Mme Laurence Cohen. Elle a raison !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous verrons le résultat du vote, ma chère collègue...

Nous ne proposons pas d’économies de posture !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je n’ai pas eu de mots aussi durs à votre égard, madame la secrétaire d’État, alors que le détail des 9,6 milliards d’euros d’économies portant sur le champ des administrations de sécurité sociale n’a jamais été véritablement étayé devant le Parlement, ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat !

M. Francis Delattre. Très juste !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je prendrai un seul exemple : le secrétaire d’État chargé du budget, Christian Eckert, nous a précisé dans cette enceinte même que les 4 milliards d’euros de mesures d’économies déjà prévus pour 2015 comprenaient plus de 800 millions au titre de l’accord national interprofessionnel du 13 mars 2013 sur les retraites complémentaires. Or cette prévision a été actualisée voilà quelques semaines : il s’agit désormais toujours de 800 millions d’euros… mais sur trois ans !

Vous le constatez, y compris sur le chiffre que le Gouvernement avance, le compte n’y est pas !

Sur ce même sujet des régimes à gestion paritaire, d’où peut bien venir ce montant de 1,2 milliard d’euros pour 2015 ? Personne ne le sait ! Nous n’avons pas davantage obtenu de réponse sur ce point, et il n’y a pas de convention en cours de négociation qui pourrait justifier ce chiffre.

M. Jean Desessard. Il n’y a pas de pilote dans l’avion !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il est vrai, madame la secrétaire d’État, que le présent amendement est un signal : celui que le Sénat souhaite un ONDAM plus rigoureux, non pas en baisse – j’ai bien entendu les reproches qui ont été adressés à cet égard ! –, mais en progression contenue, plus compatible avec la soutenabilité de notre modèle social. Ce que nous souhaitons réduire, c’est l’augmentation des dépenses !

Compte tenu de l’effort demandé à notre économie, je vous propose, mes chers collègues, de voter en faveur de ce nouvel ONDAM.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. L’ONDAM fixé par le Gouvernement et adopté par l’Assemblée nationale produit d’ores et déjà des économies de l’ordre de 3,2 milliards d’euros, auxquelles vous proposez d’ajouter 1 milliard d’euros.

Je vous rappelle que le comité d’alerte de l’ONDAM, qui est un organisme indépendant, a souligné que le niveau d’économies proposé par le Gouvernement était « exigeant » et supposait que l’ensemble des acteurs et des professions de santé soient parties prenantes de l’effort demandé.

La méthode de l’index thérapeutique relatif que vous préconisez n’est pas applicable pour le moment. On peut certes y travailler, comme l’a dit Marisol Touraine, mais on ne peut pas l’inscrire dans le budget de la sécurité sociale au titre des économies pour 2015.

S’agissant de la lutte contre les actes et prescriptions inutiles et redondants, j’indique que, à ce titre, un montant de 1,2 milliard d’euros est déjà inscrit dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Avec ce texte, nous réussissons à faire des économies sans altérer l’accès aux soins, sans réduire les remboursements et en facilitant l’accès à de nouveaux médicaments, comme ceux contre l’hépatite C. Voilà ce qui fait la différence !

Nous considérons que le volume d’économies contenu dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est soutenable, au regard de l’idée que nous nous faisons de l’égalité d’accès aux soins et aux nouvelles thérapeutiques.

Vous nous proposez, enfin, un ONDAM à 1,5 %, tandis que celui-ci est à 2,1 %. Je rappelle que, entre 2007 et 2012, il s’établissait à 3,1 %...

Nous accomplissons aujourd’hui les efforts qui n’ont pas été réalisés précédemment. S’ils avaient été consentis, nous pourrions aujourd’hui engager des réformes d’avenir et de structure.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Les écologistes voteront contre ces deux amendements.

