Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, il est en France un paradoxe qui a la vie dure : les citoyens veulent à la fois plus de services publics et moins de pression fiscale, plus d’État et moins d’impôts, plus de dépenses et moins de recettes.

Pour dépasser ce paradoxe, il n’y a guère qu’une façon d’avancer : réformer l’État. C’est une tâche de Sisyphe, un travail continu auquel nous ne devons jamais renoncer.

Réduire notre déficit tout en améliorant la qualité de nos services publics, telle est donc notre mission. Elle n’est pas impossible. Le Gouvernement l’a d’ailleurs prouvé, notamment par le biais d’une réforme technique, mais populaire : la mise en œuvre du prélèvement à la source. Cette réforme a coché toutes les cases.

Premièrement, elle a amélioré la qualité du service public rendu aux contribuables en simplifiant leurs démarches.

Deuxièmement, elle a permis d’augmenter les recettes de l’État en actualisant les prélèvements par rapport aux revenus.

Troisièmement, elle fait preuve d’efficience et mobilise moins de fonctionnaires à Bercy pour le suivi des procédures.

Ainsi, transformer l’action permet à la fois d’améliorer les recettes sans augmenter l’impôt et de baisser les dépenses sans dégrader les services publics. Messieurs les ministres, il faut bien l’avouer, nous aimerions tous que cet exemple puisse être suivi par l’ensemble de nos administrations.

Alors que le schéma global de la mission « Gestion des finances publiques » baissera sur l’année 2023, la qualité du service rendu doit toujours être au rendez-vous et les actions doivent continuer de se moderniser.

C’est dans ce même esprit de réforme que je souhaite aborder l’autre aspect de cette discussion, qui concerne le compte d’affectation spéciale « Pensions ».

Depuis que la réforme des retraites a été balayée par la pandémie, nous examinons chaque année ces crédits dans la crainte ou l’espoir – c’est selon – que le dossier soit de nouveau ouvert. Désormais, la donne a changé ; l’élection présidentielle a confirmé que les Français étaient prêts à une réforme du système de retraite.

M. Éric Bocquet. Pas sûr !

M. Claude Malhuret. Nous verrons bien… Les contours de cette réforme restent à définir et le Gouvernement a d’ores et déjà engagé une concertation avec les partenaires sociaux. Il faudra désormais aller au bout ; le plus tôt sera le mieux. Le rapport spécial de notre collègue Sylvie Vermeillet nous le rappelle : un recul de l’âge de départ à la retraite permettrait d’économiser entre 8 et 9 milliards d’euros à l’issue du quinquennat.

Il faut bien sûr se défier des solutions miracles. Le rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) précise que le rehaussement de l’âge légal de départ à la retraite peut également entraîner des dépenses supplémentaires pour l’assurance maladie. C’est pourquoi notre groupe prône une réforme globale plutôt qu’un ajustement paramétrique s’appuyant sur le seul levier de l’âge de départ.

Cette réforme devra également rouvrir le débat sur les régimes spéciaux. L’analyse de la mission « Régimes sociaux et de retraite » nous rappelle que le financement des deux régimes spéciaux de la RATP et de la SNCF mobilise plus de 4 milliards d’euros. Ces crédits augmenteront de 5 % sur l’année 2023.

Enfin, le compte d’affectation spéciale « Pensions » comme la mission « Régimes sociaux et de retraite » ne constituent qu’une part des financements de l’État vers les régimes de retraite. In fine, les dépenses publiques consacrées aux retraites représentent près d’un quart du total des dépenses publiques, soit 14 % du PIB.

En attendant que ce débat se tienne au Sénat, notre groupe votera en faveur des crédits des différentes missions que nous examinons aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Didier Rambaud, Marc Laménie et Thierry Meignen applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Breuiller. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon groupe souhaite exprimer son total soutien à la famille du chef de brigade décédé cette semaine dans l’exercice de ses fonctions. Nous voulons également rendre hommage à sa collègue blessée et, plus largement, à tous les agents de la direction générale des finances publiques.

