Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Le débat devient quelque peu compliqué.

Je ne sais pas si M. Karoutchi va retirer son amendement. C’est tout de même une vraie question. Si, au premier abord, cet amendement paraissait sympathique, il soulevait également un certain nombre de questions, d’ailleurs évoquées en partie par le président Retailleau.

Quand un sénateur ou une sénatrice devient rapporteur, il ou elle est nommé par la commission. Dès lors, je ne vois pas pourquoi l’assistant du parlementaire concerné devrait l’accompagner au cours des travaux qu’il mène pour rédiger le rapport « commandé » par la commission. J’ai l’impression que l’on mélange un peu les genres.

Par ailleurs, j’aimerais que nous nous attardions plus profondément sur le statut de nos collaborateurs, qu’il s’agisse des collaborateurs de groupe ou des assistants parlementaires. J’espère que nous aurons le temps d’y revenir dans la suite de la discussion de cette proposition de résolution.

Monsieur le président Bas, votre amendement m’interroge. Nous discutons du devenir et des responsabilités de nos collaborateurs. Je n’ai qu’une simple question : a-t-on consulté les syndicats sur ce sujet ? Je ne le crois pas. Ne serait-ce que pour cette raison, je ne voterai pas en faveur de votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. J’ai cosigné l’amendement de Roger Karoutchi, car j’ai vécu cette expérience au sein du Parlement européen. La présence de son collaborateur aux réunions aide énormément le parlementaire.

Nous travaillons au quotidien avec nos assistants, nous leur faisons une totale confiance. Or nous ne pouvons partager avec eux nos travaux sur un rapport puisqu’ils ne participent pas aux réunions de commission et qu’ils n’entendent pas ce qui s’y dit. Ils n’en ont pas la même connaissance que nous.

Nous avons souvent d’autres travaux à mener en parallèle de l’élaboration d’un rapport. Il me semble normal de pouvoir être accompagné d’un collaborateur, sans que celui-ci puisse prendre la parole.

Je soutiens la position de Roger Karoutchi par rapport au retrait de son amendement et je voterai l’amendement de M. Bas.

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.

M. André Gattolin. J’ai voté, avec quelques-uns de mes collègues, l’excellent amendement de mon excellent collègue Karoutchi. (Murmures sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain – M. Joël Labbé mime le geste dun violoniste.)

Je ne l’ai pas fait parce que nous sommes tous deux altoséquanais. Il s’agit d’un simple constat : je veux bien que l’on se concerte avec les syndicats, mais il n’est pas un seul de mes collaborateurs qui ne se soit pas plaint de ne pouvoir assister aux auditions.

Mme Éliane Assassi. Vos collaborateurs sont tous à Paris !

M. André Gattolin. Parfois, le rapporteur mène cinq auditions d’affilée. Les documents complémentaires sont envoyés directement à l’administrateur ; il m’est arrivé de ne pas pouvoir les obtenir. J’ai demandé une fois le compte rendu d’une de ces auditions : mon administrateur a dû s’adresser à son responsable, directeur de service, et il m’a fallu attendre quinze jours pour avoir une demi-page. Qui est élu ici ? Les parlementaires ou la structure administrative ? Il faut être clair. Qui signe le rapport ? Le sénateur, qui assume ses responsabilités ! Quand il embauche un collaborateur, il le fait sur une base de confiance. Or vous mettez en cause cette confiance.

Franchement, je suis très dubitatif. Sans doute eût-il fallu préciser, dans l’amendement de Roger Karoutchi, que les assistants ne peuvent prendre la parole et qu’ils n’ont pas vocation à remplacer les administrateurs, dont on sait la grande qualité.

Comme ma collègue Gruny, j’ai travaillé au Parlement européen. J’y ai moi-même été collaborateur et tout fonctionnait bien. Faire évoluer les choses sur un aussi petit détail ressemble ici à une révolution. Mais où vivons-nous ? Sommes-nous au XXIe siècle ou au XIXe ?

Je me pose la question de savoir si je vais voter l’amendement de M. le rapporteur, qui crée autant d’ouvertures que de fermetures. On va repousser les choses, en rediscuter, créer un comité Théodule… Pourquoi distinguer les « catégories » de collaborateurs ? C’est pourtant simple : il y a les collaborateurs de groupe et les collaborateurs du parlementaire. Et sur un sujet local, il serait normal que le collaborateur local puisse aussi assister à l’audition.