Au cours de la discussion générale, j’ai insisté sur le fait qu’une baisse des recettes devait obligatoirement se traduire par une baisse des prestations, mais la ministre de la santé m’a opposé que, avec de l’organisation, même avec moins de recettes, même avec moins de dépenses, on pouvait soigner mieux.

Madame la secrétaire d’État, vous m’avez apporté une réponse plus précise en reconnaissant que vous aviez procédé à la baisse la plus juste possible : on ne pouvait pas aller au-delà. Le rapporteur général a beau jeu de soutenir que, si l’on peut aujourd'hui diminuer les recettes de 3 milliards d’euros, on peut les baisser plus encore, puisque, selon lui, les prestations n’en souffrent pas. Comme s’il y avait des prestations qui ne servaient à rien !

Or une baisse des recettes entraîne nécessairement la suppression de certaines prestations, a une incidence sur la productivité dans l’hôpital ou sur la qualité du service rendu.

Par ailleurs, je n’exclus pas, monsieur le rapporteur général, que des économies puissent être réalisées en développant la prévention, en favorisant un mode de vie différent, moins cancérigène, des conditions de travail autres, générant moins de stress et, par conséquent, de pathologies, un rythme moins effréné. Mais les résultats ne seront pas immédiats. En revanche, c’est ce signal qu’il faut envoyer.

Je terminerai en soulignant un paradoxe.

Tous, dans cet hémicycle, nous voulons de l’emploi et que chaque citoyen puisse travailler. Or quel secteur produira de l’emploi à l’avenir, sinon celui de la santé ? Alors que nous vivons plus longtemps, que nous voulons plus de services et plus de bien-être et que ces emplois sont nécessaires socialement, nous n’avons qu’une seule envie, baisser les dépenses !

Je sais bien qu’il faut des outils industriels, des robots, qui, d’ailleurs, affecteront l’emploi, des distributions de prospectus pour les supermarchés. Reste que le secteur de la santé et du service à la personne est le plus important en termes de création d’emplois nouveaux. Pourtant, c’est là que l’on baisse les dépenses !

Je ne dis pas qu’il faut obligatoirement augmenter les recettes, même si je le pense. Sans doute faudrait-il s’y prendre autrement. Plutôt que de réfléchir chaque année à la façon d’économiser 1 milliard d’euros tout en pensant maintenir les services, nous devrions déterminer les nouvelles prestations dont notre société aura besoin et la façon de dégager des recettes pour les garantir. Car, avec ces prestations, nous offrons des services aux citoyens, nous créons de l’emploi, qui plus est de l’emploi socialement utile.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances. Madame la secrétaire d'État, vous avez assez justement signalé que, pour tenir l’objectif d’une augmentation limitée à 2 %, l’ONDAM exigerait un pilotage très serré et rigoureux. Mais en l’absence de réformes structurelles, les dépenses d’assurance maladie ne diminueront pas de façon significative. Or la diminution des dépenses qui est présentée dans le présent texte ne nous paraît pas convaincante, si nous la confrontons à ce qui se déroule actuellement et la comparons à 2013. Nous avons le droit de le dire !

Nous savons que, faute de ces réformes structurelles, il sera très compliqué de réaliser 10,5 milliards d’euros d’économies. Par ces amendements, nous interrogeons également le Gouvernement sur les réformes structurelles qu’il faudrait envisager.

Mes chers collègues, nous avons examiné ensemble en commission ce projet de budget : un chapitre n’a pas suscité de longs débats, c’est celui des retraites et du Fonds de solidarité vieillesse. Or, si ce fonds dégage 4,6 milliards d'euros de ressources, c’est parce que, en 2010 nous avons engagé une réforme structurelle !

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances. Si nous ne faisons pas de même dans le domaine de l’assurance maladie, les prévisions seront très difficiles à atteindre.

Faut-il rappeler les 160 milliards d’euros de dettes de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES ? Et on accorde à l’ACOSS la possibilité d’emprunter 34 milliards d’euros à moins de 1 %, si tout va bien.