Nous présenterons d’ailleurs tout à l’heure un amendement n° II-109 visant à renforcer les moyens du contrôle fiscal.

Le nombre d’agents affectés dans les différents services de contrôle de la DGFiP a baissé d’un tiers au cours des dix dernières années. La direction comptait 10 252 postes en 2017 contre 13 336 en 2010. En 2020, les effectifs de la DGFiP s’élevaient à environ 9 000 agents, soit une baisse de 9 % par rapport à 2017.

Dans le même temps, les résultats du contrôle fiscal se sont effondrés. Alors que le fisc a notifié pour 21,2 milliards d’euros de redressements fiscaux et de pénalités en 2015, ce montant n’est plus que de 10,7 milliards d’euros en 2021, soit une baisse de moitié. Une robustesse accrue du système ne l’explique sans doute que partiellement. Si le recours aux moyens informatiques augmente fortement et soutient un choix stratégique probablement nécessaire, l’affaiblissement des moyens en ressources humaines est bien réel.

Vous choisissez, par exemple, messieurs les ministres, au nom de la modernisation de l’action publique, que ce soit non plus les agents comptables des trésoreries de proximité qui encaissent les espèces de régie des communes, mais la Banque postale. Je rappelle, car j’étais encore il y a peu élu local, qu’une telle décision contraint certaines collectivités à souscrire un contrat privé de transport de fonds pour la sécurité des agents régisseurs.

Quand un choix du Gouvernement impose à des usagers d’aller régler leurs factures titrées au bureau de tabac, cela affaiblit, à notre sens, le modèle de service public que nous souhaitons.

Bien sûr, une dématérialisation des paiements a lieu. C’est un choc de simplification bienvenu pour la plupart des familles. Cependant, il reste dans ma ville 3 % à 4 % de familles qui viennent régler leurs factures de cantine en mairie avec des pièces. Elles ne le font pas de gaieté de cœur ; c’est le reflet d’une situation de précarité auquel nos agents publics doivent également faire face.

Votre démarche, par ailleurs, ne porte pas tout à fait ses fruits, puisque ce secteur, comme beaucoup d’autres de la fonction publique, est désormais confronté à une véritable crise pour recruter et fidéliser ses agents, comme en témoigne le volet de cette mission consacré aux ressources humaines.

Nous vous demandons donc, messieurs les ministres, de renforcer les contrôles, mais également de cesser de raboter les moyens humains de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. le président de la commission des finances applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Dominique Théophile. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, c’est donc par l’examen regroupé de quatre missions que nous abordons la seconde partie du projet de loi de finances pour 2023. Cette année encore, nous sommes invités à la concision. C’est une invitation que je m’efforcerai d’honorer !

C’est donc en quelques mots que je vous exprimerai, avant tout, que nous nous associons à l’hommage qui a été rendu à l’inspecteur des finances publiques tué lundi dernier dans l’exercice de ses fonctions. Nous apportons notre profond soutien à sa famille, à ses proches et à ses collègues, aujourd’hui plus encore, alors que nous nous apprêtons à débattre du budget de la direction générale des finances publiques.

Les deux premières missions qui nous sont ici soumises, « Gestion des finances publiques » et « Transformation et fonction publiques », regroupent les crédits qui participent activement à la transformation de l’action publique. Elles s’inscrivent en cela dans la dynamique engagée il y a cinq ans par le Président de la République.

La première, qui porte les crédits de la DGFiP et de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), verra son budget augmenter sensiblement en 2023, pour approcher les 11 milliards d’euros, en raison, principalement, de l’augmentation des crédits informatiques et immobiliers.

Nous nous réjouissons du bon déroulement de la réforme visant à unifier au sein de la DGFiP le recouvrement des taxes, ainsi que des conséquences positives de la réforme de son réseau de proximité.

