M. David Assouline. J’aimerais que chacun prête attention à cet amendement, car il y a peut-être eu un malentendu.

En l’état actuel du droit, l’obligation de diffusion audiovisuelle des campagnes électorales s’impose aux trois grandes sociétés nationales de programmes de l’audiovisuel public, à savoir France Télévisions, Radio France et France Médias Monde. Il revient au CSA de déterminer lesquels des services de ces sociétés assument cette obligation de diffusion, en tenant compte de leur format et en concertation avec les présidents des trois sociétés. Tel est le système en vigueur.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement – celui-ci nous expliquera sans doute pourquoi il a déposé un amendement à son propre texte – tendant à étendre l’obligation de diffusion audiovisuelle des campagnes électorales à chacun des services des trois sociétés que j’ai citées. La portée de cette obligation s’en trouve considérablement étendue – potentiellement, car le CSA pourra en décider autrement –, puisque ces services sont au nombre de seize : France 2, France 3, France 4, France 5, France O et Réseau France Outre-Mer pour France Télévisions ; France Inter, France Info, France Bleu, France Culture, France Musique, le Mouv’ et FIP pour Radio France ; France 24, RFI et Monte Carlo Doualiya pour France Médias Monde. Pour ne prendre que l’exemple de Radio France, je rappelle que, à l’heure actuelle, l’obligation de diffusion ne concerne que France Inter et les programmes télévisuels de France Info.

Par ailleurs, le coût de la diffusion de la campagne officielle pour l’État augmenterait considérablement, alors même que l’on demande au service public de dépenser moins.

Enfin, je ne parle pas du ridicule d’interrompre pendant deux heures les programmes de France Musique ou de FIP pour diffuser les spots électoraux…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. David Assouline. Je propose donc de circonscrire le champ de l’obligation de diffusion de la campagne officielle aux services « à vocation généraliste ».

M. le président. L’amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Leleux et Hugonet, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10, première phrase

Remplacer les mots :

service des sociétés nationales de programme mentionnées

par les mots :

société nationale de programme mentionnée

II. – Alinéa 13

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il veille à ce que le choix des services chargés de diffuser les émissions permette de s’adresser à l’ensemble des électeurs.

La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.

M. Jean-Pierre Leleux. Les motivations du présent amendement sont similaires à celles de l’amendement présenté à l’instant par M. Assouline, mais son dispositif est différent.

Dans sa rédaction initiale, l’article 2, conformément à la pratique en vigueur, visait les trois sociétés nationales de programmes de l’audiovisuel public – France Télévisions, Radio France et France Médias Monde –, et non chacune de leurs seize antennes.

J’imagine que c’est afin de promouvoir un débat plus large que le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale un amendement ayant pour objet d’étendre l’obligation de diffusion à l’ensemble des services des trois sociétés nationales de l’audiovisuel public.

Si l’on peut partager l’objectif de rendre plus dynamique et plus large le débat précédant les élections européennes, la rédaction retenue par les députés pose néanmoins des difficultés pratiques au regard de la ligne éditoriale des différents services, d’autant que le projet de loi précise qu’il s’agira du même texte pour toutes les chaînes de télévision ou de radio, sans possibilité d’adaptation aux formats des différentes antennes. Ainsi, un texte de nature politique conçu pour des citoyens majeurs et électeurs devra être diffusé sur France 4, dont les programmes sont destinés aux enfants dans la journée, ou sur la radio arabophone Monte Carlo Doualiya, alors qu’il sera nécessairement en français… Je pourrais également évoquer le cas de la radio le Mouv’, dédiée aux musiques actuelles.

La rédaction que je propose vise à concilier l’objectif du Gouvernement et le respect de la ligne éditoriale des différents services, en confiant au CSA la mission de veiller à ce que la définition du champ de l’obligation de diffusion permette de s’adresser à l’ensemble des électeurs sans nécessairement concerner l’ensemble des services.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. Les jours de mauvaise humeur, certains collègues estiment que la commission des lois exerce une grande influence, et qu’elle prétend pouvoir présenter des opinions sur des sujets très variés.

En l’occurrence, nous montrons nos limites, car la commission des lois a quelque peu « séché » sur ce sujet, et même après avoir entendu deux de ses meilleurs connaisseurs, nous demeurons perplexes.

Je vais donc modestement essayer de décoder le débat. L’obligation de diffusion devrait concerner France 2, France 3, France Info, France O, Réseau France Outre-Mer, France Inter, France 24 et RFI.

Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. David Assouline. Très bien !