Mes chers collègues, nous allons encore passer entre les gouttes, cette année, mais cela ne durera pas, car la politique américaine, qui avait consisté à faire abondamment marcher la planche à billets, est aujourd'hui différente. Certes, il y a toujours un décalage, mais il faut vous attendre à ce que, d’ici à un an, le coût de l’argent augmente.

Lancez-vous dans les calculs : 200 milliards d’euros empruntés à moins de 1 %, à 2 %, à 3 %, etc. Aujourd’hui, la Grèce emprunte à 9 %, contre moins de 1 % pour la France. Le taux médian est de 4 %. Si cette perspective devenait réalité, il y aurait urgence à engager des réformes structurelles.

Ces amendements identiques sont en réalité des amendements d’appel qui nous invitent à réfléchir à la façon d’envisager une réforme structurelle, afin de mieux contrôler l’ensemble des dépenses que le pays, aujourd’hui, n’a plus les moyens d’assumer.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, vous n’appréciez peut-être pas que l’on qualifie l’exercice auquel vous vous livrez d’exercice « de posture », mais, quoi qu’il en soit, il s’agit d’un exercice assez classique pour l’opposition. Votre amendement et celui de M. le rapporteur pour avis sont politiques. Vous contestez le rythme de baisse des dépenses.

Cela étant, l’un des candidats potentiels de l’UMP à la prochaine élection présidentielle, François Fillon, a annoncé – il n’a pas été contesté sur ce point par un autre candidat potentiel, Alain Juppé – qu’il fallait parvenir à 110 milliards d'euros d’économies, en plus des 50 milliards d’euros que le Gouvernement s’est engagé à réaliser jusqu’en 2017. Beaucoup concerneront la santé.

D’une certaine façon, vous levez légèrement le voile sur ces futures économies en proposant 1 milliard d’euros d’économies, sur les 110 milliards d’euros prévus. On attend les autres…

Alors que, pour notre part, nous soutenons le Gouvernement – Mme la secrétaire d’État vient de rappeler qu’il avait été très difficile de fixer l’ONDAM à 2,1 %, du reste, certains doutent du résultat –, vous vous livrez à un exercice commode, qui est un privilège de l’opposition

En effet, tout le monde est capable dans un bureau, avec des experts qui ne sont pas des décideurs politiques, de faire de même et tout le monde l’a fait. Mais, une fois aux responsabilités, on prend en compte la dimension sociale – c’est ce qu’a fait le Gouvernement dans ce texte comme dans le projet de loi de finances pour 2015 que nous examinerons prochainement – et l’impact économique, car les décisions prises ont des incidences sur l’emploi et sur certaines activités économiques. On prend également en considération l’acceptabilité du rythme de diminution des dépenses, ce que vous ne faites pas.

Vous l’avez reconnu, ces amendements sont un signal politique et nous le recevons comme tel. Toutefois, nous avons fait d’autres choix. Ainsi, vous prônez des déremboursements, mais la secrétaire d’État a rappelé à la suite de Mme la ministre qu’il n’en était pas question. Le même débat a eu lieu sur les franchises. Ce n’est pas la ligne politique que nous adoptons, mais nous voulons réduire la dépense.

Vous vous réfugiez pour partie derrière un avis de la Cour des comptes. Or celle-ci est dans son rôle de magistrat comptable en indiquant les sources d’économies possibles, d’autant que nous continuons, certes de manière moins forte, à dépenser plus que nous ne percevons. Mais ce n’est pas elle qui fait la politique de la France.

La politique, c’est aussi apprécier la soutenabilité des réformes que nous engageons.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances. Quelles réformes ?