Je salue également les efforts déployés par ces deux directions pour valoriser les données en vue de lutter plus efficacement contre la fraude. Je souligne aussi le renforcement de la présence de la DGDDI à la « frontière numérique », alors que le commerce en ligne se développe de manière exponentielle.

Mon dernier motif de réjouissance porte sur la forte hausse des crédits alloués en 2023 à Tracfin pour renforcer sa capacité à traiter un nombre croissant d’informations.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Dominique Théophile. La mission « Transformation et fonction publiques » retrace, quant à elle, les crédits interministériels destinés à soutenir directement la transformation publique.

Elle connaîtra en 2023 une montée en charge importante, puisque le budget de cette mission s’élèvera à 800 millions d’euros en autorisation d’engagement et à 1,1 milliard d’euros en crédits de paiement, soit une hausse respective de 79 % et de 44 %.

Nous saluons dans ce cadre la mobilisation d’une enveloppe destinée à réduire la dépendance aux énergies fossiles des bâtiments de l’État et de ses opérateurs. Nous nous réjouissons également qu’ait été réabondé le fonds pour la transformation de l’action publique, qui permettra de générer des économies pérennes. Nous saluons enfin la volonté du Gouvernement de placer l’inclusion et l’expérience de l’usager au cœur de la conception des services publics numériques.

Je me réjouis également du développement de l’apprentissage dans la fonction publique, ainsi que du lancement du volet du Conseil national de la refondation (CNR) qui lui est consacré.

Je salue par ailleurs les efforts déployés par le Gouvernement pour réduire les dépenses en prestations de conseil et pour renforcer la capacité de conseil interne de ses administrations.

Quant à la mission « Crédits non répartis », elle fait une nouvelle fois l’objet d’une demande de crédits visant à financer l’extension du forfait mobilités durables et les mesures de convergence des régimes indemnitaires indiciaires résultant de la création du corps des administrateurs de l’État.

Les crédits de cette mission demeurent cependant principalement affectés au programme 552, « Dépenses accidentelles et imprévisibles » ; nous aurons, dans quelques instants, l’occasion d’évoquer cette enveloppe de près de 2 milliards d’euros.

La mission « Régimes sociaux et de retraite » voit, quant à elle, ses crédits légèrement augmenter pour atteindre 6,14 milliards d’euros en 2023. On poursuivra ainsi le financement des régimes spéciaux de retraite déficitaires à la charge de l’État.

Le groupe RDPI vous invite à adopter les crédits de ces différentes missions, qui font l’objet d’un relatif consensus au sein de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen conjoint des missions « Gestion des finances publiques », « Régimes sociaux et de retraite » et « Transformation et fonction publiques » est un exercice impossible dans le temps qui nous est alloué.

Je me concentrerai donc sur les enjeux qui concernent directement les quelque 5,6 millions d’agents publics qui, dans nos écoles, nos hôpitaux, nos commissariats ou nos collectivités, exercent dans des conditions parfois difficiles leur nécessaire mission de service public.

Je veux profiter de l’examen de ce budget pour saluer l’ensemble des agents de nos différentes fonctions publiques pour leur professionnalisme et leur engagement au service de nos concitoyens.

La fonction publique fait aujourd’hui face à une vraie crise du recrutement, qui se constate dans tous ses versants, avec des conséquences très concrètes sur le service rendu aux usagers : horaires réduits, diminution du temps de présence aux guichets et recours accru à la dématérialisation, qui éloigne des services publics beaucoup de nos concitoyens, notamment les plus âgés et les plus précaires, et alimente la mécanique du non-recours aux droits.

Relever le défi de l’accessibilité de nos services publics passe donc nécessairement par une amélioration de l’attractivité de la fonction publique. Pour assurer aux usagers un service public de qualité et de proximité, il faut que des femmes et des hommes acceptent de s’engager dans cette carrière.