M. Alain Richard, rapporteur. Comment l’écrire dans la loi ? Nous avons cru comprendre que tel était l’objet de l’amendement présenté par le Gouvernement et adopté par l’Assemblée nationale. (Mme la ministre acquiesce.) Or nos collègues David Assouline et Jean-Pierre Leleux nous indiquent que la rédaction retenue renvoie à seize services.

Compte tenu de notre incertitude, la commission avait prévu de demander l’avis du Gouvernement, ce qui était moyennement courageux. Il me semble, à l’écoute de nos deux collègues, qu’il vaudrait mieux voter l’un des deux amendements afin de pouvoir retravailler cette rédaction à froid en vue de la commission mixte paritaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet un avis de sagesse sur ces deux amendements. Oserai-je dire que nous préférons la rédaction proposée par M. Assouline, qui nous semble plus claire ? J’espère que vous ne m’en voudrez pas, monsieur Leleux !

M. Jean-Pierre Leleux. Si, beaucoup ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Monsieur Leleux, votre amendement tend à laisser au CSA le soin de déterminer quels sont les services à caractère généraliste. Or c’est précisément ce qu’il ne faut pas faire, car alors, potentiellement, jusqu’à seize services pourraient être concernés par l’obligation de diffusion.

Il convient à notre avis de circonscrire le champ des services parmi lesquels le CSA effectuera son choix, et la rédaction que je propose me semble à cet égard plus précise et plus satisfaisante. La retenir permettrait un dialogue apaisé entre le CSA et les sociétés de l’audiovisuel public.

Pour l’heure, c’est panique à bord à Radio France et à France Télévisions, où l’on ressentait déjà comme un boulet l’obligation de diffuser la campagne officielle, qui leur fait perdre de l’audience – il faut dire que les messages enregistrés par les partis sont assez rébarbatifs et repoussants. Demain, les sociétés publiques seront encore plus handicapées, par rapport à la concurrence des chaînes privées, si les programmes de leurs services non généralistes sont interrompus de manière incongrue.

Par ailleurs, circonscrire les services potentiellement concernés par l’obligation de diffusion permettra à l’État de faire des économies.

Je remercie de leurs avis la commission et le Gouvernement. Monsieur Leleux, je vous invite à vous rallier à l’amendement que j’ai présenté, qui deviendrait alors l’amendement Assouline-Leleux !

M. le président. Monsieur Leleux, l’amendement n° 46 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Leleux. Je ne suis pas certain que l’expression « service à vocation généraliste » soit suffisamment claire. C’est pourquoi je souhaitais laisser au CSA le soin de répartir les temps de parole sur les différentes antennes en concertation avec les chaînes concernées.

Cela étant dit, je me rallie à l’amendement Assouline-Leleux et je retire l’amendement n° 46 rectifié.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Quelle élégance !

M. le président. L’amendement n° 46 rectifié est retiré.

La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote sur l’amendement n° 39.

M. André Gattolin. J’espère que le service public n’en profitera pas pour exclure aussi du champ de l’obligation de diffusion les services d’information, qui sont directement concernés par les campagnes électorales.

M. David Assouline. C’est le CSA qui décide, pas le service public !

M. André Gattolin. Soit, mais il me paraîtrait préférable de viser les services généralistes et d’information dans la rédaction de l’amendement, qui mériterait sans doute d’être retravaillée, le cas échéant, en commission mixte paritaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 39.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen
Article 2 bis (interruption de la discussion)

Article 2 bis

L’article L. 167-1 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L. 167-1. – I. – Pendant la campagne électorale, les émissions du service public de la communication audiovisuelle sont mises à la disposition des partis et groupements politiques dans les conditions prévues au présent article.

« II. – Pour le premier tour de scrutin, une durée d’émission de sept minutes est mise à la disposition de chaque parti ou groupement politique qui en fait la demande dès lors qu’au moins soixante-quinze candidats indiquent s’y rattacher dans des conditions définies par décret.

« Pour les émissions précédant le deuxième tour de scrutin, une durée d’émission de cinq minutes est mise à disposition des mêmes partis et groupements politiques selon les mêmes modalités.

« III. – Pour le premier tour de scrutin, une durée d’émission de deux heures est mise à la disposition des présidents des groupes parlementaires à l’Assemblée nationale au prorata de leur nombre de députés. Ces durées d’émission sont distribuées librement, dans des conditions définies par décret, par les présidents de groupe aux partis et groupements politiques bénéficiant d’une durée d’émission au titre du II.

« Pour les émissions précédant le deuxième tour de scrutin, une durée d’émission d’une heure est répartie selon les mêmes modalités.

