La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission s’en demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Pour les mêmes raisons que celles que j’ai invoquées au sujet de l’amendement n° 90, je suis défavorable à cet amendement. La surface de 400 mètres carrés correspond au seuil retenu habituellement.
M. Frédéric Buval, rapporteur. Même avis !
M. le président. L’amendement n° 94, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
transmettent,
insérer les mots :
au plus tard le 30 juin de
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Buval. Même avis !
M. le président. L’amendement n° 95, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ces données sont exprimées en valeur absolue et en pourcentage du tarif ayant constitué le socle de la négociation commerciale, au sens de l’article L. 441-1 du même code, et ventilées par fournisseur et par ligne de produits, selon les catégories mentionnées aux 1° à 3° du III de l’article L. 441-3.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il s’agit d’un amendement important, mes chers collègues, puisqu’il vise à ce que l’on exprime en valeur absolue et en pourcentage du tarif ayant constitué le socle de la négociation commerciale les données sur les marges arrière et autres avantages obtenus que les distributeurs doivent transmettre. Le dispositif prévoit par ailleurs une ventilation desdites données par fournisseur et par ligne de produits.
Nous demandons davantage de transparence, car, aujourd’hui, tout est opaque. Je sais que ce degré de détail – « par ligne de produits » – risque de poser problème, notamment dans la suite des débats, mais c’est selon moi le meilleur indicateur pour savoir ce qui se passe réellement dans les rayons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission est a priori favorable à l’amendement de Victorin Lurel. Néanmoins, nous demandons l’avis du Gouvernement, afin que celui-ci clarifie ce point.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 95, parce qu’il nous semble qu’un tel dispositif relève davantage du pouvoir réglementaire que de la loi et que ces précisions devraient plutôt figurer dans le décret, mentionné à cet article, qui sera pris en Conseil d’État. Le Gouvernement sera bien entendu attentif à ce que le degré de détail que vous réclamez, monsieur Lurel, soit respecté.
M. le président. Quel est désormais l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Nous abordons ici la question des changements structurels qui seraient nécessaires pour que le dispositif de transmission des informations soit plus clair, plus transparent et, je l’espère, plus efficace. Il est question ici des indicateurs, des informations relatives aux marges arrière, un sujet que nous traiterons plus en profondeur dans quelques instants. Il s’agit de mettre fin à l’opacité qui préside au système actuel.
Voter contre le présent amendement et contre ceux que je défendrai ultérieurement sur les marges arrière aura pour conséquence que le droit de la concurrence dans les outre-mer restera inchangé. Aussi, mes chers collègues, je vous invite fortement à voter mon amendement, d’autant plus que les informations dont il est question resteront secrètes et que leur transmission donnera simplement à l’État davantage de moyens de prendre les bonnes décisions.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Mes chers collègues, je vous invite également à voter cet amendement. Le chapitre dont nous discutons a trait à la transparence et à la vie chère : si nous voulons savoir précisément comment agir et être réellement efficaces, il va falloir faire du cas par cas, car on voit bien que chaque territoire est différent. Pour avancer rapidement sur ce sujet, il faut savoir où se font les marges arrière, qui, nous le savons, sont très élevées. Nous avons besoin de visibilité sur ces données.
Au sein de la délégation sénatoriale aux outre-mer, la question des marges arrière a été souvent abordée. Pour agir véritablement et ne plus naviguer dans le brouillard, il faudra nécessairement faire la lumière sur ce dossier.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 95.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 96, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les fournisseurs également implantés dans les collectivités mentionnées au premier alinéa, les informations transmises permettent de distinguer, pour chacun d’eux, les avantages commerciaux consentis aux distributeurs de ces collectivités, de ceux consentis hors de ces territoires.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il s’agit là encore de mettre en place un indicateur, mais cette fois-ci pour faire ce que l’on appelle, en anglais, du benchmarking, et, plus précisément, des comparaisons par territoire et non pas seulement, comme certains le veulent, entre les commerces de détail à prédominance alimentaire – on n’en tirerait rien !
Que se passe-t-il en matière de marges arrière en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et ailleurs ? Il faut pouvoir comparer les données en outre-mer avec celles de l’Hexagone. Ainsi, on sera mieux informé, et on pourra donc mieux décider.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Je crois comprendre l’objectif que vous visez, monsieur Lurel : au fond, vous voulez savoir s’il y a, oui ou non, une discrimination au niveau des marges arrière de la part des fournisseurs entre territoires d’outre-mer et Hexagone.
Mais le dispositif, tel que vous le proposez, n’est pas cohérent avec l’économie générale de l’article 7 : l’extension du périmètre de la mesure va créer une obligation impossible à respecter pour certains distributeurs et pourrait décourager des sociétés implantées dans l’Hexagone de continuer à exercer elles-mêmes une activité de distribution en outre-mer. Une telle mesure serait donc contre-productive.
En outre, le but que vous cherchez à atteindre me semble correspondre à celui que s’est fixé le Gouvernement à l’article 8.
Je suis par conséquent défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 96.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 110, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elles doivent en outre déclarer l’identité et le siège social des centrales d’achat ou des sociétés importatrices avec lesquelles elles sont liées, directement ou indirectement, ainsi que les conditions d’achat et de vente intragroupe. Ces informations sont transmises à l’Autorité de la concurrence.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet d’introduire une exigence simple, mais essentielle : la transparence sur les liens entre les distributeurs et leurs centrales d’achat ou sociétés importatrices. Il tend à combler un angle mort que nous connaissons bien, celui des marges cachées dans les groupes intégrés.
Les lois Égalim l’ont illustré : on a imposé la transparence entre producteurs et distributeurs et encadré les négociations commerciales, mais les grands groupes ont trouvé la parade. Ils ont simplement déplacé la marge en la réalisant en amont, dans les centrales d’achat ou des filiales d’importation, souvent situées hors du territoire, parfois même à l’étranger. Résultat : les prix en rayon continuent d’augmenter, tandis que les profits se font ailleurs, à l’abri du contrôle public.
Dans les outre-mer, une grande partie des marges sont réalisées en amont de la chaîne dans les transactions intragroupe. Ce que nous proposons avec cet amendement, c’est de mettre un terme à cette opacité organisée, en obligeant les enseignes à déclarer l’identité et le siège social de leurs centrales d’achat, et à détailler les conditions d’achat et de vente intragroupe. Cette simple exigence permettra à la DGCCRF et à l’Autorité de la concurrence de reconstituer toute la chaîne de valeur, depuis l’importation jusqu’aux rayons. Car, tant qu’on ignore où la marge est captée, on ne combat pas la vie chère ; au contraire, on la subventionne !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la transmission à la DGCCRF et à l’Autorité de la concurrence d’informations sur les conditions d’achat et de vente intragroupe, de manière à limiter les pratiques de transfert de bénéfices via des filiales importatrices.
Ce dispositif radical, qui garantit davantage de transparence, peut sembler séduisant, mais il va sans doute trop loin et pourrait se heurter au secret des affaires. C’est pourquoi nous y sommes défavorables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. À y regarder de plus près, cet amendement est satisfait. Il me semble même que le dispositif proposé est moins-disant que celui de l’article 7.
Les auteurs de l’amendement laissent entendre que les mesures à prendre pourraient se limiter aux seuls échanges entre les sociétés du groupe de distribution, alors que l’article 7 vise justement à cibler les échanges avec les vrais fournisseurs, y compris en cas de recours à une centrale d’achat.
Aussi, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 110.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 123, présenté par MM. Mellouli et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Première phrase
Remplacer le montant :
375 000 €
par les mots :
1 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos
2° Dernière phrase
Remplacer le montant :
750 000 €
par les mots :
4 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos
La parole est à M. Akli Mellouli.
M. Akli Mellouli. En complément de mon amendement n° 122, qui a été adopté tout à l’heure, le présent amendement tend à fixer à 1 % du chiffre d’affaires annuel le montant de la sanction encourue par les distributeurs qui refusent de transmettre à la DGCCRF les données relatives à leurs marges arrière, et à 4 % du chiffre d’affaires annuel le montant de la sanction encourue en cas de réitération du manquement. Comme mes collègues l’ont souligné, de telles sanctions visent à décourager ceux qui voudraient frauder sur les marges arrière.
En votant l’amendement n° 122 – ce dont je vous remercie et vous félicite –, mes chers collègues, vous avez montré que la République était ferme avec tout le monde, du moins avec tous ceux qui tentent de frauder et qui ne respectent pas les règles du jeu et les lois ; vous avez montré que la République n’était en tout cas pas faible avec les forts. Je vous invite à le prouver de nouveau en votant le présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement, qui est similaire à un amendement déjà rejeté en commission, a pour objet de porter à 1 % ou à 4 % du chiffre d’affaires, selon les cas, la sanction en cas de non-transmission par les distributeurs des informations sur les marges arrière prévue à l’article 7 du présent projet de loi.
En vue de garantir l’effectivité du dispositif et de faire en sorte que les grandes enseignes de la distribution transmettent bien les données attendues, l’article 7 prévoit actuellement des amendes de 75 000 euros pour une personne physique et de 375 000 euros pour une personne morale, ces montants étant multipliés par deux en cas de récidive.
Il nous semble qu’il convient d’en rester à un niveau de sanction proportionné à la faute commise. Autant le non-dépôt des comptes, obligation résultant du droit national et du droit de l’Union européenne, doit pouvoir faire l’objet de sanctions en pourcentage du chiffre d’affaires, autant la sanction en cas de non-transmission d’informations sur les marges arrière doit rester mesurée.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Vous avez raison, monsieur le sénateur, il faut être ferme avec tout le monde, mais il faut aussi être juste avec chacun. Le montant de l’amende que vous proposez est très élevé, à tel point que le dispositif contrevient à un certain nombre de principes juridiques, dont le principe constitutionnel de proportionnalité.
L’amende de 375 000 euros prévue à l’article 7 correspond à ce qui se pratique actuellement ; son montant est cohérent avec les dispositions figurant dans le code de commerce, d’autant que l’on parle ici d’obligations déclaratives…
J’ajoute qu’en doublant le montant de l’amende en cas de réitération, vous n’y allez pas avec le dos de la cuillère, si je puis me permettre : d’une certaine manière, vous quadruplez la sanction… Avec une telle mesure, on est loin de respecter la règle de proportionnalité en vigueur et l’échelle des peines, sans compter les conséquences qu’une telle sanction pourrait avoir pour la viabilité d’une entreprise.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.
M. Akli Mellouli. Pardonnez-moi, madame la ministre, mais je crois qu’il y a une petite confusion. Si j’ai évoqué le montant de 375 000 euros, c’est parce qu’il figure à l’article 6, article modifié à la suite de l’adoption de mon amendement n° 122… Avec l’amendement n° 123, je propose cette fois-ci de modifier l’article 7, qui prévoit une amende maximale de 750 000 euros : il n’est donc pas question de quadrupler la sanction, puisque notre ambition est de remplacer les montants en euros par des pourcentages…
J’ajoute, pardonnez-moi de vous le dire ainsi, qu’en termes d’équité il est préférable de fixer des sanctions en pourcentage de chiffre d’affaires plutôt qu’en montants bruts. Par exemple, la somme de 375 000 euros ne représente que 0,007 % du chiffre d’affaires de certains grands groupes, mais 20 % de celui de petites entreprises : il y a là une inégalité profonde.
J’évoquais donc un autre dispositif que celui de l’article 7, madame la ministre. Vous pouvez tout à fait contester l’argumentaire que j’ai développé à l’article 6 – c’est votre droit –, mais ce dernier a déjà été voté par le Sénat. Il semblerait que vous ne sachiez pas de quoi vous parlez, ce qui risque d’être problématique pour la suite de nos débats… (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Di Folco. Du calme !
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Pardonnez-moi, mais je ne comprends pas bien ce que nous sommes en train de faire : d’un côté, on se refuse à lever le secret des affaires, sujet tabou, auquel il ne faudrait pas toucher, au motif que l’on ne veut pas savoir à quel point certaines entreprises s’en mettent plein les poches ; et, de l’autre, on pinaille au sujet de ce qui pourrait leur faire du mal. Mes chers collègues, on ne le saura jamais si l’on ne fait pas la vérité complète sur le secret des affaires.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Mme la ministre conteste le niveau de la sanction, alors même qu’il s’agit de l’amende prévue en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. Il est donc question ici d’une amende infligée à des récidivistes, qui n’auront pas été dissuadés malgré une première amende d’un montant de 750 000 euros.
Que faire quand on a affaire à des endurcis ? Que faire face à des personnes qui résistent et ne respectent pas la loi ? Il faut que celle-ci sévisse ! Nous avons voté l’amendement n° 122 : il ne serait pas incohérent de voter celui-ci. Mais, une fois de plus, notre appel à davantage de transparence semble représenter une charge insupportable pour certains.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 123.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 50, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3, seconde phrase
Après le montant :
150 000 €
insérer les mots :
, assorti d’une peine complémentaire d’interdiction de gérer un commerce pendant un an,
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. À l’image des communes qui préfèrent s’acquitter d’amendes plutôt que de respecter la loi SRU, certains groupes ou filiales préféreront ne pas respecter leurs obligations.
Pourtant, la transparence – une revendication récurrente – est un enjeu à la fois d’ordre public et sociétal.
Pour y répondre efficacement, la sanction en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive doit être dissuasive. Nous proposons donc de l’assortir d’une peine complémentaire d’interdiction de gérer un commerce pendant un an.
Cet amendement vise ainsi à adapter les sanctions au principe de réalité, notamment à la structuration de secteurs économiques à caractère monopolistique ou oligopolistique au sein desquels le comportement prédateur de certaines entreprises nuit à l’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement déjà rejeté en commission vise à prévoir une peine complémentaire d’interdiction de gérer un commerce pendant cinq ans en cas de non-transmission par les distributeurs des informations sur les marges arrière prévues à l’article 7 du projet de loi.
Afin de garantir l’effectivité du dispositif et de s’assurer que les grandes enseignes de la distribution transmettent bien les données attendues, une amende de 75 000 euros pour une personne physique et de 375 000 euros pour une personne morale est prévue, ces montants étant doublés en cas de récidive.
La commission estime qu’il convient de rester à un niveau de sanction proportionné à la faute commise. Autant le non-dépôt des comptes – obligation résultant du droit national et du droit de l’Union européenne – doit pouvoir faire l’objet de sanctions en pourcentage du chiffre d’affaires, autant la sanction en cas de non-transmission des informations sur les marges arrière prévues à l’article 7 doit rester mesurée.
Enfin, interdire de gérer un commerce pendant cinq ans irait à l’encontre de l’objectif de lutter contre les monopoles.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Dans ce type d’exercice, nous sommes contraints de tenir compte de l’existant, de comparer les mesures proposées avec ce qui se pratique et de respecter l’échelle des sanctions. En effet, une sanction excessive pourrait faire l’objet, demain, d’une question prioritaire de constitutionnalité qui ferait tomber le dispositif.
Je rappelle que l’interdiction de gérer un commerce est une sanction très lourde dans la hiérarchie des sanctions, puisqu’elle porte atteinte à une liberté constitutionnelle. La lier à une obligation déclarative me paraît donc disproportionné sur le plan juridique.
En outre, une telle interdiction ne peut pas être, vous le savez, une simple mesure administrative : elle nécessite l’intervention d’un tribunal, ce qui n’est pas prévu dans l’amendement.
Pour toutes ces raisons, j’y suis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 50.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 112 rectifié, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, lorsque trois entreprises ou moins détiennent plus de 70 % de parts de marché dans la distribution de produits de première nécessité, le préfet peut fixer, par arrêté, un taux maximal de marge brute applicable à ces produits pour une durée de douze mois renouvelable.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Cet amendement vise à doter l’État d’un pouvoir d’encadrement temporaire des marges dans les secteurs où la concurrence n’existe tout simplement plus.
Il s’agit de répondre à un constat simple, mais alarmant : dans certaines collectivités d’outre-mer, trois entreprises, voire moins, contrôlent plus de 70 % de la distribution de produits essentiels.
Cette situation d’oligopole, combinée à l’éloignement géographique et aux coûts logistiques, crée un terreau fertile pour des marges abusives. À titre d’exemple, les prix du riz, des pâtes ou des couches pour bébés sont parfois de 30 % à 50 % plus élevés en outre-mer qu’en métropole, sans justification économique autre que l’absence de concurrence.
Face à cette situation, l’État a le devoir d’intervenir. Nous proposons comme solution un mécanisme ciblé, proportionné et temporaire permettant aux préfets, après analyse, de fixer un taux maximal de marge brute pour ces produits.
Inspiré des dispositifs existants pour les carburants dans les départements d’outre-mer, cet outil a fait ses preuves. Il s’agit non pas de contrôler les prix, mais de réguler les excès là où le marché échoue. Voilà non pas une atteinte à la liberté économique, mais une correction nécessaire pour rétablir l’équité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux préfets d’encadrer les taux de marge en outre-mer dès lors que trois entreprises ou moins détiennent plus de 70 % de parts de marché. Ses auteurs évoquent des marges pouvant atteindre 35 % sur certains produits laitiers.
La question des abus de certaines entreprises en situation de monopole ou d’oligopole mérite d’être posée. Cependant, la mesure envisagée paraît trop contraignante dans une économie reposant sur la liberté du commerce.
Les rapporteurs s’opposent donc à un tel plafonnement. Ils proposeront en revanche de sous-amender l’amendement n° 66 rectifié de M. Lurel visant à plafonner les marges arrière.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 112 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Je comprends l’objectif des auteurs de l’amendement, mais la rédaction proposée me paraît dangereuse à double titre.
Premièrement, elle porte atteinte à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle. Vous risquez en fait de dissuader les opérateurs économiques de s’installer et de se développer sur ces territoires, ce qui n’est évidemment pas l’objectif.
Deuxièmement, il faut veiller aux efforts de bord que cette mesure pourrait avoir sur les « petits ». En fonction de l’organisation qui sera retenue pour l’approvisionnement, la société en charge de la distribution aura des activités plus ou moins étendues.
Supposons qu’un plafonnement commun de la marge brute soit fixé à un niveau exigeant : vous favoriserez les grands acteurs, qui pourront procéder à des péréquations sur certains produits ; a contrario, vous pénaliserez les petits, qui préféreront d’ailleurs probablement renoncer à la distribution de ces produits. Cela contrevient donc à l’objectif de départ.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, avec tout le respect que je vous dois, je n’ai pas très bien compris comment l’instauration d’un taux maximal de marge peut nuire à l’installation d’entreprises. Nous parlons ici d’un taux maximal fixé par un préfet.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Michelle Gréaume a rappelé qu’un tel dispositif existait déjà à La Réunion pour les carburants. Or ce territoire ne souffre d’aucune pénurie : on y trouve des distributeurs et des stations-service, l’économie fonctionne et les voitures roulent.
Il est tout à fait possible de réguler les marges. Je ne vois pas pourquoi nous nous empêchons d’agir sur les produits de consommation courante, qui sont indispensables à de nombreuses familles.
Je rappelle que, à Mayotte, 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. À la Réunion, ce taux est de 36 %, contre 8 % dans l’Hexagone.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 112 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 111, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, les marges brutes pratiquées par les entreprises de distribution sur les produits de première nécessité ne peuvent excéder 15 % du prix de vente au public. Le non-respect de cette disposition est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 10 % du chiffre d’affaires annuel réalisé dans le territoire concerné.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Ainsi que l’ont souligné plusieurs d’entre nous, les habitants des outre-mer subissent une injustice économique persistante. Les prix des biens essentiels – alimentation, hygiène, énergie – y sont de 30 % à 40 % plus élevés qu’en métropole, alors que les revenus, comme chacun le sait, y sont plus faibles.
Cette situation ne s’explique pas seulement par les coûts de transport ou d’approvisionnement ; elle tient aussi aux marges excessives captées dans des chaînes de distribution trop concentrées.
Dans son avis Mieux connecter les outre-mer publié en octobre 2024, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) fait référence à l’analyse que l’Autorité de la concurrence a réalisée sur les taux de marge des distributeurs, compagnies maritimes, ports, manutentionnaires, transitaires et grossistes. Cette analyse révèle que les taux de marge réalisés par certains acteurs sont plus importants que ceux réalisés dans l’Hexagone. Ces écarts ne s’expliquent pas par des coûts logistiques ; ils sont le résultat de marges excessives.
Au travers de cet amendement, nous souhaitons franchir une étape supplémentaire en fixant une règle claire, lisible et applicable qui protège le consommateur : le plafonnement des marges brutes à 15 % sur des produits essentiels tels que le riz, le lait, les pâtes ou les huiles. Les manquements seraient sanctionnés par une amende pouvant atteindre 10 % du chiffre d’affaires annuel réalisé dans le territoire concerné.
À la différence des grands groupes, les PME locales et les petits commerces ne sont pas concernés par ce plafond, puisque leurs marges sont inférieures à 15 %.
Cette mesure devrait permettre de réduire les prix payés par les ménages de 20 % à 30 %. Elle contribuera aussi à briser le pouvoir des oligopoles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à plafonner à 15 % du prix de vente les taux de marge des distributeurs pour les produits de première nécessité.
Les rapporteurs sont défavorables à un tel plafonnement, qu’ils estiment contraire au principe de liberté du commerce. Ils proposeront en revanche, je l’ai dit, de sous-amender l’amendement n° 66 rectifié de M. Victorin Lurel, afin de plafonner les marges arrière à 12 %.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 111.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. On peut débattre sur le niveau du taux de plafonnement : 12 %, 15 %, etc. Personnellement, je ne connais pas un agriculteur, pas un paysan qui fasse des marges de 15 %. Et lorsque je pose la question à mes collègues qui connaissent mieux que moi la ruralité, ce que l’on y produit et ce que l’on y vend, ils me le confirment.