La crise du recrutement n’est pas une crise des vocations pour le service public. Elle s’explique plutôt par une perte de sens et par une dégradation des conditions de travail au sein de la fonction publique, dégradation nourrie par le développement de la contractualisation et de l’externalisation.

La crise du recrutement s’explique aussi par la faiblesse des rémunérations. J’observe que nous partageons ce constat, monsieur le ministre de la transformation et de la fonction publiques, puisque vous avez vous-même récemment déclaré que « le déficit d’attractivité de la fonction publique est lié à une problématique salariale ».

Le Parlement a certes voté une revalorisation de 3,5 % du point d’indice, mais cette augmentation intervient après dix années de gel – exception faite des années 2016 et 2017 – et dans un contexte inflationniste exceptionnel.

Certes, il s’agit de la plus forte augmentation générale du point d’indice au cours des quarante dernières années, mais l’inflation aussi n’a jamais été aussi haute depuis quarante ans ! Cette augmentation, aussi importante soit-elle, ne couvre donc ni la hausse des prix en 2022 ni la perte de pouvoir d’achat cumulée depuis 2017.

Vous affirmez que, en l’absence d’une nouvelle mesure générale portant sur les salaires, les mesures de compensation individuelle devraient permettre de maintenir le pouvoir d’achat des agents de la fonction publique. Mais ces compensations, tout comme la garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa), ne sont plus des mécanismes adaptés et ne sont pas à la hauteur en matière d’attractivité.

Certes, grâce aux compensations individuelles, les agents qui sont déjà sur la grille ne perdent pas de pouvoir d’achat. Mais quid de ceux qui passent les concours, pour lesquels aucune compensation individuelle n’est prévue ? Par ailleurs, la grille est de moins en moins attractive par rapport aux possibilités offertes dans le secteur privé.

L’action sociale interministérielle, qui vise à améliorer les conditions de vie des agents de l’État et de leurs familles, pourrait constituer un levier d’amélioration du pouvoir d’achat des agents publics.

J’en viens plus directement au budget qui nous est présenté. Ses crédits sont en légère hausse de 1,8 %, mais ils restent faibles en volume et cette augmentation est amputée par l’inflation.

Ainsi, en premier lieu, des crèches : le dispositif qui permet aux agents de bénéficier prioritairement de places en crèches dans des aires géographiques adaptées à leurs besoins reste trop modeste. Le montant global qui lui est alloué, 30,7 millions d’euros, est à peine plus important que celui qui avait été ouvert pour 2022, soit 30,1 millions d’euros. Cette quasi-stabilité freine nécessairement le développement du parc. Seules cent places en crèches ont été créées en 2022 et il n’est annoncé que cent trente-cinq places supplémentaires pour 2023.

Ainsi, en second lieu, du logement des fonctionnaires : les chiffres présentés dans ce texte montrent l’absence d’une grande politique sociale interministérielle en matière de logement, alors que celui-ci pèse toujours plus lourd dans le budget des Français et notamment des fonctionnaires.

En 2020, lors du débat budgétaire pour l’année suivante, j’avais souhaité, par un amendement, attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de réviser l’ensemble du dispositif de l’indemnité de résidence.

Ce dispositif, qui n’a pas été modifié depuis 2001, est obsolète. Les montants proposés sont ridiculement faibles. Son périmètre aussi doit être révisé, certaines zones frontalières n’étant pas incluses alors qu’elles subissent des loyers très élevés. C’est le cas du pays de Gex, dans mon département de l’Ain, et des zones frontalières de la Haute-Savoie. Les difficultés que rencontrent les fonctionnaires pour se loger sont vraiment immenses !

Monsieur le ministre, votre prédécesseur, Mme Amélie de Montchalin, s’était engagée au nom du Gouvernement, devant le Sénat, à revoir ce dossier, considérant que les politiques sociales d’aide à l’accès au logement doivent permettre aux agents publics d’avoir accès à un logement adapté pour un coût connu et encadré. En dépit des relances, nous n’avons rien vu venir !

Devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, le 26 octobre dernier, vous avez reconnu qu’il y avait là un vrai sujet. Je vous demande avec insistance, monsieur le ministre, de passer enfin aux actes. C’est important pour un certain nombre de territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

Organisation des travaux

Transformation et fonction publiques - Compte d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'État - Gestion des finances publiques - Crédits non répartis - Régimes sociaux et de retraite - Compte d'affectation spéciale : Pensions
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Organisation des travaux (interruption de la discussion)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement souhaite inverser l’ordre d’examen des missions « Plan de relance » et « Investir pour la France de 2030 », d’une part, et des missions « Engagements financiers de l’État » et « Remboursements et dégrèvements », ainsi que des comptes spéciaux qui leur sont associés, d’autre part. Avec votre permission, les premières seraient examinées mardi prochain et les secondes dès demain.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Après avoir consulté les rapporteurs spéciaux sur ces missions et ces comptes spéciaux, je peux confirmer qu’il est favorable.

Mme la présidente. Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Alain Richard.)

PRÉSIDENCE DE M. Alain Richard

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Organisation des travaux (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Discussion générale

5

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour une mise au point au sujet d’un vote.

M. François Bonhomme. Monsieur le président, lors du scrutin n° 67 sur les amendements identiques nos I-715 rectifié ter et I-958 rectifié bis, intervenu au cours de la séance du 23 novembre 2022, M. Jean-Raymond Hugonet souhaitait voter pour.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

6

Organisation des travaux (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Transformation et fonction publiques - Compte d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'État - Gestion des finances publiques - Crédits non répartis - Régimes sociaux et de retraite - Compte d'affectation spéciale : Pensions

Loi de finances pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Transformation et fonction publiques - État B
Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Transformation et fonction publiques - État B

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Transformation et fonction publiques (suite)

Compte d’affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l’État (suite)

Gestion des finances publiques (suite)

Crédits non répartis (suite)

Régimes sociaux et de retraite (suite)

Compte d’affectation spéciale : Pensions (suite)

M. le président. Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des crédits de la mission « Transformation et fonction publiques », du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », des missions « Gestion des finances publiques », « Crédits non répartis », « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions » (et articles 50 et 51).

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Lana Tetuanui.

Mme Lana Tetuanui. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen de la mission « Transformation et fonction publiques » me permet d’interpeller le Gouvernement sur les affectations de fonctionnaires dans ma collectivité d’outre-mer. Ne me dites pas que je suis hors sujet, parce que les affectations d’expatriés outre-mer ont un coût non négligeable pour le budget de l’État !

En effet, messieurs les ministres, sur l’ensemble des différents départements ministériels concernés, ceux de la justice et de l’intérieur méritent votre attention, au vu de notre actualité locale.

Comment peut-on encore aujourd’hui favoriser l’affectation d’un expatrié au détriment d’un Polynésien, à compétences égales ?

Avant les élections législatives, sept postes de policiers étaient vacants et, sans notre intervention forte, nous aurions eu droit à l’affectation de sept expatriés, alors même que des personnes originaires de Polynésie en exercice dans l’Hexagone depuis plusieurs années attendaient leur mutation. Un correctif a été apporté par le ministre Darmanin, que je remercie.

Par ailleurs, je m’interroge aussi sur le choix de certains candidats métropolitains affectés chez nous. Dans l’exercice de leurs fonctions, on découvre qu’ils ont des comportements déplacés et qu’ils profèrent des propos sévères à l’encontre du personnel polynésien. C’est le cas à la direction territoriale de la police nationale de Papeete.

Je m’interroge fortement sur ces mouvements de personnel.

De grâce, messieurs les ministres, veillez à introduire davantage de vigilance dans le choix des affectations outre-mer et veuillez donner des instructions aux administrations centrales pour que les dispositions de la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dite loi Érom soient mieux respectés, ainsi que la notion de « centre des intérêts matériels et moraux ».