Essayons de parvenir à un résultat un peu intelligent, qui soit digne de notre époque. (Mme Michèle Vullien applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. L’exposé des motifs de l’amendement de M. Karoutchi était clair, sa rédaction nettement moins.

« Assister » – j’ai vérifié dans le dictionnaire – signifie être présent et seconder. Dans notre esprit, il s’agissait bien de permettre à nos collaborateurs d’être présent, non de suppléer les administrateurs. Ce n’est pas leur mission.

Assister, c’est nous aider. Qui se trouve dans le bureau ? Qui reçoit les appels téléphoniques ? Qui met à jour nos sites internet ? Qui rédige les communiqués destinés à la presse régionale ? Ce sont nos collaborateurs.

Sur les dix assistants que j’ai eus en quatorze ans de Sénat, trois avaient les capacités nécessaires sur le plan législatif pour assister à mes réunions et, le cas échéant, m’aider par la suite. Tous les assistants ne sont donc pas concernés. Je souhaite que, derrière la notion de « catégories », apparaisse bien la possibilité pour le sénateur de choisir que tel ou tel de ses collaborateurs assistera ou non aux réunions de commission. Tel était l’esprit de l’amendement de M. Karoutchi : je me plierai donc à sa décision.

La notion de confiance que lui et Bruno Retailleau ont évoquée est importante. Cela fait dix ans que je réclame cette évolution ; j’espère que d’autres que moi n’auront pas encore à la réclamer dans dix ans. (Mme Michèle Vullien et M. André Gattolin applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.

M. Michel Raison. L’objet de l’amendement de Roger Karoutchi, qui évolue avec celui de la commission, n’a pas qu’une dimension technique ; il a aussi une dimension psychologique par rapport à nos assistants.

Quand nous embauchons un assistant, à Paris ou dans nos circonscriptions, nous prenons un certain nombre de précautions. Il ne serait pas élégant de notre part de punir la grande majorité de nos assistants parce qu’il y a pu avoir dans leurs rangs quelques indélicats, comme cela peut aussi être le cas chez les sénatrices et les sénateurs. (Murmures appuyés sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)

Cela peut arriver, mais ce n’est pas le cas pour le moment ! (Sourires.)

Eu égard à cette dimension psychologique, nos assistants, lorsqu’ils demandent quelque chose à l’administration du Sénat, ont parfois le sentiment d’être considérés comme des sous-secrétaires. Or ils sont en quelque sorte nos directeurs de cabinet et, quand ils s’expriment, à l’instar du directeur de cabinet d’un maire qui parle au nom du maire, ils le font aussi en notre nom, ce dont nous sommes responsables.

Je voterai cet amendement en demandant au président Bas de faire en sorte que la question soit mise à l’ordre du jour du Bureau le plus rapidement possible.

À défaut, tout cela s’apparenterait à la demande de retrait d’un de nos amendements par un ministre qui nous promettrait de mettre en place un groupe de travail pour régler le problème. Or nous savons tous que le groupe de travail en question ne se sera jamais réuni une seule fois au terme de notre mandat.

Je ferai également tout mon possible, en tant que membre du Bureau, pour que cette question arrive à l’ordre du jour le plus vite possible et que la rédaction qui sera retenue ne soit pas trop étriquée. Il convient de donner à nos assistants les autorisations nécessaires pour pouvoir participer à un certain nombre de réunions importantes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.

Mme Françoise Cartron. J’interviens au titre d’une double expérience.

J’ai vécu cette difficulté lorsque j’étais rapporteure de la loi de refondation de l’école. Mon assistant ne pouvait participer à mes auditions, ce qui doublait mon travail. Certes, je bénéficiais de la compétence et de l’expertise des administrateurs, mais mon assistant ne pouvait partager le vécu, le ressenti des auditions. Je me devais donc de lui en faire un résumé, car c’est aussi une partie de la relation de confiance qui se noue avec lui, tout en espérant que je lui faisais une retranscription fidèle de ce que j’avais entendu.

J’étais tout à fait favorable à l’amendement de M. Karoutchi. Il faut raisonner par rapport au point de vue, non pas tant de l’assistant, mais de la sénatrice ou du sénateur. Lorsque l’on a avec son assistant une vraie relation de confiance – le mot a été beaucoup employé –, tout ce qui peut la faciliter encore davantage est bienvenu.

