Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La logique de cet amendement est assez similaire à celle de l'article 9 bis, que nous venons de supprimer. Cette nouvelle niche serait simplement un peu plus encadrée, puisque l'amendement tend à instaurer un critère géographique.

En cohérence avec l'avis précédent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 557 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Après l'article 9 bis
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Après l'article 9 ter

Article 9 ter (nouveau)

À l'article L. 731-14-1 A du code rural et de la pêche maritime, après la référence : « L. 731-14 », sont insérés les mots : « du présent code et à l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale » – (Adopté.)

Article 9 ter (nouveau)
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Article 9 quater (nouveau)

Après l'article 9 ter

Mme la présidente. L'amendement n° 1728 rectifié, présenté par Mmes Espagnac, Le Houerou et Conconne, M. Kanner, Mmes Féret et Canalès, MM. Jomier et Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 9 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article ainsi rédigé : 

« Art. L. 731-23-.... – Les personnes non-salariées des professions agricoles bénéficient d'une exonération des cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité et des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole pour leurs revenus issus des activités de location de meublés de tourisme au sens de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme et soumises au régime défini à l'article 50-0 du code général des impôts.

« Un décret détermine les conditions d'application et d'éligibilité de la présente exonération. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement vise à restaurer l'abattement fiscal concernant les gîtes ruraux.

La loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale a contribué à réduire l'avantage fiscal prévu pour le régime micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux), dans le but – louable – d'aligner les avantages fiscaux des locations de courte et de longue durée.

Les agriculteurs exerçant à titre complémentaire une activité de location de gîtes ruraux se sont vu appliquer la réforme, notamment l'abaissement, dans un premier temps, de l'abattement fiscal de 71 % à 50 %, alors qu'ils n'étaient pas la cible. Notre groupe avait pourtant défendu l'exception du gîte rural jusqu'en commission mixte paritaire, sans succès.

En conséquence, les revenus tirés de cette activité de location sont doublement pénalisés : d'une part, du fait de la réduction de l'abattement ; et, d'autre part, en raison de la taxation plus importante par la Mutualité sociale agricole (MSA), compte tenu de l'augmentation de l'assiette.

Je rappelle que cette activité permet aux agriculteurs de s'assurer un complément de ressources. Pour ne pas fragiliser l'activité touristique des territoires ruraux et, surtout, pour garantir des revenus décents à nos agriculteurs, cet amendement vise à exonérer de cotisations sociales les revenus qu'ils tirent de la location de gîtes ruraux, lorsqu'ils sont concernés par l'abattement fiscal en micro-BIC.

J'ajoute que nous avions voté cet amendement l'année dernière au Sénat, en demandant au Gouvernement de se pencher sur cette question des gîtes ruraux. Au vu des débats à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2026, je comprends que rien n'a été fait pour avancer sur ce dossier.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Espagnac, nous avions déjà eu un débat sur cette question l'année dernière et j'avais soutenu votre amendement.

Mme Frédérique Espagnac. Je vous en remercie !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pour être honnête, je suis quelque peu confuse, car je pensais que nous avions résolu le problème. Ce n'est apparemment pas le cas, mais nous venons d'adopter l'article 9 ter, qui instaure déjà une exonération.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur cette question ?

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je rappelle que l'article 12 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 permet déjà aux exploitants agricoles de conserver, pour le calcul des cotisations sociales, les abattements et plafonds fiscaux, dans leur version antérieure à la loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale. Nous considérons que ce dispositif est déjà très favorable. (Mme Frédérique Espagnac le conteste.)

En outre, un amendement tendant à renforcer le dispositif pour les gîtes ruraux a été adopté à l'Assemblée nationale.

Pour ces raisons, l'évolution que vous proposez n'apparaît ni soutenable ni souhaitable.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, l'amendement adopté à l'Assemblée nationale porte sur la définition non pas des gîtes ruraux, mais des Gîtes de France. Ce n'est pas la même chose.

Par ailleurs, nous avions voté la mesure que je vous propose, l'an dernier, mais elle n'a pas été retenue en commission mixte paritaire. La double taxation, due notamment à la MSA, est toujours en vigueur.

Mes chers collègues, je vous demande donc d'adopter cet amendement, car nos agriculteurs sont toujours doublement taxés et doublement peinés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1728 rectifié.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)

Après l'article 9 ter
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Après l'article 9 quater

Article 9 quater (nouveau)

I. – Au troisième alinéa du I de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « , à l'exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.

