M. le président. La parole est à M. Alain Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous utilisons dans bien des circonstances le mot « indispensable », parfois de façon un peu imagée, mais il est à prendre au sens propre lorsqu’il qualifie les secrétaires de mairie. On ne peut pas se dispenser de ces agents polyvalents, qui assurent le support administratif et juridique de toutes nos collectivités.

Il est donc très heureux que la proposition de loi de nos collègues du groupe CRCE nous donne l’occasion d’avoir un débat sur ce métier. Mais il faudra mener celui-ci jusqu’à sa vraie conclusion, dont nous savons bien qu’elle impliquera le Gouvernement.

D’abord, nous devons procéder à une redéfinition de cet emploi, mieux caractériser et actualiser l’ensemble des aptitudes qu’il requiert et des fonctions qu’il recouvre. Ainsi, le profil de recrutement tiendra compte des transformations récentes que ce métier a subies.

Cela dit, l’édifice statutaire commence à montrer ses limites. Il apporte, d’abord, une garantie de droits professionnels. Il est assorti d’un schéma, conçu à la Libération et fondé sur une nomenclature de l’intégralité des emplois et des grades, assortie d’une échelle indiciaire complètement uniforme.

Cela ne date pas d’hier : au cours de ma carrière administrative, j’ai maintes fois observé que, à mesure que sont apparues des spécialités ou des spécificités professionnelles qui échappaient à cette grille initiale, la seule solution était la contractualisation.

Nous devons faire le maximum pour rétablir l’attractivité de ces fonctions et leur donner une visibilité durable. Pour commencer, nous devons nous assurer que toutes les personnes qui les exercent de manière permanente et professionnelle sortent de la catégorie C. Cela n’a plus aucun sens de les y maintenir, car le niveau de qualification requis est bien supérieur à ce que représente la catégorie C. Il faut donc définir de façon urgente un schéma de reclassement, pour l’ensemble de ces personnels, fondé sur la reconnaissance des acquis de l’expérience.

Il faut ensuite que nous fassions du « hors norme » en ce qui concerne la rémunération, car les marges du Rifseep ne sont pas suffisantes et ne permettront pas, compte tenu des différents systèmes de chaînage des indices qui l’encadrent, d’arriver à un niveau suffisant d’attractivité et de reconnaissance. Nous serons sans doute amenés – et c’est l’un des apports de cette proposition de loi – à autoriser le recrutement sur contrat, avec une marge d’appréciation sur la rémunération, l’ensemble des secrétaires de mairie dans des communes de moins de 2 000 habitants.

Il y a une composante qui est peut-être plus perceptible en périphérie des grandes villes, où la tension immobilière est importante : le droit actuel, monsieur le ministre, ne permet pas à une commune de loger sa secrétaire de mairie – je remercie d’ailleurs la rapporteure de m’avoir aidé à clarifier ce point. Une mairie qui loge sa secrétaire de mairie ou qui lui loue un logement à un loyer très inférieur au prix du marché se place dans l’illégalité. Il faut certainement donner de la liberté sur ce point, qui est un élément de l’attractivité et contribue à la possibilité réelle d’exercer cet emploi dans le cours d’une carrière.

Tout cela aura des conséquences sur les finances communales. Je crois donc, monsieur le ministre, que nous pouvons vous donner rendez-vous à la prochaine loi de finances. Le paquet de mesures destinées à rétablir l’attractivité et la visibilité de ces fonctions doit être bouclé avant l’été. Comme il aura des implications financières, que j’évalue à 2 000 ou 3 000 euros annuels pour quelque 30 000 communes, il serait légitime que celles-ci fassent l’objet d’une catégorie au sein du calcul de la DGF. Nous devons donc vous donner rendez-vous avant même la loi de finances ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Guy Benarroche applaudit également.)

M. le président. Le ministre aura pris note !

La parole est à M. Hussein Bourgi.

M. Hussein Bourgi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je salue l’initiative de notre collègue Céline Brulin et de ses camarades du groupe CRCE, qui nous permet de répondre à quelques-unes des attentes des secrétaires de mairie qui officient dans nos communes.

Je remercie également Catherine Di Folco, rapporteure de la commission des lois, pour l’exhaustivité et la richesse des auditions qu’elle a menées.

