M. le président. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.
proposition de loi visant à mieux protéger les écosystèmes marins
Article 1er
Le I de l’article L. 110-4 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« D’ici au 1er janvier 2030, au moins 30 % de l’ensemble du territoire national et des espaces maritimes sous souveraineté ou juridiction française sont couverts par un réseau cohérent d’aires protégées en métropole et en outre-mer, sur terre et en mer, et au moins 10 % sont placés sous protection stricte. En mer, les aires placées sous protection stricte atteignent un niveau d’au moins 10 % de chaque façade maritime et de chaque bassin maritime ultramarin. Afin de parvenir à cet objectif, l’État élabore et met en œuvre, sur la base des données scientifiques disponibles et en concertation avec des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements ainsi que des autres parties prenantes, une stratégie nationale des aires protégées. » ;
2° Au troisième alinéa, le mot : « forte » est remplacé par le mot : « stricte » ;
3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les zones placées sous protection stricte mentionnées au premier alinéa du présent I sont délimitées afin de conserver, ou de restaurer, l’intégrité, la structure écologique sous-jacente et les processus environnementaux naturels de soutien d’espaces naturels riches en biodiversité. Les processus naturels sont préservés des pressions humaines et des menaces qui pèsent sur la structure et le fonctionnement écologiques globaux à l’intérieur ou à l’extérieur de la zone strictement protégée. Ne sont autorisées que les activités de gestion nécessaires à la restauration ou à la conservation des habitats et des espèces pour la protection desquels la zone a été désignée ainsi que les activités limitées et bien contrôlées qui n’interfèrent pas avec les processus naturels ou les améliorent. Un décret précise les modalités de mise en œuvre de la protection stricte, notamment en ce qui concerne les règles de protection foncière et les procédures de contrôle.
« Une zone tampon, où sont interdits le chalutage, les activités industrielles et la pêche récréative dont les impacts périphériques sont de nature à contrevenir à l’avant-dernier alinéa, est établie autour des zones placées sous protection stricte. Un décret précise les modalités de mise en œuvre ainsi que les procédures de contrôle et de sanction en cas de violation des interdictions. »
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié quater, présenté par M. Cadec, Mme Evren, MM. Sol, J.P. Vogel, Brisson, Piednoir, Burgoa, Rapin, Panunzi, Naturel, Le Rudulier, D. Laurent et Lefèvre, Mme Joseph, MM. Canévet, Chauvet et Bouchet, Mmes Canayer et Belrhiti, MM. Margueritte, Pernot, P. Vidal, Sautarel, Duplomb et L. Vogel, Mme Lassarade, M. Gremillet, Mme Muller-Bronn, M. Milon et Mmes Josende et Gosselin, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Agnès Evren.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. La commission a émis à l’unanimité un avis défavorable sur cet amendement de suppression de l’article 1er, et ce pour une question de méthode.
Sans préjuger du vote à venir sur cet article, elle a souhaité permettre l’examen en bonne et due forme de l’ensemble des amendements déposés, afin qu’un véritable débat puisse avoir lieu.
La protection et l’utilisation durable des océans sont un sujet vital pour les territoires côtiers, sur lequel la France appelle le monde entier à se mobiliser dans le cadre de l’Unoc cette semaine. Il ne serait pas compréhensible que le Sénat ne prenne pas sa place dans cette discussion.
À titre personnel, je suis également défavorable à cet amendement, car je soutiens l’adoption de l’article 1er, modifié le cas échéant par l’amendement n° 3 déposé par le groupe GEST, dont l’adoption permettrait un assouplissement du dispositif, gage d’une meilleure acceptabilité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Je souhaite m’attarder un instant sur cet amendement qui vise à supprimer l’objectif de 10 % d’aires marines protégées.
Monsieur le ministre, vous avez simplement indiqué être favorable à cette suppression. Voilà une réponse très courte !
Dans ses récentes interventions, Emmanuel Macron a annoncé que nous allions avancer vers des objectifs de protection stricte, évoquant même 10 % de protection stricte de nos eaux. Il n’a en revanche pas annoncé de nouveaux objectifs dans les eaux territoriales hexagonales ; on y resterait donc à 0,1 % de protection stricte.