« IV. – Pour le premier tour de scrutin, une durée d’émission supplémentaire d’une heure est répartie entre les partis et groupements politiques mentionnés au II afin que les durées respectives d’émission attribuées en application du présent article ne soient pas hors de proportion avec leur participation à la vie démocratique de la Nation.

« Pour la répartition prévue au présent IV, il est tenu compte de :

« 1° La répartition déjà effectuée au titre des II et III ;

« 2° La représentativité de ces partis ou groupements politiques, appréciée, en particulier, en fonction des résultats obtenus lors du dernier renouvellement général de l’Assemblée nationale et aux plus récentes élections par les candidats ou par les partis et groupements politiques auxquels ils ont déclaré se rattacher et en fonction des indications de sondages d’opinion ;

« 3° La contribution de chaque parti ou groupement politique à l’animation du débat électoral.

« Pour les émissions précédant le deuxième tour de scrutin, une durée d’émission supplémentaire d’une demi-heure est répartie entre les mêmes partis et groupements politiques selon les mêmes modalités.

« V. – Les durées d’émission prévues aux II, III et IV s’entendent pour chaque service des sociétés nationales de programme mentionnées à l’article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication désigné par le Conseil supérieur de l’audiovisuel conformément à l’article 16 de la même loi. Les émissions doivent être diffusées dans le même texte pour les émissions de télévision et dans un texte similaire ou différent pour les émissions de radio.

« VI. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel constate l’attribution des durées d’émission prévues aux II et III et procède à la répartition de la durée d’émission prévue au IV.

« Il fixe les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions, après consultation des présidents des sociétés nationales de programme mentionnées au V.

« Les durées d’émission attribuées à plusieurs présidents de groupe parlementaire à l’Assemblée nationale en application du III ou à plusieurs partis ou groupements politiques peuvent être additionnées, à leur demande, en vue d’une ou plusieurs émissions communes. Ces demandes sont adressées, dans des conditions fixées par décret, au Conseil supérieur de l’audiovisuel.

« VII. – En ce qui concerne les émissions destinées à être reçues en dehors de la métropole, le Conseil supérieur de l’audiovisuel tient compte des délais d’acheminement et des différences d’heures.

« VIII. – Les dépenses liées à la campagne audiovisuelle officielle sont à la charge de l’État. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 17 rectifié est présenté par MM. Grand et Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam et MM. Magras et Le Gleut.

L’amendement n° 50 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, MM. Collombat, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié.

M. Jean-Pierre Grand. Introduit par voie d’amendement gouvernemental en séance publique à l’Assemblée nationale, le présent article vise à tirer les conséquences d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la durée des émissions de la campagne électorale en vue des élections législatives.

Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a fixé au 30 juin 2018 la date de l’abrogation de ces dispositions, afin de laisser au législateur le temps de les remplacer. Il est apparu opportun au Gouvernement d’utiliser le présent vecteur législatif pour se conformer à cette décision dans ce délai et éviter ainsi l’apparition d’un vide juridique.

Or le présent projet de loi relatif à l’élection des représentants au Parlement européen ne visait initialement que la loi du 7 juillet 1977, et nullement le code électoral.

Conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, il est proposé de supprimer cet article, qui est à l’évidence un cavalier législatif.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 50.

Mme Éliane Assassi. Je dirai d’abord un mot sur la méthode.

Tout le monde conviendra que l’organisation de la campagne radiotélévisée officielle des élections législatives, moment fort du débat démocratique, n’est pas une mince affaire. C’est une question très complexe sur le plan technique et qui peut avoir de lourdes conséquences politiques.

Comment accepter, dans ces conditions, qu’une telle disposition soit introduite par la voie d’un amendement déposé de façon inopinée par le Gouvernement à l’Assemblée nationale ? Il est pour le moins incongru que ce soit le Sénat, qui a priori n’est pas directement concerné, qui soit amené à examiner ce dispositif avec la sérénité et le sérieux requis.

Une telle méthode, selon nous, n’est pas respectueuse du Parlement, d’autant qu’elle devient la méthode du Gouvernement puisque Mme Borne, ministre chargée des transports, a « dégainé » hier en séance publique un amendement visant à rien de moins que la transformation de la SNCF en société anonyme !

Ces amendements gouvernementaux inopinés, véritables mini-projets de loi, ne sont pas accompagnés d’études d’impact. Ils représentent un véritable contournement de la Constitution. Leur développement, conjugué au recours de plus en plus fréquent aux ordonnances ou à la procédure accélérée, à la multiplication des déclarations d’irrecevabilité à l’encontre d’amendements, sonne comme l’oraison funèbre des droits du Parlement.