Présidente de l’AGAS pendant trois ans, j’ai souvent entendu, de la part des assistants, que certaines catégories de personnels, au Sénat, étaient plus nobles que d’autres. Le fait d’être exclu de ces auditions est vécu comme quelque chose de discriminant. Il me semblait donc que l’adoption de l’amendement de M. Karoutchi aurait pu donner aux assistants la place essentielle qui est la leur, ce qui passe par leur présence à nos côtés en audition.

Je m’interroge sur l’amendement de M. Bas, qui ne fixe aucun délai. Au regard de toutes les concertations à engager, je crains que plusieurs d’entre nous ne soient plus là quand cette mesure sera réellement mise en place.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Léonhardt, pour explication de vote.

M. Olivier Léonhardt. Mme Cartron a parfaitement résumé ma position, que j’exprime, non au nom de mon groupe, mais à titre personnel.

Il me semble que l’amendement de Roger Karoutchi est un simple amendement de bon sens.

Je ne suis pas un sénateur de très longue date puisque c’est mon premier mandat. Je tombe de ma chaise en voyant que l’on n’arrive pas à avancer sur une question aussi simple. Dès l’instant où les garanties nécessaires sont prises – ils n’ont pas le droit à la parole et sont uniquement là pour nous assister –, je ne comprends même pas que la question de la présence de nos collaborateurs puisse encore se poser.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Cet amendement m’avait échappé, faute de quoi je l’aurais cosigné comme nombre de sénateurs de mon groupe.

Il ouvre le débat. La commission des lois s’est efforcée de trouver un compromis, certains mettant encore quelques freins au fait que nous puissions prévoir effectivement la présence de nos collaborateurs.

Malgré ma jeune expérience dans l’hémicycle, je peux apporter un témoignage. J’ai eu la chance, la semaine dernière, de voir une proposition de loi dont j’étais l’auteure votée à l’unanimité. Dans le cadre du cheminement de cette proposition de loi, j’ai trouvé assez frustrant de devoir expliquer à ma collaboratrice, qui m’avait aidée à la rédiger, qui a suivi les travaux, qui a fait des auditions pour la préparer, qu’elle ne pouvait pas assister aux auditions du rapporteur.

C’est vrai, monsieur Karoutchi, c’est un cas qui n’est pas pris en compte dans cet amendement. Quand on est auteur d’une proposition de loi, on peut en effet assister aux auditions du rapporteur. Dans le cadre de ce gentlemans agreement, on peut aussi proposer des amendements visant à bonifier le texte.

J’ai partagé avec mes collègues de la commission des lois cette réalité qu’il avait été difficile, après quatre heures d’audition, de pouvoir rapporter à mon assistante toutes les subtilités et les faits marquants qui auraient pu nous permettre d’améliorer encore le texte.

Nous sommes tous d’accord sur le fait que l’amendement de M. Karoutchi méritait quelques précisions. La proposition de la commission des lois me semble acceptable, même s’il ne précise aucun délai, comme le soulignait Mme Carton.

Par ailleurs, comme l’a dit Mme Assassi, le dialogue social avec les syndicats est un préalable incontournable.

Nous pouvons voter cet amendement et nous engager à faire diligence. Nous sommes très majoritairement d’accord pour que nos assistants participent aux auditions en faisant preuve de la plus grande confidentialité.

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Nathalie Delattre. Quand nous les embauchons, nous prenons toujours garde à ce qu’ils aient les qualités éthiques nécessaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président Philippe Bas, comme vous le savez, les membres du groupe socialiste et républicain ont voté votre amendement lors de la réunion de commission qui vient d’avoir lieu.

Toutefois, comme vous le savez aussi, nous avons assorti notre approbation de deux points déjà largement évoqués par M. Karoutchi, par Mme Delattre, par Mme Assassi et par beaucoup d’autres orateurs.

Premièrement, il ne faut pas qu’un tel dispositif se révèle dilatoire. Nous voulons un engagement de votre part à ce que le Bureau traite de cette question lors de sa prochaine réunion ou de la suivante.

Deuxièmement, il est nécessaire d’organiser avant cette même réunion une concertation avec l’ensemble des organisations représentatives des collaborateurs.

Nous serons d’accord pour adopter cet amendement à ces deux conditions précises. Dans la mesure où elles ne figurent pas dans l’objet de votre amendement, nous vous demandons de bien vouloir vous engager en séance publique à les faire respecter.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Montesquieu écrivait : « J’aime les paysans, ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers. »

N’étant pas savant, je n’ai pas raisonné de travers en découvrant l’amendement de Roger Karoutchi et je l’ai cosigné.

