M. David Margueritte, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination pour les outre-mer.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 13, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 12

I. - Alinéa 15, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

L. 743-25 à L. 744-3

L. 744-4

La loi n° XXX du XXX tendant à confier à l’Office français de l’immigration et de l’intégration certaines tâches d’accueil et d’information des personnes retenues

L. 744-5

 

L. 744-6

La loi n° XXX du XXX tendant à confier à l’Office français de l’immigration et de l’intégration certaines tâches d’accueil et d’information des personnes retenues

L. 744-7 et L. 744-8

 

L. 744-9

La loi n° XXX du XXX tendant à confier à l’Office français de l’immigration et de l’intégration certaines tâches d’accueil et d’information des personnes retenues

L. 744-10 à L. 744-16

 

II. - Après l’alinéa 15

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

5° bis Après le 10° de l’article L. 764-2, il est inséré un 10° bis ainsi rédigé :

« 10° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 744-9, les mots : “, assurée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration” sont supprimés ; »

5° ter Après le 12° de l’article L. 765-2, il est inséré un 12° bis ainsi rédigé :

« 10° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 744-9, les mots : “, assurée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration” sont supprimés ; »

III. - Alinéa 16

Rédiger ainsi cet alinéa :

6° Après le 12° de l’article L. 766-2, sont insérés un 12° bis et un 12° ter ainsi rédigé :

IV. - Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

« 12° ter Au deuxième alinéa de l’article L. 744-9, les mots : “, assurée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration” sont supprimés ; »

La parole est à M. le ministre d’État.

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Il n’existe ni centres de rétention administrative ni Ofii dans le Pacifique. Il convenait de le préciser.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 13.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.

Après l’article 1er
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'information et l'assistance juridiques en rétention administrative et en zone d'attente
Article 2 (nouveau) (interruption de la discussion)

Article 2 (nouveau)

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 2026 et, à Mayotte, le 1er avril 2027.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 6 est présenté par Mmes Narassiguin et de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 8 est présenté par Mme Margaté, M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 10 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 6.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l’amendement n° 8.

Mme Marianne Margaté. Il est également défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 10.

M. Guy Benarroche. La prorogation de la date d’entrée en vigueur de la proposition de loi montre bien que ni les avocats, ni l’Ofii, ni les budgets ne sont prêts. Rien n’est prêt, mais il faut voter ce texte, qui constitue un important vecteur de communication médiatique pour la campagne que mènent certains ici…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. David Margueritte, rapporteur. Cet article a pour objet de prolonger de quelques mois les marchés publics, le temps que l’Ofii procède aux recrutements.

La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6, 8 et 10.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Irrecevabilité

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Conformément à l’article 45, alinéa 4, de notre règlement, je tiens à soulever à l’encontre de la présente proposition de loi une irrecevabilité fondée sur l’article 40 de la Constitution. Je cite ce dernier : « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique. »

En l’occurrence, cette proposition de loi représente une aggravation de la charge financière des administrations publiques, à savoir l’État et ses opérateurs, sur deux sujets : les nouvelles missions confiées à l’Ofii et, conséquemment, le recours à l’aide juridictionnelle.

En premier lieu, M. le rapporteur a, par son amendement adopté en commission, souhaité « reporter l’entrée en vigueur » du texte afin de laisser « à l’Ofii le temps nécessaire pour procéder aux recrutements ». L’aggravation de la charge publique s’entend bien dans ce propos !

En second lieu, M. le rapporteur a apporté par un amendement des clarifications relatives aux droits des retenus : les avocats se chargeront de l’assistance juridique et seront payés au titre de l’aide juridictionnelle. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, cette mission d’assistance est encadrée par un cahier des charges défini par l’État. Son coût s’élève actuellement à 7,4 millions d’euros seulement, malgré une présence six jours sur sept des associations dans les CRA. C’est un exemple d’efficacité.

Garantir un niveau de soutien similaire de la part d’avocats devant se déplacer sera évidemment bien plus coûteux pour l’État. Le rapport est clair à ce sujet : « La commission a […] approuvé l’intervention accrue de l’avocat dans le dispositif d’assistance juridique […]. Elle a néanmoins souligné que le renforcement de la présence des avocats dans les CRA nécessitera une revalorisation de l’aide juridictionnelle. » C’est limpide.

