Je ferai moi aussi une référence historique : « le pain, la paix et la liberté ». En l'évoquant, je ne fais pas preuve de passéisme ou de nostalgie, ce slogan étant toujours complètement d'actualité.
Souvenez-vous, ce mot d'ordre, assorti d'un programme politique, date de l'époque où il a fallu faire barrage à l'extrême droite. Il s'agissait alors d'abord de combattre la misère – c'est pour cela qu'on cite en premier le pain – et de mettre en place, madame la ministre, vous vous en souvenez, un régime de sécurité sociale – assurance vieillesse et maladie. C'est une très belle référence.
Par ailleurs, chers collègues de droite, vous êtes, les uns et les autres, dans une définition extensive, et pour tout dire un peu morale, du volontariat.
Mais les faits sont têtus. Les dérogations au repos dominical n'ont abouti à aucune création d'emploi. Ce sont les chiffres de l'Insee ; vous pouvez les vérifier.
En revanche, le lien de subordination crée bien un chantage à l'embauche ou au maintien dans l'emploi : il faut le dire. Si le refus de ce prétendu volontariat n'aboutit peut-être pas mécaniquement à un licenciement, le risque pour le salarié de perdre son emploi existe bel et bien.
Voilà qui me rappelle – je m'adresse notamment à ma collègue Puissat – le débat que nous avions eu sur l'ubérisation du travail. À quand un vrai contrat de travail pour ceux qui doivent effectuer des livraisons en pleine canicule, dans des conditions inadmissibles, sans droit du travail ni protection sociale ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Je rappelle à mes collègues siégeant de l'autre côté de l'hémicycle qu'en cas d'adoption de la proposition de loi, les boulangers et les fleuristes ne seront pas les seuls concernés.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Monique Lubin. Ce sont tous les commerces de bouche des centres-bourgs et des villes qui ouvriront. (Mme Ghislaine Senée acquiesce.)
Et vous dites qu'il ne s'agit pas d'une brèche dans le droit du travail ? (L'oratrice s'esclaffe.) Mais, selon vous, combien y aura-t-il de salariés concernés dans toute la France ? Des centaines ? Des milliers ?
Et surtout, encore une fois, est-ce vraiment indispensable ?
Martine Aubry, à laquelle il a été fait référence à plusieurs reprises, confirmait le droit qui s'appliquait aux salariés dont l'activité ne pouvait pas s'arrêter, par exemple dans les hôpitaux, les services aux personnes âgées ou les transports.
Là, vous nous parlez des commerces de bouche, dont on ne pourrait soudainement plus se passer le 1er mai… Ce sont des centaines de milliers de salariés qui seront concernés par une telle mesure.
Et arrêtez avec votre discours sur le volontariat ! Tout le monde sait très bien qu'à quelques exceptions près, c'est – pardonnez-moi l'expression – du pipeau !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Monique Lubin. Vous vous défendez de vouloir « mettre un pied dans la porte » ? Pourtant, un collègue du groupe Les Républicains, absent aujourd'hui, a dit en commission des affaires sociales que vous vouliez le faire et même « ouvrir la porte ».
Sur le moment, nous n'avions pas nécessairement saisi de quoi il parlait. Mais nous avons vite compris : retraite à 65 ans, semaine de travail de trente-six heures ou trente-sept heures, etc. C'est reparti !
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Avec les membres de mon groupe, nous ne voterons évidemment pas ces amendements de suppression.
Chers collègues, ayant moi-même été salariée pendant dix ans, je ne me reconnais absolument pas dans votre vision des relations au sein du monde du travail, qui me semble assez désuète et datée. Il y a des lois sur le volontariat ; elles doivent être respectées. Comme M. le rapporteur l'a rappelé, nous y sommes très attachés.
Je suis fière d'avoir déposé cette proposition de loi avec Hervé Marseille. Au-delà des artisans boulangers et fleuristes, c'est de la vitalité de nos centres-villes et centres-bourgs qu'il s'agit.
Pour ces commerces, que nous essayons depuis des années de préserver, le 1er mai, c'est 25 % de chiffre d'affaires de plus qu'un jour férié classique. À l'échelon national, cela représente 70 millions à 80 millions d'euros. Pour les fleuristes, c'est le quatrième jour de l'année en volume de ventes. Et pour les salariés, c'est – je le rappelle – environ 400 euros sur la feuille de paie au mois de mai.
Oui, je défends le 1er mai férié et chômé ! Mais je défends aussi la possibilité, pour les artisans qui le souhaitent, de travailler et, pour les salariés qui le souhaitent, de gagner plus ! Voilà pourquoi nous proposons de sécuriser l'ouverture des commerces le 1er mai.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je ne me reconnais pas du tout dans la description que font nos amis de gauche de la relation de travail entre employeurs et salariés.