Cette proposition de loi est particulièrement bienvenue, car elle nous donne l’occasion de nous pencher sur le sort des secrétaires de mairie. Leur métier est méconnu ou peu connu du grand public, mais ô combien précieux dans les communes. Que serait une équipe municipale, en effet, sans secrétaire de mairie ? À la fois juristes, fiscalistes, trésoriers et trésorières, urbanistes, rédacteurs et rédactrices, mais aussi parfois assistantes sociales, psychologues, conseillers et conseillères d’orientation, les secrétaires de mairie sont souvent l’incarnation du service public municipal – un service public à visage humain, accessible à toutes et à tous. Dans les villages, le secrétaire de mairie est souvent appelé par son prénom. C’est dire le lien, fort, qui l’unit à la population.

Les secrétaires de mairie sont, au quotidien, les partenaires du maire et de son équipe municipale. Ils aident à la conception et à la mise en œuvre des décisions des élus. Ils contribuent à l’efficience des politiques publiques locales. Disons-le, sans flagornerie et sans ambages : sans les secrétaires de mairie, les communes, notamment en milieu rural, n’existeraient tout simplement plus.

Pourtant, malgré son intérêt et sa polyvalence, ce métier connaît une perte d’attractivité évidente, si bien que les collectivités, notamment celles de moins de 2 000 habitants, peinent à recruter – et que dire de celles de moins de 1 000 habitants ?

Les perspectives sont inquiétantes : d’ici à 2030, un tiers des secrétaires de mairie partiront à la retraite, sans qu’un renouvellement générationnel soit assuré. Si l’on ajoute leur crise de vocation à celle qu’on observe chez les élus locaux, en particulier chez les maires, nous allons droit à la catastrophe, monsieur le ministre !

Venons-en aux trois articles de cette proposition de loi qui restent en discussion.

L’article 4 prévoit une formation obligatoire dispensée par le CNFPT pour l’ensemble des secrétaires de mairie, dans un délai d’un an à compter de leur prise de poste. Puisqu’il confère un caractère indispensable à cette formation, cet article est bienvenu, au regard de la multiplicité des tâches que devront accomplir les secrétaires de mairie et de la complexification permanente de la législation et de la réglementation.

Pour autant, le dispositif adopté en commission n’évoque pas le régime d’absence qui encadrerait son application. Ce silence pourrait mettre à mal l’efficience de cette mesure.

L’article 5 vise à garantir des perspectives d’évolution de carrière pour cette profession en prévoyant une part de secrétaires de mairie dans l’établissement des listes d’aptitude. C’est un levier bienvenu à cette fin.

Nous sommes plus réservés sur la philosophie de l’article 5 bis. Si nous comprenons et connaissons les difficultés de recrutement dans les communes de moins de 2 000 habitants, nous ne sommes pas pour autant convaincus qu’il soit utile d’y permettre le recrutement de contractuels. Le relèvement du plafond de 1 000 à 2 000 habitants reviendrait en fait à répartir la pénurie et conduirait à une forme de concurrence entre les communes de 1 000 à 2 000 habitants et celles de moins de 1 000 habitants, qui disposent souvent de moins de moyens.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain reste persuadé que d’autres voies peuvent être envisagées pour redonner à la profession son attractivité.

Le premier levier est celui de la rémunération. Un effort a été fait, monsieur le ministre, avec le décret du 28 février 2022 sur la NBI pour les postes de secrétaire de mairie au sein des communes de moins de 2 000 habitants. Mais cette mesure se heurte à deux écueils : elle reste insuffisante, tout d’abord, pour atteindre un niveau de rémunération décent, au regard des responsabilités exercées ; de plus, la charge de cette revalorisation est portée par les collectivités locales, qui n’ont souvent pas les moyens de financer une telle disposition – même lorsque plusieurs communes salarient un même secrétaire de mairie, comme je le vois parfois dans l’Hérault, chacun se renvoyant alors la balle.

L’article 6 de cette proposition de loi apportait un début de réponse, par la création d’un fonds de soutien local. La forme retenue n’était sans doute pas la bonne, mais la question soulevée aurait mérité un débat en séance. Comme l’a dit Alain Richard, nous aurons l’occasion d’y revenir, monsieur le ministre ! Sur un sujet aussi sérieux, nous ne pouvons pas nous contenter d’un jeu de ping-pong permanent entre vous-même, Christophe Béchu, Gabriel Attal et Dominique Faure. Le Gouvernement doit s’accorder sur une réponse substantielle et sérieuse à apporter à ce problème, qui préoccupe fortement bien des élus municipaux.