Par conséquent, les mesures de la proposition de loi ne peuvent être assurées par l’État à moyens constants ; il s’agit donc bien d’une aggravation de ses charges. Pour être reconnue comme telle, celle-ci doit être directe et certaine, selon la jurisprudence entourant l’usage de l’article 40 de la Constitution : deux critères auxquels répond parfaitement le présent texte.

En définitive, le problème est simple. Si le Sénat prétend que cette proposition de loi a pour objet de garantir sincèrement aux retenus le maintien des droits dont ils bénéficient dans le dispositif actuel, alors elle entraînera un coût supplémentaire pour l’État. Si elle est recevable financièrement, alors assumons qu’elle conduira à une diminution draconienne des droits.

Soit le Gouvernement dépose un projet de loi reprenant ces dispositions avant de revenir les défendre dans l’hémicycle, soit cette initiative n’est pas recevable financièrement.

Mme la présidente. Mes chers collègues, conformément à l’article 45, alinéa 4, de notre règlement, M. Dossus soulève à l’encontre de la présente proposition de loi une exception d’irrecevabilité fondée sur l’article 40 de la Constitution. En application de l’article 45 du règlement du Sénat, l’irrecevabilité est admise de droit et sans débat si elle est affirmée par la commission des finances.

La parole est à M. le ministre d’État.

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. J’ai abordé la question financière à plusieurs reprises. Le Gouvernement soutient cette proposition de loi notamment parce qu’il s’agit d’une mesure d’économie.

J’ai d’ailleurs indiqué que la somme consacrée par le Gouvernement aux associations pour accomplir leur mission dans les CRA s’élève à 9,244 millions d’euros et que j’attends de ce texte une économie de 6,5 millions d’euros. Une partie sera consacrée au renforcement des moyens de l’Ofii. Croyez-moi : cette proposition de loi aboutira non pas à une aggravation d’une charge publique, mais, au contraire, à des économies. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. En application de l’article 40 de la Constitution, je saisis la commission des finances. (M. Roger Karoutchi proteste.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-neuf heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Mes chers collègues, conformément à l’article 45, alinéa 4, de notre règlement, la commission des finances a été saisie de sorte qu’elle se réunisse au plus vite. Dans l’attente, je réserverai le vote, puis nous commencerons l’examen de la proposition de loi figurant au point suivant de l’ordre du jour. Dès que la commission des finances aura statué, nous passerons au vote de la présente proposition de loi.

La parole est à M. le ministre d’État.

M. Bruno Retailleau, ministre dÉtat. Pour être tout à fait clair, madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement reprend la proposition de loi à son compte, y compris si elle crée des charges. Comme je vous l’ai expliqué, ce ne sera pas le cas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Cette précision est importante pour la commission des finances.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 2 (nouveau) (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'information et l'assistance juridiques en rétention administrative et en zone d'attente
Discussion générale (début)

3

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires
Discussion générale (interruption de la discussion)

Amélioration de l’accès aux soins dans les territoires

Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins dans les territoires, présentée par M. Philippe Mouiller (proposition n° 494, texte de la commission n° 577, rapport n° 576, avis n° 574).

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Philippe Mouiller, auteur de la proposition de loi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon propos par un bref rappel de la genèse de cette proposition de loi.

Ce texte est né au sein de la Haute Assemblée, à la suite d’une initiative du groupe Les Républicains. Ce travail a mobilisé, depuis plus d’un an, une trentaine de sénateurs, principalement membres de la commission des affaires sociales et de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, tous mobilisés sur un enjeu qu’ils connaissent bien : la désertification médicale et la difficulté d’accéder aux soins dans nos communes et nos territoires.

Tout naturellement, ce groupe de travail a été coprésidé par Corinne Imbert, aujourd’hui rapporteure de la proposition de loi, et par Bruno Rojouan, rapporteur pour avis. Je tiens à les remercier pour leur mobilisation et pour la qualité de leur travail.

Pour élaborer cette proposition de loi, nous avons consulté les acteurs de nos territoires, interrogé les autorités chargées de l’élaboration de la politique de santé et pris en compte la parole des patients et celle de la communauté des soignants. Je ne suis donc que le porte-voix de cette initiative qui mobilise très fortement les parlementaires ainsi que le Gouvernement.

Chacun d’entre nous connaît un problème d’accès aux soins dans son territoire. Ceux des sénateurs qui se sont impliqués dans le groupe de travail ont pu témoigner des difficultés et des opportunités.