Cet article 2 bis est un cavalier législatif inséré dans un texte relatif à l’élection des représentants au Parlement européen. Son adoption est de plus précipitée puisque les prochaines élections législatives n’auront lieu qu’en 2022. Nous savons qu’elle répond à une injonction du Conseil constitutionnel en date du 30 novembre 2017.

Par ailleurs, sur le contenu de cet article, beaucoup a déjà été dit à l’occasion de l’examen de l’article précédent. Je n’y reviendrai pas, sauf pour souligner à nouveau le véritable scandale démocratique que représente la substitution du principe d’équité au principe d’égalité dans les règles de calcul du temps de parole.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. La commission est défavorable aux deux amendements identiques en observant des injonctions constitutionnelles contradictoires.

Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 31 mai 2017, a censuré les dispositions organisant la répartition du temps de parole sur les médias publics lors des élections législatives en cours, à une quinzaine de jours du premier tour. Faisant un travail presque administratif, il a décidé un dispositif provisoire, en conférant une part importante de la responsabilité au CSA, lequel a adopté le schéma de campagne télévisuelle le 1er juin. Comme il le fait depuis quelques années, sur le modèle du Conseil d’État, il a indiqué que l’abrogation définitive de ces dispositions ne prendrait effet que le 30 juin 2018.

Madame la présidente Assassi, si tout se passe normalement, il est vrai qu’il n’y aura pas d’élections législatives avant plusieurs années. Mais des marges d’appréciation, des possibilités de décision sont possibles, dont la dissolution de l’Assemblée nationale – je ne suis d’ailleurs pas sûr que vous y seriez forcément défavorable ! (Mme Éliane Assassi sourit.) À partir du 30 juin 2018, aucune disposition n’encadrera donc la campagne télévisuelle et radiophonique des élections législatives. Il est donc sage de remédier à cette situation.

Il est vrai que cela s’est décidé en peu de temps. Le Gouvernement avait cette injonction de faire depuis plusieurs mois. L’Assemblée nationale, qui est directement intéressée par cette question, a adopté ce projet. Nous avons eu le temps –nous en avons longuement discuté en commission – d’y réfléchir et de suivre la ligne de l’Assemblée nationale. Comme vous l’avez relevé à juste titre, un usage immémorial dans notre République veut que chaque assemblée n’entre pas trop dans le détail du dispositif électoral applicable à l’autre assemblée.

Aussi, le Gouvernement nous propose de calquer – les principes de répartition ont été très fermement affirmés par le Conseil constitutionnel – le schéma général de répartition du temps de parole pour les législatives sur celui que nous venons d’adopter pour les élections européennes et de laisser l’Assemblée nationale procéder aux éventuelles adaptations ultérieurement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Comme l’a rappelé le rapporteur, ce dispositif a été adopté par l’Assemblée nationale et il ne s’agit donc pas d’un amendement que le Gouvernement aurait déposé devant le Sénat.

Mme Éliane Assassi. C’est un peu facile !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. C’est la vérité !

Par ailleurs, ce dispositif n’est pas non plus sans lien avec le texte débattu aujourd’hui. Je tiens à préciser que, dès lors qu’une disposition ainsi introduite présente un lien même indirect avec l’objet du texte, ce qui est le cas ici, celle-ci est admise par le Conseil constitutionnel. J’en veux pour preuve sa décision du 21 avril 2016 relative à la loi de modernisation de diverses règles applicables aux élections.

En conclusion, l’avis est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié et 50.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 40, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin et Lepage, MM. Magner et Manable, Mmes Monier et S. Robert, MM. Leconte, Marie et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5, première phrase

Remplacer les mots :

de deux heures

par les mots :

d’une heure et demie

II– Alinéa 6

Remplacer les mots :

d’une heure

par les mots :

de trois quarts d’heure

III. - Alinéa 7

Après le mot :

heure

insérer les mots :

et demie

IV. – Alinéa 12

Remplacer les mots :

d’une demi-heure

par les mots :

de trois quarts d’heure

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Concernant la campagne officielle des élections législatives, nous proposons, comme nous l’avons fait précédemment à l’article 2, une légère modification de la répartition du temps d’expression entre les différentes fractions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable pour le motif que je viens d’exposer dans ma réponse à Mme la présidente Assassi.

Le schéma général est identique pour les temps de parole en campagne législative à celui qui a été adopté pour les élections européennes. Nous avons légèrement modifié celui-ci avec l’adjonction d’une demi-heure supplémentaire à la disposition du CSA. Si l’on doit faire évoluer le dispositif, il semble à la commission que la décision doit revenir à l’Assemblée nationale, suivant en cela la tradition républicaine très ancienne de réserve d’une assemblée pour statuer sur les détails de l’élection de l’autre assemblée.