Pour l’heure, nous voterons cette proposition de loi, en prenant date pour l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est grand temps que nous prenions en compte l’importance du rôle stratégique que jouent les secrétaires de mairie dans notre pays. Il m’est donc impossible de commencer sans saluer l’initiative de nos collègues du groupe CRCE, qui contribue à mettre sur le devant de la scène la situation de nos secrétaires de mairie.

Ces 14 000 agents publics, souvent des femmes, sont les gardiens des bases administratives de nos villages et de nos communes. Ils sont les premiers acteurs de notre société à être en contact direct avec les citoyens : ils reçoivent et traitent leurs demandes, leurs réclamations, leurs doléances.

Ces secrétaires sont les collaboratrices directes du maire et de la municipalité. Elles œuvrent au bon fonctionnement du service public local chaque jour, sans compter ni leur temps ni leurs heures, et jouent le rôle, si essentiel, de trait d’union entre les administrés, les élus et les autres administrations.

Malheureusement, ce métier n’est pas suffisamment reconnu. Les secrétaires de mairie sont souvent considérées comme des employées administratives de bas niveau – excusez-moi ce terme – alors qu’en réalité elles ont des responsabilités importantes et larges.

En effet, elles organisent les services de la commune, élaborent concrètement le budget, gèrent ses ressources humaines, l’état civil, l’urbanisme, les délibérations, les arrêtés, etc. De plus, les secrétaires municipales doivent constamment s’adapter à la complexité et aux mutations des procédures administratives.

Faute de candidatures, le recrutement de secrétaires de mairie s’avère de plus en plus difficile. Les causes sont connues : exigence technique et juridique des missions, rémunération trop faible, obligation de cumuler plusieurs postes pour parvenir à un temps plein. Cette pénurie risque de s’aggraver, car un tiers des secrétaires de mairie en poste partiront à la retraite d’ici à 2030.

Il est donc temps de prendre des mesures concrètes pour revaloriser le statut des secrétaires de mairie en France. Nous devons reconnaître leur importance et leur rôle crucial dans l’administration locale, en leur offrant une formation adéquate et en leur octroyant des primes et des augmentations de salaire à la hauteur de leurs compétences.

De plus, nous devons également revoir leur classification et les faire bénéficier d’une progression de carrière qui prenne en compte l’ancienneté et les compétences acquises.

Enfin, il est urgent de mettre en place des dispositifs de sécurité appropriés pour garantir leur sécurité au travail et leur permettre de faire face aux incivilités ou aux agressions physiques dont elles peuvent être, de plus en plus fréquemment, victimes.

Pour conclure, il nous faut rendre plus attractif ce métier très diversifié, qui demande de nombreuses qualités sur les plans professionnel et humain. Les secrétaires de mairie sont un maillon incontournable de la vie communale. Elles sont l’avenir de nos communes. Il devient plus qu’urgent de leur donner la reconnaissance qu’elles méritent.

Mme Françoise Gatel. C’est vrai !

M. Jean-François Longeot. Ce serait là un investissement essentiel pour le bon fonctionnement de nos collectivités. Notre groupe votera ce texte sans aucune hésitation. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin.

Mme Béatrice Gosselin. Monsieur le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme cela a déjà été dit, le métier de secrétaire de mairie est celui qui est le plus en tension dans la fonction publique territoriale. Alors que cette profession est indispensable au bon fonctionnement de l’administration de nos communes rurales, le métier souffre d’un manque de reconnaissance comme d’une profonde méconnaissance de la réalité des fonctions exercées.

Le secrétaire de mairie assure des tâches essentielles en matière de budget, d’état civil, d’élections et de recensement, de gestion funéraire, ou encore d’urbanisme et de marchés publics. Et, parfois, il gère aussi les ressources humaines de la commune. Toutes ces tâches s’effectuent évidemment en même temps que l’accueil du public. Véritable couteau suisse de nos petites collectivités, le secrétaire de mairie est la première personne que l’administré rencontre lorsqu’il se heurte à une difficulté dans sa commune.