Tous les rapports, qu’ils soient issus des travaux de la Cour des comptes, de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), de l’ordre national des médecins, de l’Académie de médecine ou, bien sûr, du Parlement, sont unanimes : l’accès aux soins est insatisfaisant dans de nombreux territoires en France. Pis, la situation se dégrade malgré les mesures prises.

Le pays en subit les effets : sur 87 % du territoire, l’offre de soins est insuffisante, à commencer dans les zones rurales et périurbaines. Un constat s’impose : alors que la population et les besoins de santé augmentent, le nombre de médecins généralistes libéraux a chuté de plus de 10 % entre 2012 et 2022. En parallèle, les délais moyens pour obtenir une consultation s’allongent, le nombre de patients sans médecin traitant s’accroît – près de 10 % des Français sont concernés – et les disparités d’accès aux médecins généralistes se creusent.

Faute de pouvoir accéder à un médecin, qu’il soit généraliste ou spécialiste, de nombreux Français renoncent aux soins, ce qui induit une perte de chance qui n’est pas acceptable.

L’Assemblée nationale s’est saisie de la question et le Premier ministre, en parallèle, a annoncé le 25 avril dernier un pacte de lutte contre les déserts médicaux. Plusieurs des mesures envisagées par le Gouvernement font écho aux dispositions du présent texte : nous retrouvons dans les déclarations du Premier ministre un certain nombre de sujets que le Sénat traite depuis longtemps. Nous avons ainsi pu constater l’adhésion du Gouvernement à nos travaux.

La présente proposition de loi s’efforce de construire une réponse collective et équilibrée, susceptible d’être soutenue par tous les acteurs. Elle est cosignée par 152 sénateurs, ce qui témoigne de sa capacité à rassembler.

Alors qu’il pourrait être fait reproche de la dispersion des travaux législatifs, le débat qui s’ouvre est l’occasion d’approfondir les convergences de vues pour articuler les initiatives. Nous aurions tous préféré un projet de loi global sur l’accès aux soins, mais le contexte politique ne le permet pas. Pourtant, nous sommes dos au mur : un plan d’action ambitieux s’impose pour garantir, ensemble, l’accès aux soins dans nos territoires.

Au travers de ce texte, il s’agit tout d’abord de réaffirmer le caractère libéral de la médecine française et la liberté de choix des patients. Cette proposition de loi se fonde également sur une autre conviction : il faut œuvrer à l’amélioration de l’accès aux soins, ce qui exige de mener une réflexion globale en commençant par nous interroger sur le modèle de pilotage de l’organisation de l’offre.

Pour cette raison, ce texte vise à redonner la parole aux territoires en matière de pilotage de la politique de santé, de définition des besoins et d’analyse de l’évolution de la démographie des professions concernées.

Nous souhaitons sortir d’une politique centralisée de définition des besoins, dans laquelle les agences régionales de santé (ARS) déclinent à l’échelon local des priorités fixées à l’échelle nationale, trop souvent sans prendre en considération les remontées de terrain, si bien que le département, acteur majeur en matière de santé publique et dans le domaine médico-social, reste trop souvent un maillon secondaire de la régulation et de l’organisation de l’offre de santé sur son territoire.

Nous estimons que le département constitue l’échelon pertinent en matière de définition des besoins : il concilie proximité territoriale et taille critique, ce qui permet d’établir un projet cohérent associant tous les acteurs. Pour cette raison, nous souhaitons confier à cette collectivité un véritable rôle de coordination des politiques en matière d’accès aux soins, rôle qu’elle jouera aux côtés des ARS, des caisses primaires d’assurance maladie et des ordres professionnels.

Nous avons également souhaité renforcer les capacités d’évaluation de la démographie des professions de santé, afin de mieux répondre aux besoins de la population. Les dispositifs actuels ne permettent pas d’apporter une solution aux besoins des territoires faute de prise en compte adéquate des inégalités de densité médicale existantes, mais aussi faute de moyens, ce qui trahit l’insuffisance de l’engagement des pouvoirs publics sur le sujet.

Les offices départementaux d’évaluation de la démographie des professions de santé et l’Observatoire national de la démographie des professions de santé seront consacrés dans la loi. Ils assureront l’évaluation et la prise en compte des besoins depuis les territoires.