Cette proposition de loi vise justement à clarifier les notions de protection stricte et de protection forte. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement s’oppose à ce que la notion de protection stricte soit définie dans la loi.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 5, présenté par Mme Conconne, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Première phrase
Après les mots :
juridiction française
insérer les mots :
, à l’exception des territoires de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane,
2° Deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, à l’exception du bassin maritime de Martinique, de Guadeloupe, et de la Guyane
La parole est à Mme Catherine Conconne.
Mme Catherine Conconne. Il y a quelques heures, nous rappelions avec émoi dans cet hémicycle la pollution dramatique au chlordécone que subissent la Guadeloupe et la Martinique.
Mes chers collègues, savez-vous qu’aujourd’hui 30 % du littoral de nos îles est de ce fait interdit de pêche ? Oui, interdit ! Cette interdiction a plongé dans la difficulté, voire dans la pauvreté, un très grand nombre de pêcheurs. Certains ont dû vendre et se reconvertir ; d’autres peinent, parce qu’il faut maintenant aller très loin pour pêcher, ce qui signifie plus de carburant – vous savez ce qu’il coûte aujourd’hui.
Et l’on voudrait maintenant ajouter de nouvelles aires marines protégées, alors que, en Martinique, il y en a déjà !
Que dirai-je à mes pêcheurs en rentrant ? On va simplement leur demander de tout arrêter, de ne plus pêcher du tout, d’aller je ne sais où. Peut-être qu’ils viendront demander un petit job au Sénat…
Il est temps d’avoir une vision extrêmement réaliste de la situation : la Guadeloupe et la Martinique, ce n’est pas la Bretagne. (Mme Solanges Nadille acquiesce.) Nous ne sommes pas en situation de surpêche, bien au contraire. Même la Commission européenne a autorisé le financement d’un nouveau navire après qu’on lui a fait la preuve par neuf qu’on était très loin de la surpêche, qu’on pouvait continuer à aider nos marins-pêcheurs à avoir de nouveaux outils de pêche.
Et il faudrait que je reste passivement à vous entendre dire que l’on va augmenter les aires marines protégées ? Non ! Laissez nos pêcheurs tranquilles, laissez-les travailler !
Je partage tout à fait le souci de préserver nos richesses naturelles. Ne faites pas de moi une anti-écolo, c’est tout sauf le cas, mais, de grâce, considérez ce qui mérite de l’être et ne faites pas subir à nos pays une double peine, celle du chlordécone et celle d’aires marines hyperprotégées !
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme Ollivier, MM. Dantec, Benarroche, G. Blanc, Dossus et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° bis Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret établit pour chaque façade maritime et bassin maritime ultramarin, après consultation des conseils maritimes de façade ou des conseils maritimes ultramarins, un sous-objectif permettant d’atteindre l’objectif global de placer sous protection stricte au moins 10 % de l’ensemble des espaces maritimes sous souveraineté ou juridiction française d’ici au 1er janvier 2030. Cette déclinaison permet d’assurer une contribution de chaque façade maritime et bassin maritime ultramarin à cet objectif global, en assurant un équilibre entre, d’une part, les contraintes géographiques, physiques et socio-économiques et, d’autre part, les enjeux de protection de la biodiversité, appréciés en fonction des caractéristiques des écosystèmes concernés et des pressions anthropiques constatées. » ;
III. – Alinéa 6
1° Deuxième phrase
Remplacer les mots :
strictement protégée
par les mots :
placée sous protection stricte
2° Troisième phrase
Après le mot :
zone
insérer les mots :
placée sous protection stricte
IV. – Alinéa 7, première phrase
Remplacer les mots :
, les activités industrielles et la pêche récréative dont les impacts périphériques sont de nature à contrevenir à l’avant-dernier alinéa,
par les mots :
et les activités industrielles, dont les impacts périphériques sont de nature à contrevenir à l’avant-dernier alinéa, ainsi que la pêche récréative,
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Cet amendement vise à rendre plus flexible la manière dont nous autorisons le placement des AMP sous protection stricte, en renvoyant la définition de ces aires à un décret.
