Mme Nadège Havet. Il s'agit d'un amendement identique aux précédents. Comme l'ont rappelé le président Longeot et d'autres après lui, nous, parlementaires, ne prêtons pas serment, alors que nous sommes des élus : cette disposition est donc disproportionnée.

Mme la présidente. L'amendement n° 59 rectifié, présenté par MM. Roiron, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kanner, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Uzenat, Cozic, Redon-Sarrazy, Lurel, Gillé, M. Weber et Marie, Mme Conway-Mouret, M. Chantrel, Mmes Canalès, Bonnefoy, Brossel, Artigalas, Bélim et Blatrix Contat, M. Darras, Mme Féret, MM. Jacquin et Mérillou, Mmes Monier et S. Robert, MM. Ros, Temal, Tissot, Vayssouze-Faure et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 11, au début

Ajouter la référence :

« Art. L. 1111-13. –

III. – Alinéa 27

1° Remplacer les mots :

Après le mot : « prévue »,

par le mot :

À

2° Après les mots :

et L. 7222-8

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

, les mots : « à l'article L. 1111-1-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 1111-13 et L. 1111-14 ».

La parole est à M. Christophe Chaillou.

M. Christophe Chaillou. Comme cela vient d'être souligné, avec cette mesure, qui s'apparente à une sorte de contrat d'engagement républicain pour les élus locaux, on envoie un très mauvais signal, car on laisse entendre que ces élus pourraient ne pas respecter les valeurs et lois de la République.

D'autres l'ont dit avant moi, ni les parlementaires que nous sommes, ni les ministres, ni même le Président de la République ne sont soumis à une telle obligation. Les élus locaux seraient-ils donc moins attachés aux valeurs de la République que les parlementaires, les membres du gouvernement ou le chef de l'État pour qu'on les contraigne à s'engager publiquement à respecter ces valeurs ? Ce n'est pas en alimentant une sorte de suspicion vis-à-vis des élus locaux que l'on encouragera l'engagement des citoyens.

Permettez-moi d'ajouter que ce dispositif est tout à fait inutile dans la mesure où le maire est officier de police judiciaire et où il est également, au titre de son pouvoir de police administrative générale, le garant de l'ordre public local, et, donc, des lois de la République.

L'Assemblée nationale avait supprimé cette disposition en première lecture. Je vous invite à en faire de même en adoptant cet amendement. Notre objectif est bien évidemment de favoriser l'adoption définitive de ce texte dans les meilleurs délais : ne perdons pas notre temps à réintroduire des mesures qui sont des irritants et qui risqueraient de la retarder.

Mme la présidente. L'amendement n° 107 rectifié quinquies, présenté par Mmes Noël et Muller-Bronn, MM. H. Leroy, Sol, J.B. Blanc, Pellevat et Milon, Mmes P. Martin, Joseph, Bonfanti-Dossat et Bellurot, M. Panunzi, Mme Lopez, MM. J.P. Vogel, Khalifé, Sido, Rojouan, Houpert, Anglars et Genet et Mme Chain-Larché, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 11, au début

Insérer la référence :

« Art. L. 1111-13. –

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Je rejoins les propos de mes collègues en réclamant moi aussi la suppression de l'alinéa 10, qui alourdit considérablement la charte des élus locaux. Nous sommes là pour simplifier la vie de ces élus et non pour la complexifier.

Mme la présidente. L'amendement n° 251, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Remplacer les mots :

, de laïcité et de dignité de la personne humaine

par les mots :

et de laïcité

II. – Alinéa 12, seconde phrase

Supprimer les mots :

sans préjudice de l'article L. 1111-6-1,

III. – Alinéa 27

1° Remplacer le mot :

prévue

par le mot :

local

2° À la fin, remplacer les mots :

aux articles L. 1111-13 et L. 1111-14, et prend publiquement l'engagement de respecter les valeurs de la République mentionnées par cette charte

par les mots :

mentionnée à l'article L. 1111-12

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Cet amendement de la commission des lois tient compte de ce que l'on vient d'entendre : en effet, nous ne sommes pas là pour heurter les élus locaux – j'ai moi-même été maire et sais ce qu'est l'engagement au quotidien.