Je l’ai fait, car j’aimerais que mon assistante puisse être dans l’assistance lors des auditions que je mène en tant que rapporteur du budget de l’agriculture, par exemple. Il ne m’est jamais venu à l’esprit que le terme « assister » puisse avoir un autre sens que celui d’être dans l’assistance, pour entendre ce qui se dit, pour en faire le compte rendu et, surtout, pour être informé de la suite des événements. Il faut notamment pouvoir communiquer sur le rapport, répondre aux questions, aux demandes d’entretien. Je souscris donc à ce qu’a dit Catherine Procaccia.

J’entends les propos des présidents Retailleau et Bas appelant à border les choses. Je comprends que Roger Karoutchi parle de retirer son amendement et d’accepter la proposition de la commission, mais à la condition du respect du pacte de confiance.

Il est indiqué à la fin de l’amendement de Philippe Bas : « Après avoir échangé avec le président du Sénat, votre rapporteur confirme qu’il est très clairement disposé à ouvrir une réflexion à ce sujet pour faire émerger la meilleure solution. » Dès lors, pourquoi ne pas simplement ajouter au texte de l’amendement un délai, par exemple d’un ou deux mois ? Nous serions alors vraiment dans le cadre de ce pacte de confiance. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.

M. Alain Marc. J’ai été député pendant sept ans. Nous avions la possibilité, à l’Assemblée nationale, de venir en réunion avec nos assistants, même les stagiaires, sans que cela pose le moindre problème. Quand je suis arrivé au Sénat, le fait que cela puisse en poser m’a quelque peu interloqué.

Associer nos collaborateurs à ces auditions, comme le souhaite M. Karoutchi au travers de son amendement, est une bonne chose.

Toutefois, le terme « assister » pose problème. Je fais confiance à Philippe Bas, dont l’amendement ne me semble pas reposer sur une volonté dilatoire. Nous avons tous déjà eu cette discussion avec nos présidents de groupe et je crois que l’amendement de la commission va dans le bon sens.

Le président Bas apportera sans doute une réponse à la question du délai dans lequel le Bureau pourrait rendre une instruction sur cette problématique. Je souhaite avancer et voterai son amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Mes chers collègues, je vous ai bien écoutés, les uns et les autres.

Je voudrais répondre à la préoccupation de la confiance. Vouloir que le Bureau soit saisi, rédiger un texte qui fait obligation au Bureau, en ce qu’il utilise l’indicatif présent, de prendre de nouvelles dispositions, c’est déjà un gage de confiance.

Toutefois, j’entends ce que vous me dites, sur plusieurs travées. Laurent Duplomb me suggère de modifier l’objet de mon amendement, ce que je vais faire verbalement : après avoir évoqué de manière approfondie cette question avec le président du Sénat, je peux vous annoncer qu’elle sera examinée dès la prochaine réunion du Bureau, si cet amendement était adopté.

Je suis le gardien de cet engagement et je veillerai à ce qu’il soit respecté, ce dont je ne doute pas.

Par ailleurs, je voudrais rassurer M. Sueur sur la question de la concertation. Je connais et partage votre souci du dialogue social, mon cher collègue. D’aucuns craignent que ce dialogue ne soit qu’un simple prétexte à visée dilatoire pour diluer l’examen de cette question, au point de ne pas aboutir. En réalité, il faut faire les deux. Nous avons nous-mêmes suffisamment reproché au Gouvernement de ne pas avoir su dialoguer avant de prendre ses décisions lors du déclenchement de la crise des « gilets jaunes » ; sachons donc dialoguer avant de déterminer les modalités de mise en œuvre de ce que nous proposons.

À mon sens, le Bureau doit aller vite – c’est pourquoi le sujet sera abordé dès sa prochaine réunion –, mais il doit également rencontrer les présidents de groupe, les présidents de commission, les responsables des associations de collaborateurs parlementaires, ainsi que les représentants des administrateurs. D’ailleurs, je ne vois pas comment nous pourrions procéder autrement.

En préparant la présente résolution tendant à modifier notre règlement, le président du Sénat a effectivement procédé à des concertations. Les concertations ne doivent pas être de la procrastination. Elles doivent être utiles et permettre de trouver les solutions en y incorporant les points de vue qui se seront exprimés.

Je souhaite que nous avancions rapidement. Je prends l’engagement d’y veiller. Au cours de notre débat, la confiance m’est apparue comme une question essentielle.