Les employeurs respectent leurs salariés. Ils ne cherchent pas à sanctionner de manière détournée ceux qui déclarent ne pas pouvoir travailler le dimanche ou un jour férié, par exemple parce qu'ils ont des enfants à garder.
Je connais des employeurs. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.) Je connais aussi des salariés, chers collègues. Les relations de travail ne sont pas du tout fondées sur le conflit ou les sanctions. Et les employeurs respectent le choix de leurs employés d'être, ou non, volontaires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.
Mme Ghislaine Senée. Je me demande dans quel monde certains vivent…
Qui peut sérieusement croire qu'un chômeur ayant besoin d'argent pour nourrir ses enfants va répondre qu'il ne peut pas travailler le dimanche si la question lui est posée lors d'un entretien d'embauche ? Il n'aura évidemment pas d'autre choix que d'accepter ; il faut bien payer le loyer. C'est cela, le lien de subordination !
Peut-être que, dans votre secteur d'activité, il y a des personnes qui se disent : « Tiens, comme je ne sais pas quoi faire ce dimanche, si j'allais travailler ? » Mais, dans le monde réel, le dimanche, les gens doivent surtout s'occuper de leur famille : pour pouvoir aller travailler, il faut déjà avoir une solution de garde et savoir comment les enfants feront pour manger le midi !
Et vous pensez que la clé de la revitalisation des centres-bourgs, c'est le travail du 1er mai ? Sérieusement ?
Nous avons effectivement un problème structurel : nos commerces de proximité et les centres-bourgs sont en train de se dévitaliser. Mais je doute que la solution réside dans le travail du 1er mai. Regardez plutôt du côté du e-commerce ou de tout ce qui empêche aujourd'hui nos artisans de valoriser leur travail. Non seulement vous élèveriez le débat, mais, en plus, vous apporteriez des réponses concrètes à nos commerçants !
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, j'ai demandé un scrutin public – je crois que je ne suis pas seul – sur ces amendements de suppression.
Je pense que nous vivons un moment politique important. C'est un vrai débat droite-gauche. Cela fait du bien de se rappeler de temps en temps qu'il y a, d'un côté, les progressistes et, de l'autre, une tendance plus que réactionnaire. (Exclamations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Jean-Michel Arnaud. Caricature !
M. Patrick Kanner. Chers collègues, n'ayez pas peur de l'adjectif « réactionnaire ». La réaction, littéralement, c'est le retour en arrière. Or ce que vous voulez faire, c'est revenir en arrière, tout simplement. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) C'est votre droit le plus strict.
Vous allez pouvoir vous déclarer officiellement réactionnaires par votre vote lors du scrutin public, ce système que vous aimez tant… Et vous pourrez ensuite justifier vos positions politiques dans vos territoires.
Pour ma part, je pense que ce texte aurait dû s'appeler « proposition de loi permettant aux employeurs d'obliger les salariés de certains secteurs à travailler le 1er mai ».
Mme Raymonde Poncet Monge. J'ai justement déposé un amendement en ce sens !
M. Patrick Kanner. Je me réjouis que nous ayons ce moment de clarification dans l'hémicycle. Cela nous permet d'affirmer nos positions politiques sur ce qui est un droit acquis depuis des dizaines et des dizaines d'années et, pour les salariés de ce pays, un symbole manifeste.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3, 4 et 15.
J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et, l'autre, du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 338 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l'adoption | 106 |
Contre | 225 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 8, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° À la première phrase, après la deuxième occurrence du mot : « au », sont insérés les mots : « double du ».
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Vous l'avez compris, nous ne vous suivons pas sur ce que vous appelez le volontariat et j'aimerais revenir sur la notion de lien de subordination qui, pour information, n'est ni une insulte ni une critique : c'est tout simplement ce qui définit la relation entre un employeur et un salarié.
Mme Raymonde Poncet Monge. Oui, une subordination !
Mme Silvana Silvani. Entre parenthèses, s'il y a un code du travail, c'est précisément pour réguler ce lien.
Voilà pourquoi la notion de volontariat n'a pas de sens dans une relation salariale. On ne voit pas bien en quoi ce serait une justification en l'espèce.
Par cet amendement, nous voulons a minima protéger les salariés qui ne pourront pas refuser de travailler le 1er mai, en doublant la majoration.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Les salariés qui travaillent le 1er mai ont droit à une indemnité égale au montant du salaire s'ajoutant à la rémunération de la journée. Il s'agit donc d'une majoration de 100 %. Cela explique, selon les fédérations représentatives, que les salariés soient très souvent volontaires pour travailler ce jour-là. Nous nous en réjouissons.