Notre amendement vise ainsi à supprimer la notion de « dignité de la personne humaine ». J'invite, malgré tout, toutes celles et tous ceux qui n'ont jamais lu la charte de l'élu local, qui existe depuis 2015, à le faire, car ce terme de « dignité » y figure d'ores et déjà. Le mot ne sort donc pas de nulle part… Pour autant, je peux comprendre que l'ajout de cette mention puisse gêner et c'est pourquoi je propose de la faire disparaître.

De même, certaines autres dispositions inscrites à l'article 5 bis posent problème : je pense en particulier à l'obligation d'un engagement public, qui, il est vrai, peut être gênante telle qu'elle est conçue actuellement. Je propose donc également sa suppression.

Je précise que l'article 5 bis intègre désormais l'essentiel des mesures précédemment inscrites à l'article 23, lesquelles reprenaient une recommandation de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales. Ce dispositif, je le rappelle, ne sort donc pas de nulle part, et n'est pas destiné à faire plaisir à tel ou tel.

Le présent amendement a donc pour objet de modifier l'article 5 bis en ce sens.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les autres amendements en discussion commune ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Je souhaite revenir sur des propos qui, je dois le dire, m'ont mis quelque peu en colère : la notion de « serment » n'a jamais existé. Jamais ! Ni dans le texte ni dans les propos ou la pensée des trois rapporteurs ici présents ou même de Mme la ministre, qui était rapporteure de la proposition de loi en première lecture. Je ne supporte pas d'entendre certains ou certaines chercher à faire le buzz pour exister sur un sujet comme celui-ci.

M. Rachid Temal. De qui parlez-vous ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Je le répète, nous n'avons jamais écrit ou pensé que les élus locaux devraient prêter serment. Celles et ceux qui ont écrit une telle chose ont perturbé les élus, ce que je considère comme irresponsable et inadmissible. Je saurai dire à celui ou celle qui est à l'origine de tout cela ce que j'en pense… Nous abordons ces questions dans un climat qui n'est pas suffisamment serein pour que l'on tolère ces perturbations.

Certes, on ne vit pas exactement dans les quartiers ou dans les villes très denses comme à la campagne, mais nous sommes tous confrontés aux mêmes choses. Soyez assurés, chers collègues, que, à terme, nous vivrons tous la même chose. Il faut donc affirmer un certain nombre de principes et, notamment, que le maire est un modèle, un symbole de la République.

La charte de l'élu local est d'ores et déjà lue lors de la première réunion du conseil municipal suivant les élections, et ce dans toutes les villes : c'est la réalité, ce n'est pas nouveau, ce n'est pas d'hier ! Il me semblerait naturel que l'on y fasse figurer un certain nombre de valeurs républicaines, car c'est le rôle de tous les maires, qu'ils soient de droite, de gauche ou du centre, que de les défendre.

Franchement, nous vivons mal le buzz qui a été fait autour de cette disposition, parce que c'est un pur mensonge qui a perturbé les élus – et je peux les comprendre ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Pour les raisons que je viens d'évoquer, la commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 102, 134 rectifié bis, 141 rectifié, 59 rectifié et 107 rectifié quinquies.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Françoise Gatel, ministre. Le Gouvernement s'en remet entièrement à la sagesse de votre assemblée – en laquelle il a toute confiance à ce sujet (Sourires.) – sur l'ensemble de ces amendements, qui posent en effet un certain nombre de questions.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Mme la rapporteure vient de le dire, nos échanges ne doivent pas nous conduire, pour des raisons d'ailleurs diverses, à des excès.

Nous avons déjà eu un débat similaire, hier, lors de l'examen de la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir la prééminence des lois de la République : il s'agit de ne pas mélanger ce qui est du ressort du droit et ce qui est du ressort de la politique. Nous avons aussi pu observer que, à l'Assemblée nationale, en première lecture, certains députés ont essayé d'en rajouter.

Madame la rapporteure, la création même de la charte a fait l'objet de discussions. À l'époque, nous étions un certain nombre à nous interroger sur la pertinence d'un tel document qui, dans son contenu actuel, n'a d'autre objet que de réaffirmer des banalités, si j'ose dire. Pis, on laisse sous-entendre qu'en l'absence de charte les élus n'exerceraient pas leurs fonctions avec dignité et probité.