Je le répète, le plafond que nous proposons ne concerne ni les PME ni les petits commerçants, il vise uniquement la grande distribution, dont les marges atteignent 30 % à 40 %.
Cette situation ne profite nullement à ceux qui produisent réellement les richesses. Je veux parler des producteurs, de ceux qui font en sorte qu’il y ait du riz ou du lait.
Par conséquent, peut-être pourrions-nous évoluer sur les votes bloqués auxquels nous assistons depuis tout à l’heure. Laissons un espace de justice sociale aux populations d’outre-mer.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 111.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement et de deux sous-amendements.
L’amendement n° 66 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 410-6 du code de commerce, il est inséré un article L. 410-… ainsi rédigé :
« Art. L. 410 –…– I. – À titre expérimental, pour une durée de cinq ans et six mois après la promulgation de la loi n° … du … de lutte contre la vie chère dans les outre-mer, dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, les services de coopération commerciale propres à favoriser la commercialisation des produits ou services du fournisseur qui ne font pas l’objet de contreparties commerciales ou financières à l’égard du distributeur ainsi que les avantages de toute nature autres que les remises, bonifications, ristournes consentis par tout fournisseur aux distributeurs ne peuvent excéder par année civile un pourcentage du chiffre d’affaires hors taxes de ces produits déterminé par décret conjoint pris par les ministres en charge de la consommation et des outre-mer qui ne peut excéder 10 % du chiffre d’affaires hors taxes par ligne de produits.
« II. – Les remises, bonifications, ristournes et avantages publicitaires, commerciaux et financiers assimilés de toute nature obtenus au titre des marges arrière par un distributeur auprès du fournisseur et faisant l’objet de la convention écrite définie à l’article L. 441-3 du présent code doivent être mentionnés sur les factures d’achat, dès lors qu’ils sont de principe acquis et de montants chiffrables, même si leur versement est différé.
« III – Les infractions aux dispositions prévues au présent article sont passibles d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. Ces infractions sont constatées et poursuivies dans les conditions prévues au titre V du livre IV du code de commerce.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement, que j’ose qualifier de très important, vise à reprendre une disposition absente de ce texte, mais adoptée en mars dernier par le Sénat dans le cadre de la proposition de loi visant à lutter contre la vie chère en renforçant le droit de la concurrence et de la régulation économique outre-mer. À l’époque, la rapporteure et le Gouvernement avaient émis un avis favorable sur cette proposition.
Je propose d’instaurer un plafonnement des marges arrière à 10 % du chiffre d’affaires. Le sous-amendement n° 150 de la commission tend à relever ce taux à 12 % et j’y suis favorable.
Il s’agit non pas d’interdire les marges arrière, mais simplement de les encadrer. Nous avons déposé d’autres amendements qui visent à préciser les modalités de cet encadrement.
Dans sa rédaction actuelle, mon amendement tend à prévoir une application du plafond par ligne de produits. Sur ce point également, je suis ouvert au compromis. Si cela devait permettre de contrer l’argument sur le secret des affaires, nous pourrions raisonner par fournisseur. Ainsi, il sera toujours possible de procéder à une péréquation interne. Même par interpolation linéaire, on ne pourra pas connaître avec précision le montant des marges arrière.
Enfin, je suis favorable au sous-amendement n° 145, qui vise à exclure Saint-Barthélemy du dispositif.
Vous le voyez, nous prenons toutes les précautions pour que le Gouvernement soit favorable à cet amendement et que le Sénat l’adopte.
M. le président. Le sous-amendement n° 145, présenté par Mme Jacques, est ainsi libellé :
Amendement n° 66, alinéa 4
Supprimer les mots :
de Saint-Barthélemy,
La parole est à Mme Micheline Jacques.
Mme Micheline Jacques. Ce sous-amendement vise à exclure Saint-Barthélemy des territoires dans lesquels le plafonnement des services de coopération commerciale est prévu.
Compte tenu de son statut de collectivité d’outre-mer, Saint-Barthélemy applique une fiscalité qui permet de neutraliser une très large part du coût du transport. Il en résulte des prix relativement moins élevés que dans les territoires voisins.
L’exiguïté du territoire, d’une superficie de 21 kilomètres carrés, et les prix vertigineux du foncier qui en découlent s’ajoutent par ailleurs aux surcoûts du fait du surstockage et des charges de personnel. La tension sur le marché du logement oblige les employeurs à loger leurs employés, si bien que les charges de personnel représentent 20 % du chiffre d’affaires contre 10 % pour un supermarché de l’Hexagone.
Les prix étant comparables à ceux de la petite couronne parisienne, le plafonnement des services de coopération commerciale n’est pas pertinent pour Saint-Barthélemy.
M. le président. Le sous-amendement n° 150, présenté par Mme Jacques et M. Buval, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 66, alinéa 4
Remplacer les mots :
10 % du chiffre d’affaires hors taxes par ligne de produits
par les mots :
12 % du chiffre d’affaires hors taxes de chaque groupe du secteur de la distribution
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Ce sous-amendement vise à préciser que le plafonnement expérimental des marges arrière en outre-mer pour une durée de cinq ans doit être entendu au niveau de chaque groupe du secteur de la distribution.
Ces marges ne pourraient ainsi excéder 12 % du chiffre d’affaires hors taxes de chaque groupe au lieu de 10 % du chiffre d’affaires hors taxes par ligne de produits.
Les taux excessifs de marges arrière peuvent en effet contribuer à des distorsions dans la formation des prix et donc au renchérissement du coût de la vie en outre-mer.
Je crois, monsieur le président, que M. Lurel souhaiterait que nous rectifiions ce sous-amendement. Peut-être est-il possible de lui donner la parole dès maintenant pour qu’il nous expose ses demandes avant de demander l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Comme je l’ai dit à l’instant, nous sommes d’accord avec l’exclusion de Saint-Barthélemy.
Nous sommes également d’accord pour préciser que le calcul du plafond s’effectue « en moyenne » du chiffre d’affaires.
Cependant, comme l’expression « chaque groupe du secteur de la distribution » ne veut rien dire, nous souhaiterions que le sous-amendement n° 150 soit rectifié pour parler à la place de « fournisseur ».
Je serai donc favorable à un sous-amendement n° 150 rectifié qui tendrait à rehausser le plafond de 10 % à 12 % en moyenne du chiffre d’affaires par fournisseur.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Nous rectifions le sous-amendement n° 150 dans le sens indiqué par M. Lurel.
Si ce sous-amendement était adopté, l’avis de la commission sur l’amendement n° 66 rectifié serait favorable.
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 150 rectifié, présenté par Mme Jacques et M. Buval, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Amendement n° 66, alinéa 4
Remplacer les mots :
10 % du chiffre d’affaires hors taxes par ligne de produits
par les mots :
12 % du chiffre d’affaires hors taxes en moyenne par fournisseur
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Une fois n’est pas coutume, je suis bien embêtée, car j’étais initialement défavorable à l’amendement n° 66 rectifié.
Je m’interroge sur la faisabilité de la mesure proposée, que ce soit sur l’affichage des factures, le niveau de chiffre d’affaires ou encore les services. Il faudra probablement réécrire cette disposition.
Je constate néanmoins qu’un consensus transpartisan se dessine et je souhaite que nous avancions sur la question des marges arrière en outre-mer. C’est un sujet majeur. Nous devons mieux protéger les fournisseurs et garantir la transparence des prix.
Pour toutes ces raisons, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur l’amendement et sur les deux sous-amendements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 145 ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Ce sous-amendement vise à exclure Saint-Barthélemy des territoires dans lesquels le plafonnement des marges arrière est prévu. Les prix dans cette collectivité étant comparables à ceux de la petite couronne parisienne, le plafonnement des services de coopération commerciale n’y est pas pertinent.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 145.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 150 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.
Article 8
I. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 441-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les conditions générales de vente sur le fondement desquelles sont négociées les conventions mentionnées aux articles L. 441-3-1, L. 441-4 et, le cas échéant, L. 443-8, ne peuvent être différenciées au seul motif que les produits sont destinés à être commercialisés dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ou dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna. » ;
2° Le III de l’article L. 441-1-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les conditions générales de vente sur le fondement desquelles sont négociées les conventions mentionnées à l’article L. 441-3-1 ne peuvent être différenciées au seul motif que les produits sont destinés à être commercialisés dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ou dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna. » ;
3° Après l’article L. 441-4, il est inséré un article L. 441-4-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 441-4-2. – Tout fournisseur ou grossiste communique, à sa demande, à l’autorité administrative chargée de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, les conditions générales de vente relevant du dernier alinéa du II de l’article L. 441-1 ou du dernier alinéa du III de l’article L. 441-1-2 qu’il a établies, les conventions relevant du 4° bis du I de l’article L. 442-1 auxquelles il est partie, ainsi que, le cas échéant, les motifs des différenciations que ces conditions générales et conventions comportent pour les produits destinés à être commercialisés dans les collectivités mentionnées par ces dispositions.
« Les manquements au présent article sont passibles d’une amende administrative, prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 470-2, dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. » ;
4° Après le 4° du I de l’article L. 442-1, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :
« 4° bis De pratiquer, à l’égard de l’autre partie, ou d’obtenir d’elle des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d’achat discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles prévues par les conventions mentionnées aux articles L. 441-3-1, L. 441-4 et, le cas échéant, L. 443-8, au seul motif que les produits sont destinés à être commercialisés dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ou dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna ; »
II. – Le I est applicable aux conditions générales de vente soumises par les fournisseurs à la négociation avec les acheteurs et aux conventions qu’ils ont conclues avec eux postérieurement à son entrée en vigueur.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 73, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 5
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Toutefois, dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, les conditions générales de vente établies au niveau national entre un fournisseur, un distributeur ou un prestataire de services et définies dans la présente section s’appliquent de plein droit, de façon transparente et non discriminatoire. » ;
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement vise à ce que les conditions générales de vente, mais aussi toutes leurs déclinaisons – contrats uniques, contrats d’application, accords-cadres sur le moyen et le long terme – s’appliquent de manière non pas nécessairement uniforme, mais égale entre le niveau national et les outre-mer.
Sans doute convient-il de réviser outre-mer la formulation et le contenu des conditions générales de vente et de les appliquer avec quelque différenciation.
Je reviendrai plus en détail, à l’occasion de la présentation d’autres amendements, sur l’esprit de cette proposition.
M. le président. L’amendement n° 97, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 5 et 10
Remplacer les mots :
de l’article 73 de la Constitution ou dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna
par les mots :
des articles 73 et 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement vise à intégrer la Nouvelle-Calédonie aux dispositions prévues à l’article 8.
Bien que la Nouvelle-Calédonie soit autonome et gère ses propres affaires, une certaine cohérence sur l’ensemble du territoire national est souhaitable, ainsi que le suggère le Conseil d’État dans son avis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 73.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 97.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 98, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
à sa demande
par les mots :
au plus tard le 30 avril de chaque année
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il est défendu !
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après les mots :
Conseil d’État
insérer les mots :
, dans un délai fixé par cette dernière et qui ne saurait être supérieur à un mois
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il est défendu également !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Il paraît préférable de maintenir la transmission des informations sur les conditions générales de vente « à la demande » de la DGCCRF. Il faut veiller, en effet, à ne pas trop alourdir la charge administrative des entreprises. Par ailleurs, un trop-plein d’informations rendrait le travail des services de l’État plus difficile.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 98.
En revanche, bien qu’il soit un peu court, le délai d’un mois proposé dans l’amendement n° 99 rectifié pour la transmission par les entreprises des informations demandées par la DGCCRF, notamment leurs conditions générales de vente, paraît acceptable.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 99 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 98.
En revanche, nous sommes favorables à l’amendement n° 99 rectifié. Cette disposition figurait dans l’avant-projet de loi. Le Conseil d’État a souhaité l’écarter pour la renvoyer au domaine réglementaire. Pour ma part, je suis favorable à ce qu’elle soit rétablie.
M. Victorin Lurel. Je retire l’amendement n° 98 !
M. le président. L’amendement n° 98 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 99 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 100, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après le mot :
différenciations
insérer les mots :
, notamment celles portant sur les barèmes des prix unitaires et réductions de prix proposés aux acheteurs,
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La précision que cet amendement tend à apporter est satisfaite : l’article 8 prévoit déjà que les entreprises devront transmettre à la DGCCRF, à sa demande, des éléments explicitant les éventuelles différences entre l’Hexagone et les territoires ultramarins en ce qui concerne les conditions générales de vente.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 100.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 124, présenté par MM. Mellouli et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer le montant :
375 000 €
par les mots :
1 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos
La parole est à M. Akli Mellouli.
M. Akli Mellouli. Tout le monde appelle à plus de transparence ; pour cela, les sanctions en cas de manquement doivent être dissuasives.
L’amendement n° 123, qui portait sur la transmission des montants correspondant aux marges arrière, a été rejeté.
À l’instar de l’amendement n° 122, le présent amendement porte sur les sanctions encourues en cas de non-transmission des documents, mais il vise spécifiquement, par cohérence, les fournisseurs et les grossistes.
En effet, il faut prévoir des sanctions dissuasives sur l’ensemble de la chaîne, si nous voulons éviter que certains se livrent à des jeux subtils qui pourraient nous empêcher d’obtenir la transparence escomptée.
Plutôt qu’une amende de 375 000 euros, je propose donc une sanction égale à 1 % du chiffre d’affaires.
Nul n’étant censé frauder, cette disposition n’est pas contraignante : il s’agit simplement d’une garantie pour rendre la transparence effective.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. La sanction prévue à l’encontre des fournisseurs et grossistes qui refusent de transmettre les informations demandées par la DGCCRF sur leurs conditions générales de vente apparaît déjà suffisamment dissuasive. Il n’est pas nécessaire de la rehausser davantage.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Akli Mellouli. Mais c’est 0,007 % du chiffre d’affaires de Hayot !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Des sanctions existent bien aujourd’hui, monsieur Mellouli ; nous ne créons rien. Le problème réside plutôt dans la force de ces sanctions, plus ou moins dissuasives, même si la contrainte est là une fois que c’est inscrit dans la loi. Il ne s’agit pas seulement de faire peur : vous devez passer à la caisse si vous enfreignez la règle.
Cela étant posé, je trouve que ce que vous proposez dans cet amendement est disproportionné. Aussi, je préfère en rester à ce qui est prévu, à savoir 75 000 euros pour une personne physique et 350 000 euros pour une personne morale. J’y insiste, le dispositif est solide sur le plan juridique, y compris en cas de contestation.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.
M. Akli Mellouli. On nous explique depuis tout à l’heure qu’il faut de la transparence. Nous avons d’ailleurs voté un certain nombre d’amendements à cet effet, mais vous refusez d’aggraver les sanctions, estimant qu’une amende de 375 000 euros est suffisante.
Mais pour qui est-ce suffisant ? Pour les petites et moyennes entreprises et ceux qui ont des revenus modestes, mais pour un groupe comme Hayot, cela représente 0,007 % du chiffre d’affaires !
Qui veut-on protéger, en fait ? Le consommateur et le pouvoir d’achat des Ultramarins ou bien ceux qui s’enrichissent sur leur dos ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Pour un groupe qui réalise 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires et plus de 200 millions d’euros de bénéfices, une sanction de 375 000 euros n’est pas du tout à la hauteur.
Assez souvent, sur les bancs de la droite, il est question de peines dissuasives, de peines à la hauteur, voire de peines planchers. Il est assez surprenant que, pour certains petits délinquants, il faille être très dissuasif et que, lorsqu’il s’agit de délinquants commerciaux, il y ait tout à coup un changement de bord. C’est un peu une surprise pour moi… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Le problème n’est pas l’absence de sanctions – selon le Conseil d’État, il en existe cinq ou six –, mais leur caractère dissuasif. Honnêtement, depuis de longues années qu’il existe, le dispositif n’a pas démontré son efficacité, si bien que la loi n’est guère respectée. Or nous devons toutes et tous être égaux devant la loi.
Manifestement, c’est vrai, cela pénalisera davantage les petites entreprises. Nous avons voté il y a un moment un amendement fixant une sanction à 1 % du chiffre d’affaires. Un tel mécanisme existe dans d’autres textes. Nous n’avons rien inventé. Nous proposons d’adapter la mesure pour qu’elle soit dissuasive.
Je ne vous cacherai pas que, d’ici quelques instants, je vous présenterai un amendement sur les commissaires aux comptes qui coûte zéro euro et qui permettra de faire respecter la loi sans poser de problèmes. Nous verrons bien ce qu’en dit la commission des affaires économiques.
Pour autant, en l’occurrence, il me paraît de bon sens qu’au moins les récidivistes soient réellement pénalisés. N’en faisons pas toute une affaire, mais, de fait, le dispositif actuel ne marche pas.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je sens beaucoup de prudence et de bienveillance à l’égard des oligopoles en outre-mer.
Je regrette de ne pas ressentir beaucoup d’envie dans cet hémicycle, notamment sur sa droite, pour venir en aide à une population qui souffre, qui a du mal à se nourrir, à se loger, à élever ses enfants, et pour qui la confiance dans l’avenir s’amenuise.
Pour nous, la réalité du quotidien, c’est l’injustice sociale, l’inégalité des chances et le sacrifice de tous les jours. Je ne comprends pas pourquoi l’on cherche toujours à épargner les mêmes. Ce texte s’intitule « Lutte contre la vie chère dans les outre-mer ». Or ceux que vous cherchez à protéger ne subissent pas la vie chère. Eux, ils en profitent et ils se gavent. Ce titre n’est donc peut-être pas le plus adapté.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Ce qui se dit ici est le fruit de beaucoup de travail, d’auditions, de rapports, et d’une grande assiduité aux réunions des observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). Et je ne vous parle pas des heures d’échanges, lorsque des émeutes ont eu lieu en Martinique. Ce qui se dit ici vient d’un examen minutieux des dossiers, des rapports, des analyses.
Lorsque je ne prends pas position sur un sujet, c’est en conscience.
Il est vrai que je ne partage pas le même positionnement politique que certains, que je peux comprendre par ailleurs. Nous sommes dans une économie libérale où les prix sont libres. Nous devons trouver le meilleur compromis, sans pour autant basculer dans une économie administrée. Il y a beaucoup d’explications à donner pour amener les gens, petit à petit, à accepter ce compromis.
Je suis désolée, mais, même si nous vivons dans le même arc caribéen, nous ne pouvons pas passer du régime économique de la Martinique à celui de Cuba !
Je le répète, ce que nous sommes en train de faire représente énormément de travail. Je vous passe les nuits blanches, les auditions et toutes les analyses que nous avons dû mener pour parvenir à nos positionnements. Il ne faut pas nous prendre pour des enfants qui ne savent pas ce qu’ils font. Ici, j’agis toujours en conscience, ou alors je me tais. (Mme Frédérique Puissat applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Naïma Moutchou, ministre. Je précise que je suis là non pas pour protéger telle ou telle entreprise, mais pour protéger le pouvoir d’achat de nos concitoyens et pour agir sur les prix, le tout dans un système équilibré qui soit viable. Le but n’est pas de plomber les acteurs économiques.
Vous avez confondu deux choses, monsieur le sénateur.
Il y a, d’une part, la nouvelle infraction de pratique anticoncurrentielle basée sur la discrimination prévue à l’article 8. Comme elle est nouvelle, on ne peut pas déjà dire que l’amende – une amende administrative, je le précise – n’est pas dissuasive.
D’autre part, il y a l’article 9, qui résulte du constat que nous n’allons pas assez loin aujourd’hui. En l’occurrence, nous n’avons pas la main qui tremble, puisque nous prévoyons une astreinte pouvant aller jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires. Il n’y a donc pas de crainte de notre côté.
Nous sommes simplement obligés de bien distinguer les choses pour que les dispositifs soient adaptés et fonctionnent.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement, si je le lis bien, vise à rendre dissuasives les sanctions encourues par les fournisseurs et les grossistes qui refusent de transmettre les informations demandées par la DGCCRF sur leurs conditions générales de vente.
Finalement, c’est une sorte d’arme qui a vocation à ne pas être utilisée. C’est un peu la dissuasion nucléaire. (M. Victorin Lurel marque son approbation.) Il s’agit de faire en sorte que la sanction soit suffisamment forte pour que le prix de la non-communication des éléments soit plus élevé que ce que l’entreprise peut considérer pouvoir gagner.
À ce stade de la discussion et de la navette parlementaire, notre assemblée peut donc tout à fait adopter cet amendement. Les choses pourront encore évoluer dans le cadre des discussions avec l’Assemblée nationale ; toutefois, je ne trouve pas cette disposition choquante dès lors qu’elle vient sanctionner le non-respect d’une disposition légale.
C’est la raison pour laquelle je voterai cet amendement.
M. Victorin Lurel. Très bien !
M. Akli Mellouli. Respecter la loi est quand même un minimum !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 124.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 101, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer les mots :
postérieurement à son entrée en vigueur
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Dans la mesure où l’article 8 crée une nouvelle pratique restrictive de concurrence, qui plus est assortie de sanctions, prévoir que cette disposition est rétroactive viendrait enfreindre le principe général de notre droit, prévu à l’article 2 du code civil, selon lequel « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».
Ce principe général de non-rétroactivité constitue un corollaire du concept de sécurité juridique. Il est essentiel pour assurer la confiance nécessaire au bon fonctionnement de notre économie et, en l’occurrence, celle de nos territoires ultramarins.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’ai bien entendu les explications de Mme le rapporteur et je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 101 est retiré.
Je mets aux voix l’article 8, modifié.
(L’article 8 est adopté.)