La contrepartie prévue étant suffisante, il n'est pas souhaitable d'aller au-delà, sauf, évidemment, si une négociation collective le décidait.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je profite de l'occasion pour revenir sur certains termes qui ont pu être prononcés : « progressiste », « réactionnaire », etc.
Chers collègues, je vous écoute et il me semble que vos propos dénotent une peur, une détestation, pour ne pas dire une diabolisation du travail. (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.) Sincèrement, cela m'inquiète : à mon sens, un pays qui en viendrait à avoir peur, à détester et même à diaboliser le travail, à le considérer comme maléfique, n'aurait pas beaucoup d'avenir (Mme Ghislaine Senée s'exclame.), ne risquerait pas de connaître la prospérité et finirait par s'enfoncer dans la pauvreté.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il s'y enfonce déjà ! Et du fait de votre politique !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué tout à l'heure ne pas tolérer certains des propos que j'ai pu tenir. Eh bien, sachez que c'est réciproque : moi, je ne tolère pas la manière dont vous caricaturez nos positions !
Personne ici ne s'est déclaré hostile au travail. Simplement, ce que nous disons, c'est que vous êtes en train de défigurer le 1er mai. Si, par malheur, ce texte venait à être adopté et à entrer en vigueur, le 1er mai ne serait plus que l'ombre de lui-même. Or nous, nous tenons au 1er mai, pour toutes les raisons que nous avons déjà évoquées.
Mais, de grâce, ne caricaturez pas nos propos !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, en France, ceux qui détestent le travail, ce sont les rentiers. (Exclamations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Et les rentiers, vous les favorisez ! (Mêmes mouvements.) Regardez plutôt du côté des travailleurs : eux ne détestent pas le travail, ils sont le monde du travail !
J'aimerais revenir sur l'une de vos déclarations. Vous avez reproché aux inspecteurs du travail d'abuser… quand ils font appliquer le droit du travail. Celle-là, il fallait quand même la faire !
Je reviens sur le lien de subordination. Depuis le début du XXe siècle, des dispositions ont été adoptées pour essayer de corriger le déséquilibre qui caractérise les relations de pouvoir au sein de l'entreprise. C'est l'objet du code du travail, dont l'existence même démontre la nécessité d'un rééquilibrage quand le lien de subordination est au cœur du contrat de travail.
L'amendement que nous examinons concerne la majoration. Comprenons bien de quoi il s'agit.
Le fait que le 1er mai soit un jour chômé est un droit collectif. La majoration, c'est la contrepartie prévue pour ceux qui, à titre individuel, ne peuvent pas bénéficier de ce droit, parce qu'ils exercent une activité qui ne peut pas s'interrompre. Il s'agit non pas de « payer le double » le travail effectué – si le jour avait été chômé, la personne aurait tout de même reçu son salaire –, mais bien de compenser l'impossibilité de bénéficier d'un droit. (Marques d'impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
Il faut cesser de prétendre que le salarié qui travaille le 1er mai serait payé le double ; il est simplement payé pour son travail ce jour-là !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 8.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 17 rectifié bis, présenté par Mme Billon, MM. Marseille et Malhuret, Mme Antoine, M. Belin, Mmes Bellurot et Berthet, M. Bonneau, Mmes Borchio Fontimp, Bourcier et V. Boyer, MM. Bruyen, Cambier, Delahaye et Delcros, Mmes Dumont et Duranton, M. Fialaire, Mmes Florennes, Gacquerre, F. Gerbaud et Guidez, M. Haye, Mmes Herzog et Imbert, M. Kern, Mme Lassarade, MM. Laugier et Lemoyne, Mme Malet, MM. Maurey et Menonville et Mmes Perrot, O. Richard, Romagny, Saint-Pé, Schalck, Sollogoub, Vérien et Vermeillet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Après le mot :
jour,
Rédiger ainsi la fin de l'alinéa :
les établissements suivants ne relevant pas du I :
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« III – Pour l'application du II, seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler. Le salarié qui refuse de travailler le 1er mai ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail. Le refus de travailler le 1er mai pour un salarié ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. »
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Depuis quarante ans, les boulangeries et les magasins de fleurs ouvrent le 1er mai. Depuis quarante ans, des salariés travaillent ce jour-là, sur la base du volontariat. Depuis quarante ans, nous nous rendons chez les boulangers et les fleuristes sans que cela ait posé de problème à quiconque jusqu'à présent.
