvre du droit commun dans les quartiers relevant de la politique de la ville devront être poursuivis ; les parlementaires, auxquels il appartient de contrôler l’action du Gouvernement, ont aussi leur rôle à jouer dans ce domaine.

Pour finir, je tiens à répondre à M. Antoinette, qui m’a interrogé sur les outre-mer. Pour ce qui est de l’habitat indigne, j’ai l’intention de mettre en place une politique de la ville adaptée à chacun des territoires ultramarins. En effet, on ne fait pas la même politique de la ville à La Réunion, en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe. Il faut tenir compte des spécificités de chaque territoire : dans certains cas, la bonne échelle de pilotage sera l’intercommunalité ; dans d’autres, ce sera la commune.

Vous savez, monsieur le sénateur, que la rénovation urbaine et la résorption de l’habitat indigne sont des politiques qui font intervenir des crédits et des administrations différents. Je proposerai à Victorin Lurel que, dans les semaines qui viennent, nous travaillions ensemble pour fluidifier le dispositif en identifiant l’opérateur le plus performant. Ainsi, la rénovation des quartiers qui en ont besoin, notamment dans votre département, pourra aller plus vite et la tâche des élus sera facilitée.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les réponses que je désirais apporter aux orateurs de la discussion générale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de quelques minutes.

M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à cette demande.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Titre Ier

Politique de la ville

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine
Article 1er (début)

Article additionnel avant l’article 1er

M. le président. L'amendement n° 12, présenté par Mme Schurch, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité d'inscrire dans la loi de finances un objectif chiffré de réduction des inégalités territoriales, réévalué chaque année, en indiquant les moyens mis en œuvre pour l’atteindre. Cet objectif se présente sous la forme d’un plancher de ressources défini par type de collectivités, plancher en deçà duquel une collectivité perçoit des dotations et des subventions pour combler son déficit de ressources ainsi défini.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Monsieur le ministre, je suis persuadée que cet amendement vous aidera à négocier avec vos collègues !

Le 12 mai 2011, l’Assemblée nationale examinait une proposition de loi que vous connaissez bien et qui a été déposée le 31 mars 2011 par le groupe socialiste, en particulier par Jean-Marc Ayrault et vous-même. Malheureusement, sous l’ancienne mandature, cette proposition de loi, que nous avions bien sûr soutenue, n’avait pu être adoptée.

Nous reprenons l’article 8 de cette proposition de loi, qui prévoyait qu’un rapport soit remis au Parlement afin de permettre la définition d’un objectif chiffré annuel de réduction des inégalités de ressources entre les collectivités et d’établir ensuite les moyens de l’atteindre.

Selon cet article, chaque projet de loi de finances devait fixer un objectif annuel de réduction des écarts pour chaque niveau de collectivités. En effet, il vous paraissait inacceptable que le pouvoir d’achat par habitant soit quarante-cinq fois plus élevé pour le premier centile des communes les plus riches que pour le premier centile des communes les plus pauvres, ce qui conduit de fait à renforcer les inégalités en termes d’accès aux services essentiels.

Aux termes de cet article, un plancher de ressources devait être fixé, sorte de SMIC communal, en deçà duquel une collectivité bénéficierait de dotations lui permettant d’atteindre ce plancher. Cela permettait de donner un contenu à l’article 72-2 de la Constitution, qui impose au législateur de prévoir des « dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales ».

Monsieur le rapporteur, vous nous avez indiqué que le rapport demandé n’envisage que la solution des dotations et subventions, alors qu’il y a bien d’autres manières de réduire les inégalités, par exemple en encourageant le développement des activités économiques dont nous venons de parler ou en réorientant les différentes politiques de droit commun. Nous considérons pourtant que le niveau des dotations de droit commun est un socle minimal pour permettre à toutes les collectivités de mener des politiques audacieuses en faveur de leurs habitants.

Le présent amendement traduit l’objectif de l’égalité des territoires que vous venez d’évoquer, monsieur le ministre.