Après l’article 8
M. le président. L’amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Lurel, Mmes Bélim et G. Jourda et MM. P. Joly, M. Weber et Cozic, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 330-3 du code de commerce, il est inséré un article L. 330-… ainsi rédigé :
« Art. L. 330-…. – Est prohibée, dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, toute clause d’exclusivité, contractuelle ou non, restreignant la liberté des fournisseurs de commercialiser leurs produits auprès d’autres intermédiaires actifs sur les marchés de l’approvisionnement et de la vente en gros auprès des distributeurs, ou bien auprès de distributeurs concurrents.
« Un décret précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Je me suis inspiré des positions de l’Autorité de la concurrence (ADLC) pour cet amendement qui vise à interdire toute clause d’exclusivité, contractuelle ou non, restreignant la liberté des fournisseurs de commercialiser leurs produits auprès d’autres intermédiaires actifs sur les marchés de l’approvisionnement, de la vente en gros auprès des grandes surfaces ou bien auprès des distributeurs concurrents.
Quel est le problème dans les outre-mer que personne n’évoque, si ce n’est l’ADLC ? C’est l’absence de concurrence intramarques, que ce soit pour les marques nationales ou celles de distributeurs, les MDD. Cela concerne notamment les produits de grande consommation et de première nécessité.
Quand le marché est captif et l’entreprise intégrée, certes elle commerce avec des plateformes, mais elle est à la fois l’importateur et le distributeur, via ses grandes surfaces. Tout cela repose sur l’intégration et la confiance des grandes marques, et interdit toute concurrence, ce que l’ADLC dénonce depuis longtemps. Cet amendement, fruit de l’expérience, est une réponse à cette situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Le présent amendement vise à interdire toute clause d’exclusivité restreignant la liberté de fournisseurs de commercialiser leurs produits auprès de distributeurs.
Or l’article L. 420-1 du code de commerce prévoit déjà que sont prohibées, lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, les conventions, les ententes expresses ou tacites ou les coalitions, notamment lorsqu’elles tendent à limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique.
La pratique restrictive de concurrence visée par les auteurs du présent amendement est donc déjà sanctionnée par le droit existant. Par conséquent, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Monsieur le sénateur, cette proposition est en fait moins-disante que l’article L. 420-1 du code de commerce qui, non seulement prohibe les clauses d’exclusivité, mais s’attaque de manière générale aux accords ou aux pratiques ayant pour objet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à un groupe d’entreprises. Le champ est donc plus large.
Voilà pourquoi nous demandons le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Madame la ministre, je ne suis pas convaincu par votre argumentaire. J’ai été, avec beaucoup d’autres, à l’origine de ce texte visant à interdire les exclusivités de distribution, mais ici les choses se passent en amont.
Lorsqu’un grand groupe distribue Nestlé, Procter & Gamble, Pepsi, etc., il ne le fait que dans ses propres magasins et pas dans ceux des concurrents. L’ADLC, dans un avis de 2011, répété en 2019, souligne que le corpus législatif est insuffisant pour contrer cette pratique.
Ce que vous évoquez, madame la ministre, se situe en aval, lorsque le produit est déjà importé. Les grossistes, eux, fournissent aux distributeurs, principalement à leur réseau de détaillants. C’est en amont qu’il faut agir, et l’ADLC nous demande la possibilité de le faire. C’est du bon sens. Je n’ai rien inventé.
Si nous voulons transformer le paysage concurrentiel, il faut changer l’encadrement normatif. Aujourd’hui, je le répète, je propose un dispositif qui ne coûte pas un kopeck à l’État. Il faut donner des moyens juridiques aux tribunaux, aux acteurs locaux, aux lanceurs d’alerte. Je ne cherche pas à soviétiser notre économie ou à créer un Gosplan. Je veux l’équité entre partenaires pour créer les conditions d’une saine compétition.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 42 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 51, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 420-2-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 420-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 420-2-…. – I. – Constitue une pratique restrictive de concurrence le fait, pour une entreprise exerçant une activité intégrée de grossiste-importateur et de distributeur au détail, ou disposant d’une exclusivité de fait en tant que fournisseur de ses propres enseignes de distribution, de traiter de manière discriminatoire ses clients tiers par rapport à ses ventes intra-groupe, notamment en matière :
« 1° D’allocation des budgets de coopération commerciale ;
« 2° De conditions de prix, délais de paiement ou modalités de livraison ;
« 3° D’accès aux services logistiques, commerciaux ou informatiques ;
« 4° De respect des délais de réapprovisionnement ou de traitement des commandes ;
« 5° De communication commerciale et de visibilité de produits.
« II. – Cette pratique s’apprécie notamment au regard de :
« 1° L’existence d’une position dominante ou d’une exclusivité de fait du fournisseur intégré ;
« 2° L’écart de traitement entre clients tiers et ventes intra-groupe pour des prestations ou produits comparables ;
« 3° L’absence de justification objective et proportionnée pour cet écart de traitement ;
« 4° L’impact potentiel de cette discrimination sur la concurrence intra et inter-marque.
« III. – Le présent article s’applique aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ainsi qu’aux collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, où l’intégration verticale des acteurs de la distribution et de l’importation soulève des risques spécifiques de restriction concurrentielle.
« IV. – L’Autorité de la concurrence est chargée de veiller au respect du présent article et peut prononcer des sanctions administratives conformément aux dispositions de l’article L. 462-1. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Le présent amendement vise à renforcer la protection de la concurrence outre-mer, en sanctionnant la discrimination commerciale que les acteurs intégrés verticalement, c’est-à-dire des grossistes-importateurs disposant de leur propre réseau de distribution au détail, sont susceptibles d’exercer envers leurs clients qui seraient aussi des concurrents. Il s’agit d’une recommandation de l’Autorité de la concurrence, dans son avis du 4 juillet 2019, ainsi que du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
En effet, lorsqu’une entreprise exerce à la fois l’activité de grossiste-importateur et celle de distributeur au détail, elle crée une situation de conflit d’intérêts majeur. Elle peut favoriser ses propres enseignes de distribution, et ce au détriment de ses clients concurrents. Cette discrimination peut revêtir plusieurs formes : discrimination en matière de budget de coopération commerciale, discrimination logistique, discrimination informationnelle ou encore discrimination tarifaire.
Cet amendement n’a pas vocation à interdire l’intégration verticale en tant que telle. Il vise seulement la discrimination qu’elle peut entraîner.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Nous sommes bien conscients de la situation.
Toutefois, il ne nous apparaît pas nécessaire d’introduire une disposition législative pour lutter contre ce phénomène, qui peut en effet s’assimiler à un abus de position dominante, pratique restrictive de concurrence déjà visée par l’article L. 420-2 du code de commerce.
Pour mémoire, celui-ci dispose qu’« est prohibée […] l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ».
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis pour les mêmes raisons.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je me bats depuis le début de nos débats pour faire comprendre qu’il n’y a presque aucune décision judiciaire sur ces sujets.
L’ADLC a prononcé quelques amendes à partir de 2013, après le vote de la loi de 2012, pour sanctionner des exclusivités de distribution – cette pratique est autorisée lorsqu’elle est en faveur des consommateurs.
En l’occurrence, il s’agit de la concurrence intramarques et du traitement infligé à des tiers concurrents. Or cela n’a jamais été sanctionné. C’est pourtant bien cela qui constitue le paysage commercial outre-mer. C’est non pas le monopole, le duopole ou l’oligopole qui pose problème, mais l’intégration, la non-transparence, les prix de cession internes, le bénéfice tiré de la coopération commerciale, des boosters, de la publicité, y compris sur le lieu de vente (PLV), etc.
Tout cela échappe à notre sagacité. L’ADLC ne dispose pas de moyens suffisants pour bien contrôler cela. Le constat d’échec est patent depuis nombre d’années.
Vous continuez pourtant à croire que l’action des tribunaux est suffisante, que toute plainte entraîne une sanction et la privation de l’approvisionnement. Cet amendement relève simplement du bon sens !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 51.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 43 rectifié, présenté par M. Lurel, Mmes Bélim et G. Jourda et MM. P. Joly, Cozic et M. Weber, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 441-3-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 441-3-…. – Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, les budgets de coopération commerciale reçus par les filiales de la part de leurs fournisseurs sont alloués entre les magasins détenus par un groupe et ceux de ses concurrents sans discrimination et sur la base de critères commerciaux transparents, objectifs et vérifiables.
« Un décret précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 43 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 45 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. P. Joly, Mme G. Jourda et MM. M. Weber et Cozic, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 441-3-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 441-3-…. – I. – Les conditions générales de vente, les contrats uniques, les accords-cadres et les contrats d’application applicables aux produits ou services dans l’industrie et le commerce de détail destinés aux départements et régions d’outre-mer, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna ne peuvent inclure les coûts, directs ou indirects, supportés par le fournisseur au titre d’opérations de commercialisation menées sur le territoire de la France métropolitaine et dont le distributeur ultramarin ne bénéficie pas directement. Ces coûts incluent notamment les frais liés à la publicité nationale, au sponsoring, aux actions de la force de vente et aux opérations de marketing territorialisées.
« II. – Le I s’applique y compris lorsque la vente est conclue avec un acheteur, notamment une centrale d’achat ou de référencement, situé en France métropolitaine, dès lors que le fournisseur a connaissance, au moment de la formation du contrat, qu’un volume significatif des produits ou services sont destinés à être distribués dans un des territoires mentionnés au même I. Cette connaissance est présumée lorsque l’acheteur a pour objet social l’approvisionnement de distributeurs situés exclusivement dans ces territoires et y réalisent un volume d’affaires significatif, ou lorsque l’existence d’un courant d’affaires régulier significatif vers ces territoires est établie.
« III. – En cas de litige, lorsque le prix facturé à un distributeur desservant l’un des territoires mentionnés au I est identique ou supérieur au prix de base facturé à un distributeur en France métropolitaine pour des produits ou services équivalents, les coûts mentionnés au même I sont présumés être inclus dans les conditions générales de vente, les contrats uniques, les accords-cadres et les contrats d’application. Il appartient alors au fournisseur de rapporter la preuve contraire, en démontrant par tout moyen qu’il a procédé à une défalcation de ces coûts ou que l’absence d’écart de prix est justifiée par des contreparties spécifiques ou des facteurs objectifs propres à la desserte de ces territoires.
« IV. – À la demande du distributeur ou de l’autorité administrative compétente, le fournisseur communique, dans un délai de deux mois, les éléments objectifs permettant d’attester de la conformité de ses conditions générales de vente aux dispositions du I. Le manquement à cette obligation de communication ainsi que la transmission d’informations sciemment inexactes engagent la responsabilité de leur auteur et sont passibles des sanctions prévues à l’article L. 442-1 du présent code.
« V. – Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, les opérateurs peuvent bénéficier de la clause du client le plus favorisé.
« VI. – Les conditions et modalités d’application de cet article sont précisées par décret.
« VII. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er juin 2026. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement est lourd, mais nécessaire. Pourquoi ? J’ai soulevé, avec beaucoup d’autres ici, le problème des conditions générales de vente (CGV) en outre-mer. Toutes les entreprises vendant au grand public ont des CGV, grâce auxquelles il est possible d’introduire des biais, des distorsions.
Il y a ensuite la déclinaison des CGV : les contrats uniques, les contrats d’application et les accords-cadres. Il s’agit par exemple de la facturation ou de la convention commerciale. Ce sont des documents importants et la DGCCRF devrait pouvoir y avoir accès.
Je veux aussi aborder un problème plus prégnant : la publicité nationale. Quand vous allez en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion, vous voyez des publicités qui intéressent plutôt l’Hexagone. Elles ne bénéficient ni aux distributeurs ni même aux grossistes.
Pourtant, on leur fait payer une coopération commerciale, qui est en fait de la publicité : elle devrait être défalquée des surcoûts. Un vendeur ne peut pas imposer à un acheteur domicilié en outre-mer de payer quelque chose sur ces pratiques, sauf à ce qu’un volume significatif du produit soit vendu outre-mer.
N’oublions pas qu’il faut aussi payer le transport terrestre dans l’Hexagone, l’assurance fret, le coût du dépotage, le placement dans les gondoles, etc.
Bref, on vous fait payer indûment un avantage, ce qui s’apparente à une discrimination sanctionnée par la loi. Mais cette discrimination n’est jamais reconnue.
L’honnêteté m’oblige à dire que cette proposition est inspirée par les distributeurs eux-mêmes. Nous avons repris et remanié cette idée dans le but de corriger cette inégalité de traitement infligée aux acheteurs ultramarins.
Je rappelle, et je termine sur ce point, que cela s’appelait auparavant les tarifs export. Nous souhaitons faire en sorte que les distributeurs ne paient que ce qui est effectif. Or la publicité, les boosters, les PLV, par exemple, ne sont pas effectivement mis en œuvre dans les outre-mer. Voilà ce que nous demandons de corriger. Je n’irai pas plus loin et je laisse les paragraphes III et IV à votre sagacité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 45 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 39 rectifié, présenté par Mmes Jacques, Eustache-Brinio et Malet, M. Naturel, Mme Renaud-Garabedian et MM. Pointereau, Cambon, H. Leroy, Séné, Khalifé et Panunzi, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Le III de l’article L. 441-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Pour les produits et services destinés aux collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ou aux collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon ou Wallis-et-Futuna, les modalités de prise en compte par le fournisseur des surcoûts liés aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités, notamment les frais de transport, d’exploitation, de logistique et fiscaux supportés par le distributeur, et l’objectif de réduction de l’écart des prix entre l’Hexagone et ces territoires. »
2° Le III de l’article L. 441-3-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Pour les produits et services destinés aux collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution ou aux collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon ou Wallis-et-Futuna, les modalités de prise en compte par le fournisseur des surcoûts liés aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités, notamment les frais de transport, d’exploitation, de logistique et fiscaux supportés par le grossiste et l’objectif de réduction de l’écart des prix entre l’Hexagone et ces territoires. »
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement vise à faire prendre en compte les caractéristiques et contraintes des marchés ultramarins dans les relations entre distributeurs et grossistes, d’une part, et fournisseurs, d’autre part.
En effet, les grossistes-importateurs et les distributeurs des départements et régions d’outre-mer (Drom) supportent des surcoûts spécifiques liés à l’éloignement et à l’insularité.
Il s’agit en particulier des surcoûts de transport entre l’Hexagone et le Drom destinataire, des surcoûts d’exploitation liés à la nécessité de surstocker par rapport à l’Hexagone, des coûts liés à la gestion plus complexe des invendus, des frais marketing et commerciaux supplémentaires pour adapter l’offre commerciale aux consommateurs des Drom, etc.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Sagesse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 39 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
L’amendement n° 114, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et M. Xowie, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les conventions commerciales conclues entre fournisseurs et distributeurs pour les fournitures destinées aux collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna ne peuvent contenir de clause ou condition tarifaire discriminatoire, directement ou indirectement, par rapport à l’Hexagone, sans justification objective liée aux coûts de transport, logistique ou adaptation réglementaire.
II. – Constituent des justifications objectives au sens du présent article :
1° Les coûts de transport maritime ou aérien, attestés par des factures ou contrats de fret ;
2° Les frais de manutention portuaire ou douanière, justifiés par des reçus ou déclarations en douane ;
3° Les adaptations réglementaires spécifiques aux collectivités ultramarines, documentées par les autorités compétentes ;
4° Les surcoûts liés à l’éloignement géographique, évalués par un observatoire indépendant.
En l’absence de justification recevable dans un délai de trente jours à compter de la demande de l’autorité administrative, ces clauses sont présumées abusives au sens de l’article L. 442-1 du code de commerce.
III. – Les distributeurs et fournisseurs doivent transmettre annuellement à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et aux observatoires des prix, des marges et des revenus territorialement compétents un rapport standardisé sur les conditions générales de vente appliquées aux collectivités ultramarines, incluant :
1° La liste exhaustive des produits concernés, avec leurs prix d’achat et de vente ;
2° Le détail des remises, ristournes et avantages en nature, y compris ceux accordés par des entités tierces ;
3° Les justifications des écarts de prix par rapport à la métropole, avec pièces justificatives ;
4° Les noms et sièges sociaux de toutes les entités – filiales, sous-traitants, prestataires logistiques – intervenant dans la chaîne d’approvisionnement des collectivités ultramarines y compris celles établies hors de France.
Ce rapport est publié sur le site internet de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et transmis aux observatoires des prix, des marges et des revenus.
IV. – Le refus de communiquer les informations demandées dans un délai de trente jours constitue une présomption de discrimination tarifaire abusive, passible des sanctions prévues à l’article L. 442-1 du code de commerce.
V. – En cas de manquement aux obligations du présent article, les sanctions suivantes s’appliquent :
1° Premier manquement : amende administrative de 0,5 % du chiffre d’affaires annuel réalisé dans les collectivités ultramarines ;
2° Récidive dans les deux ans : amende portée à 1 % du chiffre d’affaires annuel, avec publication de la décision ;
3° Manquement répété ou refus de coopérer : amende de 2 % du chiffre d’affaires mondial, avec exclusion temporaire des marchés publics.
VI. - Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article, notamment le format du rapport standardisé et les procédures de contrôle.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. L’article 8 du projet de loi interdit, à juste titre, les discriminations tarifaires entre l’Hexagone et les outre-mer. C’est une avancée.
Toutefois, cet article doit être complété afin d’encadrer précisément les justifications légitimes d’un écart de prix – transport, fret, manutention, adaptation réglementaire, etc. –, mais aussi afin d’imposer aux distributeurs et aux fournisseurs de prouver, documents à l’appui, la justification des écarts sous peine de sanction.
Nous cherchons, par notre amendement, à établir une grille de justifications objectives d’un écart de prix entre la métropole et les outre-mer. Cet amendement vise à créer une obligation de transparence proactive afin que les distributeurs ne puissent invoquer des surcoûts logistiques sans les documenter. Pour que la règle ait un effet réel, des sanctions graduées sont prévues en cas de refus ou de manquement.
En somme, cet amendement n’a pas pour objet de modifier l’esprit du texte : il le rend simplement applicable et vérifiable en le transformant en un outil plus concret de régulation. C’est une mesure de transparence réelle qui permettrait enfin à la DGCCRF et aux OPMR de reconstituer la chaîne de valeur et de débusquer les abus. Tel est bien l’objet de ce projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement est satisfait par les dispositions de l’article 8, qui prohibe les clauses générales de vente (CGV) discriminatoires au seul motif que des produits sont destinés à être vendus outre-mer.
Lorsque les CGV des produits à destination de ces territoires sont différenciées, ces différences devront être dûment justifiées auprès de la DGCCRF lorsque celle-ci en fera la demande.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Effectivement, cet amendement est satisfait par l’article 8, qui interdit déjà les clauses et conditions tarifaires discriminatoires.
L’apport de cet amendement réside dans la liste, laquelle risque de s’avérer très vite incomplète. Il se pourrait aussi que l’adoption d’une telle liste conduise à interdire des différenciations qui, in fine, pourraient être utiles pour les outre-mer.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 114.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 113 rectifié, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les conventions commerciales conclues entre fournisseurs et distributeurs pour la fourniture de biens destinés à la vente dans les collectivités mentionnées à l’article 2 de la présente loi ne peuvent comporter de clauses ou de dispositifs, directs ou indirects, ayant pour objet ou pour effet de :
1° Dissimuler tout ou partie des coûts réels d’achat, de transport ou de marge, notamment par le recours à des entités tierces établies hors desdites collectivités ;
2° Fractionner artificiellement les flux d’approvisionnement ou les facturations pour échapper aux obligations de déclaration prévues par les articles 6 et 7 de la présente loi ;
3° Facturer des services fictifs ou surévalués, y compris sous forme de commissions, ristournes conditionnelles ou avantages en nature non justifiés par une contrepartie réelle ;
4° Externaliser la détermination des prix ou des marges vers des sociétés ou filiales dont l’activité principale n’est pas liée à la distribution ou à la logistique dans les collectivités concernées.
II. – Constituent notamment des dispositifs interdits au sens du I :
La facturation de prestations logistiques ou commerciales par des entités établies hors des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, lorsque ces prestations ne correspondent pas à des services effectivement rendus ou sont surévaluées de plus de 20 % par rapport aux coûts moyens du marché ;
Le recours à des contrats conclus avec des sociétés dont le siège social est situé dans un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du code général des impôts, lorsque ces contrats ont pour effet de réduire artificiellement les coûts déclarés ou les marges communiquées aux autorités compétentes ;
Toute pratique visant à modifier rétroactivement les conditions commerciales après leur communication à l’autorité administrative, afin de dissimuler des écarts de prix ou de marges.
III. – Tout manquement aux dispositions du présent article est constitutif d’une pratique restrictive de concurrence au sens de l’article L. 442-6 du code de commerce et est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes de l’entreprise concernée.
IV. – Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont habilités à :
1° Demander la communication de l’intégralité des contrats et conventions liés à l’approvisionnement des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, y compris ceux conclus avec des entités établies hors de ces collectivités ;
2° Effectuer des contrôles inopinés dans les locaux des entreprises concernées, avec le concours des douanes locales, et à saisir les observatoires des prix, des marges et des revenus pour expertise complémentaire.
V. – Le refus de communiquer les informations demandées dans un délai de trente jours à compter de la réception de la demande constitue une présomption de manquement aux obligations de transparence, passible des sanctions prévues au III.
VI. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article, notamment la liste indicative des clauses ou dispositifs présumés frauduleux, les méthodes de calcul des surévaluations de services facturés.
La parole est à M. Alexandre Basquin.
M. Alexandre Basquin. La vie chère dans les territoires d’outre-mer ne résulte pas seulement d’un écart de prix. Elle naît aussi de mécanismes propres utilisés par certains grands groupes pour gonfler artificiellement leurs coûts. Ces pratiques rendent impossible tout contrôle efficace de la formation des prix dans les outre-mer.
L’objectif de cet amendement est simple : rétablir la transparence. Nous souhaitons ainsi interdire les clauses et dispositifs qui dissimulent les coûts réels, habiliter la DGCCRF à accéder aux contrats d’approvisionnement et introduire une présomption de manquement en cas de refus de communication.