M. Kanner nous a traités de « réactionnaires » et nous a accusés de vouloir un « retour en arrière ». En réalité, nous souhaitons simplement donner un cadre clair à l'ouverture de ces magasins le 1er mai, qui n'a pas fait débat depuis plus de quarante ans.
C'est la raison pour laquelle le présent amendement vise à apporter des précisions relatives au volontariat, dans un souci, là encore, de sécurisation.
Mme la présidente. L'amendement n° 5, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
volontariat
insérer les mots :
exprimé par écrit à leur employeur dans un délai d'un mois
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Par cet amendement, nous proposons de préciser que le volontariat doit être exprimé « par écrit » et avec un délai d'un mois. Il s'agit évidemment d'une protection : le fait de ne pas vouloir travailler le 1er mai ne saurait être un motif de refus d'embauche.
Monsieur le rapporteur, je ne peux pas vous laisser dire que nous n'aimerions pas le travail. Je vous rappelle qu'en France, les salariés ont 364 jours pour travailler ; le seul jour chômé, c'est le 1er mai !
Je veux aussi revenir sur cette question du volontariat. Comme vous, je tiens des permanences. Et les gens que j'y rencontre me disent qu'ils n'ont vraiment pas le choix. Lorsqu'un jeune, une femme ou une personne en situation de précarité va travailler dans un supermarché le dimanche, ce n'est pas ce que vous appelez du « volontariat » ; c'est parce qu'il y est obligé !
Si on fait miroiter à une salariée en CDD depuis des mois qui élève seule ses enfants – nous en rencontrons tous dans nos permanences – la possibilité d'obtenir un CDI à condition de venir travailler le dimanche, elle n'aura évidemment pas le choix. En plus, les personnes sont culpabilisées sur le thème : « Si vous ne venez pas le dimanche, nous ferons travailler vos collègues. »
Et vous, vous nous parlez de volontariat ? Un peu de bonne foi, s'il vous plaît !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Ces deux amendements visent à renforcer les garanties relatives au volontariat.
La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 17 rectifié bis. En revanche, elle demande le retrait de l'amendement n° 5, faute de quoi l'avis serait défavorable. En effet, le délai d'un mois nous semble abusif et source de complications, notamment pour les TPE.
Je voudrais revenir sur le volontariat et, plus généralement, sur le sens de cette proposition de loi. L'idée n'est évidemment pas – sur ce point, nous sommes d'accord – d'ouvrir les hypermarchés ou les supermarchés. Simplement, avec ce texte, dans ma commune, le fleuriste du quartier pourra vendre son muguet le 1er mai avec ses deux salariés, qui – je sais que cela vous paraîtra bizarre ! – aiment leur métier.
Mme Ghislaine Senée. Ils aiment peut-être aussi passer du temps avec leur famille…
M. Olivier Henno, rapporteur. Nous permettons ainsi à des responsables de TPE, qui ne sont pas d'affreux capitalistes aux profits mirobolants, de travailler honorablement et de faire vivre un peu mieux leur famille, sachant qu'ils réalisent un chiffre d'affaires important le 1er mai et qu'un petit brin de muguet ce jour-là – Jocelyne Guidez l'a souligné –, cela fait toujours plaisir !
Voilà le sens de la proposition de loi déposée par Annick Billon.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. À l'instar de la commission, le Gouvernement sollicite le retrait de l'amendement n° 5 au profit de l'amendement n° 17 rectifié bis, qui vise à apporter une précision utile dans le texte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous voterons ces amendements.
Mme Annick Billon. Ah ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Eh oui, ma chère collègue. Car je vois dans votre amendement une tentative, certes désespérée, de rendre effectif le volontariat. Et si vous essayez de le rendre effectif, c'est bien que vous avez pu observer ce que produit depuis des années la dérogation au repos dominical.
Mais aucun amendement ne pourra aller contre la réalité : il est vain de penser que, pour les salariés, le volontariat s'exerce en toute liberté.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Je ne dirai pas mieux ! Pourquoi déposer un tel amendement si vous êtes sûrs que le volontariat est réel et que le choix profond des salariés sera respecté ?
Vous n'avez pas beaucoup apprécié ce que j'ai dit tout à l'heure, mais je le maintiens. Et d'ailleurs, cet amendement en est la confirmation. Vous n'auriez pas besoin d'introduire des dispositions aussi précises dans le texte si vous étiez convaincus par votre propre discours sur le volontariat. Mais manifestement, vous savez comment les choses se passent en pratique…
Pour ma part, je m'abstiendrai sur ces amendements. Les voter, c'est déjà composer avec ce texte. Or moi, je n'en veux pas du tout !