Je souhaite également répondre à une interpellation à caractère rédactionnel. Plusieurs orateurs se sont interrogés sur la signification du terme « catégories ». M. Gattolin a par exemple indiqué qu’il serait préférable d’écrire : « les collaborateurs de groupe et les collaborateurs des sénateurs ». Or c’est précisément ce que nous avons voulu exprimer par cette économie de mots.

M. Philippe Bas, rapporteur. Je vous confirme – et l’interprétation que je vous donne fait foi – que l’expression « les catégories de collaborateurs » désigne bien les collaborateurs du groupe et les collaborateurs des sénatrices et des sénateurs.

M. André Gattolin. Très bien !

M. Philippe Bas, rapporteur. M. Karoutchi a soulevé une véritable question. Je tiens très sincèrement à le remercier, d’autant que cela représentait visiblement pour lui un certain effort, d’avoir retiré son amendement.

M. Roger Karoutchi. Mais je ne l’ai pas encore retiré !

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est ce que vous avez annoncé, mon cher collègue. (M. Roger Karoutchi le conteste.) En tout cas, je vous en remercie.

M. Roger Karoutchi. « Par avance » ! (Sourires.)

M. Philippe Bas, rapporteur. Si vous le souhaitez ! (Nouveaux sourires.) Mais il m’avait bien semblé entendre dans vos propos que vous retiriez votre amendement.

Il y a, me semble-t-il, une satisfaction à avoir dans notre débat. À ma connaissance, pas une voix ne s’est exprimée contre la modification de nos pratiques permettant, sur décision des présidents de commission, aux collaborateurs des rapporteurs et aux collaborateurs des auteurs de propositions de loi d’être présents aux auditions, pour être pleinement et en temps réel informés du travail de leur sénateur sur une proposition ou un projet de loi, et d’être également présents lors des travaux de la commission sur le texte dont leur sénateur est rapporteur ou auteur.

Je crois qu’il y a une unanimité du Sénat. Notre président est par avance d’accord pour que nous allions en ce sens. Je ne vois aucune raison de douter que les décisions nécessaires seront prises par l’instrument adapté : l’instruction générale du bureau du Sénat. (Marques dimpatience sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Tous les éléments sont maintenant réunis pour que nous puissions progresser. C’est pourquoi je vous demande d’adopter l’amendement que nous avons déposé au nom de la commission des lois.

Mme la présidente. Monsieur Karoutchi, confirmez-vous que vous retirez l’amendement n° 10 rectifié ter ?

Mme Éliane Assassi. Cela fait plus d’une heure et quart que nous sommes sur cet amendement !

M. Roger Karoutchi. Nous avons passé une heure et demie en séance plénière pour savoir si les collaborateurs parlementaires peuvent assister à certaines réunions avec leur sénateur ! Sans commentaire. Mais songeons à la portée, parfois, de certaines de nos discussions…

Je retire naturellement l’amendement n° 10 rectifié ter. Je veux bien accorder la confiance nécessaire à notre rapporteur et au président du Sénat. Nous nous sommes exprimés. Nous jugerons sur pièce après les réunions des prochains bureaux.

Mme la présidente. L’amendement n° 10 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 40.

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRCE s’abstient !

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 16, présenté par Mme Assassi, M. Collombat, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ….- Si le groupe auteur d’une proposition de loi inscrite à l’ordre du jour dans les conditions fixées par l’alinéa 5 de l’article 29 bis demande la désignation d’un de ses membres comme rapporteur, cette demande est de droit. » ;

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. J’espère que nous allons passer autant de temps sur cet amendement, visant à renforcer le rôle des parlementaires et à donner plus de place aussi à l’opposition. Passer une heure et demie à discuter de la place de nos collaborateurs me semble surréaliste au regard des vrais problèmes qui se posent dans notre pays !

M. Philippe Bas, rapporteur. On peut aussi avoir des égards pour nos collaborateurs !

Mme Laurence Cohen. Je dis cela quelle que soit mon opinion quant à la qualité de nos collaborateurs, monsieur le rapporteur.

Nous sommes en train de modifier notre règlement dans un contexte où le pouvoir exécutif prend une place considérable et rabote les droits des parlementaires, en bénéficiant de la neutralité de la majorité sénatoriale : nous avons de moins en moins de droits, et vous faites en sorte de nous en retirer encore davantage !

Cet amendement de notre groupe est simple. Il n’est pas révolutionnaire. Cela dit, celui de M. Karoutchi, qui a tout de même mis un sacré désordre dans notre hémicycle, ne l’était pas non plus.