Mme Nicole Bricq. C’est ce qu’a fait le Gouvernement. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ces amendements de commodité.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

M. Gilbert Barbier. Je commencerai par un éclaircissement : il s’agit non de diminuer les dépenses, mais d’en limiter l’augmentation. L’ONDAM prévu dans le présent texte augmente de 4 milliards d’euros. Ces amendements visent à proposer une réduction de 1 milliard d’euros. Par conséquent, ne parlons pas d’économies ou de diminution des dépenses, comme je l’ai entendu dire, y compris par Mme Bricq à l’instant.

Pour ne pas transférer à nos enfants 10 milliards d’euros, voire 12 milliards d'euros de charges supplémentaires, il faudrait que l’augmentation de l’ONDAM ne dépasse pas celle du PIB de notre pays. On pourrait alors envisager de rembourser la dette. Pour l’instant, nous continuons de l’aggraver.

Il nous faut avoir conscience que nous devons déjà rembourser 160 milliards d’euros, peut-être même 180 milliards d’euros.

Par ailleurs, madame la secrétaire d’État, vous nous reprochez d’être imprévoyants. Je vous ferai remarquer que le montant de l’ONDAM a baissé de 1 milliard d’euros entre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 – il atteignait environ 179 milliards d’euros – et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, où nous venons de le fixer à 178,3 milliards d’euros. Or vous savez très bien que cette régularisation de l’ONDAM correspond aux sommes que vous avez mises en réserve tout au long de l’année.

Pour notre part, nous proposons de faire cette économie tout de suite. Les estimations sont assez précises, mais je pense que des révisions pourront être envisagées au cours de l’année en fonction de la réalisation des objectifs. Quoi qu’il en soit, il faut arriver à contrôler l’ONDAM.

C’est pour cela que je voterai en faveur de ces amendements identiques.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Je suis extrêmement choquée que l’on puisse ainsi manipuler les chiffres sans mesurer les incidences sociales et économiques qui en découlent, comme cela a d’ailleurs déjà été souligné. Or derrière ces chiffres, il y a des femmes et des hommes. Et je ne suis pas le seul parlementaire à le dire !

Depuis le début de ce débat, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous sommes convenus de difficultés dans le domaine de la santé, dans des établissements de santé publique, en matière de lutte contre certaines maladies ou encore de médicaments. Or adopter des restrictions budgétaires, prendre des mesures d’austérité, c’est utiliser une règle à calcul et ne plus tenir compte des réalités.

Une réduction de 1 milliard d’euros des dépenses de santé aura des incidences très graves à la fois pour les patients et pour les personnels.

Quand j’entends dire que des réformes structurelles sont nécessaires, quand je vois que l’on se réjouit des réformes des retraites, quel que soit d’ailleurs le Gouvernement qui les a adoptées, je suis très choquée. En matière de retraite, de telles réformes signifient que l’on demande à des gens ayant travaillé toute leur vie de travailler plus encore, et ce pour toucher une pension de retraite guère plus élevée. De ce fait, des femmes subiront des décotes, car ce sont les femmes qui ont des carrières morcelées. C’est extrêmement grave !

Dans la situation actuelle, nous, membres du groupe communiste républicain et citoyen, n’adhérons pas à la faible progression de l’ONDAM proposée, entraînant une économie de 3,2 milliards d’euros. Cela ne correspond pas à notre conception d’une politique de santé pour toutes et pour tous sur l’ensemble du territoire. Alors ajouter 1 milliard d’euros de restrictions et d’économies supplémentaires, c’est carrément intolérable !

Depuis le début de l’examen du présent texte, nous sommes confrontés à un problème : on refuse de modifier les recettes. Or si l’on ne cherche pas de nouveaux financements, on en est réduit à bricoler, au risque que tel ou tel hôpital soit complètement asphyxié. Que dira-t-on aux personnels et aux usagers ? Je n’en sais rien !

Il faut réfléchir à toutes ces questions et, du moins si l’on a une autre conception de la santé, prendre des mesures en matière de financement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 et 75.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 26 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l’adoption 184
Contre 152

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l'article 55, modifié.

(L'article 55 est adopté.)