II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la majoration de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 607 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° 880 est présenté par M. Salmon, Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli et Mmes Ollivier, Senée et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l'amendement n° 607.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer l'article 9quater. Pour rappel, la ministre de l'action et des comptes publics a estimé le coût de l'extension du dispositif prévue dans cet article entre 40 millions et 80 millions d'euros. La commission y est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l'amendement n° 880.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement a été déposé par Daniel Salmon et les membres du groupe écologiste.

Alors que nous demandons depuis plusieurs années une évaluation de l'efficacité, des effets indirects et de l'inscription dans les objectifs de transition agroécologique du dispositif travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE), il nous paraît particulièrement inopportun d'étendre encore davantage cette exonération de cotisations patronales, en l'occurrence aux entreprises de travaux forestiers.

Le dispositif TO-DE est une dépense à l'aveugle, qui augmente tous les ans en fonction du niveau du Smic et du nombre de travailleurs. Cette exonération de cotisation s'ajoute à des allégements généraux, renforçant ainsi la trappe à bas salaires dans le secteur agricole.

Cette aide, dont le coût a triplé depuis 2019, a été pérennisée en 2025, alors qu'elle n'a jamais été évaluée, et profite principalement à un nombre restreint d'exploitations : les plus grosses, les plus intensives et les plus consommatrices d'intrants.

Nous nous devons de protéger et de consolider la filière bois, mais nous devons le faire par d'autres moyens que des exonérations de cotisations, lesquelles sont fort préjudiciables à l'heure des budgets contraints.

Compensé en partie sur le budget du ministère de l'agriculture, le dispositif TO-DE empêche de mobiliser d'autres crédits pour soutenir, par exemple, la transition agroécologique, le revenu des agriculteurs ou l'installation-transmission.

Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Nous sommes d'accord avec la rapporteure générale : le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 607 et 880.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 9 quater est supprimé, et les amendements nos 226 rectifié ter, 1097 rectifié quater et 1614 rectifié quater n'ont plus d'objet.

Article 9 quater (nouveau)
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Article 9 quinquies (nouveau)

Après l'article 9 quater

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 1173 est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L'amendement n° 1314 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L'amendement n° 1691 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 9 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rétabli :

« III. – Les employeurs ayant bénéficié de cette exonération sont tenus de garantir aux travailleurs occasionnels des conditions de logement digne, de participer à la prise en charge de leurs frais de transports, de mettre en place un plan de réexamen de la rémunération à la tâche ainsi que d'appliquer un plan canicule. Ils en fournissent la preuve aux organismes mentionnés à l'article L. 723-1 du présent code. Les employeurs ne satisfaisant pas à ces exigences ne bénéficient pas des dispositions du présent article. »

La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l'amendement n° 1173.

Mme Silvana Silvani. Nous proposons de conditionner à un certain nombre de critères sociaux les aides accordées au secteur agricole.

Chaque année, les vendanges connaissent leur lot de faits tragiques. Des traitements inhumains sont infligés à des travailleurs saisonniers dénutris, hébergés dans des conditions extrêmes d'insalubrité, forcés à travailler sur de larges amplitudes horaires, dans des conditions météorologiques difficiles et pour une paye dérisoire, lorsqu'elle leur est seulement versée…

Concrètement, les grands groupes du capitalisme agricole français et les multinationales du luxe, comme LVMH, exploitent la misère de travailleurs précaires, voire organisent le retour d'une forme d'esclavage. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Silvana Silvani. Or les mêmes grandes entreprises parviennent à s'exonérer de toute responsabilité en ayant recours à la sous-traitance. Si trois personnes ont récemment été condamnées à de la prison ferme pour s'être rendues coupables de traite d'êtres humains, la société viticole donneuse d'ordre s'en est tirée à bon compte : elle n'a eu à acquitter qu'une faible amende, de 75 000 euros. Au sommet de la chaîne de décision, les multinationales du luxe n'ont eu à répondre d'aucun crime.

Le dispositif TO-DE coûtera plus de 620 millions d'euros aux finances sociales en 2026. C'est autant d'argent public qui n'ira pas aux finances sociales et qui ne doit pas être orienté vers des entreprises maltraitantes.

Il convient donc de conditionner le bénéfice de ces aides à l'existence d'un logement digne, à la protection des salariés lors des canicules, à la remise en cause de la rémunération à la tâche ou encore à la prise en charge des frais de transport des salariés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 1314.