C’est la raison pour laquelle nous avons écarté cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 51, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, MM. Collombat, Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

tout en respectant le pluralisme

II. – Alinéas 8 à 11

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 12

Supprimer les mots :

selon les mêmes modalités

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Cet amendement de repli vise à écarter, pour la répartition des temps de parole lors des campagnes radiotélévisées des élections législatives, la prise en compte de critères relevant d’un principe d’équité d’ordre subjectif. Nous préférons à celui-ci le principe d’égalité, qui prévalait auparavant.

La troisième fraction du temps de parole serait répartie en fonction de la participation des partis et groupements politiques à l’animation du débat électoral. La représentativité de ces derniers serait appréciée à partir des résultats obtenus lors des dernières élections législatives générales et des plus récentes élections – à notre étonnement, un tel principe avait été retenu en 2016 en vue de l’organisation de la campagne de l’élection présidentielle – et, surtout, des indications des sondages et des enquêtes d’opinion.

Nous l’avons déjà dit, cette répartition s’effectuerait donc en fonction de la capacité à accéder aux médias, critère d’animation d’une campagne, et à susciter la bienveillance des instituts de sondage. Or nombre de chaînes d’information et d’instituts de sondage sont aux mains des puissances financières, ce qui engendre un doute sérieux sur leur objectivité.

Nous vous proposons donc, au travers de cet amendement, de supprimer une disposition dangereuse pour le pluralisme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. L’avis est défavorable, parce que nous ne travaillons plus sur un champ de complète liberté du Parlement. Je rappelle de temps en temps, de façon un peu fastidieuse, que le Parlement n’est pas au-dessus de l’État de droit : il est dedans. Par conséquent, lorsque les principes supérieurs ont été énoncés ou rappelés par le Conseil constitutionnel, ils s’imposent à nous.

Au regard de plusieurs litiges intervenus sur ce sujet, le Conseil constitutionnel a énoncé un équilibre dans lequel figure en effet l’ensemble des élections antérieures. Cela signifie, par exemple, qu’une organisation politique comptant de nombreux représentants lors des élections locales verra cet avantage pris en compte dans la répartition si elle n’est pas suffisamment représentée dans les autres fractions.

Par ailleurs, le système des enquêtes d’opinion est régulé ; nous avons d’ailleurs légiféré sur cette question pour faire en sorte que ces dernières présentent des garanties en termes d’objectivité et de rigueur.

Enfin, un nouveau facteur est à prendre en compte : les réseaux sociaux. Il nous oblige d’ailleurs à recadrer un peu notre discussion : le nombre de personnes en train d’échanger en ligne, notamment sur les réseaux sociaux, pour comprendre ce qui se passe dans la campagne officielle, sera sans doute un multiple du nombre de personnes assises devant leur téléviseur ou en train d’écouter la radio. Les chiffres sont mesurables et vérifiables ; des techniques existent à cet effet.

Au contraire, la commission estime que les critères sont assez objectifs et équilibrés et qu’ils permettent au CSA de faire cette compensation de manière très guidée et très encadrée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement visant à supprimer les critères encadrant le rôle du CSA pour ce qui concerne la répartition de la fraction corrective. Le CSA est bien évidemment une autorité indépendante, mais il n’empêche que le législateur doit fixer un cadre. Ne pas le faire reviendrait à donner au CSA une marge d’appréciation trop importante, ce qui serait de nature à entraîner un risque de censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative du législateur.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Un débat s’ouvre sur les instituts de sondage. Je n’ignore pas que l’on a légiféré sur les enquêtes d’opinion, monsieur le rapporteur, mais chacun sait ici que les cinq principaux instituts de sondage appartiennent à des puissances financières, comme le groupe Bolloré ou des fonds de pension américains. De surcroît, neuf milliardaires possèdent 90 % des médias. Cela représente une vraie menace pour le pluralisme. Il nous faut avoir un débat de qualité sur ce sujet.

Quant aux réseaux sociaux, ils jouent en effet aujourd’hui un rôle dans le débat démocratique, mais ce rôle demeure limité. Pour ma part, je n’ai jamais eu un vrai débat sur les réseaux sociaux. En outre, on peut acheter des followers ou des « J’aime », sponsoriser une publication pour grimper au « hit-parade ». Voilà qui pose aussi problème au regard de la démocratie : les candidats qui pourront s’appuyer sur les puissances financières disposeront là encore de davantage de moyens d’expression que les autres. Il faut y être attentif.

Vous l’aurez compris, il s’agit là d’une sorte d’amendement d’appel visant à engager un débat qui devra se prolonger dans les mois à venir.