Sur les 368 communes de moins de 2 000 habitants de la Manche, 260 ont un seul agent et, pour plus des deux tiers, ce sont des adjoints administratifs de catégorie C.

De cette spécificité statutaire, sans équivalent pour d’autres métiers de la fonction publique, découle notamment l’absence de concours, propre au métier de secrétaire de mairie, et donc un certain manque de visibilité pour des candidats éventuels.

Sur le terrain, nous le constatons, les secrétaires de mairie sont en quasi-totalité des femmes, et relèvent majoritairement de la catégorie C. La plupart d’entre eux travaillent de manière isolée et sont secrétaires à temps partiel de deux ou trois mairies différentes au cours de la semaine. Dans la Manche, seuls 38 % sont des postes occupés à temps plein et, parmi les postes à temps partiel, 60 % représentent moins de dix-sept heures trente par semaine.

D’ailleurs, certains EPCI, conscients du déficit d’attractivité d’un emploi à temps partiel, favorisent des postes à temps complet en proposant une mutualisation des horaires sur plusieurs petites communes.

Enfin, l’appellation « secrétaire de mairie » apparaît aujourd’hui quelque peu désuète et ne correspond assurément plus à la nature des fonctions exercées par les agents concernés. Cependant ce titre reflète un sentiment d’accessibilité et de proximité et reste plébiscité par les habitants.

Quelles sont les pistes envisageables pour remédier à ces problématiques d’attractivité, d’autant plus sensibles dans un contexte de quasi-plein emploi comme celui de la Manche ?

Plutôt que de créer un fonds de soutien ad hoc, comme le prévoyait à l’origine la proposition de loi, la commission des lois a ouvert aux communes de moins de 2 000 habitants la possibilité de recruter des contractuels pour leurs emplois permanents de secrétaire de mairie. Cette disposition n’était possible auparavant que pour les communes de moins de 1 000 habitants.

Il est également plus pertinent de privilégier l’autonomie financière des communes, qui doit passer non pas par une compensation, mais par une fiscalité adaptée, ainsi que par l’indexation de la DGF sur l’inflation.

S’il n’existe pas de concours propre au métier de secrétaire de mairie, une formation académique spécifique, destinée aussi bien aux étudiants qu’à des actifs en reconversion professionnelle, est en cours de développement. Certaines universités organisent en effet, en partenariat avec les centres de gestion, des formations en alternance, qui conduisent à l’octroi d’un diplôme universitaire. C’est le cas de la licence professionnelle « métiers de l’administration des collectivités territoriales » du pôle universitaire d’Alençon.

Un partenariat entre Pôle emploi et le CNFPT, qui associerait également l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et l’association Régions de France, pourrait permettre la mise en œuvre de formations au métier de secrétaire de mairie à destination des demandeurs d’emploi.

Toutes ces initiatives ou ces pistes envisageables ne sauraient nous dispenser d’une réflexion de fond sur les moyens d’améliorer l’attractivité de la fonction publique territoriale.

Les employeurs publics, notamment territoriaux, doivent avoir une véritable politique de communication, pour mettre en avant l’extrême variété des métiers proposés et des carrières à mener.

Surtout, les récentes mesures ponctuelles de revalorisation restent limitées dans les faits. Seule une véritable réforme globale des règles de rémunération pourrait rendre cette profession plus attractive.

S’agissant de la promotion interne, vous avez récemment indiqué, monsieur le ministre, que le projet de refonte des modalités d’accès, de parcours et de rémunération intégrera une réflexion sur les règles de promotion dans la fonction publique territoriale, à laquelle les employeurs territoriaux seront associés, et je m’en félicite. Ainsi, il pourrait être proposé que les centres de gestion fixent les quotas selon les besoins locaux en termes d’emplois.

Enfin, l’État pourrait envisager des modalités d’accompagnement financier des centres de gestion qui s’engagent dans des initiatives innovantes, par exemple en développant la mission de tutorat.

Je salue l’excellent travail de nos collègues du groupe CRCE et du rapporteur Catherine Di Folco, qui pose les bases de ce métier. Sa refonte permettra une revalorisation essentielle qui, je l’espère, sera à la hauteur des espérances de la profession.

Le groupe Les Républicains votera le texte modifié par le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon.

M. Rémi Cardon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour commencer, je veux rendre hommage à notre collègue Céline Brulin et à ses collègues et camarades du groupe CRCE. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. C’est un réflexe !