Une fois élu, on devrait donc s'engager à respecter l'ensemble de ces valeurs. Or on aura beau écrire toutes les chartes que l'on veut, il n'en reste pas moins que, si un élu ne respecte pas ces valeurs, c'est la loi qui permettra de le rattraper – c'est d'ailleurs bien là l'essentiel.

Au-delà des polémiques, qui traversent actuellement l'ensemble des familles politiques, il y a eu des malentendus ou, en tout cas, une vague d'émotion relayée par certaines associations d'élus et par certains élus eux-mêmes – j'ai pu le constater vendredi dernier lors de la réunion de l'association des maires de mon département. Il nous faut donc aboutir à une rédaction qui permette que les choses s'apaisent. Aussi, nous maintenons, sans grand espoir, notre amendement et, le cas échéant, nous nous replierons sur l'amendement de la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour explication de vote.

M. Daniel Fargeot. Je tiens à remercier Mme la rapporteure pour les précisions tant attendues qu'elle vient d'apporter. En effet, la rédaction proposée était loin d'être claire… Je retire donc mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 134 rectifié bis est retiré.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Mme la rapporteure a eu bien raison d'apporter ces éclaircissements. En effet, même si nous sommes des élus de terrain, nous avons tous été gravement pris à partie, voire déstabilisés à ce sujet dans nos territoires respectifs – ce fut le cas pour mon collègue Olivier Bitz et moi-même dans l'Orne. On nous a demandé de réagir au motif notamment qu'il s'agissait d'une mesure introduite par la commission des lois. Il est vrai que, par principe, on a tendance à faire confiance aux rapporteurs, au moins jusqu'à l'examen du texte en séance, et que l'on n'a pas toujours le nez sur le dérouleur des amendements…

Les prises à partie ont été violentes, et c'est pourquoi j'apporte tout mon soutien à Mme la rapporteure : ses explications vont permettre de ramener le calme au sein des associations d'élus qui nous ont interrogés les uns et les autres d'une façon plus ou moins délicate, ce qui explique peut-être les réactions en chaîne.

Il est fondamental que la commission des lois et le Sénat soient parfaitement explicites sur les tenants et les aboutissants de ce dispositif, ainsi que sur ceux qui vont suivre, de telle sorte qu'il n'y ait aucun malentendu au cours de nos débats, et ce d'autant plus que le congrès de l'AMF se tiendra prochainement. Il est inutile de jeter de l'huile sur le feu, de créer de l'inquiétude et de déstabiliser un terrain qui l'est déjà suffisamment compte tenu du contexte national, voire international.

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.

M. Cédric Vial. Il n'est jamais bon de toujours vouloir en rajouter. Je salue l'intention – que je partage – de Mme la rapporteure, ainsi que les travaux de la commission, mais nous savons tous où nous mènent les bonnes intentions : rarement là où nous aurions envie de vivre !

Cette charte de l'élu local rappelle un certain nombre de valeurs. Mais, très honnêtement, si un amendement de suppression de celle-ci nous avait été soumis, je l'aurais voté. En effet, les élus locaux que nous sommes ou que nous avons été connaissent très bien le cadre dans lequel ils s'inscrivent : c'est celui de la loi et de la Constitution.

Le principe de laïcité figure ainsi à l'article premier de notre Constitution. Tous les élus, dès lors qu'ils sont des élus de la République, doivent donc s'y conformer : alors, pourquoi vouloir l'inscrire dans la charte ? Sans compter que, aujourd'hui, il est question de la laïcité, mais que, demain, il s'agira d'ajouter une autre valeur d'actualité. Nous ouvririons une brèche en permettant à la représentation nationale de définir une sorte de charte éthique, comportementale, qui s'appliquerait maladroitement à nos élus, lesquels, en tout cas, le prennent mal.

Comme cela a été dit, la charte de l'élu local a été votée en 2015 – je ne siégeais pas dans cette assemblée à l'époque et je ne sais donc pas exactement dans quel contexte la mesure a été adoptée. Puis le dispositif s'est appliqué pour la première fois en 2020, après le renouvellement général des conseillers municipaux. Certains d'entre nous étaient maires à l'époque : chacun se souvient de la réaction des conseils municipaux quand il a fallu lire cette charte.