Mme Raymonde Poncet Monge. L'exonération de cotisations TO-DE constitue un soutien à l'activité agricole, en particulier dans les filières dépendant fortement du travail saisonnier. Toutefois, cet outil doit s'inscrire dans un cadre garantissant le respect des droits des travailleurs.

Les difficultés récurrentes, et documentées, constatées dans l'hébergement, la rémunération et l'organisation du travail des saisonniers montrent la nécessité d'assortir ces aides publiques d'exigences sociales claires et vérifiables.

La Confédération paysanne le soulignait déjà en 2023, en rappelant le fait suivant : la conditionnalité sociale des aides figurant dans le règlement de la politique agricole commune (PAC), tout soutien accordé dans ce cadre doit être soumis au respect des droits des personnes et du travail.

Cette même année, six travailleurs saisonniers perdaient la vie dans les vignes françaises en l'espace d'une semaine, du fait de leurs conditions de travail et des fortes chaleurs ; six !

Au-delà, comme le souligne le Conseil économique, social et environnemental (Cese), les productions agricoles exigent une importante main-d'œuvre saisonnière à faible revenu. En résultent de fortes tensions dans l'accès au logement et l'indisponibilité d'un parc sous-dimensionné. Les besoins de logement des saisonniers n'en sont que plus difficile à satisfaire, si bien que ces travailleurs sont parfois contraints de vivre dans des conditions peu acceptables.

En conditionnant ces exonérations à l'existence d'un hébergement conforme aux normes de salubrité et de sécurité – ce n'est pas beaucoup demander ! – et à l'assurance d'une rémunération au moins équivalente aux standards légaux et conventionnels les plus protecteurs, nous entendons rétablir un juste alignement entre l'aide publique et l'exemplarité sociale attendue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 1691.

Mme Annie Le Houerou. À mon tour, je défends ces dispositions, présentées par les trois groupes de gauche de notre assemblée.

Par ces trois amendements identiques, nous exprimons une exigence simple, mais fondamentale : les aides publiques versées au secteur agricole doivent être conditionnées au respect du droit du travail et de la dignité humaine, ni plus ni moins.

Au cours des dernières années, chacun de nous a été marqué par des faits divers insupportables. Mme Poncet Monge l'a rappelé, plusieurs travailleurs saisonniers sont morts lors d'épisodes de canicule.

J'ajoute que nombre de ces salariés sont logés dans des conditions indignes et que l'on a constaté des abus manifestes dans l'organisation du travail.

Certes, ces situations restent minoritaires, mais elles jettent un profond discrédit sur l'ensemble de la profession. Surtout, elles rappellent que ce sont toujours les travailleurs les plus précaires qui paient le prix de telles dérives.

Il est selon nous de notre responsabilité de législateurs de dire clairement que les deniers publics ne peuvent pas financer des pratiques bafouant les droits fondamentaux. C'est le sens de ces dispositions, visant à conditionner l'exonération TO-DE au respect de quelques règles élémentaires : un jour de repos hebdomadaire doit être garanti, un logement décent doit être assuré et une protection minimale doit être accordée.

Nous entendons, en somme, veiller à l'application du droit commun. Il ne s'agit pas de pénaliser les exploitations agricoles vertueuses, qui représentent l'immense majorité. Au contraire, nous proposons de les soutenir, en évitant une concurrence déloyale fondée sur le contournement des règles sociales.

Les aides publiques doivent encourager de bons comportements et non pas cautionner des abus. Notre politique agricole doit, plus largement, être cohérente avec les valeurs de la République, l'exigence de dignité au travail et l'impératif de justice sociale. Telle doit être notre ambition collective.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, nous n'admettons pas davantage que vous les situations que vous décrivez et que vous n'êtes d'ailleurs pas seuls à dénoncer. Toutefois, je m'interroge : faut-il cibler un dispositif d'exonération des cotisations patronales ? Cette politique relève-t-elle de la sécurité sociale ? (Protestations sur des travées du groupe SER.)

Mme Annie Le Houerou. Nous proposons une simple conditionnalité de l'aide !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement est bien sûr très attentif à ces enjeux. Il vise lui aussi l'amélioration des conditions de travail des travailleurs occasionnels du secteur agricole.

L'objectif de l'exonération TO-DE est de soutenir les entreprises agricoles employeuses de main-d'œuvre occasionnelle, lesquelles sont confrontées à des crises récurrentes ainsi qu'à la concurrence internationale exercée sur les prix.

Le droit du travail contient quant à lui un vaste corpus de règles visant à protéger les travailleurs et à leur assurer des conditions de travail dignes. L'employeur qui s'y soustrait s'expose à des sanctions administratives et pénales. Le droit du travail n'est pas une option.