En d’autres termes, nous entendons donner à l’administration les moyens de contrôler les prix appliqués.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à traquer les services fictifs, les fractionnements artificiels des flux d’approvisionnement, etc. Il s’agit de combattre toutes ces pratiques malhonnêtes qui portent atteinte au pouvoir d’achat des plus précaires de la République, c’est-à-dire les habitants des outre-mer.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 113 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 9
Après l’article L. 123-5-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 123-5-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 123-5-1-1. – Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna, à la demande des associations de consommateurs mentionnées à l’article L. 621-1 du code de la consommation qui justifient d’une atteinte directe ou indirecte à l’intérêt collectif des consommateurs ou du représentant de l’État, le président du tribunal, statuant en référé, peut enjoindre sous astreinte toute personne morale ou le dirigeant de toute personne morale de procéder au dépôt des pièces et actes au registre du commerce et des sociétés auquel celle-ci est tenue par des dispositions législatives ou réglementaires.
« Le montant de cette astreinte ne peut excéder 5 % du chiffre d’affaires journalier moyen hors taxes de la personne morale réalisé au cours du dernier exercice par jour de retard à compter de la date fixée par l’injonction.
« En cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive, l’astreinte est liquidée selon les modalités fixées par décret en Conseil d’État.
« Le président du tribunal peut, à la demande d’une partie, ordonner la publication de la décision sur un support et pour une durée qu’il détermine aux frais de la personne objet de l’injonction. – (Adopté.)
Après l’article 9
M. le président. L’amendement n° 67 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 232-23 du code de commerce, il est inséré un article L. 232-23-… ainsi rédigé :
« Art. L. 232-23-…. – Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, les commissaires aux comptes sont tenus de déposer au greffe du tribunal, pour être annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois suivant l’approbation des comptes annuels par l’assemblée ordinaire des associés ou par l’associé unique ou dans les deux mois suivant cette approbation lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique, les comptes annuels et, le cas échéant, les comptes consolidés, le rapport sur la gestion du groupe, les rapports sur les comptes annuels et les comptes consolidés, éventuellement complétés de leurs observations sur les modifications apportées par l’assemblée qui leur ont été soumises ainsi que le rapport de certification des informations en matière de durabilité. »
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Nous avons évoqué des sanctions qui seraient en elles-mêmes dissuasives et qui n’auraient pas vocation à être utilisées, sauf en cas de réitération et de refus de respecter la loi.
Avec cet amendement, je l’avoue, je reprends une suggestion du Mouvement des entreprises de France (Medef) : un prestataire indépendant assermenté, à savoir le commissaire aux comptes, qui vérifie si la comptabilité est faite selon les règles de l’art, si j’ose dire, endosserait la responsabilité de transmettre au greffe du tribunal la certification des comptes, ainsi que les documents annexes.
Ainsi, ces informations pourront être transmises au greffe sans que cela coûte un sou vaillant.
Selon la commission, cette disposition pénalisera les petites et moyennes entreprises. Mais je rappelle que l’obligation d’avoir recours à un commissaire aux comptes ne pèse que sur les entreprises dont le total de bilan dépasse 5 millions d’euros et le chiffre d’affaires 10 millions d’euros ; il faut en outre que l’effectif salarié soit d’au moins 50 personnes. De fait, cela signifie que seules les grosses entreprises sont assujetties à cette obligation. Sans oublier que notre proposition ne leur coûtera rien !
J’ai l’impression que, une nouvelle fois, certains ici ont des réticences à imposer quoi que ce soit aux entreprises : en l’occurrence, il s’agit d’une prestation supplémentaire, si j’ose dire, pour les commissaires aux comptes, à savoir le dépôt direct au greffe des comptes de l’entreprise. Il s’agit donc d’un amendement de bon sens !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent que l’obligation de dépôt des comptes des entreprises soit opposable aux commissaires aux comptes. On ferait ainsi peser cette obligation sur les commissaires aux comptes plutôt que sur les sociétés fautives, ce qui n’est pas pertinent.
En outre, les commissaires aux comptes risquent d’être débordés : si les TPE et les PME n’ont pas d’obligation formelle de dépôt de leurs comptes, pour autant, les commissaires risquent, faute de temps, de se trouver en défaut pour déposer tous les comptes, tandis que les plus grosses entreprises disposent de leurs propres commissaires et que leur personnel est en mesure d’accomplir ce travail.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis pour les mêmes raisons.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Vous me voyez sourire : je parlais de réticences, mais il s’agit plutôt d’une réelle résistance ! Il ne s’agit nullement de rendre cette obligation opposable aux commissaires aux comptes ; simplement, on leur confie une mission supplémentaire.
Je rappelle que le commissaire aux comptes est indépendant et qu’il doit attester que la comptabilité est sincère. Sa responsabilité est déjà engagée s’il ne respecte pas les prescriptions de la loi.
Il leur suffira de transmettre les comptes certifiés au greffe du tribunal de commerce en même temps qu’à l’entreprise. Je ne vois pas en quoi cela pose problème.
En seraient-ils débordés ? Mon Dieu, non : c’est un dépôt dématérialisé, qui s’effectue par un simple clic. Les commissaires vérifient déjà nécessairement les comptes, leur devoir est de délivrer une certification de sincérité. La mission supplémentaire que nous leur demandons d’assumer ne les surchargera pas, c’est un simple test de bonne volonté. Cela ne coûtera rien à personne, mais, à vous croire, ce serait Cuba !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 67 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 71, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Les mots : « ou qui » sont remplacés par les mots : « , qui » ;
c) Après les mots : « activité économique », la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « ou dont le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé dans le territoire concerné est supérieur à un million d’euros transmettent, le 30 juin de chaque année, au représentant de l’État dans le territoire et à l’observatoire des prix, des marges et des revenus compétent les comptes sociaux et la comptabilité analytique de leur dernier exercice clos. » ;
2° Le second alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« II. – Chaque trimestre, les entreprises mentionnées au I, les commerçants détaillants dont la surface de vente est supérieure ou égale à 300 mètres carrés ainsi que les commerçants en gros transmettent au représentant de l’État dans le territoire, au service statistique public et à l’observatoire des prix, des marges et des revenus compétent :
« 1° Les taux de marge en valeur pratiquée sur les produits commercialisés et leurs évolutions ;
« 2° Le cas échéant, les taux de marge pratiqués tout au long de la chaîne d’approvisionnement, de livraison et de commercialisation des produits et leurs évolutions ;
« 3° Les prix d’achat et de vente des produits alimentaires et non alimentaires et leurs évolutions ;
« 4° Le cas échéant, pour les filiales des entreprises détenues à plus de 25 % par leur société mère, les prix de cession interne et leurs évolutions.
« III. – En l’absence de transmission des données et documents mentionnés aux I et II, le représentant de l’État dans le territoire saisit le juge des référés afin que ce dernier adresse à l’entreprise une injonction de transmettre lesdits données et documents sous trois semaines et sous astreinte. Le montant de cette astreinte ne peut être inférieur à 2 % du chiffre d’affaires journalier moyen hors taxes réalisé par l’entreprise en France lors du dernier exercice clos, par jour de retard à compter de la date fixée par l’injonction.
« L’injonction fait l’objet d’une mesure de publicité. L’entreprise est informée, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l’injonction, de la nature et des modalités de la publicité envisagée. La publicité est effectuée aux frais du professionnel destinataire de l’injonction.
« IV. – Les informations transmises en application du présent article ne sont pas diffusées auprès des consommateurs ni rendues publiques.
« V. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2027. Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Le dispositif de cet amendement reprend celui de l’article 1er de la proposition de loi visant à lutter contre la vie chère en renforçant le droit de la concurrence et de la régulation économique outre-mer, telle que je l’avais déposée. Son objet est de rendre plus prescriptif l’article 22 de la loi du 20 novembre 2012 afin, là encore, de renforcer la transparence des activités économiques.
Sans rentrer dans le détail de notre proposition, je dirai simplement que nous demandons l’instauration d’obligations de transparence spécifiques pour les entreprises dont plus de 25 % du capital est détenu par une société-mère.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Il est défavorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Ce dispositif ferait doublon avec celui que vous avez adopté à l’article 9, aux termes duquel le représentant de l’État peut saisir le président du tribunal de commerce territorialement compétent pour enjoindre à une personne morale de déposer ses comptes.
En outre, une obligation de transmission des informations sur les prix et les quantités des produits de grande consommation est également instaurée à l’article 6, que votre assemblée a renforcé.
Cet amendement me semblant donc satisfait, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Monsieur Lurel, l’amendement n° 71 est-il maintenu ?
M. Victorin Lurel. Mme la ministre affirme que l’amendement est satisfait, mais je n’en suis pas convaincu. Je le maintiens !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 56, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Sont ajoutés dix alinéas ainsi rédigés :
« Le bénéfice des aides économiques accordées par l’État ou les collectivités territoriales dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, qu’elles revêtent la forme de crédits d’impôt, de défiscalisation, de réductions de cotisations sociales, de subventions directes ou d’avantages fiscaux de quelque nature que ce soit, est subordonné au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux conformément au droit qui s’applique à l’entreprise bénéficiaire.
« Sont notamment visés par cette disposition :
« 1° Les dispositifs de défiscalisation applicables aux investissements productifs en outre-mer ;
« 2° Les aides aux entreprises relevant de la loi de finances relative à l’économie des outre-mer ;
« 3° Les exonérations de cotisations patronales ou de charges sociales ;
« 4° Les subventions d’investissement ou de fonctionnement ;
« 5° Toute autre aide financière publique, directe ou indirecte.
« L’entreprise bénéficiaire doit justifier, au moment de la demande et chaque année du versement de l’aide, qu’elle s’acquitte de l’obligation de publication de ses comptes. Cette justification doit être apportée auprès de l’autorité publique qui octroie l’aide.
« Le non-respect de cette obligation de publication ou la falsification des comptes produits est constitutif d’une violation des conditions d’octroi de l’aide et justifie le remboursement total ou partiel des aides versées, sans préjudice des sanctions prévues par le droit pénal.
« …. – Un arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé des finances précise les modalités d’application du présent article, notamment les délais de production des justificatifs et les seuils de chiffre d’affaires au-dessus desquels l’obligation de publication s’impose. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Je le retire au profit de l’amendement n° 55 rectifié qui suit, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 56 est retiré.
L’amendement n° 55 rectifié, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice des aides économiques accordées par l’État ou les collectivités territoriales est subordonné au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux conformément au droit qui s’applique à l’entreprise bénéficiaire. Les modalités d’application du présent alinéa sont définies par décret. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à renforcer la transparence financière et la responsabilité des entreprises bénéficiant d’aides publiques dans les territoires d’outre-mer, en subordonnant l’accès à ces aides au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux.
Les aides économiques accordées aux entreprises par l’État et les collectivités représentent des ressources publiques substantielles, prélevées sur les finances publiques ultramarines ou nationales. Il est légitime que la collectivité exige en contrepartie une transparence financière minimale de la part de leurs bénéficiaires.
À La Réunion comme dans d’autres territoires ultramarins, certaines entreprises bénéficiaires d’aides économiques refusent de se soumettre à l’obligation de publication de leurs comptes sociaux, ou la contournent, ce qui empêche l’évaluation du besoin qu’elles ont de ces aides. Sans comptes certifiés, il est impossible de vérifier que l’entreprise justifie réellement de la nécessité d’une aide.
Cela favorise l’opacité et les abus. La non-publication permet de cacher les bénéfices réels, les structures de groupe, les flux financiers vers des tiers ou encore les rémunérations excessives de dirigeants.
Cela crée une iniquité, car les TPE-PME, respectueuses de leurs obligations comptables, voient leurs concurrents bénéficier d’avantages publics tout en échappant aux contrôles.
Enfin, cela fragilise les finances publiques, car l’État aide des entreprises sans pouvoir vérifier si l’aide était justifiée ou si elle a atteint son objectif.
Notre proposition s’inscrit ainsi dans la continuité de la loi de modernisation de l’économie de 2008 et de la loi Lurel de 2012 ; elle constitue aussi un prolongement des directives comptables européennes imposant la publication des comptes pour les entreprises dépassant certains seuils.
Nous n’entendons pas, par cet amendement, remettre en cause les aides justifiées : toute entreprise respectant ses obligations légales de publication pourra continuer à en bénéficier. Seules les entreprises refusant une transparence élémentaire en seront exclues.
M. Victorin Lurel. Un bon amendement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Les sanctions proposées sont disproportionnées, d’autant que l’article 9 instaure déjà un nouveau régime de sanctions en cas de non-dépôt des comptes, régime qui a de surcroît été renforcé en commission par un amendement des rapporteurs.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Il est proposé dans cet amendement, me semble-t-il, non pas d’instaurer une sanction, mais de poser une condition à l’octroi d’aides.
Cet objectif me semble louable, tant l’absence de publication des comptes sociaux peut traduire un manque de transparence quant au besoin effectif d’aides, notamment pour ce qui est du bénéfice de l’entreprise.
Les règles européennes relatives aux aides d’État ne font pas de la publication des comptes sociaux une condition de l’octroi de telles aides, mais n’empêchent pas pour autant les États membres de soumettre à cette obligation les entreprises qui en bénéficient. Notons d’ailleurs que les aides fiscales à l’investissement outre-mer sont d’ores et déjà conditionnées au dépôt des comptes.
J’approuve donc l’objet de cet amendement, dont la rédaction est en outre meilleure que celle de l’amendement n° 56 qui a été retiré. Par conséquent, l’avis du Gouvernement est favorable.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Voter cet amendement ne mange pas de pain, mes chers collègues ! Il est tout de même question des dotations destinées aux territoires ultramarins, dotations qui sont reversées à ces entreprises sous forme d’aides. Il est normal que ces aides fassent à un moment donné l’objet d’un certain contrôle et que des sanctions soient prononcées si la nécessité de ces aides ne peut être vérifiée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 55 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.
TITRE III
RENFORCER LA CONCURRENCE
Article 10
I. – L’article L. 461-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « dix-sept » est remplacés par le mot : « dix-neuf » ;
b) Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Deux personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer. » ;
c) Au septième alinéa, les références : « 2° et 3° » sont remplacés par les références : « 2°, 3° et 4° » ;
2° Au III, les mots : « , sous réserve du septième alinéa du II, » sont supprimés.
II. – Le mandat des membres nommés pour la première fois en application du 4° du II de l’article L. 461-1 du code de commerce prend effet à compter du 18 septembre 2026. Le mandat du membre nommé en second prend fin le 17 mars 2029 et peut être renouvelé pour une durée de cinq ans.
III. – Le premier alinéa de l’article L. 461-4 du code de commerce est ainsi rédigé :
« L’Autorité de la concurrence dispose de services d’instruction, dont l’un traite les sujets concernant les collectivités de l’article 73 de la Constitution, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna. Ils sont dirigés par un rapporteur général nommé par arrêté du ministre chargé de l’économie après avis du collège. »
IV. – Après l’article 6 de l’ordonnance n° 2014-471 du 7 mai 2014 portant extension et adaptation à la Nouvelle-Calédonie de dispositions du livre IV du code de commerce relevant de la compétence de l’État en matière de pouvoirs d’enquête, de voies de recours, de sanctions et d’infractions, il est inséré un article 6-1 ainsi rédigé :
« Art. 6-1. – Les décisions par lesquelles le rapporteur général de l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, en application de l’article Lp. 463-4 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie, refuse la protection du secret des affaires ou lève la protection accordée peuvent faire l’objet d’un recours en réformation ou en annulation devant le premier président de la cour d’appel de Paris ou son délégué.
« L’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris statuant sur ce recours peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation.
« Ce recours et ce pourvoi sont instruits et jugés en chambre du conseil.
« Un décret en Conseil d’État détermine les délais de recours et de pourvoi et fixe la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, au plus tard le 1er janvier 2026. »
V. – Après l’article L. 462-9-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 462-9-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 462-9-1-1. – L’Autorité de la concurrence peut, sans que puisse y faire obstacle l’obligation de secret professionnel, communiquer à l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, de sa propre initiative ou sur demande de cette dernière, toute information ou document qu’elle détient ou qu’elle recueille, dans l’exercice de ses propres missions ou de celles exercées pour le compte de cette autorité. »
VI. – Le III de l’article L. 430-2 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « un ou plusieurs départements d’outre-mer, dans le Département de Mayotte, dans les îles Wallis et Futuna ou dans » sont remplacés par les mots : « les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et » ;
2° Au troisième alinéa, le nombre : « 5 » est remplacé par le nombre : « 3 ».
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 10 vise à augmenter les moyens de l’Autorité de la concurrence (ADLC).
Je veux avant tout souligner la qualité du travail de la commission des affaires économiques sur ce texte ; en témoigne l’ampleur de son rapport, de plus de 130 pages. Ce travail est aussi une marque de solidarité entre ceux qui, parmi nous, représentent des territoires de métropole et ceux qui représentent nos outre-mer ; cette solidarité aussi mérite d’être relevée.
L’ADLC, autorité administrative indépendante instituée par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, est composée d’un collège de dix-sept membres nommés pour cinq ans. Ses services d’instruction emploient 123 équivalents temps plein travaillé (ETPT).
Elle mène une action importante dans les outre-mer : depuis 2008, elle a rendu 46 décisions les concernant, pour un total de 232 millions d’euros d’amendes, dont 177 millions d’euros prononcés à l’encontre d’auteurs de pratiques anticoncurrentielles. Elle a également publié plusieurs avis relatifs à l’outre-mer, qui témoignent, eux aussi, de l’importance de cette autorité.
Aux termes de cet article, le nombre de membres du collège de l’ADLC passerait à dix-neuf : on adjoindrait aux membres existants deux « personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ».
L’article prévoit aussi la formation au sein de l’Autorité d’un service d’instruction spécifique pour l’outre-mer.
L’article procède également à une augmentation des moyens de la DGCCRF en outre-mer.
Enfin, il abaisse outre-mer, de 5 millions à 3 millions d’euros, le seuil de notification en matière de concentration dans le commerce de détail, secteur très sensible dans les territoires ultramarins au vu du contexte de crise de la vie chère. On reprend ainsi l’une des mesures de la proposition de loi de notre collègue Victorin Lurel adoptée par notre assemblée le 5 mars 2025.
Au vu de ces éléments, les membres du groupe Les Indépendants voteront évidemment cet article.
M. le président. L’amendement n° 136 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après le mot :
personnalités
insérer les mots :
, issues de deux bassins géographiques différents,
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Le présent article prévoit l’ouverture du collège de l’Autorité de la concurrence à des personnalités ayant une « expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ».
Nous proposons que ces représentants ultramarins soient issus de deux bassins géographiques différents, afin de renforcer la prise en compte de la diversité de nos territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Imposer que les deux membres du collège de l’Autorité de la concurrence nommés en tant qu’experts des questions ultramarines soient issus de deux bassins géographiques différents paraît trop restrictif et exclut la possibilité que ces personnalités soient issues de l’Hexagone.
Il importe avant tout de nommer les personnalités les plus qualifiées possible en matière de concurrence outre-mer et de connaissance des économies ultramarines, quand bien même elles devraient provenir d’un même bassin géographique ultramarin ou de l’Hexagone.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. À en croire notre rapporteur, la précision que nous demandons reviendrait à imposer une sorte de décision ethnique, voire chromatique… Il faudrait que l’on soit originaire des outre-mer ; mais ce n’est en aucune manière ni la lettre ni l’esprit de notre amendement !
Si vous êtes expert de tel ou tel territoire ultramarin, du Pacifique ou de l’océan Indien, de l’Atlantique ou des Caraïbes, ce ne sont évidemment pas vos origines qui seront appréciées, mais votre expertise et vos qualifications. Tel est le sens de notre amendement, et non pas le communautarisme échevelé que vous voulez y voir ! Il importe de ne pas le dévoyer, mais de bien en comprendre le sens.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Nous voici devant un cas où la notion d’« ultramarin », contre laquelle je me bats régulièrement, trouve toutes ses limites. Qu’est-ce donc qu’une personnalité ultramarine experte ? J’avoue que cela me pose problème. Ce doit être une espèce d’homme-orchestre, qui connaîtrait sur le bout des doigts tout ce qui se passe à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie, en Guadeloupe… Il faut arrêter !
Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, je n’ai cessé d’entendre dire qu’il faut absolument différencier les territoires, qu’aucun d’entre eux ne ressemble à un autre. Or on persiste à nous soumettre des dispositions qui vont dans le sens contraire.
Qu’on me donne donc l’ADN d’un expert ultramarin ! J’avoue peiner à qualifier cet homme ou cette femme-orchestre, qui saurait tout sur l’économie, la concurrence, les forces en présence, etc., d’une bonne dizaine de pays. Certains disent que ces personnalités existent ; pour ma part, je demande à voir.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Si vous me permettez d’insister, mes chers collègues, je tiens à rappeler les termes sur lesquels porte notre amendement : « deux personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ». Ce n’est pas le physique qui est visé, mais bien la compétence, la connaissance, l’appétence pour cette matière et la capacité à la défendre demain.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 136 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 133 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 18 à 20
Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :
VI. – Le III de l’article L. 430-2 du code de commerce est ainsi rédigé :
« III. – Lorsque au moins une des parties à la concentration exerce tout ou partie de son activité dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et les collectivités d’outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Martin ou de Saint-Barthélemy, est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du présent titre toute opération de concentration, au sens de l’article L. 430-1, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes :
« 1° Le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé individuellement dans au moins un des départements ou collectivités territoriales concernés par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 15 millions d’euros, ou à 3 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail sans qu’il soit nécessaire que ce seuil soit atteint par l’ensemble des entreprises concernées dans le même département ou la même collectivité territoriale ;
« 2° L’opération n’entre pas dans le champ d’application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, précité.