Demande de priorité

Article 55
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015
Demande de priorité (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, dans un souci de cohérence, la commission demande l’examen par priorité, à la reprise de la séance, des articles 63 et 64, qui portent sur le Fonds de solidarité vieillesse, après les articles 56, 56 bis et 57, qui concernent l’assurance vieillesse.

M. le président. Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. C’est en effet cohérent. Le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. La priorité est ordonnée.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures vingt-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Hervé Marseille.)

PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Demande de priorité (début)
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Discussion générale

7

Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été publiée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Alain Milon, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Caroline Cayeux, MM. René-Paul Savary, Yves Daudigny, Mmes Catherine Génisson, Annie David.

Suppléants : MM. Gilbert Barbier, Jean-Noël Cardoux, Francis Delattre, Gérard Dériot, Mme Michelle Meunier, MM. Gérard Roche, Jean-Louis Tourenne.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

8

Demande de priorité (interruption de la discussion)
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Quatrième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2015

Suite de la discussion et adoption d’un projet de loi modifié

Discussion générale
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Articles additionnels avant l'article 56

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Dans la discussion des articles de la quatrième partie, nous en sommes parvenus au titre II.

Titre II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES D’ASSURANCE VIEILLESSE

Quatrième partie
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Article 56

Articles additionnels avant l'article 56

M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Roche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant l’article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « soixante-deux » sont remplacés par les mots : « soixante-quatre » et la date : « 1955 » est remplacée par la date : « 1960 » ;

2° Au deuxième alinéa, la date : « 1955 » est remplacée par la date : « 1960 » et la date : « 1954 » est remplacée par la date : « 1959 » ;

3° Au quatrième alinéa, la date : « 1954 » est remplacée par la date : « 1958 » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« …° – À raison de quatre mois par génération pour les assurés nés entre le 1er janvier 1959 et le 31 décembre 1959 ».

La parole est à M. Gérard Roche, rapporteur.

M. Gérard Roche, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. La soutenabilité de notre système de retraite par répartition, qui dépend étroitement de la croissance économique, n’est nullement garantie aux horizons 2020, 2030 et au-delà, compte tenu de la gravité de la crise que traverse notre pays, dont les effets à long terme sur la croissance potentielle sont difficiles à évaluer.

Certes, la durée de cotisation a été augmentée dans la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, mais ce texte n’était pas à la hauteur des enjeux, car il n’a pas prévu le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite entamé par la loi du 9 novembre 2010 au-delà du 1er janvier 2017.

L’effet très favorable sur les finances de la branche vieillesse d’un relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, surtout à moyen et à long terme, n’est pourtant plus à démontrer.

C’est pourquoi le présent amendement tend à prévoir le relèvement graduel de cet âge légal au-delà du 1er janvier 2017 et à le fixer à 64 ans au 1er janvier 2024 pour la génération née en 1960.

En vertu des dispositions de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, la poursuite du relèvement de l'âge légal de départ à la retraite entraînera mécaniquement celle du relèvement de l'âge de la retraite à taux plein sans décote, qui lui est supérieur de cinq ans. Ce dernier, qui sera porté à 67 ans au 1er janvier 2017, sera donc de 69 ans au 1er janvier 2024.

La commission a voulu présenter cet amendement car, en examinant les chiffres de l’évolution de notre régime de retraite, on voit bien que l’équilibre ne sera pas atteint en 2017 ni au-delà.

L’équilibre ne sera pas au rendez-vous non seulement en raison de l’importance de la crise économique, mais aussi parce que, dans les chiffres qui nous sont présentés – 1,7 milliard d’euros de déficit en 2014 et un peu plus de 1 milliard d’euros en 2015 –, on ne prend pas en compte le déficit du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, qui s’élève aujourd’hui à 2,9 milliards d’euros, et qui se maintiendra à peu près à ce niveau : même à l’horizon 2018 ou 2019, il s’établira à près de 2 milliards d’euros. Autrement dit, le FSV, qui est porté par la CADES, est en fait un trompe-l’œil.