Notre proposition de loi vise également à renforcer l’offre de soins dans les territoires les plus fragiles. Elle comporte plusieurs mesures à cet effet, mais je sais que l’une d’entre elles concentrera une bonne partie de nos débats.

Par l’article 3, nous entendons encadrer l’installation des médecins dans les zones les mieux dotées en la conditionnant principalement à un engagement d’exercice à temps partiel en zone sous-dense. Les médecins spécialistes, pour lesquels l’organisation de consultations avancées hors de leur lieu d’exercice habituel peut se révéler plus difficile, pourront également être autorisés à s’installer en cas de départ concomitant d’un confrère ou lorsque l’ARS juge l’installation nécessaire pour maintenir l’accès aux soins sur le territoire.

La commission des affaires sociales, que je préside, est traditionnellement attachée aux libertés qui structurent la médecine libérale et conditionnent son attractivité. Elle observe toutefois que les inégalités d’accès imposent une évolution.

La mesure que nous présentons préserve la liberté d’installation des médecins, en permettant à ces derniers d’exercer où ils le souhaitent. En revanche, les médecins qui choisiront, en connaissance de cause, de s’installer dans les territoires les mieux dotés devront contribuer activement à la maîtrise des inégalités d’accès par des consultations avancées dans les territoires fragiles. Puisqu’elle responsabilise les professionnels dans leur choix d’installation, cette mesure nous paraît équilibrée tout en étant la plus efficace.

De plus, nous voulons simplifier le dispositif d’autorisation d’exercice visant les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) ayant réussi les épreuves de vérification des connaissances.

Par ailleurs, nous cherchons à libérer du temps médical pour que les médecins consacrent plus de temps à leurs patients. Pour ce faire, nous souhaitons supprimer un certain nombre de certificats et de contraintes administratives qui représentent pour les professionnels de santé une importante sollicitation.

Nous tenons également à favoriser le partage de compétences entre professionnels de santé, en coordination avec les médecins.

J’ai la certitude que tous les sénateurs se rejoignent sur ces mesures. Il faut maintenant agir ; il y va de l’égalité entre nos concitoyens et de la solidité de notre contrat social.

Le texte que nous examinons ne permettra ni de surmonter toutes les difficultés ni d’aborder toutes les questions. La formation des professionnels de santé, notamment, n’y est pas traitée, alors qu’elle constitue un vecteur essentiel de l’attractivité des professions et de leur répartition équilibrée sur le territoire. Notre pays doit avant tout mieux former et former plus de médecins à l’avenir pour répondre aux besoins de la population.

Dans les prochaines semaines, la commission des affaires sociales sera également amenée à examiner un texte concernant la formation. Il faut réfléchir à une dose de régionalisation pour permettre aux jeunes d’être formés au plus près de leur territoire afin de renforcer l’attractivité de la profession.

Malgré tout, il convient d’avancer. Cette proposition de loi constitue une étape importante pour relever le défi de l’accès aux soins. Nos débats permettront d’en consolider les fondements et d’en renforcer la portée. Elle sera très certainement enrichie par les nombreux amendements dont nous discuterons.

Nous avons également bien compris, monsieur le ministre, que vous souhaitiez compléter les dispositions de ce texte par un certain nombre de mesures défendues par le Gouvernement et par le Premier ministre.

Le Sénat a gardé son indépendance dans ses choix, mais nous devons relever ensemble un défi commun : faire en sorte d’améliorer l’accès aux soins pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’insisterai pas davantage sur le constat déjà dressé par Philippe Mouiller : l’accès aux soins n’a cessé de se détériorer ces dernières années pour nos concitoyens.

La France compte 4 millions d’habitants de plus depuis 2010, sa population vieillit et la démographie des médecins continue de décroître. Nous payons aujourd’hui le choix d’une régulation aveugle du nombre de médecins, qui a produit ses effets pendant quarante ans, et d’une réflexion trop tardive pour tenter d’orienter l’installation des professionnels de santé dans nos territoires.

Dans ce contexte, les inégalités territoriales d’accès se sont inévitablement creusées. De nombreuses lois ont tenté d’en freiner la progression, ces dernières années, sans succès. Je pense, notamment, à la loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite loi Rist, et à la loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, dite loi Valletoux, de 2023, ainsi qu’aux lois de financement de la sécurité sociale successives.