La proposition originelle allait déjà plus ou moins dans le sens de Mme Conconne : si elle fixait un objectif de 10 % d’aires marines protégées par façade, c’était justement pour éviter que le Gouvernement n’établisse toutes les aires marines protégées dans les outre-mer et se dédouane de ses responsabilités en métropole.
C’est en effet exactement ce qui s’est passé il y a quelques jours ! Dans un grand exercice de communication, le Gouvernement a annoncé la mise en place d’une énorme aire marine protégée de protection stricte en Polynésie française, en s’attribuant d’ailleurs les déclarations du président de la Polynésie française.
Si nous avons préféré fixer un objectif de 10 % d’aires marines protégées par façade, c’est bien pour que les aires marines protégées ne soient pas toutes dans les outre-mer.
Madame Conconne, nous partageons votre combat contre le chlordécone et contre le manque de responsabilité du Gouvernement sur ces sujets depuis de très nombreuses années. (Mm Catherine Conconne manifeste son scepticisme.) Les écologistes se sont toujours mobilisés pour lutter contre les pollutions, à terre comme en mer. Cet objectif, nous n’y renonçons pas.
C’est très bien que le Gouvernement nous annonce que nous allons lutter contre la pollution, car elle exerce aujourd’hui une pression très importante sur les écosystèmes marins, mais la surpêche continue d’être une problématique majeure. L’IPBES indique qu’il s’agit aujourd’hui du problème principal en termes de pression sur les écosystèmes marins. Oui, il faut continuer à traiter cette question !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 5.
Si je comprends la nécessité de prendre en compte les contraintes de pêche spécifiques de la zone antillo-guyanaise, exempter purement et simplement la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane des engagements nationaux en matière de déploiement des aires marines protégées ne semble pas souhaitable. En outre, ce serait moins-disant par rapport au droit actuel.
L’amendement n° 3 tend à reprendre des propositions d’évolution que j’avais proposées au stade de l’examen en commission, mais qui n’ont pas été retenues. Bien que les dispositions qu’il contient aillent dans le bon sens, en permettant davantage de différenciation territoriale, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, parce qu’elle ne souscrit pas à la proposition, formulée dans ce texte, de remplacer dans le droit français la notion de protection forte par celle de protection stricte.
À titre personnel, je soutiens cet amendement par cohérence avec la position qui a été la mienne en commission. Cette mesure permettrait d’assurer l’effectivité d’une petite partie au moins de nos aires marines protégées, tout en fixant des objectifs de déploiement adaptés aux possibilités et contraintes de chaque façade maritime et bassin maritime ultramarin.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’avez compris, le Gouvernement n’est pas favorable à ce que la notion de protection stricte soit retenue.
L’amendement n° 5 tend à exclure de cette approche les territoires de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane. Voilà bien la preuve qu’elle ne permet pas de prendre en compte les spécificités locales, notamment celles des bassins maritimes de la région antillo-guyanaise, qui sont très particulières.
La définition actuelle de la protection forte permet la différenciation que vous demandez, madame la sénatrice, pour tenir compte de la grande diversité des écosystèmes et des activités économiques dans nos espaces maritimes français.
Étant défavorable à l’article 1er, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 5.
L’amendement n° 3 vise pour sa part à assouplir l’objectif d’au moins 10 % des aires marines protégées sous protection stricte par façade maritime et par bassin maritime ultramarin.
Je le répète, le Gouvernement est défavorable à cette approche. Cette proposition d’assouplissement témoigne parfaitement de la difficulté d’avoir une approche systématique comme celle-ci : la diversité de notre écosystème marin et de nos territoires nécessite une approche différenciée.
C’est pourquoi le Gouvernement privilégie l’approche de protection forte, comme c’est le cas aujourd’hui. Étant défavorable à l’article 1er, il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement également.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Le rapporteur souhaite peut-être la différenciation, mais il voudrait en même temps aligner les territoires ultramarins pour qu’ils soient dans la République. Si cet alignement fonctionnait dans tous les domaines, comme nous serions heureux !
Quand il s’agit des zones de protection, il faudrait être comme en France et se soumettre aux mêmes règles, mais alors, pour le reste, c’est pour quand ? Je peux vous donner la liste des situations où nous ne sommes pas du tout alignés avec l’Hexagone : on y passerait la nuit !