Aujourd'hui, je regrette qu'une telle disposition ait été votée, car je ne suis pas sûr qu'elle apporte davantage de garanties que la loi. Gardons-nous, mes chers collègues, de créer toujours plus de cadres et d'ouvrir de nouvelles brèches avec des mesures de cette nature. À titre personnel, je voterai les amendements identiques nos 102 et 141 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Arnaud. Pour un certain nombre d'entre nous ici, nous sommes ou nous avons été maires. En 2020, j'étais maire de Tallard dans les Hautes-Alpes : j'ai le souvenir que la lecture de cette charte n'avait suscité aucune des effusions de violence que, semble-t-il, l'on a observées dans d'autres collectivités locales. Peut-être étais-je maire d'une commune exceptionnelle – j'en remercie tous mes collègues du conseil municipal…

La vérité, c'est que rappeler de grands principes à des élus qui, pour certains d'entre eux, s'engagent pour la première fois au service de la collectivité ne me paraît pas être un drame. D'ailleurs, il n'y a pas eu de débordements ou de difficultés majeures. Finalement, s'il n'y avait pas eu cette espèce de buzz, lié à des inquiétudes probablement légitimes, parce que le texte devait être amélioré – la commission propose désormais des adaptations qui devraient rassurer chacune et chacun d'entre nous –, on n'aurait probablement pas rencontré ces difficultés.

La vérité, c'est aussi que ce buzz s'explique par la nature même du texte défendu par Françoise Gatel et un grand nombre d'entre nous : la présente proposition de loi comporte des avancées, qui ne sont ni exceptionnelles ni révolutionnaires, mais qui ont le mérite d'exister. Dans le climat actuel, certains cherchent, ici ou là, y compris à l'extérieur de notre assemblée, à ajouter de la tension à la tension. C'est indiscutablement la tendance aujourd'hui.

J'estime que l'amendement de la commission des lois permet de faire baisser la pression d'un cran. Dans la mesure où il est devenu nécessaire de tourner la page de l'incident qui a pu opposer certains d'entre nous et certaines associations représentatives d'élus, il nous faut adopter ces adaptations bienvenues. Cela nous permettra de passer à autre chose, de laisser derrière nous une polémique qui n'avait certainement pas lieu d'être, mais qui nécessite néanmoins d'être traitée comme elle l'est aujourd'hui, c'est-à-dire avec sérénité, et d'aborder des sujets plus sérieux et conformes aux attentes des élus locaux. (Mme Anne-Sophie Patru applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour explication de vote.

Mme Sylviane Noël. Je souscris pleinement aux propos de Mme la rapporteure, que je remercie pour son écoute. Je retire par conséquent mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 107 rectifié quinquies est retiré.

La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. Même après avoir écouté Mme la rapporteure, j'avoue ne pas être très rassuré à la lecture de l'alinéa 27, qui prévoit que l'élu doit prendre « publiquement l'engagement de respecter les valeurs de la République mentionnées par cette charte ».

Mme Béatrice Gosselin. On l'enlève du texte !

M. Michel Canévet. Il n'est certes pas question de serment, mais quelle interprétation feront de cette phrase les services de l'État et les différents acteurs présents sur le terrain ? Il faut se méfier ! Et même si les intentions sont louables, il n'empêche qu'il faut tenir compte de ce qui est écrit. C'est pourquoi j'en appelle à la prudence de chacun.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Nous avions déjà déposé en première lecture un amendement de suppression de ces dispositions, qui n'avaient alors pas encore été intégrées à l'article 5 bis. Pour ma part, je « plussoie » les propos de mes collègues Jean-François Longeot, Michel Canévet et Cédric Vial, que je remercie de leurs interventions très mesurées sur le sujet.

Si l'on avait vraiment voulu éviter toute polémique, il aurait fallu ne pas reparler spécifiquement de cette charte de l'élu local et ne pas souhaiter la modifier. La tension est née de cela et non des débats autour de l'intérêt qu'il y aurait à y inscrire ces principes.