C’est pourquoi nous vous soumettons, mes chers collègues, cette proposition, qui, je le reconnais, est extrêmement dure socialement, mais qui est la seule possible. En effet, quand on regarde la courbe d’évolution du déficit, on voit bien que, depuis 2010, c’est le report de l’âge légal de départ à la retraite qui a permis les améliorations les plus significatives : ainsi, alors que le déficit dépassait les 11 milliards d’euros en 2010, il est tombé cette année à 1,7 milliard d’euros. Bien sûr, d’autres mesures ont eu aussi des effets positifs, dont le report de la revalorisation des pensions de six mois prévu par la loi du 20 janvier 2014 et l’augmentation de 0,3 % des cotisations tant des salariés que des employeurs.

Oui, et je m’adresse à mes collègues de la gauche, cette proposition est très dure, mais je n’aurais pas osé la présenter si deux dispositifs ne permettaient pas d’adoucir le système : le départ à la retraite anticipée pour les carrières longues qui date de 2003 et qui a été très largement amélioré en 2012, ainsi que le compte personnel de prévention de la pénibilité. Je me tourne à présent vers mes collègues de la droite : je sais que vous n’êtes pas de cet avis, mais je considère, pour ma part, que la réelle prise en compte de la pénibilité une très bonne chose. Certes, le mécanisme doit encore être amélioré, car les employeurs estiment le compte pénibilité, en l’état, inapplicable, en raison des difficultés qu’ils rencontrent.

Ainsi, si notre amendement est adopté, l’âge légal de départ à la retraite sera reporté à 64 ans en 2024, mais les personnes qui ont travaillé dur et qui ont eu des carrières longues pourront toujours prendre leur retraite à 62 ans et bénéficier du taux plein à 67 ans.

Je vous demande, mes chers collègues, d’adopter un comportement républicain, car notre régime de retraite par répartition, auquel nous sommes tous attachés, risque de connaître de graves difficultés et son avenir est incertain. C’est pourquoi, il faut, d’un côté, que la majorité sénatoriale tende la main à la gauche car le compte pénibilité constitue une réelle avancée, et, de l’autre côté, que l’opposition sénatoriale comprenne qu’on rendra un grand service à la France si on arrive à pérenniser notre système de retraite.

Madame la secrétaire d’État, la mesure que je propose est très confortable pour vous, car son adoption rendra la préparation du budget plus facile à l’avenir : certes, elle est forcément impopulaire, mais c’est le Sénat qui en portera la responsabilité.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de cet hommage rendu au compte pénibilité et de la volonté de consensus dont vous avez fait preuve. Pour autant, comme vous le savez, le Gouvernement a soumis au Parlement une réforme des retraites qui a été examinée en 2013 et mise en œuvre à partir de cette année. La question de la barrière d’âge a été tranchée à ce moment-là. Le choix qui a été fait est effectivement celui de l’allongement de la durée de cotisation, qui sera portée à 43 ans en 2035 pour les personnes qui sont nées en 1973.

Je comprends votre inquiétude sur l’équilibre du régime des retraites. Néanmoins, on ne peut pas tout le temps changer les règles, d’autant que la dernière réforme est très récente. De plus, le principal problème du régime des retraites, c’est le chômage, et donc le nombre de cotisants, et non pas le nombre de bénéficiaires. Or il faut faire confiance aux politiques que mène le Gouvernement. Elles sont prioritairement axées sur la croissance et le redressement productif de la France et doivent avoir un effet sur le taux de chômage et sur le niveau de l’emploi. Ayons donc foi, si je puis dire, dans l’efficacité à moyen terme – car vos préoccupations portent sur le moyen terme, monsieur Roche – des politiques que nous menons et dans la capacité du pays à se redresser et à créer de l’emploi.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.