« Les modalités d’application du présent III sont précisées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à adapter, dans les départements et collectivités d’outre-mer, la procédure de déclenchement du contrôle des concentrations économiques, afin de mieux tenir compte de la structure économique locale et de la taille réelle des entreprises opérant sur ces marchés.
Rappelons que le dispositif en vigueur fixe trois conditions pour le déclenchement de ce contrôle ; en particulier, le chiffre d’affaires total mondial hors taxes de l’ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration doit être supérieur à 75 millions d’euros.
Or ce seuil est extrêmement élevé quand il s’agit de tissus économiques insulaires ou enclavés, peu insérés dans le commerce mondial, comme le sont ceux de nos territoires, dominés par les petites et moyennes entreprises et les filiales de groupes régionaux.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 103 est présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 125 est présenté par MM. Mellouli et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au deuxième alinéa, le nombre : « 75 » est remplacé par le nombre : « 50 » ;
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 103.
M. Victorin Lurel. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour présenter l’amendement n° 125.
M. Akli Mellouli. Cet amendement vise à abaisser, de 75 millions à 50 millions d’euros de chiffre d’affaires total mondial cumulé, le seuil à partir duquel une opération de concentration commerciale intervenant dans une collectivité relevant de l’article 73 de la Constitution doit être notifiée à l’Autorité de la concurrence et soumise à son accord.
Il nous paraît important d’abaisser ce seuil, au vu de la superficie des territoires concernés, pour améliorer les contrôles et la transparence.
M. le président. L’amendement n° 102, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Au troisième alinéa, les mots : « 15 millions d’euros, ou à 5 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail » sont remplacés par le montant : « 3 millions d’euros ».
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Défendu !
M. le président. L’amendement n° 134 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…° Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Deux ou plusieurs opérations intervenues au cours d’une période de deux années entre les mêmes personnes ou entreprises sont considérées comme une seule concentration, réputée intervenir à la date de la dernière opération. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à transposer dans le code de commerce une disposition spécifique à la Nouvelle-Calédonie qui nous semble utile et pragmatique. Ainsi, on pourra prévenir d’éventuelles manœuvres de contournement de la loi par certains acteurs économiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. L’amendement n° 133 rectifié tend à supprimer, pour le déclenchement d’un contrôle par l’Autorité de la concurrence, tout seuil de chiffre d’affaires total mondial hors taxes de l’ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à une opération de concentration concernant un territoire ultramarin.
Lors de l’audition de ses représentants, l’Autorité de la concurrence nous a fait valoir que la suppression de ce seuil, outre qu’elle ne s’appuie sur aucune étude d’impact, risquerait d’augmenter de manière très sensible le nombre d’opérations soumises à obligation de notification, ce qui ferait peser une charge supplémentaire sur ces entreprises, mais susciterait aussi une surcharge administrative importante pour les services de l’Autorité, sans que cette évolution la conduise nécessairement à examiner des opérations problématiques en matière de concurrence.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement, ainsi que sur les autres amendements faisant l’objet de la discussion commune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements qui visent à abaisser les seuils de déclenchement des contrôles auxquels peuvent être soumises les opérations de concentration. Le texte procède déjà à un renforcement de ces contrôles pour le commerce de détail ; c’est ce qui compte pour atteindre l’objectif assigné à ce projet de loi. Il n’y a pas, selon nous, matière à aller plus loin.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Mon explication de vote porte sur l’amendement n° 134 rectifié.
Il s’agit d’un amendement de bon sens, qui a dû être inspiré à notre collègue Audrey Bélim par des faits qui se sont déroulés à La Réunion.
L’Autorité de la concurrence, il y a quelques années, avait pointé les risques importants que faisait peser une opération pour laquelle le groupe Bernard Hayot (GBH) s’était engagé à rétrocéder quatre hypermarchés de notre territoire. Cette opération avait été validée par le Conseil d’État, mais le nouvel acteur qui avait repris ces magasins avait très vite frôlé la faillite ; ses créances ont alors été apurées par les pouvoirs publics, ce qui a permis son rachat par un groupe mauricien. Ce fiasco a coûté à l’État la bagatelle de 35 millions d’euros, alors même que GBH est plus prospère que jamais à La Réunion !
Cet amendement est donc justifié par des faits bien réels ; l’adopter nous éviterait simplement de reproduire les erreurs du passé.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 133 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 103 et 125.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 102.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 134 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
Après l’article 10
M. le président. L’amendement n° 52, présenté par Mmes Bélim et Conconne, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 141-1 du code de la consommation, il est inséré un article L. 141-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 141-1-…. – Dans le cadre des enquêtes statistiques publiques relatives à la formation des prix, aux coûts logistiques et aux marges de commercialisation dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, l’Institut national de la statistique et des études économiques peut, lorsqu’il se voit opposer le secret des affaires, saisir la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités territorialement compétente.
« La direction mentionnée au premier alinéa peut exiger, par décision motivée, la communication des informations et documents nécessaires auprès des personnes physiques ou morales qui participent à la chaîne de formation des prix. Cette communication intervient sous couvert du secret statistique et dans des conditions garantissant la préservation des intérêts économiques légitimes des entreprises concernées.
« En cas de refus de communication ou de communication incomplète, la direction peut prononcer une sanction administrative, dont le montant ne peut excéder 1 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos, sans préjudice de poursuites pénales éventuelles.
« Le recouvrement et le contentieux de ces sanctions sont opérés comme en matière de créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. »
II. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à renforcer la transparence économique dans les territoires ultramarins, où les mécanismes de formation des prix demeurent insuffisamment connus en raison d’un accès limité aux données économiques.
Le Conseil économique, social et environnemental (Cese), dans son avis n° 2023-23 du 11 octobre 2023 sur le pouvoir d’achat en outre-mer, relève que « l’Insee se heurte régulièrement au secret des affaires (…) lorsqu’il demande des informations. Pour le Cese, cette situation n’est pas admissible. »
En permettant à l’Insee de saisir la direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Deets) compétente lorsqu’il se voit opposer le secret des affaires, cet amendement tend à renforcer la production de données publiques objectives sur les marges, les intermédiaires logistiques et les pratiques tarifaires, tout en sécurisant juridiquement la levée – elle est encadrée – du secret des affaires à des fins exclusivement statistiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent de permettre à l’Insee de saisir les services du ministère de l’économie dans les outre-mer – en l’espèce la Deets territorialement compétente – dans les cas où une entreprise lui oppose le secret des affaires.
L’amendement tend aussi à instaurer un régime de sanctions à cette fin, de sorte que l’entreprise refusant de communiquer ces données ou les transmettant de manière incomplète pourrait se voir infliger une sanction administrative, dont le montant irait jusqu’à 1 % de son chiffre d’affaires.
S’il peut arriver que l’Insee se voit opposer le secret des affaires, permettre la saisie des services du ministère de l’économie dans les outre-mer, en faisant peser sur les entreprises la menace d’une amende aussi élevée, paraît disproportionné.
Nous sommes donc défavorables à l’amendement n° 52, mais nous souhaiterions que le Gouvernement nous précise les solutions qu’il entend mettre en œuvre dans ces cas où le secret des affaires est invoqué pour refuser une demande de l’Insee.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Je voudrais compléter mon argumentaire en faveur de cet amendement, en précisant que nous entendons ainsi répondre à une demande d’intérêt général, adaptée aux spécificités économiques et structurelles de nos territoires, qui sont marqués par une forte concentration des acteurs et une faible transparence sur les marges. C’est l’objet même de ce projet de loi, mes chers collègues !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 52.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 144 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 420-2 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est également prohibé, dans chacune des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, le fait, pour un groupe de distribution, de détenir une part de marché supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d’État au regard des caractéristiques du secteur économique, du groupe et de la position dominante d’un ou de plusieurs acteurs sur le marché concerné. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Nous reprenons, avec cet amendement, une disposition adoptée par l’Assemblée nationale lorsqu’elle a examiné la proposition de loi visant à prendre des mesures d’urgence contre la vie chère et à réguler la concentration des acteurs économiques dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
On constate l’existence sur de nombreux territoires ultramarins de certaines pratiques anticoncurrentielles. Par exemple, certains groupes acquièrent non seulement la licence d’exploitation sur le territoire d’une enseigne spécialisée, mais également celle de sa principale concurrente, empêchant ainsi tout développement concurrentiel sur ce marché.
C’est pourquoi nous proposons de réguler à nouveau ce secteur afin de lutter contre la concentration, tant horizontale que verticale, et ce au bénéfice du pouvoir d’achat des Françaises et des Français des départements ultramarins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement est satisfait par d’autres dispositions du droit de la concurrence, figurant à l’article L. 420-2 du code de commerce, qui interdit les abus de position dominante, mais aussi par l’article 12 du présent projet de loi, qui donne aux commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC) la possibilité de saisir l’Autorité de la concurrence lorsqu’une opération de création ou d’extension de magasins conduirait une entreprise de distribution à disposer d’une part de marché d’au moins 25 % d’une zone de chalandise donnée.
J’attire aussi votre attention sur le fait que, lors de nos auditions, nous avons découvert qu’il n’existait qu’une seule saisine de CDAC en douze ou treize ans d’existence…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 144 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 21, présenté par MM. Théophile, Buval, Kulimoetoke et Fouassin, Mmes Ramia, Nadille et Phinera-Horth, MM. Patient, Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 420-2-1 du code du commerce, il est inséré un article L. 420-2-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 420-2-1-…. – Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ainsi que dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, il est interdit à tout acteur économique, à tout groupement d’entreprises ou consortium d’entreprises de se trouver en situation de position dominante sur un marché déterminé, lorsque cette situation constitue un abus de position dominante ou est de nature à restreindre, fausser ou empêcher le jeu de la concurrence sur ce marché. »
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement va un peu plus loin que les précédents, car il vise à introduire dans le code de commerce un nouvel article applicable spécifiquement aux territoires d’outre-mer.
Y serait précisé qu’il est « interdit à tout acteur économique, à tout groupement d’entreprises ou consortium d’entreprises de se trouver en situation de position dominante sur un marché déterminé, lorsque cette situation constitue un abus de position dominante ou est de nature à restreindre, fausser ou empêcher le jeu de la concurrence sur ce marché ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. L’article L. 420-2 du code de commerce prohibe déjà l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Cela inclut bien sûr les territoires ultramarins.
Les abus de position dominante peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires, ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.
Au titre de sa compétence répressive, l’Autorité de la concurrence a ainsi adopté, depuis sa création en 2008, 46 décisions relatives aux outre-mer, pour un total de 232 millions d’euros d’amendes, dont 177 millions d’euros prononcés à l’encontre d’auteurs de pratiques anticoncurrentielles – ententes et abus de position dominante.
Le présent amendement est donc pleinement satisfait ; l’avis de la commission est par conséquent défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Le problème, c’est qu’on ne peut pas sanctionner la position dominante en soi. Elle n’entraîne pas automatiquement – par essence, si je puis dire – un abus, comme le présuppose cet amendement, pas plus qu’elle porte atteinte au bon fonctionnement de la concurrence.
En pratique, une entreprise peut acquérir une position dominante sur un marché concurrentiel par ses mérites propres ou se trouver de fait dans une telle position, par exemple en raison de l’étroitesse du marché, sans pour autant ni abuser de sa position ni empêcher le jeu concurrentiel.
Le code de commerce permet déjà d’interdire à une entreprise d’abuser de sa position dominante sur un marché donné, par exemple en cas d’imposition de conditions commerciales injustifiées ou discriminatoires. Le droit en vigueur prohibe également l’exploitation abusive de la dépendance économique d’un partenaire commercial quand cela nuit au bon fonctionnement de la concurrence.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 21.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 115, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et M. Xowie, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Toute entreprise exerçant simultanément des activités d’importation, de distribution et de logistique dans une même collectivité mentionnée à l’article 2 de la présente loi, est soumise à un contrôle spécifique de l’Autorité de la concurrence, afin de prévenir les risques de pratiques restrictives de concurrence, notamment :
1° Les abus de position dominante résultant de l’intégration verticale ;
2° Les ententes illicites entre filiales ou entités liées ;
3° Les subventions croisées ou surfacturations internes entre activités.
II. – Les entreprises mentionnées au I doivent transmettre annuellement à l’Autorité de la concurrence un rapport détaillé incluant :
1° Les coûts de transfert entre filiales (importation, logistique, distribution) ;
2° Les marges pratiquées à chaque étape de la chaîne d’approvisionnement ;
3° Les justifications de tout écart supérieur à 10 % par rapport aux coûts moyens du marché.
III. – En cas de manquement aux obligations du présent article, l’Autorité de la concurrence peut :
1° Imposer une amende administrative pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires annuel réalisé dans la collectivité concernée ;
2° Ordonner des mesures correctives, y compris la séparation des activités si les pratiques anticoncurrentielles sont avérées ;
3° Publier une décision de non-conformité, interdisant à l’entreprise concernée de bénéficier de subventions publiques pendant trois ans.
IV. – Le contrôle spécifique prévu au I s’étend aux sous-traitants et prestataires avec lesquels l’entreprise intégrée entretient des liens capitalistiques ou contractuels durables, dès lors que ces liens sont susceptibles d’affecter la concurrence.
V. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article, notamment les critères de définition des liens durables et les procédures de contrôle.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Nous devons lutter contre la concentration économique et la domination de quelques acteurs historiques qui, il est vrai, bénéficient d’une véritable rente de situation.
Nous nous sommes appuyés, pour rédiger cet amendement, sur l’avis de l’observatoire des prix, des marges et des revenus de La Réunion : « La régulation spécifique doit impérativement être renforcée et porter sur la transparence des marchés et surtout sur la structuration des marchés pour écarter les risques d’abus de position dominante – limitation de la taille de surface de vente, interdiction des concentrations verticales et démantèlement dès lors qu’elles sont existantes. »
En d’autres termes, sans intervention forte du législateur pour rompre avec l’opacité et les rentes, rien ne permettra de lutter efficacement contre la vie chère, sujet qui nous occupe aujourd’hui, et une inflation structurelle.
Le mécanisme est le suivant : les marges s’empilent entre les filiales d’un même groupe sans qu’il soit possible d’en mesurer le niveau réel. C’est précisément dans ces circuits internes que se joue une grande partie de la vie chère. Je précise d’ailleurs que cela existe dans d’autres secteurs stratégiques : l’énergie, les banques, les assurances…
C’est pourquoi nous proposons un contrôle spécifique de ces entreprises intégrées par l’Autorité de la concurrence. Ce faisant, il s’agit de passer d’une approche en réaction à un contrôle préventif et régulier. Cela donnera enfin à l’Autorité de la concurrence les moyens de comprendre comment se forment les prix et de prévenir les abus avant qu’ils ne pèsent sur les consommateurs. C’est vérifiable et factuel.
Madame la ministre, madame, monsieur les rapporteurs, trois acteurs concentrent 70 % de certains marchés. Par conséquent, adopter cet amendement répond à une nécessité à la fois économique et démocratique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Il n’est pas nécessaire de créer un contrôle spécifique pour lutter contre ce phénomène, dès lors que l’article L. 420-2 du code de commerce tient compte de ces pratiques abusives.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous verrons bien quelle sera l’issue de ce vote.
Pour autant, voter contre cet amendement reviendrait à s’exonérer totalement de l’avis de l’observatoire des prix, des marges et des revenus de La Réunion, dont je rappelle qu’il est un organisme indépendant, et à envoyer ce message : le législateur laisse faire ! Il n’y aura alors ni régulation des marchés ni contrôle de leur structuration.
Chacun prendra ses responsabilités.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 115.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 116, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Toute entreprise exerçant simultanément des activités d’importation, de distribution et de logistique dans une même collectivité ultramarine doit, dans un délai de deux ans, séparer juridiquement et comptablement ces activités en créant des filiales distinctes, avec :
1° Des comptes sociaux séparés ;
2° Une interdiction des subventions croisées ;
3° Une déclaration annuelle des flux financiers à l’Autorité de la concurrence.
II. – En cas de manquement, l’Autorité de la concurrence peut :
1° Ordonner la séparation immédiate des activités ;
2° Imposer une amende pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires mondial ;
3° Exclure l’entreprise des marchés publics pour trois ans.
III. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application, notamment les critères de séparation comptable et les procédures de contrôle.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Cet amendement a un objet distinct du précédent même s’il se fixe le même objectif. Il va plus loin.
Dans un délai de deux ans, les entreprises exerçant simultanément des activités d’importation, de distribution et de logistique dans une même collectivité ultramarine devront séparer juridiquement et comptablement leurs activités. Cela implique des comptes distincts, l’interdiction des subventions croisées et une déclaration annuelle à l’Autorité de la concurrence.
En effet, ces groupes importent d’une main, vendent de l’autre et, entre les deux, gonflent leurs marges dans des filiales qu’aucun service public ne peut vraiment contrôler.
En ce sens, nous traduisons concrètement ce que les rapports de l’Autorité de la concurrence, du Cese et des OPMR pointent depuis des années : une structure de marché défaillante. Dès lors, il faut remettre en cause cette structure de marché et pas seulement en corriger les effets.
M. le président. L’amendement n° 44 rectifié bis, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, MM. Cozic et M. Weber, Mme G. Jourda et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, tout groupe de société intégré s’assure d’une exploitation autonome de ses activités de grossiste-importateur, qui soit distincte de celles de distribution au détail.
Un décret précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit. Il ne me paraît pas incongru de demander la séparation des activités d’importateurs-grossistes de celles de détaillants. Cela éviterait les conflits d’intérêts.
Je tiens à faire remarquer que, à l’issue de l’examen de ce texte, nous aurons sciemment refusé de nous attaquer à la structuration conglomérale des marchés dans les outre-mer.
Nous aurons refusé de reconnaître que la verticalisation, l’intégration, la concentration impliquaient nécessairement manque de transparence, abus de position dominante et excès.
Nous aurons refusé de reconnaître que cette situation est due non pas aux handicaps géographiques, que sont la distance ou l’éloignement, mais à la concentration, à l’intégration et à l’action de quelques groupes. Je rappelle que, en 2016-2017 – cette étude qui portait sur la Martinique n’a pas été réactualisée –, 70 entreprises possédaient dans ce département plus de 50 % des marchés et réalisaient 18 millions d’euros de chiffres d’affaires.
C’est pourquoi je demande a minima la séparation de ces deux segments d’activités.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
La séparation juridique et comptable des activités d’importation, de distribution et de logistique par la création de filiales spécifiques constitue une ingérence excessive dans la vie des entreprises sur le fondement d’une suspicion généralisée d’abus de position dominante, dès lors qu’une entreprise dispose de plusieurs activités dans une chaîne de valeur.
Les entreprises doivent pouvoir s’organiser librement, tout en veillant à ne pas avoir recours à des pratiques restrictives de concurrence, sous peine de sanctions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président.
L’adoption de ces amendements porterait une atteinte manifeste à la liberté d’entreprendre, en bridant la libre organisation de l’activité des entreprises. Les entreprises peuvent vouloir s’organiser d’une certaine façon et regrouper des activités pour des raisons tout à fait légitimes, a fortiori légales : réaliser des économies, appliquer une politique salariale uniforme…
Ce texte prévoit d’autres avancées en matière de transparence. Je vous propose de nous y cantonner.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’avoue très sincèrement que j’entends l’argument. Je serais même prêt à le retenir, si la chaîne d’approvisionnement n’était pas constituée de maillons intermédiaires et que l’on n’ignorait pas les prix de cession internes, c’est-à-dire les marges intermédiaires. Sur ces sujets, il n’existe pas de transparence.
Il est vrai que l’objet de cet amendement donne l’impression d’une sorte d’immixtion dans l’organisation interne des entreprises. Certaines d’entre elles n’hésitent pas à créer artificiellement des filiales, voire des holdings, ce qui leur permet même parfois de ne pas payer certains impôts et de rémunérer leurs dirigeants en dividendes ou intérêts.
La situation n’est pas seulement conjoncturelle ; or vous refusez de vous attaquer aux causes structurelles, en arguant qu’il faut laisser le marché faire librement.
Je maintiens l’amendement n° 44 rectifié bis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 116.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 44 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 135 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, sauf dérogation motivée de la commission départementale d’aménagement commercial, l’autorisation demandée ne peut être accordée lorsqu’il apparaît qu’elle aurait pour conséquence de porter au-delà d’un seuil de 25 % sur l’ensemble du département, ou d’augmenter, si elle est supérieure à ce seuil, la part de surface de vente destinée à l’alimentation, que celle-ci concerne l’ensemble du projet ou une partie seulement, et appartenant :
1° Soit à une même enseigne ;
2° Soit à une même société, ou une de ses filiales, ou une société dans laquelle cette société possède une fraction du capital comprise entre 10 % et 50 %, ou une société contrôlée par cette même société ;
3° Soit contrôlée directement ou indirectement par au moins un associé exerçant sur elle une influence ou ayant un dirigeant de droit ou de fait commun.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à rétablir, dans les départements ultramarins, une disposition introduite en 1993 dans la loi du 27 décembre 1973 d’orientation du commerce et de l’artisanat, dite Royer, sur l’initiative du député André Tien Ah Koon.
Depuis l’abrogation de la loi Royer, l’équilibre du secteur de la grande distribution alimentaire s’est fortement dégradé sur la plupart de ces territoires, comme l’a rappelé Evelyne Corbière Naminzo.
Il s’agit donc de réguler de nouveau ce secteur, ce qui permettra de lutter contre la concentration du marché, et ce au bénéfice du pouvoir d’achat des Français des départements ultramarins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. L’article 12 du projet de loi a exactement le même objectif. Une fois ce texte entré en vigueur, la position de l’Autorité de la concurrence portera sur la puissance économique de l’enseigne, qui sera également prise en compte par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC).