En effet, un réel sentiment de malaise, une rancœur et une perte de confiance à l’égard de l’État se développent parmi nos fonctionnaires polynésiens du fait de ces affectations, dont le coût est en outre important pour le budget de l’État en raison des avantages financiers se rattachant à l’expatriation.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Lana Tetuanui. Messieurs les ministres, ces affectations dictées depuis Paris font beaucoup de mal chez nous. On le ressent de plus en plus…

M. le président. Il faut vraiment conclure !

Mme Lana Tetuanui. Il ne faudra donc pas s’étonner que les rangs indépendantistes progressent dans les mois à venir ! (MM. François Bonhomme, Marc Laménie et Jean-Michel Houllegatte applaudissent, ainsi que M. le président de la commission des finances.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc Laménie. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le travail des rapporteurs spéciaux Claude Nougein, Albéric de Montgolfier et Sylvie Vermeillet, ainsi que des rapporteurs pour avis René-Paul Savary et Catherine Di Folco.

La mission « Transformation et fonction publiques », le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », les missions « Gestion des finances publiques » et « Régimes sociaux et de retraite », ainsi que le CAS « Pensions » représentent des engagements financiers très significatifs.

Comme les orateurs qui m’ont précédé à la tribune, je souhaite rendre hommage à l’inspecteur des finances publiques qui a perdu la vie dans des circonstances dramatiques, lors d’un contrôle fiscal dans le département du Pas-de-Calais, et m’associer à la douleur de sa famille, de ses proches et de ses collègues.

Il est très important de témoigner de notre solidarité, de notre respect et de notre reconnaissance à l’égard de l’ensemble des fonctionnaires, qu’ils appartiennent à la fonction publique d’État, à la fonction publique territoriale ou à la fonction publique hospitalière. Derrière les missions que nous allons examiner, il y a des femmes et des hommes qui font preuve de dévouement, au service de nos concitoyens.

Les 5,66 millions d’agents publics sont répartis entre la fonction publique d’État, à hauteur de 45 % des effectifs, la fonction publique territoriale, pour 34 % des effectifs, et la fonction publique hospitalière, à hauteur de 21 %.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit la création de plus de 10 000 équivalents temps plein (ETP), affectés notamment aux ministères de l’éducation nationale, de la justice et de l’intérieur.

Je m’attarderai quelque peu sur la gestion des finances publiques par la direction générale des finances publiques, une gestion à laquelle nous sommes particulièrement attachés lorsqu’elle est exercée à l’échelon de nos départements et territoires respectifs.

Depuis plusieurs années, malheureusement, les effectifs de la DGFiP ont été réduits et bon nombre de trésoreries ont fermé, ce qui entraîne des difficultés. Même si l’automatisation peut être efficace dans certains cas, je rappelle que les trésoreries sont aussi au service des élus, dans le cadre de la relation entre ordonnateurs et comptables publics – et nous tenons à cette présence humaine –, comme elles sont à l’écoute de nos entreprises et des particuliers. Ces missions sont très importantes.

Je veux également mentionner dans mon propos l’administration des douanes, qui relève du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; je le fais en tant que représentant des Ardennes, département frontalier dans lequel les douanes jouent un rôle considérable, aux côtés de nos forces de sécurité intérieure.

Je tiens à citer, à cet égard, l’intéressant rapport de nos collègues Albéric de Montgolfier et Claude Nougein intitulé Organisation et moyens de la Douane face au trafic de stupéfiants, qu’ils ont récemment présenté au sein de la commission des finances et qui contient onze recommandations. Nos collègues ont pu mesurer l’ampleur de l’engagement de l’administration des douanes, mais aussi le niveau des moyens humains et techniques qu’il convient de leur apporter.