Le présent texte pourrait ne constituer qu’une initiative de plus dans un concert de propositions au sein duquel on peine à distinguer qui formule quoi. Mais tel n’est pourtant pas le cas.

D’une part, parce que ce texte porte une ambition globale : à ce titre, l’article 1er, notamment, vise à rénover l’architecture de notre système de définition des besoins en santé en partant véritablement des territoires et en sortant d’une « hyper-régionalisation » qui empêche de prendre en compte la diversité des réalités locales.

D’autre part, parce qu’il s’efforce de construire des réponses partagées, durables et équilibrées, sans opposer les acteurs entre eux : l’article 3 vise à défendre cette ambition en responsabilisant les médecins dans la maîtrise des inégalités d’accès aux soins sans porter atteinte pour autant à la liberté d’installation.

À cet égard, les vives réactions suscitées par la proposition de loi que vient d’adopter l’Assemblée nationale, sur l’initiative du député Guillaume Garot, me semblent mériter toute notre attention, si ce n’est notre vigilance : notre modèle d’organisation de l’offre de soins ne peut se construire contre ses principaux acteurs.

Alors que nous devrions redynamiser l’exercice libéral, une régulation trop coercitive découragerait de nombreux praticiens de s’engager dans ce mode d’exercice et accentuerait certainement les problématiques d’accès aux soins dans les territoires les plus fragiles.

La proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins dans les territoires se présente donc comme un plan d’action global, décliné en trois axes : piloter la politique d’accès aux soins au plus près des territoires ; renforcer l’offre de soins dans les territoires les plus fragiles ; libérer du temps médical et favoriser les partages de compétences. Je les aborderai tour à tour.

La première ambition de ce texte est d’assurer un pilotage de la politique d’accès aux soins au plus près des territoires. Attachée à la territorialisation de la politique de santé, la commission entend soutenir la volonté inscrite dans ce texte de donner aux départements la capacité d’agir en matière de définition des besoins de santé.

J’estime que le département constitue l’échelle cohérente d’action en matière d’accès aux soins et que le niveau régional, aujourd’hui privilégié dans la définition des besoins en santé, ne permet pas de mesurer finement la réalité des besoins des territoires.

Concernant le pilotage des ressources humaines en profession de santé, notre dispositif, bien qu’essentiel en vue d’adapter les effectifs aux besoins des populations, est, de l’aveu même de la Cour des comptes, inabouti. Dans ce cadre, le texte que nous examinons aujourd’hui tend à remplacer l’actuel Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) et ses comités régionaux par un nouvel office national, décliné à l’échelon départemental. Ces offices départementaux, présidés par le président ou la présidente du conseil départemental, seront chargés de l’identification des besoins en professions de santé dans le département.

Sur ma proposition, la commission a renforcé le rôle de ces nouveaux offices en prévoyant qu’ils rendent un avis conforme sur le zonage d’installation des médecins arrêté par le directeur général de l’agence régionale de santé. Ce zonage devra désormais être révisé tous les ans. Il s’agit ainsi de renverser la logique de construction du zonage et d’identification des besoins en assurant la prise en compte effective des besoins des territoires.

J’entends les remarques concernant un risque de « comitologie » – pathologie contre laquelle nous ne disposons d’aucun médicament – dans une architecture déjà complexe. Je réponds à cette objection par les arguments de proximité, de réactivité et de coordination.

Le département incarne naturellement l’échelon de la concertation territoriale entre les délégations départementales des ARS, les caisses primaires d’assurance maladie, mais également les ordres et les représentants des collectivités territoriales concernées. Il est temps de laisser la main à ceux qui connaissent le mieux les spécificités de chaque territoire.

Le deuxième levier mobilisé par cette proposition de loi vise à renforcer l’offre de soins dans les territoires en tension.

L’article 3 tend à réduire les inégalités territoriales d’accès aux médecins en soumettant leur installation en zone surdense à une autorisation préalable du directeur général de l’ARS. Cette autorisation serait conditionnée, pour les médecins généralistes, à un engagement de leur part à exercer à temps partiel en zone sous-dense. Pour les médecins spécialistes, elle serait subordonnée à un tel engagement, à la cessation concomitante d’activité d’un confrère de la même spécialité ou, à titre exceptionnel, à une décision du directeur général de l’ARS motivée par la nécessité de l’installation pour maintenir l’accès aux soins dans le territoire.