M. Rémi Cardon. Ils utilisent leur niche parlementaire pour mettre en lumière une profession ayant une réelle importance dans nos territoires.

La réalité du poste de secrétaire de mairie est bien plus vaste que nous ne saurions l’imaginer. Sans elles…

M. Rémi Cardon. … – la profession est à 94 % féminine –, nous n’aurions plus ce lien précieux qui unit au quotidien citoyen et République.

Hier, elles étaient les couteaux suisses de la République. Elles le sont toujours aujourd’hui, mais elles sont aussi devenues les perles rares de la République.

À la fois juristes, trésorières, urbanistes, ou encore rédactrices, mais aussi parfois assistantes sociales ou conseillères sur le numérique, là où les services publics ou France Services font défaut, les secrétaires de mairie sont à la fois le premier et le dernier visage du service public municipal, accessibles à tous nos concitoyens.

Au quotidien, elles mènent un travail dantesque et permettent à nos villes et à nos villages de vivre en tant qu’entités politiques et administratives fonctionnelles. Elles apportent un appui technique et humain précieux, qui participe à la vie de nos communes et donne pleinement du sens à la promesse républicaine.

Pourtant, ce maillon essentiel du lien entre la République et le citoyen n’est pas valorisé comme il le faudrait. Faible rémunération, statut précaire, multiplications des temps partiels et des difficultés attachées : ce métier connaît une perte d’attractivité évidente, si bien que les collectivités, notamment celles de moins de 2 000 habitants, peinent à recruter.

Il manquerait aujourd’hui près de 1 900 secrétaires de mairie sur l’ensemble de notre territoire. Et, d’ici à 2030, plus du tiers des secrétaires de mairie partiront à la retraite, sans qu’un renouvellement générationnel soit assuré au sein de la profession.

Cette proposition de loi entend poser le premier jalon d’une revalorisation du statut de secrétaire de mairie, et nous l’accueillons positivement. Si ce sujet relève quasi exclusivement du domaine réglementaire, cette proposition de loi ouvre un débat utile sur l’attractivité de ce métier décisif pour nos collectivités et essentiel pour notre République.

Nous prenons acte des amendements adoptés en commission des lois. Mme la rapporteure a cherché à rendre ce texte plus opérationnel. Mon collègue Hussein Bourgi s’est exprimé avant moi : le groupe SER estime que d’autres pistes existent pour valoriser cette profession, à commencer par la rémunération. Le décret du 28 février 2022 – pris juste avant l’élection présidentielle – est très insuffisant. L’augmentation de 70 euros brut par mois qu’il prévoit ne permet pas de porter la rémunération à la hauteur des responsabilités exercées. De plus, son coût est supporté par les collectivités territoriales. Il faudra donc en reparler lors de l’examen du projet de loi de finances, comme l’a dit Alain Richard.

À ce propos, le Gouvernement peut et doit…

M. le président. Vous êtes arrivé au terme de votre temps de parole.

La parole est à Mme Véronique Del Fabro. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Le meilleur pour la fin ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Véronique Del Fabro. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le constat est alarmant : d’ici à 2026, année où commencera le prochain mandat municipal, plus de 150 secrétaires de mairie en poste dans des communes de Meurthe-et-Moselle partiront à la retraite ; et 80 % des communes de ce département comptent moins de 2 000 habitants.

Ce n’est pas une exception : à l’échelon national, ce sont 42 % des secrétaires de mairie qui partiront dans les dix prochaines années.

Le métier de secrétaire de mairie, peu valorisé et complexe, souffre d’une crise d’attractivité, et les mairies font face à une pénurie sans disposer de moyens pour y remédier.

Le secrétaire – ou plutôt la secrétaire – est un collaborateur essentiel et direct du maire, et un véritable relais pour les habitants. Elles sont le savoir, et bien souvent la mémoire, des communes. Les élus passent, les secrétaires restent…

L’accroissement des compétences communales et intercommunales fait considérablement évoluer ce métier. Les tâches effectuées à ce poste sont diverses et variées : aide à l’élaboration du budget, suivi de celui-ci, gestion des ressources humaines, rédaction de courriers, état civil, listes électorales, cimetière, etc. Certaines secrétaires de mairie, même, montent les dossiers de subvention, y compris pour le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), particulièrement complexes.