Je me pose deux ou trois questions toutes simples : quels bénéfices tirera-t-on de la modification de cette charte de l'élu local ? Que nous apporte-t-elle de plus ? Son existence, sa lecture, non plus publique, mais à l'occasion du premier conseil municipal, sont-elles de nature à promouvoir les valeurs de la République et à créer de la sérénité ? Si quelqu'un me fournit des preuves de cela, des motifs de reconsidérer ma position, je suis prêt à la revoir. Mais, en l'état actuel des choses, je voterai contre l'article 5 bis.

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons déjà eu l'occasion de débattre de ce sujet en première lecture lors de l'examen de l'article 23. J'ai bien entendu les propos de Mme la rapporteure, mais, dans cette assemblée qui représente les collectivités territoriales, il ne faut pas infantiliser les élus locaux ni sous-estimer leurs capacités d'analyse. J'avoue que cette façon de faire m'interpelle quelque peu. Aujourd'hui, on leur dit grosso modo : « Circulez, vous n'avez pas bien compris, on va vous expliquer la vie… »

À mon sens, un certain nombre d'analyses et de perceptions étaient justifiées, notamment après l'examen de ce texte en première lecture au Sénat. Cette impression est d'ailleurs confirmée par l'ajout de plusieurs dispositions à l'article 5 bis.

En tant qu'assemblée représentant les collectivités territoriales, le Sénat a le devoir d'entendre ce que les élus locaux lui disent. Dans le Morbihan, comme dans beaucoup d'autres départements, je confirme que ceux-ci ont été nombreux à réagir. Il faut désormais faire preuve de sagesse et de modération, et c'est la raison pour laquelle nous soutiendrons évidemment les amendements qui vont dans ce sens, au premier chef desquels l'amendement n° 59 rectifié.

Je souhaite que nous adoptions une posture empreinte de modestie : reconnaissons que la République doit beaucoup plus à ses élus locaux que l'inverse. Il faut être clair sur ce point : ces derniers mois, ces dernières années, la République a tenu parce que les élus locaux se sont dévoués corps et âme, de la crise sanitaire jusqu'aux événements politiques que nous vivons aujourd'hui.

D'une certaine manière, s'il y avait une charte à créer aujourd'hui, c'est celle par laquelle la République reconnaîtrait l'engagement des élus et les remercierait infiniment d'être présents pour elle et de l'incarner au quotidien. En tout cas, c'est la vision que les membres de mon groupe défendent à travers leur amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.

M. Rachid Temal. J'ai compris des propos de Mme la rapporteure que son idée était d'améliorer cette charte de l'élu local. Or on voit bien que, manifestement, une grande association d'élus – son nom n'a pas été cité –, ou, en tout cas, son président, a souhaité ajouter de la tension. Il y a donc deux approches qui s'opposent dans cette affaire.

Pour ma part, je considère que ce texte est déjà un grand pas pour les élus locaux, un pas attendu depuis de nombreuses années. Il n'instaure certes pas vraiment un statut, mais il constitue une avancée importante, même s'il doit, nous le savons tous, encore être amélioré par la suite.

Je propose que l'on aborde l'article 5 bis sous cet angle : puisque la charte existe, autant ne pas y toucher, ne rien y ajouter, et éviter, si j'ose dire, de remettre une pièce dans la machine. Les élus locaux font leur travail et cela fonctionne bien ainsi. À ce stade – et cela n'enlève rien à la qualité du travail des rapporteurs –, je suggère donc que nous laissions la charte de l'élu local en l'état, ce qui permettra d'apaiser rapidement la situation, notamment les relations avec une grande association d'élus, en l'occurrence l'AMF.

Au vu du contexte actuel et des retours en provenance du terrain, et même si j'entends parfaitement l'argumentaire de Mme la rapporteure, je suis favorable à ce que l'on ne fasse rien de plus et que l'on maintienne la charte telle qu'elle est. Après tout, cette dernière est aujourd'hui acceptée des élus locaux ; elle mentionne bien que ceux-ci sont engagés et aucune obligation ne leur est effectivement faite de prêter serment. Tout va donc pour le mieux, et il me semble plus simple que nous agissions ainsi. Le moment venu, le législateur que nous sommes aura à améliorer ce texte et nous pourrons, dans un cadre plus apaisé, continuer d'avancer.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Permettez-moi tout d'abord de remercier ceux de nos collègues qui m'ont écoutée et qui ont bien compris que nous ne sommes pas là pour embêter les élus. Je le rappelle, car il me semble que l'un des orateurs ne m'a pas entendue sur ce point, la commission entend supprimer de la charte des notions qui peuvent heurter.