Nous proposons que, lors des niches parlementaires, le groupe à l’origine du texte en discussion obtienne de droit la fonction de rapporteur pour l’un de ses membres s’il en fait la demande. La pratique actuelle veut que les textes discutés dans le cadre des niches ne soient pas dénaturés par les autres groupes lors de leur examen en commission. Nous souhaitons la rendre plus officielle, en donnant de droit la fonction de rapporteur au groupe dont le texte est issu, afin de garantir qu’il n’y aura pas de dénaturation.

Je pense qu’une telle disposition devrait recueillir la majorité de vos suffrages, mes chers collègues. Pour ma part, je serai particulièrement attentive – d’ailleurs, je le suis toujours – à la réponse du président-rapporteur. J’ai eu le sentiment, sur nos précédents amendements, qu’il utilisait des arguments un peu à géométrie variable, évoquant tantôt la proportionnelle, tantôt la nécessité de ne pas dépenser les deniers de la Haute Assemblée. Tout cela ne sera, me semble-t-il, pas de mise en l’occurrence. Il pourra nous soutenir, afin que notre amendement soit voté dans le plus grand consensus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Il est souhaitable que les rapporteurs puissent s’adosser à la majorité de la commission pour en défendre le point de vue en séance. Les rapports sur des textes présentant une dimension technique ou un caractère consensuel peuvent parfaitement être pris en charge par des collègues issus de groupes d’opposition ou de groupes minoritaires ; comme président de commission, ma pratique est de rechercher le maximum d’occasions pour que cela soit le cas. Mais confier un rapport à un membre d’un groupe minoritaire en sachant que la majorité de la commission votera contre ses conclusions, ce qui l’obligera ensuite à défendre au banc des convictions contraires aux siennes, c’est le placer dans une situation extrêmement inconfortable !

Au fond, c’est le jeu normal de la démocratie. Cela existe dans nos conseils municipaux et dans nos conseils départementaux, comme au Sénat et à l’Assemblée nationale. Je ne crois pas que l’on puisse déroger à cette règle, même si, encore une fois, je suis extrêmement soucieux qu’un maximum de rapports puissent être confiés à des sénateurs issus de groupes n’appartenant pas à la majorité.

Vous m’avez demandé une explication aussi complète que possible. Vous serez en désaccord avec ma position. C’est le dialogue démocratique entre nous. J’exprime moi aussi un point de vue de conviction !

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Nous venons de discuter longuement, trop longuement à mon goût, de la présence ou non d’assistants parlementaires à certaines de nos réunions pour nous seconder. J’ai entendu dire que certaines positions constituaient une remise en cause de la « confiance ». Mais là, c’est exactement pareil !

Nous demandons qu’un groupe ayant déposé une proposition de loi puisse obtenir de droit la fonction de rapporteur pour l’un de ses membres sur celle-ci. Honnêtement, je ne vois pas où est le problème !

On nous dit qu’il ne serait pas possible à un groupe d’argumenter et de défendre son texte sous peine de le « dénaturer » ? Je ne comprends pas bien. Le rapporteur, ajoutez-vous, pourrait se retrouver en contradiction avec ses propres convictions ? On marche sur la tête !

C’est tout de même une question de confiance dans le travail législatif. Vous avez des présupposés quant au contenu du rapport rédigé par un membre du groupe auteur de la proposition de loi. Mais rien n’empêche – d’ailleurs, nous y sommes confrontés plutôt deux fois qu’une ! – que le texte soit rejeté ; je ne vois pas en quoi le fait d’avoir la fonction de rapporteur change la donne à cet égard. Enfin, mes chers collègues, regardez nos propositions de loi qui sont acceptées !

Par conséquent, je ne pense pas que votre argument puisse être pris en compte.

Aujourd’hui, dans les hémicycles, les groupes minoritaires n’ont que peu de pouvoir. Voyez le nombre d’amendements qui sont acceptés ! Dans notre groupe, nous sommes toujours constructifs ; nous déposons donc des amendements. Or quasiment 95 % d’entre eux sont rejetés par le Gouvernement et la majorité sénatoriale.

Et quand nous demandons que le groupe porteur d’une proposition de loi puisse obtenir la fonction de rapporteur pour l’un de ses membres, on nous rétorque que nous allons « dénaturer » je ne sais quoi ! Mais pas du tout ! Celui qui risque de dénaturer la proposition de loi, c’est le rapporteur issu d’un autre groupe qui ne la comprendra pas !