Je veux bien comprendre qu’il y ait des postures différentes. À certains moments, on nous dit : comme vous êtes dans la République, vous devez être alignés. Pourtant, à d’autres, nous en sommes loin et tout cela nous passe au-dessus de la tête !
Soyons cohérents. Si l’on nous impose l’alignement pour les aires marines protégées, nous voulons un alignement pour tout : T-O-U-T !
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 323 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Pour l’adoption | 95 |
Contre | 229 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Article 2
I. – Le livre IX du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier du titre Ier est complété par un article L. 911-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 911-5. – I. – L’État définit et met en œuvre une stratégie nationale de transition des flottilles de pêche au chalut de fond. Cette stratégie est révisée tous les trois ans. Elle vise à réduire la dépendance de la filière de la pêche française à la consommation d’énergies fossiles, à protéger les écosystèmes marins et à assurer une gestion durable des ressources halieutiques.
« La stratégie nationale précise les objectifs et les mesures permettant la transition des navires de pêche au chalut de fond vers d’autres pratiques de pêche, y compris par l’expérimentation et l’incitation. Elle fixe notamment les mesures relatives à l’attribution des permis de mise en exploitation des navires de pêche professionnelle ainsi qu’aux critères et à la répartition des quotas qui contribuent à l’atteinte de ces objectifs. Elle comporte les dispositions compensatoires et d’accompagnement économique et social garantissant une transition juste et durable.
« II. – L’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs prennent en compte la stratégie nationale définie au I dans leurs documents de planification et de programmation maritimes. » ;
2° L’article L. 921-8 est ainsi rétabli :
« Art. L. 921-8. – L’usage des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à vingt-cinq mètres est interdit à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes. »
II. – Le 2° du I entre en vigueur le 1er janvier 2026.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par M. Cadec, Mme Evren, MM. Sol, J.P. Vogel, Brisson, Piednoir et Burgoa, Mme Garnier, MM. Rapin, Naturel, Panunzi, Le Rudulier, D. Laurent et Lefèvre, Mme Joseph, MM. Canévet, Chauvet et Bouchet, Mmes Canayer et Belrhiti, MM. Margueritte, Pernot, P. Vidal, Sautarel, Duplomb et L. Vogel, Mme Lassarade, M. Gremillet, Mme Muller-Bronn, M. Milon et Mme Josende, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Agnès Evren.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. Comme pour l’amendement de suppression de l’article 1er, la commission a émis à l’unanimité un avis défavorable sur l’amendement de suppression de l’article 2.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Le report éventuel des chalutiers de fonds vers d’autres engins de pêche doit être anticipé à large échelle. Je pense notamment à l’impact potentiel sur les espèces d’intérêt halieutique et leurs quotas, mais aussi sur les espèces protégées.
Par ailleurs, le Gouvernement a déjà traité les enjeux d’évolution des pratiques de pêche, qui sont étudiés dans plusieurs stratégies – je les ai mentionnés dans la discussion générale –, et ce pour l’ensemble des engins de pêche pour lesquels les impacts sur les écosystèmes sont documentés.
Enfin, la France engage des actions en faveur de la durabilité des activités de pêche, quelle que soit la taille des navires. Une interdiction des navires 25 mètres et plus dans la bande côtière, en plus d’être fondée sur un seuil arbitraire, risquerait de porter préjudice à la pêche française, si elle était instaurée à l’échelle nationale. Elle s’opposerait aussi au cadre européen, qui prévoit un accès de certains navires d’autres États membres dans cette bande côtière.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Je suis toujours surpris d’entendre que l’on essentialise les pêcheurs, que l’on évoque « les pêcheurs » en général.
Lorsque nous avons gagné, ensemble, contre la pêche électrique – Alain Cadec était là, il pourrait nous en parler –, nous étions soutenus par les pêcheurs artisanaux français, contre les pêcheurs industriels, contre le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), qui défendaient une pêche industrielle. Le gouvernement français était des plus ambigus sur ce sujet.
Même chose lorsque nous avons gagné, à l’échelon européen, sur la pêche en eaux profondes. Nous avions évidemment la pêche industrielle contre nous, mais la pêche artisanale avec nous.