Pour conclure, je salue encore une fois les différents travaux qui ont été réalisés ; je soutiendrai les avis des rapporteurs sur ces missions. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame, messieurs les rapporteurs spéciaux, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d’abord vous remercier pour les paroles d’hommage que vous avez dédiées à cet agent du service public qui a perdu la vie en accomplissant sa mission. Vous avez eu raison de rappeler que l’ensemble des agents de la fonction publique étaient aujourd’hui en deuil.

Je suis heureux de vous présenter le budget du ministère de la transformation et de la fonction publiques, qui est en hausse de 57,8 millions d’euros. Il ne s’agit pas, en volume, du budget le plus important que vous examinerez, mais – vous le savez – c’est un budget de levier et d’action, qui permet d’enclencher des projets pour la fonction publique.

Je traiterai de quelques faits saillants de l’évolution des crédits budgétaires.

Notre première priorité est de renforcer les compétences au sein de la fonction publique, afin d’améliorer son attractivité – un objectif que plusieurs d’entre vous ont mentionné.

Nous créons, pour ce faire, sept emplois supplémentaires au sein de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), au titre de la réforme des carrières et des rémunérations, qui sera un enjeu très important en 2023.

Nous augmentons aussi les moyens de la direction interministérielle de la transformation publique, en créant 22 emplois, afin de renforcer nos compétences internes de conseil, comme j’en avais pris l’engagement au Sénat lors de l’examen de la proposition de loi encadrant l’intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques.

J’en profite pour vous indiquer que je respecte l’autre engagement que j’avais pris alors : le texte qui vous est présenté intègre bien la création d’une annexe budgétaire dédiée – un « jaune » budgétaire – et pérenne ; cette mesure, prévue dans l’un des amendements qui ont été retenus, sera inscrite dans le temps long.

Je signale aussi, bien qu’ils ne relèvent pas de mon budget, les moyens considérables que nous donnons à la délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État (Diese), qui est en quelque sorte la direction des ressources humaines de l’encadrement supérieur de la fonction publique. Ces moyens, essentiels, s’inscrivent dans la réforme de la haute fonction publique que nous conduisons dans un objectif de transformation de l’action publique.

Notre deuxième priorité transparaît aussi dans ce budget : il s’agit de rendre nos services publics plus efficaces et accessibles.

Nous avons fait le choix de continuer à investir dans la transformation de l’action publique, en reconduisant le fonds pour la transformation de l’action publique : une nouvelle enveloppe de 330 millions d’euros est proposée pour la période 2023-2025, dont 120 millions dès 2023.

Nous poursuivons le déploiement des espaces France Services, pour accompagner les collectivités ; ce sont 150 espaces supplémentaires qui seront créés grâce aux moyens reconduits pour 2023. À cet égard, je salue la mesure portée par le sénateur Bernard Delcros au cours de ce débat budgétaire, visant à abonder de 12,5 millions d’euros les crédits alloués à cette politique de service public.

Nous pérennisons les moyens dédiés au déploiement des conseillers numériques France Services, un sujet sur lequel nous reviendrons à l’occasion de l’examen d’un amendement.

Je précise aussi que le Gouvernement présentera un amendement n° II-412 visant à abonder de 2 millions d’euros le programme 349, « Transformation publique », afin de permettre aux services déconcentrés de l’État, nos préfectures, de porter les politiques prioritaires du Gouvernement et de communiquer à leur sujet. C’est essentiel pour assurer le suivi de nos politiques publiques et renforcer la confiance de nos concitoyens dans l’action publique.

Je voudrais enfin vous dire un mot du financement de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale, que vous avez mentionné, madame le rapporteur pour avis.

Je tiens à souligner l’engagement maintenu de l’État pour 2023, à hauteur de 15 millions d’euros via France compétences, qui nous permettra de soutenir l’apprentissage dans la fonction publique. Lors de l’exercice précédent, nous avions dépassé notre objectif de 8 000 apprentis : ils sont désormais 12 000.

Nous pourrons ainsi engager une discussion sereine avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et l’ensemble des acteurs de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale, afin de convenir des bonnes conditions de financement de cette politique prioritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)