L’ampleur et l’aggravation des inégalités d’accès aux médecins justifient pleinement ces dispositions. La mesure vise à préserver la liberté d’installation des médecins, en leur permettant d’exercer où ils le souhaitent. Elle contraint, en revanche, ceux d’entre eux qui choisiraient de s’installer dans les territoires les mieux dotés à contribuer activement à la maîtrise des inégalités d’accès par des consultations avancées dans les zones plus fragiles.

Par mesure d’équité et afin que les centres de santé ne soient pas utilisés pour contourner ce dispositif, je vous proposerai d’étendre la mesure aux médecins salariés.

L’encadrement équilibré des installations responsabilisera les médecins et apportera, à court terme, une première réponse aux inégalités d’accès aux soins. Il pourra être concilié avec le système de solidarité territoriale, annoncé par le Premier ministre, visant les médecins d’ores et déjà installés. Celui-ci fait l’objet d’un amendement du Gouvernement que je vous proposerai d’adopter, modifié par deux sous-amendements de la commission.

Pour inciter les médecins à s’installer dans les zones sous-denses ou y réaliser une part de leur activité, l’article 5 invite les partenaires conventionnels à définir des tarifs spécifiques applicables dans tout ou partie des zones sous-denses.

Alors que ces dispositions ont suscité le débat, je tiens à le réaffirmer d’emblée : ces tarifs spécifiques ne constituent pas des dépassements d’honoraires et ne viendront, en conséquence, pas aggraver le reste à charge de plus de 95 % de Français entièrement couverts par une assurance complémentaire. Toutefois, pour entendre les craintes manifestées et supprimer toute augmentation possible du reste à charge, je vous présenterai un amendement visant à remplacer ces tarifs par des rémunérations forfaitaires fondées sur l’activité des médecins dans les mêmes zones.

Plusieurs articles ont pour objet d’améliorer les conditions d’accès des praticiens à diplôme hors Union européenne à l’autorisation d’exercice en France. De l’avis unanime des acteurs auditionnés, la procédure d’autorisation d’exercice mérite d’être simplifiée et adaptée à la diversité des profils des candidats. Sur ce sujet, les travaux de la commission ont été guidés par le souci de simplifier la procédure d’autorisation d’exercice actuelle, en veillant à préserver la qualité et l’impartialité de l’évaluation des candidats.

Les articles 8 à 10 visent ainsi, respectivement, à renforcer la portée de l’évaluation des besoins en nombre de postes à pourvoir, à adapter les conditions de l’évaluation des Padhue en confiant aux acteurs locaux chargés de leur supervision un pouvoir autonome d’appréciation permettant de raccourcir la durée des parcours et, enfin, à accélérer la délivrance des autorisations d’exercice.

J’ajoute que le Gouvernement a dévoilé son intention de réformer les épreuves de vérification des connaissances (EVC) : c’est en effet nécessaire. Les attentes sont nombreuses et nous serons attentifs aux modalités de mise en œuvre de ces annonces.

Enfin, la proposition de loi vise à introduire plusieurs mesures destinées à augmenter et à mieux allouer le temps médical disponible : il s’agit du troisième pilier.

Quatre articles visent à renforcer les partages de compétences en développant les protocoles de coopération, en étendant les compétences des pharmaciens d’officine ou en favorisant le déploiement de la pratique avancée par un maintien de salaire lors de la formation et une revalorisation du modèle économique, notamment en libéral.

Deux autres articles visent à supprimer les certificats médicaux inutiles en matière de pratique sportive et pour recourir au congé pour enfant malade.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, la présente proposition de loi constitue, selon moi, un texte équilibré. Les mesures qu’elle contient permettront de mieux estimer les besoins de santé des territoires et contribueront à freiner la progression des inégalités territoriales d’accès aux soins, dont l’ampleur désormais inacceptable abîme notre pacte républicain. Elles permettront également, à court et moyen terme, de libérer et de redéployer du temps médical, aujourd’hui mal affecté.

Parmi les nombreuses initiatives récentes, j’aimerais qu’elle constitue une voie de compromis. Je vous invite donc, au nom de la commission des affaires sociales, à lui donner la majorité qu’elle mérite. Quant à notre collègue Alain Milon, je veux lui dire, en référence à son intervention en commission des affaires sociales, que s’il se coupe un doigt, j’ai des pansements ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également. – M. Alain Milon sourit.)