Bien qu’indispensables, ces professionnelles ne sont pas suffisamment connues ni reconnues à leur juste valeur.

Les raisons de la pénurie sont nombreuses : manque d’attractivité du métier, faible rémunération, temps partiel, etc. Nombre d’entre elles travaillent pour de petites communes ou des syndicats, et doivent utiliser des outils différents, avec des préfectures, des intercommunalités, des trésoreries différentes, ce qui nécessite de leur part une grande adaptabilité.

Le mal-être est palpable. Les réseaux sociaux valent ce qu’ils valent, mais le groupe Facebook que certaines animent révèle un malaise certain.

Changer l’intitulé du poste n’est pas la solution, monsieur le ministre. Mais c’est une solution pour refléter davantage la réalité et les responsabilités de ce métier.

Un autre aspect, très important, est la formation initiale. En Meurthe-et-Moselle – comme dans la Manche –, le centre de gestion a décidé de créer en 2018, en partenariat avec l’Université de Lorraine, un diplôme universitaire « secrétaire de mairie – gestionnaire administratif ». Cette formation qualifiante et diplômante permet d’apporter les connaissances théoriques et pratiques, puisque le stage de huit mois est souvent effectué dans une commune où la secrétaire de mairie s’apprête à partir à la retraite. À l’issue de cette formation, le taux d’insertion professionnelle est de 90 %.

Il est nécessaire de généraliser ce diplôme universitaire au niveau national pour tenter de répondre à la pénurie de la profession.

Les moyens des communes rurales étant limités, certaines communes n’hésitent pas à mutualiser le recrutement afin d’offrir à ces femmes des postes à temps complet, des avantages sociaux, et même une formation. Cette formation est un enjeu pour la bonne continuité du service public, notamment dans les petites mairies.

Nous devons offrir à ces personnels des conditions de travail décentes, des rémunérations justes et des formations régulières, pour leur permettre de s’adapter aux évolutions du métier. Cela permettra de garantir un service public de qualité et d’assurer la continuité de nos communes.

C’est pourquoi le groupe Les Républicains est favorable à cette proposition de loi telle qu’elle a été adoptée par la commission, et remercie le groupe CRCE d’en avoir pris l’initiative. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Cécile Cukierman et M. Jean-Pierre Corbisez applaudissent également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie
Article 4

Articles 1er à 3

(Supprimés)

Articles 1er à 3
Dossier législatif : proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie
Article 5

Article 4

Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :

1° La sous-section 2 de la section 3 du chapitre II du titre II du livre IV est complétée par un article L. 422-34-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 422-34-1. – Outre la formation initiale dont ils bénéficient en application des statuts particuliers dont ils relèvent, les agents qui occupent un emploi de secrétaire de mairie reçoivent, dans un délai d’un an à compter de leur prise de poste, une formation adaptée aux besoins des collectivités concernées. » ;

2° Après le troisième alinéa de l’article L. 451-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il définit et assure la formation des agents publics occupant un emploi de secrétaire de mairie dans les conditions prévues à l’article L. 422-34-1. »

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, sur l’article.

Mme Françoise Gatel. Je salue l’initiative de Céline Brulin et de ses collègues du groupe CRCE. Cette proposition de loi est bienvenue parce qu’elle place sous les projecteurs la fonction de secrétaire de mairie, qui constitue un maillon essentiel de l’action publique de proximité, et qui se trouve actuellement en difficulté, ce qui participe certainement à la fatigue des maires.

Ce texte nourrira sans aucun doute le travail sur l’attractivité de la fonction publique territoriale qui vient d’être lancé, ce matin, par la délégation aux collectivités territoriales, et qui sera conduit par Catherine Di Folco, Jérôme Durain et Cédric Vial. Attirer et fidéliser, voilà deux défis nouveaux pour nos collectivités.

Les candidats ont deux préoccupations, que Jérôme Durain a très clairement exposées : le sens du travail, mais aussi les « sous », c’est-à-dire la rémunération.

Face à ces difficultés, il convient de « chasser en meute » et d’éviter de se concurrencer entre les différentes collectivités. C’est pourquoi je salue les initiatives qui ont été prises dans certains territoires.

Monsieur le président de la commission des lois, à tout seigneur tout honneur, je citerai d’abord la marque de territoire Only Lyon.