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le rapporteur, à l'instar de ma collègue Lubin, je vous prie de ne pas caricaturer nos propos et de ne pas nous faire dire ce que nous n'avons pas dit. Je ne sollicite pas d'excuses, mais je vous demande de bien vouloir cesser de prétendre que nous n'aimerions pas le travail. Cela suffit !
Oui, monsieur le rapporteur, il y a des gens qui ont peur du travail. C'est un problème de santé reconnu. Ils ont la boule au ventre, ils sont stressés. J'en ai connu qui perdaient tous leurs moyens lors d'épreuves professionnelles. Je suis d'ailleurs certain que vous en connaissez aussi. Oui, cette peur existe, c'est un problème de santé et c'est sous cet angle qu'il faut l'appréhender. Merci donc de ne pas nous l'attribuer politiquement !
Comme vous, je siège souvent dans cet hémicycle. Et je dois vous dire que les conditions dans lesquelles nous légiférons me posent problème.
Voilà trois semaines, nous avons proposé de taxer – à un taux dérisoire ! – les 1 700 ultrariches. Vous avez refusé. Et peu après, ce texte visant à introduire des dérogations au code du travail arrivait en commission ! (Mme Raymonde Poncet Monge renchérit.)
Les choses sont simples : il y a un code du travail, mais il n'y a pas de code du capital. Ou, plus exactement, le seul « code du capital » qui existe à ma connaissance – c'est un livre très intéressant, dont je vous recommande vivement la lecture – ne fait pas partie, malheureusement, de notre corpus législatif. (Sourires sur les travées des groupes CRCE-K et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. Monsieur le rapporteur, je ne peux pas vous laisser dire que ceux qui chôment le 1er mai n'aiment pas leur travail.
Mme Annick Billon. Ce n'est pas ce qui a été dit !
Mme Silvana Silvani. C'est bien ce qui a été indiqué en creux. Et c'est faux !
J'ai longtemps été salariée – je ne me ferai pas offense en précisant le nombre d'années… – et j'ai beaucoup aimé mon travail. Et le 1er mai, j'étais avec mes collègues dans la rue et dans les réunions.
Par ailleurs, vous avez renvoyé tout à l'heure le montant de la majoration à la négociation collective. J'ai un peu de mal à vous suivre : quand les syndicats de travailleurs s'opposent unanimement à vos propositions, vous ne voulez pas discuter, mais quand il s'agit de fixer le montant d'une majoration, là, vous proclamez votre amour pour la fameuse négociation collective…
Je vois le contrat de volontariat qui est proposé dans l'amendement de Mme Billon comme une tentative d'apaisement. Mais, pour ma part, je ne l'accepte pas. D'ailleurs, cela ne change rien au lien de subordination. Pourquoi créer un contrat de volontariat quand il existe déjà quelque chose qui s'appelle le contrat de travail et qui a justement pour objet de fixer les conditions de travail ?
M. Pascal Savoldelli. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.
Mme Ghislaine Senée. Mes collègues ont raison : voter l'amendement de Mme Billon, c'est entériner le fait que le texte va passer – quelque chose que nous avions peut-être intériorisé... Finalement, nous nous abstiendrons.
Moi aussi, j'ai un peu de mal à vous suivre : vous n'avez de cesse de proclamer, la main sur le cœur, à longueur de colloques, votre volonté de simplifier les choses et, là, vous les complexifiez avec ce nouveau contrat de volontariat.
Les commerçants, artisans, boulangers et fleuristes qui veulent ouvrir leur boutique le 1er mai ne vous ont pas attendus : voilà quarante ans qu'ils le font tout seuls, comme des grands ! Et, comme eux, les syndicalistes sont très attachés au 1er mai et à ce petit brin de muguet, emblème de tant de luttes sociales, que l'on achète chez son fleuriste ou au coin de la rue…
Encore une fois, je déplore la complexité supplémentaire que vous créez avec ce nouveau contrat.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Notre collègue Pascal Savoldelli regrettait la temporalité du texte.
Je rappelle que le groupe Union Centriste a été l'un des seuls, au moment de la crise de la covid, à proposer de taxer les superprofits et qu'il n'a pas été suivi. (Mmes Raymonde Poncet Monge et Cathy Apourceau-Poly s'exclament.)
Le fait est que le 1er mai tombe tous les ans à la même date et c'est à son approche que des fleuristes et des boulangers, notamment par l'intermédiaire de leurs syndicats professionnels, nous ont sollicités.
Sur la question du volontariat en particulier, notre amendement vise à préciser le texte. En général, cela permet de limiter les interprétations.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 5 n'a plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
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