Déjà j’entendais les mêmes discours : « Les pêcheurs sont contre ! » Eh bien non ! Il y a des débats au sein de la pêche. Les pêcheurs à la ligne de bars sont contre le chalutage en bœuf dans les zones de frayères du bar. Le secteur de la pêche parle peu, il n’expose pas publiquement ses divergences, mais il est divers.
Alors oui, nous nous battons ici pour la pêche artisanale, avec celles et ceux qui font vivre les territoires, pas avec ceux qui pillent les fonds marins. Si l’on continue, il n’y restera plus rien ! Il n’y aura bientôt plus de pêcheurs et plus d’activité dans les territoires autour de la pêche. Alors, arrêtons ce bazar et les mensonges, cessons de dire qu’il n’existe qu’une pêche française ! C’est faux ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Ollivier, MM. Dantec, Benarroche, G. Blanc, Dossus et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article L. 921-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rétabli :
« Art. L. 921-8. – L’usage des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à vingt-cinq mètres est interdit à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2026.
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Par cet amendement, nous proposons une solution de repli. Afin de nous permettre d’obtenir l’interdiction des bateaux de 25 mètres et plus dans la bande des douze milles nautiques, cet amendement tend à supprimer la première partie de l’article 2 sur la stratégie nationale de transition des flottilles de pêche au chalut de fond.
Il s’agit d’une mesure de bon sens. Je ne demande pas l’interdiction des bateaux industriels, je demande juste qu’ils aillent pêcher plus loin, à douze milles nautiques, c’est-à-dire à moins de vingt-cinq kilomètres des côtes. On parle ici de bateaux de 100 mètres, de bateaux-usines, qui pêchent sur le territoire des artisans pêcheurs côtiers, alors qu’ils peuvent pêcher en haute mer.
Je le répète, il s’agit d’une mesure de bon sens : nous demandons seulement que ces bateaux aillent pêcher plus loin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. Cet amendement vise à réécrire l’article 2 de la proposition de loi pour ne conserver que l’interdiction des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à 25 mètres à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes.
Bien que cet amendement aille dans le bon sens, en ciblant davantage la proposition afin d’en garantir l’acceptabilité, la commission y est défavorable, car elle ne souscrit pas à l’ensemble de l’article 2 tel qu’il a été proposé initialement.
À titre personnel, je soutiens cet amendement, dont l’objectif est de protéger la pêche côtière et artisanale des mégachalutiers, le plus souvent étrangers, qui mettent en péril notre modèle économique et exercent une forte pression sur les ressources et les écosystèmes. L’adoption de cet amendement permettrait d’envoyer un signal fort de soutien à nos pêcheurs. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Je le redis : nous ne sommes pas favorables à cette interdiction, et ce pour trois raisons que je rappellerai très brièvement.
D’abord, juridiquement, une telle interdiction serait contraire au droit européen. Ensuite, le seuil de 25 mètres est arbitraire. Enfin, diplomatiquement, la France s’est battue pour maintenir l’accès de ses navires, y compris de plus de 24 mètres, aux eaux britanniques dans la bande des six à douze milles nautiques. Une interdiction nationale aussi stricte affaiblirait notre position internationale.
L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Émettre un avis défavorable sur cet amendement aujourd’hui est un scandale ! Cela revient à prendre position en faveur de la pêche industrielle. Or la France ne compte aujourd’hui qu’un ou deux bateaux de plus de 25 mètres, qui ne représentent que 3 % de la flottille française.
En fait, je le répète : vous prenez fait et cause pour la pêche industrielle, et c’est un scandale !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 324 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l’adoption | 94 |
Contre | 228 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mes chers collègues, je vais mettre aux voix l’article 2.
Si cet article n’était pas adopté, l’article 3, qui constitue le gage de la proposition de loi, deviendrait sans objet.
Dès lors, il n’y aurait plus lieu de mettre aux voix l’article 3 et l’ensemble de la proposition de loi. Il n’y aurait donc pas d’explication de vote sur cet article et sur l’ensemble.
Personne ne demande la parole pour explication de vote ?…
Je mets aux voix l’article 2.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)