Cette charte de l'élu local, on l'a dit, a dix ans. À cette époque, je ne siégeais pas dans ce bel hémicycle. Or, en toute objectivité, la France a changé en dix ans : je suis désolée de le dire, mais la France d'alors n'est pas la France d'aujourd'hui. Les élus doivent actuellement faire face à des difficultés, à des remises en cause qui touchent, entre autres, à la laïcité, et à bien d'autres choses.

Cette charte, si on la conforte en y ajoutant des principes très clairs, sera précieuse : elle permettra d'aider les élus locaux. Il ne s'agit pas de monter les gens les uns contre les autres, mais d'aider les élus en créant un code commun de fonctionnement, y compris en matière de laïcité.

M. Guy Benarroche. Le code commun, c'est la loi !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Il est extrêmement important de préserver un certain nombre de valeurs dans nos territoires, afin de protéger tous nos élus.

Merci à celles et à ceux qui ont entendu ce que je défends aujourd'hui ! (Mme Sophie Primas applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 102 et 141 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 59 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 251.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5 bis, modifié.

(L'article 5 bis est adopté.)

Article 5 bis
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article 6 bis A

Article 6

(Suppression maintenue)

Mme la présidente. L'amendement n° 77, présenté par M. Buval et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L'article L. 7125-22 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'assemblée de Guyane peut voter, sur les ressources ordinaires, des indemnités à son président pour frais de représentation. Une délibération de l'assemblée de Guyane détermine les conditions de versement et les modalités de contrôle de l'utilisation de cette indemnité. » ;

2° L'article L. 7227-23 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'assemblée de Martinique peut voter, sur les ressources ordinaires, des indemnités à son président ainsi qu'au président du conseil exécutif. Une délibération de l'assemblée de Martinique détermine les conditions de versement et les modalités de contrôle de l'utilisation de cette indemnité. »

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement de notre collègue Frédéric Buval tend à rétablir une disposition qui a déjà été adoptée en première lecture et qui permettait au président de l'assemblée de Guyane, au président de l'assemblée de Martinique et au président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Martinique de bénéficier du remboursement de leurs frais de représentation dans l'exercice de leur mandat.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Cet amendement vise à réintroduire une mesure pour les seuls présidents des assemblées de Guyane et de Martinique. J'ai certes beaucoup d'amitié et d'affection pour eux, mais nous ne sommes évidemment pas favorables à un amendement dont l'adoption entraînerait une rupture d'égalité entre les différents présidents de région et de département. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Françoise Gatel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 77.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 6 demeure supprimé.

Article 6
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Article 6 bis

Article 6 bis A

(Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 76 rectifié, présenté par M. Buval et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Après l'article L. 333-10 du code général de la fonction publique, il est inséré un article L. 333-10 –… ainsi rédigé :

« Art. L. 333-10 –.... – Sans préjudice de l'article L. 333-1 et par dérogation à l'article L. 415-1, le président de l'assemblée de Corse, le président de l'assemblée de Martinique et le président de l'assemblée de Mayotte peuvent librement recruter un ou plusieurs collaborateurs de cabinet, dans la limite de l'effectif maximal applicable aux collaborateurs de cabinet, respectivement, du président du conseil exécutif de la collectivité de Corse, du président du conseil exécutif de la collectivité de Martinique, et du président du conseil exécutif de la collectivité de Mayotte et mettre librement fin à leurs fonctions. Ces agents ne rendent compte qu'au président de l'assemblée, lequel décide des conditions et des modalités d'exécution du service accompli auprès de lui.

« Les articles L. 333-2 à L. 333-9 leur sont applicables. »

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement de notre collègue Frédéric Buval vise à rétablir l'article 6 bis A dans sa version issue des travaux de l'Assemblée nationale : il s'agit d'autoriser les présidents des assemblées de Corse, de Martinique et de Mayotte à disposer de collaborateurs dans les mêmes conditions que les présidents des exécutifs de ces collectivités, ce qui ne leur est pas permis aujourd'hui.