Ce dispositif reste toutefois suffisamment souple pour être conforme aux principes constitutionnels, notamment à la liberté de commerce et d’industrie, ce qui n’est pas le cas de cet amendement.
C’est pourquoi le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 135 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 53, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 420-2-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 420-2-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 420-2-1-…. – Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi que dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, constitue une pratique restrictive de concurrence le fait, pour toute personne physique ou morale, d’acquérir ou de détenir les droits d’exploitation d’une marque, d’une enseigne ou d’une licence de franchise sans procéder à son déploiement effectif sur le territoire concerné dans un délai de deux ans à compter de l’acquisition de ces droits.
« L’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut prononcer une amende administrative dont le montant ne peut excéder 375 000 euros pour une personne physique et 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos pour une personne morale.
« Les droits d’exploitation non déployés dans le délai prévu au premier alinéa peuvent faire l’objet d’une procédure de libération par l’autorité administrative, après mise en demeure restée infructueuse pendant six mois.
« Les modalités d’application du présent article, notamment la définition du déploiement effectif, sont définies par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à lutter contre une pratique anticoncurrentielle préjudiciable au développement économique des territoires ultramarins et au pouvoir d’achat des consommateurs : l’acquisition de licences de franchises ou d’enseignes nationales ou internationales dans le seul but d’empêcher leur déploiement local et la concurrence avec des commerces existants.
Cette stratégie, mise en œuvre par certains opérateurs économiques déjà implantés, consiste à acquérir les droits exclusifs d’exploitation de marques attractives afin de préserver leur position dominante et d’éviter l’arrivée de nouveaux concurrents susceptibles de faire baisser les prix.
La mesure que nous proposons respecte le principe de liberté du commerce et de l’industrie en n’interdisant pas l’acquisition de licences, mais en sanctionnant uniquement leur non-exploitation, pratique constitutive d’un abus de droit de la part des agents économiques y recourant.
M. le président. L’amendement n° 127 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 420-2-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 420-2-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 420-2-1-…. - Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi que dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, constitue une pratique restrictive de concurrence le fait, pour toute personne physique ou morale, d’acquérir ou de détenir les droits d’exploitation d’une marque, d’une enseigne ou d’une licence de franchise sans procéder à son déploiement effectif sur le territoire concerné dans un délai de trois ans à compter de l’acquisition de ces droits.
« L’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut prononcer une amende administrative dont le montant ne peut excéder 375 000 euros pour une personne physique et 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos pour une personne morale.
« Les droits d’exploitation non déployés dans le délai prévu au premier alinéa peuvent faire l’objet d’une procédure de libération par l’autorité administrative, après mise en demeure restée infructueuse pendant six mois. Les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à porter le délai pour déployer les droits acquis à trois ans, au lieu de deux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Prouver que l’acquisition de licences de franchises ou d’enseignes nationales ou internationales par une entreprise dans le seul but d’en empêcher le déploiement local se révélera particulièrement difficile.
En outre, essayer de détecter une telle pratique reviendrait à s’immiscer dans la gestion interne d’une entreprise, au risque de mettre en cause la liberté du commerce et de l’industrie.
En tout état de cause, si une telle pratique provoquait un problème concurrentiel sur un marché donné, il serait possible de mettre en cause l’entreprise qui en serait responsable pour abus de position dominante.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Sur le principe, je n’ai pas d’objection, mais le dispositif est trop large pour que son application soit efficace.
Peut-être parviendrez-vous à pointer des pratiques anticoncurrentielles, mais, comme il n’y a pas que cela, cela posera des difficultés. Il en est de même pour le délai, qui, même porté à trois ans, semble insuffisant.
Toujours est-il que nous pourrions continuer à travailler sur ces points. Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Je retire ces deux amendements, monsieur le président !
M. le président. Les amendements nos 53 et 127 rectifié sont retirés.
Article 11
En vue d’améliorer l’accessibilité du droit, le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de dix-huit mois suivant la publication de la présente loi, à prendre par ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi pour modifier et compléter le livre IX du code de commerce afin de codifier, à droit constant, les dispositions relatives à l’exercice par l’État des compétences qui lui demeurent dévolues en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française en application des lois organiques n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.
Un projet de loi de ratification de l’ordonnance est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois suivant celui de sa publication – (Adopté.)
Après l’article 11
M. le président. L’amendement n° 27, présenté par M. Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi n’est pas applicable en Polynésie française.
Elle ne saurait être étendue à ce territoire par voie d’ordonnance ou d’adaptation sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution, dès lors que les matières qu’elle régit relèvent de la compétence de la Polynésie française.
La parole est à M. Teva Rohfritsch.
M. Teva Rohfritsch. Cet amendement vise à exclure de l’application du texte la Polynésie française, en vertu du principe de spécialité législative.
En effet, la Polynésie française est régie par l’article 74 de la Constitution, qui lui confère le statut de collectivité d’outre-mer dotée d’une large autonomie. C’est à ce titre que j’interviens. En ces temps agités, nous sommes particulièrement vigilants sur l’éventuel recours aux ordonnances.
En outre, depuis une dizaine d’années, la Polynésie française s’est dotée d’un arsenal juridique en matière de régulation économique et de concurrence, saluée par l’Autorité de la concurrence et de nombreux experts lors d’un colloque qui s’est tenu cette année à l’assemblée de Polynésie française.
Elle dispose d’une autorité locale de la concurrence pleinement opérationnelle et d’instruments adaptés aux réalités de notre territoire. Certes, des perspectives d’amélioration de ces outils existent, mais cela doit rester à l’appréciation des autorités du territoire.
Madame la ministre, j’aimerais avoir des précisions sur la nature de l’ordonnance évoquée à l’article 11 du projet de loi au titre de « l’accessibilité du droit ». Nous souhaitons une utilisation parcimonieuse, si je peux utiliser cette expression, du recours à l’ordonnance et nous avons besoin d’en connaître le cadre.
À défaut d’explications satisfaisantes, je demanderai à mes collègues de voter cet amendement pour retirer la Polynésie française de cette perspective. J’associe bien entendu à cette demande ma collègue Lana Tetuanui, qui partage cet objectif. (Mme Lana Tetuanui acquiesce.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement, qui vise à exclure la Polynésie française de l’application de ce projet de loi, est satisfait. En effet, la Polynésie française est régie par le principe de spécialité législative, selon lequel une loi n’y est applicable que si elle le mentionne explicitement.
Aucune disposition du texte n’est étendue à la Polynésie française. Son champ d’application est, pour la grande majorité de ses dispositions, circonscrit aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution – La Réunion, Guadeloupe, Martinique, Guyane, Mayotte –, ainsi qu’à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.
Seuls l’article 11, qui est relatif à la codification à droit constant de dispositions relatives aux compétences de l’État en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, et les articles 14 et 15, qui sont relatifs à l’expérimentation d’un Small Business Act ultramarin – seuls les marchés publics de l’État sont à ce titre concernés pour la Polynésie française –, mentionnent la Polynésie française.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Je tiens à rassurer M. le sénateur Rohfritsch, ainsi que Mme la sénatrice Tetuanui.
Ce texte ne remet pas en cause la répartition des compétences entre l’État et le pays. Les dispositions qui seront adoptées n’auront vocation à s’appliquer qu’en ce qui concerne les compétences de l’État. En réalité, l’article 11 opère une codification à droit constant.
Je confirme donc que l’ordonnance n’interviendra pas sur les compétences du pays. Elle le fera uniquement sur les compétences résiduelles de l’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
Mme Naïma Moutchou, ministre. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Teva Rohfritsch. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 27 est retiré.
Article 12
Le premier alinéa de l’article L. 752-6-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon » sont remplacés par les mots : « et de Saint-Martin » ;
2° À la seconde phrase, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 25 % ».
M. le président. L’amendement n° 22, présenté par Mme Phinera-Horth, MM. Patient, Théophile, Buval, Fouassin et Kulimoetoke, Mmes Nadille et Ramia, M. Rohfritsch et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « En Guyane, ce seuil de part de marché est de 50 %. »
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Je présente cet amendement, qui est soutenu par l’ensemble des élus guyanais, au nom des sénateurs de la Guyane.
Il s’agit d’introduire une dérogation spécifique pour la Guyane en fixant le seuil de part de marché à 50 % au lieu de 25 %, comme c’est le cas dans les autres collectivités ultramarines. Cette adaptation tient compte de la densité commerciale plus faible et des particularités économiques du territoire afin de maintenir un équilibre entre régulation de la concurrence, incitation à l’investissement et diversité de l’offre commerciale, tout en évitant les effets défavorables sur l’emploi et l’activité locale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Lors du travail en commission, j’ai été très attentive à la problématique soulevée par Georges Patient et Marie-Laure Phinera-Horth.
Cependant, l’élargissement des possibilités de saisine, par les commissions départementales d’aménagement commercial (CDAC), de l’Autorité de la concurrence au sujet d’entreprises sollicitant une autorisation d’exploitation commerciale et susceptibles de détenir une part de marché de 25 % d’une zone de chalandise au terme de l’opération, au lieu de 50 % aujourd’hui, permet de prendre en compte la réalité des territoires.
Il s’agit en tout état de cause d’une simple faculté de saisine pour les CDAC, nullement d’une obligation. Il conviendra de s’adapter à la spécificité de chaque territoire ultramarin, notamment sa taille.
Il importe de ne pas prévoir un cadre trop rigide, mais au contraire de garantir une certaine souplesse.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. J’ai étudié cette question de près et je crois qu’il n’y a pas lieu d’ajouter cette précision et ce cas particulier.
En effet, l’article 12 donne la possibilité aux CDAC de saisir l’Autorité de la concurrence pour des projets qui conduiraient une entreprise à disposer de plus de 25 % de part de marché, contre 50 %, et ce pour tenir compte de la situation locale. La CDAC de Guyane peut donc très bien décider de ne pas invoquer la disposition prévue à cet article et de conserver le seuil actuel de 50 %.
Il n’y a donc aucune contradiction et la situation de la Guyane ne me semble pas poser de problème particulier du fait de ce nouveau seuil.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement est donc satisfait !
Mme Naïma Moutchou, ministre. Il est en effet satisfait. C’est pourquoi le Gouvernement en demande le retrait ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’entends les arguments, je les comprends, mais je ne suis pas convaincu pour autant.
Imaginez l’arrière-pays guyanais, véritable désert commercial. Le problème soulevé par Georges Patient se posera dans l’île de Cayenne, à Maripasoula, etc. Dans les grandes communes où il n’y a presque rien, si une seule entreprise s’installe, elle détiendra 100 % de la zone de chalandise. Comment la CDAC pourra-t-elle s’opposer à un seuil de part de marché supérieur à 25 % ?
J’ai moi-même défendu et fait voter une telle disposition il y a longtemps, mais il existe une spécificité guyanaise dont il faut tenir compte. Peut-être faut-il donner plus de liberté à la CDAC, qui n’a comme seul pouvoir que de saisir l’Autorité de la concurrence lorsque les seuils autorisés sont dépassés.
Nous constatons une nouvelle fois une absence d’autonomie ou de décentralisation. Nos collègues ont bien fait de poser le problème, il faut trouver une réponse équilibrée et apporter des corrections dans le cadre de la navette parlementaire.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. On est vraiment dans l’aléatoire : la CDAC « peut » saisir l’Autorité de la concurrence, dont la réponse peut elle-même aller dans un sens ou dans un autre…
Là encore, vous comprendrez pourquoi nos territoires ont soif d’autonomie. Voilà le genre de décisions que nous pourrions prendre par nous-mêmes, sans que nous soient imposées des règles qui viennent de trop loin.
Vive le pouvoir normatif autonome !
Mme Lana Tetuanui. Venez en Polynésie française !
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vous paraît satisfait, madame la ministre, mais vous estimez aussi que la question mérite d’être posée.
Puisque l’explication reste floue, gravons cette disposition dans le marbre et laissons la navette parlementaire suivre son cours. Nous verrons bien.
Mes chers collègues, je vous demande de voter cet amendement : il n’en sera que plus satisfait.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Naïma Moutchou, ministre. Dans le droit actuel, la CDAC peut saisir l’Autorité de la concurrence si le seuil de part de marché dépasse 50 %. Demain, elle le pourra, si elle le décide, dès que ce seuil atteindra 25 %. C’est une faculté qui lui est accordée.
Si je ne me trompe pas, en Guyane, cela ne s’est produit qu’une fois en dix ans.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 22.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 54, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 121-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-11-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-11-…. – Est interdite toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que le consommateur ou l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Ces dispositions s’appliquent notamment :
« 1° Aux ventes de biens ou services dématérialisés ;
« 2° À l’accès aux plateformes numériques, applications, logiciels, œuvres culturelles, contenus audiovisuels, services sportifs et services en ligne payants ou gratuits ;
« 3° Aux refus d’accès aux boutiques applicatives (“app stores”) ou aux versions ultramarines distinctes restreignant le catalogue disponible.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire excipant de raisons géographiques alors même que l’offre est disponible dans une autre partie du territoire de la République ou de l’Union européenne.
« Un décret en Conseil d’État précise les exceptions strictement nécessaires pour des raisons :
« 1° De sécurité nationale ou de cybersécurité ;
« 2° D’ordre public.
« Toute clause contractuelle visant à contourner les présentes dispositions est réputée non écrite.
« La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est chargée de constater et sanctionner ces pratiques. Elle peut enjoindre au professionnel de se mettre en conformité sous astreinte et prononcer une amende administrative pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaires. »
L’amendement n° 132 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 121-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-11-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-11-…. – Est interdite toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que le consommateur ou l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Ces dispositions s’appliquent notamment :
« 1° Aux ventes de biens ou services dématérialisés ;
« 2° À l’accès aux plateformes numériques, applications, logiciels, œuvres culturelles, contenus audiovisuels, services sportifs et services en ligne payants ou gratuits ;
« 3° Aux refus d’accès aux boutiques applicatives ou aux versions ultramarines distinctes restreignant le catalogue disponible.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire excipant de raisons géographiques alors même que l’offre est disponible dans une autre partie du territoire de la République ou de l’Union européenne.
« Un décret en Conseil d’État précise les exceptions. »
L’amendement n° 128 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 121-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-11-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-11-…. – Est interdite toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que le consommateur ou l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Ces dispositions s’appliquent aux refus d’accès aux boutiques applicatives ou aux versions ultramarines distinctes restreignant le catalogue disponible.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire excipant de raisons géographiques alors même que l’offre est disponible dans une autre partie du territoire de la République ou de l’Union européenne.
« Un décret en Conseil d’État précise les exceptions strictement nécessaires pour des raisons :
« 1° De sécurité nationale ou de cybersécurité ;
« 2° D’ordre public.
« Toute clause contractuelle visant à contourner les présentes dispositions est réputée non écrite.
« La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est chargée de constater et sanctionner ces pratiques. Elle peut enjoindre au professionnel de se mettre en conformité sous astreinte et prononcer une amende administrative pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaires. »
L’amendement n° 129 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 121-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-11-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-11-…. – I. – Est interdite toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que le consommateur ou l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Ces dispositions s’appliquent notamment aux ventes de biens ou services dématérialisés.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire excipant de raisons géographiques alors même que l’offre est disponible dans une autre partie du territoire de la République ou de l’Union européenne.
« Un décret en Conseil d’État précise les exceptions strictement nécessaires pour des raisons :
« 1° De sécurité nationale ou de cybersécurité ;
« 2° D’ordre public.
« Toute clause contractuelle visant à contourner les présentes dispositions est réputée non écrite.
« La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est chargée de constater et sanctionner ces pratiques. Elle peut enjoindre au professionnel de se mettre en conformité sous astreinte et prononcer une amende administrative pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaires. »
L’amendement n° 131 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 121-11 du code de la consommation, il est inséré un article L. 121-11-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-11-…. – Est interdite toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que le consommateur ou l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Ces dispositions s’appliquent à l’accès aux plateformes numériques, applications, logiciels, œuvres culturelles, contenus audiovisuels, services sportifs et services en ligne payants ou gratuits.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire excipant de raisons géographiques alors même que l’offre est disponible dans une autre partie du territoire de la République ou de l’Union européenne.
« Un décret en Conseil d’État précise les exceptions strictement nécessaires pour des raisons :
« 1° De sécurité nationale ou de cybersécurité ;
« 2° D’ordre public ;
« Toute clause contractuelle visant à contourner les présentes dispositions est réputée non écrite.
« La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est chargée de constater et sanctionner ces pratiques. Elle peut enjoindre au professionnel de se mettre en conformité sous astreinte et prononcer une amende administrative pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaires. »
La parole est à Mme Audrey Bélim, pour les présenter.
Mme Audrey Bélim. L’amendement n° 54 vise à mettre fin aux pratiques persistantes de blocage géographique injustifié, dit géoblocage, subies par les consommateurs ultramarins en violation du principe d’égalité d’accès aux biens et services au sein du territoire de la République.
Malgré l’entrée en vigueur du règlement européen du 28 février 2018, qui interdit le géoblocage injustifié dans le marché intérieur, de nombreux sites ou plateformes numériques continuent à exclure ou à limiter leurs offres dans les outre-mer, notamment à La Réunion, en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à Mayotte.
Le dispositif proposé vise à garantir l’égalité républicaine dans l’accès aux biens et services numériques, à lutter contre les discriminations fondées sur le lieu de résidence et à renforcer l’effectivité du droit européen dans les régions ultrapériphériques (RUP).
Il protège les consommateurs, tout en prévoyant un encadrement juridique sécurisé, et il accorde à la DGCCRF des possibilités de sanction.
Il applique par ailleurs la recommandation de l’Autorité de la concurrence du 4 juillet 2019 : « Compte tenu de l’incertitude quant à l’applicabilité du règlement européen […] aux situations impliquant un consommateur des Drom et un site basé en métropole, [il conviendrait de s’interroger sur l’opportunité] d’adopter une réglementation nationale reprenant les interdictions du règlement européen. Cela permettrait d’assurer une protection aux internautes ultramarins contre les mesures de blocage géographique et les discriminations susceptibles d’être mises en œuvre par les enseignes de commerce en ligne. »
En cas d’adoption de cet amendement, les amendements nos 132 rectifié, 128 rectifié, 129 rectifié et 131 rectifié n’auront plus d’objet et je retirerai l’amendement n° 130 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. L’amendement n° 54 et les amendements de repli visent à lutter contre les pratiques de certains opérateurs économiques qui bloqueraient l’accès à leurs services électroniques aux consommateurs ultramarins.
Ces comportements dits de blocage géographique injustifié sont déjà interdits par les articles L. 121-23 et L. 132-24-2 du code de la consommation et punis d’une amende de 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale. Cette disposition est donc satisfaite depuis l’entrée en vigueur de la loi du 3 décembre 2020.
Contrairement à ce qu’indique l’objet de cet amendement, l’interdiction en vigueur est applicable au sein du territoire national et ne se limite pas aux seules infractions transfrontalières dans le marché intérieur européen.
Pour toutes ces raisons, la commission sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. J’insiste à mon tour : des mesures contre le géoblocage ont été mises en place, et ce encore récemment.
Il est vrai que certains utilisateurs se sont plaints de dysfonctionnements : absence d’accès à l’ensemble des services numériques ou à des contenus de plateformes auxquelles ils ont souscrit moyennant paiement. Au-delà du préjudice de ne pas disposer d’un service pour lequel on a payé, cela crée une inégalité d’accès injustifiée.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 54 et un avis défavorable sur les amendements de repli. Néanmoins, si cette disposition est adoptée, il faudra notifier cette évolution à la Commission européenne pour s’assurer de sa bonne articulation avec le cadre en vigueur.
Parallèlement, je vous informe que les services de la DGCCRF lanceront prochainement une enquête sur le sujet à partir des signalements recueillis.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Avis favorable sur l’amendement n° 54.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 54.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12, et les amendements nos 132 rectifié, 128 rectifié, 129 rectifié et 131 rectifié n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 130 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 331-18 du code de la propriété intellectuelle est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Dans le cadre de ses missions, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique veille également au respect du principe d’égalité d’accès des utilisateurs aux contenus, œuvres, biens et services numériques, quelle que soit leur localisation sur le territoire de la République.
« À ce titre, elle peut être saisie de toute pratique consistant, sans motif légitime, à restreindre ou bloquer l’accès à un contenu, un produit ou un service en ligne, ou à en modifier les conditions d’accès, au seul motif que l’utilisateur réside dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution.
« Sont notamment visés les services de médias audiovisuels à la demande, les plateformes de partage de vidéos, les services de diffusion ou de distribution d’œuvres culturelles, musicales ou sportives, ainsi que les boutiques applicatives et services en ligne proposant des versions ultramarines distinctes restreignant le catalogue ou les fonctionnalités disponibles.
« Est réputé sans motif légitime tout refus discriminatoire fondé sur la localisation géographique de l’utilisateur lorsque l’offre est disponible dans une autre partie du territoire national ou du marché intérieur de l’Union européenne.
« L’Autorité peut, après mise en demeure restée sans effet, enjoindre au professionnel concerné de se conformer à ses obligations. En cas de manquement grave ou répété, elle peut prononcer les sanctions prévues à l’article L. 331-25.
« Toute clause contractuelle visant à contourner ces dispositions est réputée non écrite.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent paragraphe, notamment les motifs légitimes de restriction liés à la sécurité nationale, à la cybersécurité ou à la protection de l’ordre public. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 130 rectifié est retiré.
TITRE IV
SOUTENIR LE TISSU ÉCONOMIQUE ULTRAMARIN
Article 13
À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 420-5 du code de commerce, les mots : « ou similaires » sont remplacés par les mots : « , similaires ou substituables ».
M. le président. L’amendement n° 139, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le deuxième alinéa de l’article L. 420-5 du code de commerce est ainsi rédigé :
« En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et dans le Département de Mayotte, lorsque des produits alimentaires substituables à ceux qui sont produits et commercialisés localement sont proposés aux consommateurs à des prix manifestement inférieurs aux coûts moyens de production sur ces territoires, les acteurs de l’importation et de la distribution, d’une part, et ceux de la production et de la transformation locales, d’autre part, négocient, sous l’égide du représentant de l’État et des collectivités compétentes en matière de développement économique, un accord visant à augmenter et valoriser la production locale dans les commerces de détail à dominante alimentaire. Celui-ci prend en compte les volumes de produits concernés, la situation économique des producteurs locaux et l’intérêt des consommateurs à très faibles revenus. L’accord est rendu public par arrêté préfectoral. En cas d’échec des négociations dans le délai d’un mois à compter de leur ouverture, le représentant de l’État dans le territoire prend par arrêté toute mesure relevant de sa compétence et permettant de répondre aux objectifs précités. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Naïma Moutchou, ministre. Cet amendement vise à donner un effet utile aux dispositions de l’article L. 420-5 du code de commerce en levant les incompatibilités et les incertitudes juridiques qui empêchent leur application. L’objectif est de renforcer la protection de la production locale face à certaines pratiques commerciales déloyales.
Il tend à étendre le dispositif existant, qui est limité aux produits identiques ou similaires importés et vendus en outre-mer à des prix inférieurs à ceux qui sont pratiqués dans l’Hexagone, aux produits substituables.
Cette extension permettra de mieux protéger les filières locales quand elles sont confrontées à la concurrence exercée de produits importés qui, bien qu’ils présentent des caractéristiques différentes, répondent aux mêmes besoins de consommation et sont proposés à des tarifs nettement plus bas.
Cet amendement tend également à conférer au préfet la faculté de rendre obligatoire la conclusion d’un accord entre importateurs, distributeurs et producteurs locaux, et ainsi à renforcer l’effectivité du dispositif et la capacité d’intervention de l’État pour garantir des conditions de concurrence équitables.
Il vise enfin à préciser les objectifs de cet accord, ainsi que les conséquences d’une absence d’accord, c’est-à-dire la possibilité pour le représentant de l’État d’agir. Ce dernier pourra ainsi aller jusqu’à fixer lui-même les prix, ce qui devrait naturellement inciter tous les acteurs à entrer dans une dynamique de négociation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Nous soutiendrons cet amendement, qui vise à protéger, sans bloquer, ou plutôt sans « vitrifier » l’économie…
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 139.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 13 est ainsi rédigé et les amendements nos 72 et 58 n’ont plus d’objet.
Madame la ministre, mes chers collègues, il est minuit, je vous propose de prolonger notre séance afin d’achever l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé. Je vous invite cependant à faire preuve de concision afin que nous terminions à une heure raisonnable.
Après l’article 13
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 19 rectifié, présenté par Mme Malet, MM. Fouassin et Khalifé, Mme Aeschlimann, MM. H. Leroy, Sol et Panunzi, Mmes Petrus, Gosselin, Gruny et Berthet, MM. Rietmann, Burgoa, Brisson et Cambon et Mmes Imbert, Eustache-Brinio, Canayer, Bellurot et Lassarade, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 4 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe les modalités de mise en œuvre de cette obligation, et notamment celle de la négociation entre l’État et les acteurs du secteur. Sont prises en compte, en tant que de besoin et pour chaque collectivité, les capacités de production locales. »
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. En 2012, la loi relative à la régulation économique outre-mer (Réom) obligeait les distributeurs à réserver une part de leur surface de vente aux productions régionales. Faute de décret, cette disposition est restée lettre morte.
Cette mesure est pourtant d’une importance capitale pour les collectivités, car elle est susceptible à la fois de faire baisser le coût de la vie, de favoriser la souveraineté alimentaire et d’aider nos agriculteurs, par ailleurs durement touchés par les récents aléas climatiques.
Cependant, la publication d’un décret imposant des modalités non prévues par la loi pourrait fragiliser juridiquement le texte. Or la loi n’en prévoit aujourd’hui aucune. Le présent amendement vise donc à définir les contours du décret prévu dans la loi de 2012.
M. le président. L’amendement n° 126, présenté par MM. Salmon et Mellouli, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 4 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret, pris après consultation des collectivités concernées, détermine les conditions d’application du présent article pour chaque collectivité, en particulier la surface de vente minimale, qui ne peut excéder 400 m², à partir de laquelle les entreprises de distribution sont soumises à l’obligation mentionnée au premier alinéa, les catégories de produits concernés, la part de surface de vente dédiée à l’approvisionnement régional en fonction des caractéristiques et du potentiel de production du marché local et les sanctions applicables en cas de manquement. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Monsieur le président, je souhaite rendre cet amendement identique à celui que notre collègue vient de défendre, car il en est très proche.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 126 rectifié, dont le libellé est désormais identique à celui de l’amendement n° 19 rectifié.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à rendre effective l’obligation pour les distributeurs de réserver une part de leur surface de vente aux productions locales.
Créée par la loi relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, cette obligation n’a jamais été appliquée, comme vient de le rappeler notre collègue.
On ne peut pas se satisfaire de ce statu quo, alors que le taux de dépendance des territoires d’outre-mer aux importations oscille entre 75 % et 80 % et qu’il atteint même 98 % à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Il faut absolument valoriser les productions locales. Nous savons que, dans certains territoires d’outre-mer, d’importantes productions sont réservées à l’exportation. Nous pensons que certaines surfaces agricoles pourraient être réservées à des cultures vivrières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission s’en remettra à la sagesse de notre assemblée sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement émet le même avis que la commission, tout en précisant que le décret est en cours d’écriture. Des questions de conformité au droit européen se posant, il faudra saisir la Commission européenne, mais le Gouvernement est à la tâche.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je rappelle simplement que cela fait treize ans que nous attendons ce décret !
Nous voterons cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. En Martinique, la production locale est très bien représentée dans la grande distribution. En effet, 70 % de la production de certaines filières est écoulée en grande distribution.
Certains propos tenus ici sont peut-être valables dans d’autres pays, mais en Martinique, il y a très longtemps que ces deux entités, la grande distribution et les producteurs locaux, ont fini par s’entendre, même si cela a été très difficile au début.
Lorsque j’étais chargée des filières – je connais un peu le sujet –, j’ai fait face à des gens qui ne se parlaient pas, voire qui se combattaient. Aujourd’hui, un grand pas a été fait et l’essentiel de la production locale est écoulé en grande distribution, à des tarifs corrects et avec des délais de paiement raisonnables. On ne peut que s’en réjouir, même si on peut toujours faire mieux.
Pour conclure, la plupart des distributeurs m’ont dit que s’il était possible d’acheter plus de produits locaux, ils le feraient. Or il manque des produits. Si nous produisions trois fois plus, disent-ils, ils achèteraient ces volumes supplémentaires.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Il est vrai que nos territoires sont différents et que nos économies le sont également. Pour ma part, je vous parlerai uniquement de La Réunion.
Pour trouver des produits locaux en vente dans une enseigne du groupe GBH – pour ne pas le citer –, il faut se bagarrer et se faire entendre.
La Réunion étant une île, elle est bordée par la mer : on y produit donc du sel. Pourtant, on trouve chez GBH du sel en provenance de partout dans le monde, sauf de La Réunion. Il faut que cela cesse ! Nous sommes capables de produire du sel d’exception, du sel de chez nous, ayant des saveurs différentes.
Je vous parle du sel, mais il en va de même pour beaucoup d’autres denrées, par exemple les confitures et toutes sortes de produits d’exception qui sont primés au Salon de l’agriculture, mais qu’on ne trouve pas chez GBH. Je conteste cela.
Il faut réserver des parts de rayonnage à nos produits locaux. C’est une mesure de bon sens ; c’est ainsi que nous parviendrons à l’autonomie alimentaire.
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. J’abonderai dans le sens de mes collègues.
En Polynésie française, le gouvernement local consacre depuis la nuit des temps d’importants moyens à la promotion des produits locaux sur l’ensemble du territoire. J’ai d’ailleurs une pensée, à cet instant, pour tous nos élus locaux, pour les maires, qui font la promotion de nos produits dans les cantines scolaires de toute la Polynésie française. Nous pouvons mieux faire, oui, je le dis, et je vous prends au mot, madame la ministre.
Il y a tout de même quelque chose qui m’offusque, en tant que sénatrice de Polynésie : ce sont les normes européennes. Je m’explique : la meilleure viande que nous puissions fournir à nos cantines scolaires ou à la population est la viande locale, puisqu’il y a du bétail en Polynésie française. Or les maires ne peuvent pas acheter cette viande locale à cause des normes européennes. C’est ridicule ! Ces normes tuent l’initiative.
Je vous écoute depuis tout à l’heure, madame la ministre : vous renvoyez constamment à la législation européenne. Heureusement que la Polynésie est dotée d’une autonomie et que nous décidons pour nous, là-bas, à 20 000 kilomètres d’ici !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 19 rectifié et 126 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13.
Article 14
À titre expérimental et pour favoriser à moyen terme l’émergence de nouveaux opérateurs locaux susceptibles d’exercer pleinement leur libre accès à la commande publique, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour une période de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, les pouvoirs adjudicateurs, les entités adjudicatrices et les acheteurs publics peuvent réserver jusqu’à 20 % de leurs marchés dont la valeur estimée est inférieure aux seuils européens applicables aux marchés publics, mentionnés dans l’avis annexé au code de la commande publique, aux microentreprises et aux petites et moyennes entreprises, au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, ainsi qu’aux artisans répondant aux critères prévus aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de l’artisanat, dont le siège social est établi dans les territoires mentionnés au présent article durant l’expérimentation. Cette expérimentation peut être conduite dans les mêmes conditions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna pour ce qui concerne les marchés passés par les services et les établissements publics de l’État.
Au plus tard trois mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer l’opportunité de ses éventuelles pérennisation et extension.
M. le président. L’amendement n° 61, présenté par Mmes Bélim et Conconne, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Remplacer le pourcentage :
20 %
par les mots :
un tiers
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Le présent amendement vise à porter à 33 % la part maximale de marchés publics pouvant être réservée aux TPE-PME et aux artisans locaux dans les territoires ultramarins, conformément au dispositif initialement prévu par la loi Érom.
L’article 73 de cette loi avait instauré, à titre expérimental pour cinq ans, la possibilité de réserver jusqu’à un tiers des marchés publics aux petites et moyennes entreprises locales. Cette expérimentation s’est achevée en 2022.
L’article 14 du présent projet de loi reprend ce dispositif de réservation, mais en limitant le plafond à 20 %, soit une réduction significative par rapport au dispositif antérieur.
Le retour au seuil de 33 % permettra de renforcer le tissu économique local. Les TPE-PME et les artisans ultramarins restent structurellement fragiles et sous-capitalisés. Un seuil de 33 % leur offre de meilleures perspectives de développement et de consolidation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à relever de 20 % à 33 % la part des marchés publics que les acheteurs ultramarins pourront réserver aux TPE, aux PME et aux artisans à titre expérimental pour cinq ans.
Dans la mesure où il s’agit d’une expérimentation dans un cadre juridique dérogatoire au droit commun, il ne semble pas pertinent de rehausser ce seuil, qui plus est après l’échec de la précédente expérimentation issue de la loi Érom de 2017 qui était similaire à celle-ci. Il faut avant tout que les acheteurs publics s’approprient cette expérimentation et la mettent en œuvre.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Vous me désespérez vraiment…
Le dispositif avait été adopté, il fonctionnait assez bien au départ à La Réunion. Dans un rapport sur sa mise en œuvre, il a été dit – c’était surréaliste ! – que l’expérimentation était un échec, car seuls 8 % ou 10 % de cette part étaient utilisés. Or il s’agit d’un plafond.
À l’époque, nous avions introduit dans la loi un Small Business Act et lancé une expérimentation à partir de l’expérience réunionnaise appelée stratégie du bon achat – je veux rendre ici hommage à Ericka Bareigts. Nous avions pour cela, premièrement, modifié le code de la commande publique afin de donner la priorité aux marchandises de proximité ; deuxièmement, réservé une part des marchés publics aux PME et aux TPE.
Après cinq ans d’expérimentation, le plafond de 33 % n’a pas été atteint, c’est vrai, mais pourquoi le réduire à 20 % ? Il n’a été fait qu’une évaluation sommaire de ce dispositif, que l’on n’a du reste jamais vue. Il a simplement été décidé unilatéralement qu’il ne marchait pas ! Or il vise à soutenir la production locale.
Un deuxième volet avait été voté, dans ce même texte, sur la sous-traitance. On demandait aux grosses entreprises passant des marchés publics ultramarins de plus de 500 000 euros de faire une place aux artisans locaux et aux petites entreprises. Nous avions voté cette disposition.
Tout cela forme un tout cohérent : ce n’est pas du protectionnisme, comme si nous voulions que nos sociétés vivent en autarcie.
Nous continuons de défendre ces mesures.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. J’invite ceux qui affirment que l’on ne sait pas si cette expérimentation fonctionne à se rendre à La Réunion.
La Réunion et certaines de ses entreprises ont reçu le label French Tech pour un super projet, appelé le Kub. Il s’agit d’un outil protéiforme entièrement conçu grâce à la stratégie du bon achat. De nombreux autres chantiers à La Réunion ont été menés à bien grâce à ce dispositif.
Je rappelle que, sur nos territoires, plus de 95 % de nos entreprises sont de très petites entreprises, comptant moins de onze salariés. Plus le plafond que nous fixerons sera élevé, plus nous aurons les moyens de les renforcer.
M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin, pour explication de vote.
Mme Annick Girardin. Nous avons là l’exemple même d’objectifs atteints quelque part – La Réunion dans ce cas –, mais pas obligatoirement ailleurs. Les chiffres que j’ai vus sont globalisés pour l’ensemble de l’outre-mer. À La Réunion, ce dispositif fonctionne et le territoire veut atteindre le plafond de 33 %. Pourquoi lui dire qu’il n’est pas possible d’aller jusque-là ? C’est bien dommage !
Dans les autres territoires d’outre-mer, il ne faut pas nécessairement aller si loin, car les acteurs ne sont pas toujours là. C’est le cas dans le mien.
Aujourd’hui, fixons un plafond plus élevé, il n’imposera aucune obligation à quiconque. Ce serait un peu dommage de ne pas le faire.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 61.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 62, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Une part minimale du marché peut être réservée à des biens issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées sur le territoire du département, région ou collectivité d’outre-mer concerné.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Le présent amendement vise à compléter le dispositif expérimental prévu à l’article 14, en y intégrant une dimension d’économie circulaire adaptée aux spécificités ultramarines.
Il tend à autoriser la réservation d’une part minimale du marché à des biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées produites localement. L’emploi du verbe « peuvent » permet de laisser une marge d’appréciation aux soumissionnaires, en fonction des différents marchés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement tend à ouvrir la possibilité de réserver une part des marchés faisant l’objet de cette expérimentation à des biens issus du réemploi ou du recyclage à l’échelle locale.
Les acheteurs publics sont déjà soumis à des obligations d’acquisition de biens issus du réemploi, conformément à l’article 58 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (Agec), et peuvent, en utilisant des critères environnementaux, aider au développement de filières locales. L’amendement est donc satisfait.
Il appartient aux acteurs économiques et administratifs locaux de se mobiliser pour développer l’économie circulaire en outre-mer dans un cadre plus pérenne que cette expérimentation.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 14.
(L’article 14 est adopté.)
Article 15
À titre expérimental et pour favoriser à moyen terme l’émergence de nouveaux opérateurs locaux susceptibles d’exercer pleinement leur libre accès à la commande publique, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour une période de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, les soumissionnaires qui ne possèdent pas la qualité de microentreprise ou de petite ou moyenne entreprise au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ou d’artisan répondant aux critères prévus aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de l’artisanat doivent présenter un plan de sous-traitance prévoyant le montant et les modalités de participation d’entreprises possédant cette qualité et dont le siège social est établi dans les territoires mentionnés au présent article à l’exécution du marché auquel ils postulent, pour les marchés dont le montant estimé est supérieur à 500 000 euros hors taxes. Cette expérimentation peut être conduite dans les mêmes conditions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna pour ce qui concerne les marchés passés par les services et les établissements publics de l’État.
Au plus tard trois mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer l’opportunité de ses éventuelles pérennisation et extension. Le plan de sous-traitance comporte, pour chacune des entreprises concernées, les informations figurant dans la déclaration de sous-traitance. Lorsque les soumissionnaires ne prévoient pas de sous-traiter à des microentreprises, à des petites et moyennes entreprises ou à des artisans établis dans les territoires mentionnés au présent article, le plan de sous-traitance en justifie les motifs. Ces motifs peuvent tenir notamment à l’absence de microentreprises, de petites et moyennes entreprises ou d’artisans en activité dans le secteur concerné par les prestations du marché public ou en mesure de répondre aux exigences de ce dernier.
M. le président. L’amendement n° 63, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Pour les marchés de travaux relatifs à la construction, à la réhabilitation, ou à la déconstruction de bâtiments d’une valeur supérieure à 500 000 euros hors taxes, le plan de sous-traitance peut prévoir qu’une part minimale du contrat concerne des biens, matériaux et produits issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées, valorisés sur le territoire du département, région ou collectivité d’outre-mer concerné.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Le présent amendement vise à compléter le plan de sous-traitance prévu à l’article 15 en autorisant explicitement les soumissionnaires, dans les marchés de construction ou de travaux publics, à définir une part du marché réservée à des biens issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées produites sur le territoire concerné.
Encore une fois, l’emploi du verbe « peuvent » permet de laisser une marge d’appréciation aux soumissionnaires en fonction des différents marchés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car il est satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 63.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 60, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre des expérimentations prévues aux articles 14 et 15 de la présente loi, pour les marchés publics de travaux et services relatifs à la construction, à la réhabilitation, à la déconstruction et à l’aménagement dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices peuvent intégrer des clauses relatives à l’utilisation, la valorisation et l’incorporation de biens, matériaux et produits issus du réemploi, de la réutilisation ou de l’économie circulaire, notamment :
1° L’utilisation de matériaux de réemploi ;
2° La récupération et la valorisation sélective lors de démolitions ;
3° L’incorporation de matériaux recyclés ;
4° L’intégration d’exigences en matière d’économie circulaire dans les cahiers des charges.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à autoriser l’intégration de clauses circulaires dans les marchés de construction et de travaux publics afin de stimuler des filières locales de réemploi, de réutilisation et de matériaux recyclés.
Cette orientation permettrait de réduire les importations coûteuses, de créer des emplois locaux non délocalisables et de diminuer la facture publique à moyen terme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à ouvrir la possibilité d’intégrer des clauses liées à l’économie circulaire dans le cadre des marchés publics relevant des expérimentations des articles 14 et 15.
Il est satisfait, car chaque acheteur public est libre, dans son cahier des charges, de définir des clauses environnementales, liées notamment au réemploi, pour l’exécution du marché public.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 60.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 57, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2113-15 du code de la commande publique est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, les acheteurs peuvent, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, réserver des marchés ou des lots aux entreprises de l’économie sociale et solidaire définies à l’article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, lorsque ces marchés ou lots portent sur :
« 1° Des prestations concourant directement à la préservation de l’environnement ;
« 2° Des prestations visant l’amélioration des conditions de vie des populations ;
« 3° Des prestations portant sur le réemploi de produits ou matériaux.
« Un décret définit les modalités d’application du présent article et les critères permettant de caractériser les prestations mentionnées aux 1° à 3° du présent article. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à soutenir le tissu économique local, conformément à l’intitulé du titre IV, plus particulièrement ici les structures de l’économie sociale et solidaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Buval, rapporteur. En l’état actuel du droit, seuls peuvent être réservés aux entreprises de l’économie sociale et solidaire des marchés portant sur des services sociaux et autres services spécifiques, cette formule du droit de la commande publique désignant des prestations essentiellement sanitaires, sociales et administratives.
Il n’est pas possible d’étendre ce mécanisme à d’autres secteurs, même à titre expérimental, car cette disposition, qui déroge au principe de non-discrimination, découle directement de l’article 77 de la directive sur les marchés publics de 2014 dont le champ est strictement limité.
Réserver aux entreprises de l’économie sociale et solidaire d’autres marchés serait contraire au droit européen.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président. Étendre la dérogation présente un risque contentieux élevé.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 57.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 16
Le tableau du second alinéa du 4° du I de l’article L. 950-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° La cinquième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
| « | Article L. 410-3 | la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 | |
| Article L. 410-4 | la loi n° … du … | » ; | 
2° La sixième ligne est ainsi rédigée :
| « | Article L. 410-5 | la loi n° … du … | » ; | 
3° Après la même sixième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
| « | Article L. 410-6 | la loi n° … du … | » ; | 
4° La vingt-troisième ligne est remplacée par quatre lignes ainsi rédigées :
| « | Article L. 441-1 | la loi n° … du … | |
| Article L. 441-1-1 | la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 | ||
| Article L. 441-1-2 | la loi n° … du … | ||
| Article L. 441-2-1 | l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 | » ; | 
5° Les vingt-quatrième et vingt-cinquième lignes sont remplacées par trois lignes ainsi rédigées :
| « | Article L. 441-3 | la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 | |
| Article L. 441-3-1 | la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 | ||
| Article L. 441-4 | l’ordonnance n° 2021-859 du 30 juin 2021 | » ; | 
6° La trente et unième ligne est ainsi rédigée :
| « | Article L. 442-1 | la loi n° … du … | » ; | 
7° La trente-cinquième ligne est ainsi rédigée :
| « | Article L. 442-5 | la loi n° … du … | » ; | 
8° Après la quarantième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
| « | Article L. 443-8 | la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 | » ; | 
9° La soixante-troisième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
| « | L. 461-1 | la loi n° … du … | |
| L. 461-2 | la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 | » ; | 
10° La quatre-vingt-douzième ligne est ainsi rédigée :
| « | Article L. 470-1 | la loi n° … du … | » ; | 
11° Après la même quatre-vingt-douzième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
| « | Article L. 470-2 | l’ordonnance n° 2019-698 du 3 juillet 2019 | » | 
– (Adopté.)
Après l’article 16
M. le président. L’amendement n° 108, présenté par Mme Corbière Naminzo, M. Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’une évaluation des effets économiques et sociaux des mesures prévues par la présente loi.
Cette évaluation porte notamment sur :
1° L’évolution des prix à la consommation des produits de première nécessité ;
2° La part des marges des distributeurs et importateurs ;
3° Les effets sur la rémunération des producteurs et le niveau d’activité des entreprises locales ;
4° Les conséquences administratives et financières pour les opérateurs économiques et les services de l’État.
Un premier rapport d’étape est transmis au Parlement dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la présente loi, puis un rapport final dans un délai de vingt-quatre mois.
La parole est à M. Alexandre Basquin.
M. Alexandre Basquin. Par cet amendement, nous demandons que soit précisé le contenu du rapport d’évaluation qui devra être réalisé à la suite de la promulgation de ce texte.
Il est nécessaire d’en évaluer les effets économiques et sociaux, en particulier sur l’évolution des prix des produits de première nécessité, sur la part des marges des distributeurs et des importateurs, sur la rémunération des producteurs et le niveau d’activité des entreprises locales, ainsi que sur les conséquences administratives et financières pour les opérateurs économiques et les services de l’État.
Cette proposition est d’ailleurs une recommandation du Conseil d’État, qui relève que les effets de certaines mesures n’ont fait l’objet que d’une évaluation sommaire.
Cette loi serait inutile si nous n’avions aucune visibilité sur ses effets et donc sur la manière de l’ajuster. Nous proposons par conséquent qu’un rapport d’étape soit transmis au Parlement dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la loi, puis un rapport final dans un délai de vingt-quatre mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement vise à imposer la réalisation d’une évaluation des effets économiques et sociaux de la loi dans un délai de douze mois, puis de vingt-quatre mois.
Il sera sans doute très difficile d’isoler les effets spécifiques de l’une ou l’autre des mesures contenues dans le projet de loi. Mme la ministre pourrait nous préciser ses intentions, plutôt que de renvoyer à un décret en Conseil d’État sur ce sujet.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Naïma Moutchou, ministre. La proposition qui nous est faite ici correspond effectivement à une recommandation du Conseil d’État. Cela va dans le bon sens, celui de l’efficacité.
Je suis toutefois réservée sur la nécessité de prévoir, à ce stade, les éléments devant figurer dans l’évaluation. Plusieurs mesures ne produiront pas nécessairement d’effets immédiats. Une évaluation requiert du temps et les délais envisagés ne me semblent pas suffisants.
J’ajoute que le rôle du Parlement est aussi de procéder, le moment venu, à l’évaluation de l’application de la loi.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je souhaite revenir sur les débats que nous avons eus. Si ce texte nous donne l’illusion d’agir contre la vie chère, il ne prévoit rien pour véritablement contrôler, rien pour vraiment réguler, rien pour réellement sanctionner. Il traduit au contraire le souci de préserver la liberté d’entreprendre. In fine, le texte favorise le développement des oligopoles.
En matière de contrôle, rien n’est prévu pour renforcer les moyens existants. Les sanctions prévues sont peu convaincantes, chers collègues. Nos frères et sœurs en outre-mer ne verront pas leur pouvoir d’achat s’améliorer après le vote de ce texte. L’avenir pour ceux qui souffrent est toujours aussi sombre. Ce projet de loi n’est pas source d’espoir et nous avons vu ce que le manque d’espoir peut produire dans nos territoires.
Nous voulons croire que la vie chère n’est pas une fatalité économique. C’est pour cela que nous débattons ici ce soir. La vie chère n’est pas non plus une fatalité sociale. Nous ne nous résignons pas, mais nous savons, et nous persistons à vous le dire, que ce système est injuste. Les solutions sont à construire autour d’un contrôle renforcé, d’une concurrence plus juste qui permette à nos TPE et à nos PME d’exister et de se développer, et d’une meilleure intégration de nos territoires dans leur environnement régional.
Je regrette tout particulièrement que notre amendement portant sur la TVA du bouclier qualité-prix ait été déclaré irrecevable. Sachez, madame la ministre, que La Réunion, où les élus sont sensibles à la détresse des Réunionnaises et des Réunionnais, a réduit à 0 % le taux de l’octroi de mer sur les produits de première nécessité. Nous attendions que le Gouvernement fasse le même geste pour ce qui le concerne, mais il refuse d’écouter et d’accorder la même faveur, c’est-à-dire réduire le taux de la TVA à 0 % sur ces mêmes produits ciblés.
Pour lutter contre la vie chère, il eût fallu commencer par s’approcher davantage de la réalité des Françaises et des Français des outre-mer. Nous ne l’avons pas fait ce soir. Ici, on a tendance à s’identifier davantage à ceux qui sont à la tête de ces entreprises qui absorbent chaque année plus de parts de marché. Avec ce projet de loi, on ne se préoccupe pas des Ultramarins qui survivent en dessous du seuil de pauvreté. Il aurait fallu croiser leurs regards et écouter leurs difficultés pour joindre les deux bouts.
Nous aurons très vite l’occasion de faire mieux, en votant des mesures plus concrètes dans le projet de loi de finances pour 2026.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Je vais m’abstenir sur ce texte, comme je l’avais déjà annoncé. Je ne pourrais pas rentrer vendredi, croiser mes compatriotes et leur dire que je viens de voter quelque chose qui va changer le cours de leur vie en modifiant les prix de leur panier de courses. Ce n’est pas possible.
Comme je le dis depuis un an, la question de la vie chère est extrêmement complexe. Il est trop facile de penser qu’une loi, à elle seule, pourra régler ce problème. Désolée, mais cette loi extincteur, comme je l’ai qualifiée, ne va pas éteindre le feu de la vie chère sous nos yeux.
Cette loi extincteur n’a pas pris en compte le problème des revenus. Nous avons des revenus extrêmement bas ; les pensions de retraite sont plus faibles que dans l’Hexagone. Mme la Première ministre Élisabeth Borne et un ancien ministre du travail m’avaient promis, la main sur le cœur, que le Conseil d’orientation des retraites (COR) lancerait une mission sur le sujet. Trois ans après, ce travail n’a toujours pas été fait. La question des revenus doit être prise en compte.
Ce projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer est peut-être un début de travail, peut-être l’amorce d’une prise de conscience, mais on ne pourra pas dire, si nous l’adoptons ce soir, qu’il aura réglé un quelconque problème, ni que, dès son adoption par l’Assemblée nationale, nos compatriotes verront les prix de leur panier de courses baisser.
Je m’abstiendrai donc et, comme je l’ai dit lors de la discussion générale, je tends la main à la ministre pour que nous puissions mettre en place un véritable travail de fond, qui ne se limite pas à tout ce que j’ai pu entendre aujourd’hui comme lieux communs, comme a priori ou comme considérations erronées.
Il nous faut un travail approfondi, qui s’appuie sur des études sérieuses, pour compléter comme il se doit la réflexion sur la question de la vie chère dans ladite outre-mer. C’est une nécessité, une obligation, c’est le rôle légitime de l’État.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.
M. Akli Mellouli. Je partage certains des propos tenus par mes deux collègues. Nous avions déjà dit lors de la discussion générale que les éléments essentiels n’étaient pas tous pris en compte dans ce texte. Nous avons eu un débat passionné et j’espère n’avoir froissé personne. Ce débat est à la hauteur de ce que nous voulons pour les Ultramarins. Je pense que ce qui est bon pour nous est bon pour eux. Il faut que nous ayons à cœur la continuité territoriale et l’égalité réelle, y compris pour nos outre-mer.
Ce débat a permis, je crois, d’avancer. L’ancien ministre Victorin Lurel n’est peut-être pas parfait, mais il a eu raison de souligner que nous avançons par petits pas. Oui, nous avons fait des petits pas, notamment sur les produits locaux, mais aussi sur les sanctions. C’est une première d’aller aussi loin sur ce dernier point, mais c’est simplement répondre à une attente forte de nos concitoyens.
Bien sûr, nous ne réglerons pas tout ce soir. Ce projet de loi n’a pas vocation à tout résoudre ; il se concentre, comme cela a été rappelé, sur les distributeurs et les fournisseurs, et non sur la question du pouvoir d’achat réel, c’est-à-dire celle des salaires. Or, avec moins de 2 000 euros par mois, il est évidemment difficile de vivre dans les outre-mer.
J’ai toutefois un regret majeur : celui de n’avoir pas pu élargir le bouclier qualité-prix. Nous dénonçons tous l’uniformité que l’on voudrait imposer aux outre-mer, mais en refusant cet élargissement, on empêche les collectivités territoriales et les acteurs locaux de se saisir des sujets qu’ils souhaitent porter dans la négociation. C’est une entrave au bon fonctionnement de nos territoires.
Lorsque nous avons voulu ouvrir la discussion à des personnes qualifiées, cela a également été bloqué, alors même que nous avons besoin de toutes les intelligences : plus elles sont nombreuses, mieux nous construisons.
Malgré ces limites, les petits pas accomplis montrent qu’une dynamique est enclenchée. Au départ, nous envisagions de nous abstenir, mais ces avancées nous encouragent à poursuivre. Bien sûr, il faudra aller plus loin. D’ailleurs, les membres de la délégation aux outre-mer ont déposé ensemble une proposition de loi ; nous continuerons donc, je l’espère, de progresser.
Je souhaite remercier les rapporteurs et la présidente de la commission pour le travail accompli. Ce n’est pas simple d’être rapporteur, surtout lorsqu’il faut arbitrer certains points et donner un avis défavorable. La commission joue son rôle, même si nous ne sommes pas toujours d’accord. Le Gouvernement, pour sa part, a fait preuve d’une certaine ouverture et ce débat a permis d’éclaircir bien des positions.
En tout cas, nous savons désormais ce qu’il manque, et nous continuerons à nous battre pour apporter les compléments nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Quelques mots avant que Viviane Artigalas ne s’exprime au nom de mon groupe. Je serai bref. J’ai été élu pour légiférer, pour décider et pour tenter d’avancer. Comme dit le poète, un pas, un autre pas, encore un autre pas et tenir gagné chaque pas !
C’est vrai que nous ne sommes pas tout à fait satisfaits. C’est vrai que le Gouvernement n’a pas mis un centime. Nous savons qu’il faut changer l’environnement économique, le corpus juridique. Mais nous ne sommes pas allés jusqu’au bout. Il est vrai, madame la ministre, que vous avez émis un avis favorable sur beaucoup d’amendements. La commission a fait son travail. Nous ne sommes pas toujours d’accord, mais je salue ces évolutions.
Viviane Artigalas expliquera notre position, mais nous voterons ce texte et nous continuerons le travail avec les députés. Bien sûr, des initiatives locales devront être prises par nous-mêmes et nous demanderons un accompagnement de l’État qui n’est pas toujours, pour le moment, au rendez-vous.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Je vais compléter ce qu’a dit mon collègue Victorin Lurel. Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, la question de la continuité territoriale n’a pas été suffisamment prise en compte, tout comme celle des revenus. Il y a là un véritable travail à mener pour garantir justice réelle et égalité effective. Nous en sommes encore loin, je le crains.
Ce projet de loi est imparfait, il n’est pas à la hauteur de toutes les attentes. Toutefois, il contient une grande partie des articles que nous avions votés lors de l’examen, dans le cadre de notre niche parlementaire, de la proposition de loi de Victorin Lurel. À l’époque, nous avions dû nous limiter, car la durée de ces niches est très courte. Nous espérions donc que le texte du Gouvernement irait plus loin, qu’il renforcerait les mesures et les approfondirait. Cela n’a pas été le cas.
Cependant, il faut reconnaître les avancées obtenues, d’abord en commission, avec la suppression de certains irritants – je pense notamment à l’article 1er – et l’adoption de plusieurs de nos amendements. Je salue aussi le travail de concertation mené entre la commission, le Gouvernement et les différents groupes parlementaires.
Ainsi, très majoritairement, notre groupe votera ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Quand je lis l’intitulé de ce projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer, je me dis qu’on aurait pu ajouter les mots suivants : à l’exception de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie… Cela fait dix heures que nous débattons de tout, mais il aurait suffi d’ajouter cela pour être exact.
À cette heure-ci, j’ai le sentiment qu’on nous a servi un plat sans saveur. Je le dis et j’assume mes propos.
Parler de la vie chère dans les outre-mer suppose de rappeler que cette problématique s’est considérablement aggravée après la crise de la covid. Nous sommes tous montés au créneau. Je ne parle pas ici des difficultés conjoncturelles propres aux départements d’outre-mer.
Je salue d’ailleurs l’engagement et la détermination de l’ancien ministre des outre-mer, M. Victorin Lurel, dont la conviction et la constance méritent d’être soulignées, même si, à certains moments, je me suis interrogée sur ce qui avait été accompli durant son passage au ministère… (Sourires.) Quoi qu’il en soit, comme on dit, il n’est jamais trop tard pour bien faire, n’est-ce pas, monsieur le ministre ? Des ministres des outre-mer, j’en ai vu défiler…
Les faits sont là : après la pandémie, les prix ont explosé dans l’ensemble de nos territoires ultramarins, aggravant encore les choses. Chacun, ici, est venu défendre la situation de son territoire, et je rappelle qu’en date du 26 juin dernier, l’Assemblée de la Polynésie française avait émis un avis très défavorable sur ce projet de loi. C’est dans ce contexte que je parle de ce texte comme d’un plat sans aucune saveur.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Lana Tetuanui. Enfin, je m’interroge : ce projet de loi a-t-il une réelle chance de prospérer après son passage au Sénat, compte tenu du contexte politique ? J’en doute.
Pour ma part, je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. Je l’ai dit lors de la discussion générale : ce texte n’enlève rien, mais il ne change rien. Il ne retire rien à la loi de 2012 et ne modifie rien de fondamental. On y retrouve certains éléments recyclés du débat de 2012, qui n’avaient pas pu être adoptés à l’époque et qui le sont aujourd’hui.
Ce qui nous intéresse, madame la ministre, je le dis depuis 2009, c’est la lutte contre la « profitation ». Or celle-ci n’a jamais été aussi forte dans nos territoires. Après la Guadeloupe, c’est la Martinique qui est touchée.
Nos compatriotes n’attendent pas de littérature sur la manière de sanctionner telle ou telle entreprise. Ils attendent tout simplement que les prix soient justes, c’est-à-dire comparables à ceux pratiqués en métropole. Les salaires sont plus faibles, tandis que les prix restent plus élevés. Comment résister à cela dans nos territoires ? Certes, ceux-ci diffèrent les uns des autres, mais, partout, la question de la vie chère est une réalité quotidienne.
M. le président Patriat, à l’article 5, vous a tendu la perche pour que des avancées concrètes puissent émerger, et pourtant, après une interruption de séance, tout a été renvoyé aux calendes grecques. Or vous savez très bien que nous ne pourrons pas changer la donne sans parler chiffres, sans parler budget.
À un moment donné, l’État devra nécessairement prendre sa part. Sans cet engagement financier, les petits pas dont on parle ne mèneront nulle part ; si nous progressons à ce rythme, les générations passeront sans que nous ayons réglé la question et je peux vous assurer qu’il y aura un bouleversement.
Ce texte, tel qu’il est, n’apporte rien pour résoudre le problème de la vie chère. Il ne change rien pour le peuple guadeloupéen, martiniquais ou guyanais. Nous devrons donc remettre le couvert. Il appartient maintenant à l’Assemblée nationale de remanier profondément ce texte pour qu’il soit à la hauteur des attentes de nos compatriotes.
En l’état, nous ne le voterons pas ; nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Frédéric Buval, rapporteur. À la suite des nombreuses crises, notamment celle qui a secoué la Martinique l’année dernière, ce projet de loi était très attendu, tant par la population que par les acteurs économiques.
Cependant, comme je le craignais, ce texte, désormais amendé et privé de ses articles 1er et 5, risque de décevoir nombre de nos concitoyens. Certes, certaines avancées sont actées, mais permettront-elles de faire baisser rapidement et durablement les prix dans nos territoires ultramarins ? J’en doute.
Par ailleurs, en ma qualité de cosignataire du protocole d’objectifs et de moyens de lutte contre la vie chère de Martinique, je me dois d’exprimer ma profonde déception face au fait que le Gouvernement puisse revenir sur la parole donnée par l’État. Il s’agit là d’un élément essentiel du contrat social, je le dis avec gravité, par devoir envers les Martiniquais qui m’ont mandaté pour défendre leurs intérêts.
En conscience et en responsabilité, mes chers collègues, j’ai décidé de m’abstenir. (Mme Frédérique Puissat marque son agacement.)
Mais je souhaite également exprimer ma sincère gratitude à Mme la présidente Estrosi Sassone, qui nous a apporté un soutien constant et déterminé. Les membres de la commission des affaires économiques nous ont accompagnés, aussi, pour faire passer ce texte. Tous les élus qui ont voté les amendements proposés par la commission nous ont soutenus également. Mais je ne peux pas voter ce texte, en état actuel des choses, face au mur devant lequel nous place le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin, pour explication de vote.
Mme Annick Girardin. Ce qui est clair, c’est que nous ne sommes pas à la hauteur des espoirs que ce projet de loi a suscités. Nous ne sommes pas à la hauteur de ce qu’attendent les Martiniquais, notamment, après la crise qu’ils ont traversée.
Les frustrations, de ce fait, ne font que s’amplifier. Cependant, il faut reconnaître que nous avons progressé sur un certain nombre de dispositifs. Certaines propositions ont été acceptées, tant par le Gouvernement que par la commission, et quelques avancées ont pu être obtenues.
Le groupe du RDSE votera, dans sa quasi-totalité, ce projet de loi. Pour ma part, je m’abstiendrai, tout simplement parce que je souhaite donner un espoir à ce texte. J’ai la conviction, madame la ministre, que vous partagez cette même volonté : celle de voir ce projet se nourrir et s’enrichir lors de son examen à l’Assemblée nationale. Après son adoption par le Sénat, beaucoup de travail reste encore à accomplir.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’associe à mes propos mon collègue Pierre-Jean Verzelen, qui est intervenu lors de la discussion générale.
Je souhaite rendre hommage à celles et ceux qui ont accompli un véritable travail de fond : les rapporteurs, la présidente de la commission des affaires économiques, les collègues membres de cette commission, ainsi que ceux de la délégation sénatoriale aux outre-mer. Ce sont des sujets que vous vivez, que vous connaissez mieux que nous qui vivons en métropole.
Je crois qu’il s’agit là d’une action de solidarité importante, car au-delà de l’éloignement géographique, de la distance, des kilomètres, il y a des problématiques spécifiques qui ont été soulevées et de nombreux amendements ont été examinés.
Je me souviens des travaux menés par la commission d’enquête sur l’utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, dont le président était Olivier Rietmann et le rapporteur Fabien Gay. Un travail de fond considérable avait été accompli, avec notamment l’audition de grands chefs d’entreprise intervenant dans la distribution, y compris outre-mer. Ces auditions avaient permis de mettre en lumière des sujets sensibles. Je me permets d’y faire référence, car, personnellement, je ne connaissais pas bien ces thématiques avant ces travaux, qui nous ont véritablement éclairés. Un travail important a été mené, comme nombre de collègues représentant les outre-mer l’ont souligné avec justesse.
La tâche reste immense. D’autres textes financiers viendront prochainement, qu’il s’agisse du budget de la sécurité sociale ou de celui de l’État, au sein duquel nous aurons notamment à examiner les crédits de la mission « Outre-mer ».
Globalement, ce projet de loi constitue une avancée importante. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires le votera.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Il est un peu tard, et nos esprits commencent à s’embrouiller à force d’entendre tout ce qui se dit. Je voudrais simplement en revenir à une forme de bon sens.
Je rappelle que des amendements ont été déposés et travaillés, certains adoptés. Tous les articles du texte de la commission ont été votés. Je suis désolée, mais quand certains disent qu’ils vont s’abstenir ou qu’ils ne voteront pas ce texte, cela manque de cohérence. (M. Teva Rohfritsch s’exclame.) Nous avons voté les articles de ce texte de loi, il est donc logique que nous votions le texte dans son ensemble.
Ainsi, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi.
M. Dominique Théophile. Chacun fait ce qu’il veut !
Mme Catherine Conconne. Je n’ai pas voté tous les articles. Respectons la démocratie et la liberté de vote de chacun !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, modifié, de lutte contre la vie chère dans les outre-mer.
(Le projet de loi est adopté.)
4
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 29 octobre 2025 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures et le soir :
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles (texte de la commission n° 46, 2025-2026) ;
Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de notes verbales entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie relatif à l’échange de permis de conduire (procédure accélérée ; texte de la commission n° 62, 2025-2026) ;
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord de coopération dans le domaine de la défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Macédoine du Nord (texte de la commission n° 60, 2025-2026) ;
Projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Finlande pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales, et l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Suède en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (procédure accélérée ; texte de la commission, n° 52, 2025-2026) ;
Explications de vote puis vote sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à renforcer la lutte contre la fraude bancaire (texte de la commission n° 55, 2025-2026) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi organique visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie afin de permettre la poursuite de la discussion sur l’accord du 12 juillet 2025 et sa mise en œuvre (texte de la commission n° 80, 2025-2026).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 29 octobre 2025, à zéro heure cinquante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
JEAN-CYRIL MASSERON
 
                                                             
                                                             
                                                             
                                                             
                                                             
                                                             
                                                            