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cependant,…

Mme Laurence Rossignol. Tout est dans le « cependant »…

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. … le dispositif TO-DE n'est selon nous pas le bon outil pour inciter les entreprises à prendre des mesures plus favorables que les dispositions du code du travail.

Mme Raymonde Poncet Monge. Alors, quel est l'outil approprié ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Bref, votre cause est juste, mais l'instrument proposé ne nous semble pas adapté. Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Il y a quelques jours, nos collègues de la droite sénatoriale nous donnaient des leçons extrêmement vigoureuses de lutte contre les fraudes fiscale et sociale. Tout le monde ici renchérissait de sévérité, surtout, d'ailleurs, face à la fraude sociale.

Pour notre part, nous étions également mobilisés. Nous avons donc pu voter un certain nombre de dispositions ensemble.

Aujourd'hui, nous passons aux travaux pratiques : qu'est-ce que le non-respect du code du travail, sinon de la fraude ?

Chers collègues, nous vous proposons d'ajouter aux sanctions pénales une sanction de nature économique. Il y a quelques jours, vous nous expliquiez justement qu'il fallait supprimer le tiers payant…

Mme Laurence Rossignol. … pour les assurés sociaux qui avaient fraudé, au motif qu'ils méritaient une double peine.

J'en déduis qu'en cas de fraude la double peine vaut pour les salariés, non pour les employeurs. Franchement, soyez cohérents, tout le monde y gagnera. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, un de vos arguments me laisse quand même dubitatif.

Vous nous dites en substance que le budget de la sécurité sociale n'est pas le bon véhicule pour mettre en œuvre une politique sociale. Nous examinons pourtant je ne sais combien d'amendements et de dispositifs tendant à soutenir l'activité économique, à aider tel ou tel secteur, ce qui n'est pas l'objet de la sécurité sociale.

Ce n'est pas l'objet de la sécurité sociale d'aider une filière agricole ; pas du tout ! Mais, à l'occasion, on utilise le budget de la sécurité sociale pour pallier les carences de l'État…

M. Bernard Jomier. Il est légitime de vouloir aider telle ou telle filière, mais les crédits dont il s'agit devraient figurer au projet de loi de finances. Or on préfère placer ces dispositions dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale – nous en avons largement l'habitude.

En l'occurrence, nous pointons la nécessité de mieux protéger les droits sociaux des salariés de la filière viticole. Cette question relève bien du budget de la sécurité sociale, mais vous laissez entendre que nous sommes à côté de la plaque… Cette distorsion de la réalité est à tout le moins intéressante.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Monsieur le ministre, j'ai un peu de mal à comprendre vos arguments : les dispositions de ces trois amendements identiques relèvent tout simplement du bon sens.

Les employeurs dont il s'agit seraient « tenus de garantir aux travailleurs occasionnels des conditions de logement digne, de participer à la prise en charge de leurs frais de transport, de mettre en place un plan de réexamen de la rémunération à la tâche ainsi que d'appliquer un plan canicule ». C'est quand même la base !

Il s'agit de faire respecter la loi et le code du travail. Nous ne parlons pas du tout d'une incitation, mais d'une aide qu'il convient de conditionner. À cette fin, il faut veiller à l'application du code du travail, notamment garantir la dignité de ces salariés, ce qui paraît somme toute logique.

Nous parlons d'argent public, de crédits relevant du budget de la sécurité sociale : les règles doivent être correctement appliquées. Après toutes les déclarations que nous avons entendues lors de l'examen du texte relatif à la fraude sociale, je ne comprendrais pas que le Sénat n'aille pas dans ce sens.

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Mes chers collègues, à qui ces dispositions sont-elles destinées ? Toutes les entreprises viticoles ne sont pas concernées.

Nous parlons de celles et ceux qui font le choix d'aller chercher des hommes et des femmes, en général des hommes, pour récolter le raisin à la main. Il s'agit rarement du viticulteur du coin, qui gère une petite exploitation familiale. Ces dispositions visent surtout les grands, et même les très grands groupes ; les très grandes terres ; les très grands vins, qui appartiennent à peu près toutes et tous à des magnats de l'industrie, à des entreprises du luxe, en général étrangères.

Refuser de conditionner ces aides, c'est donc refuser de s'attaquer à celles et ceux qui ne respectent pas le code du travail. Il s'agit en réalité de grands propriétaires, non d'exploitants familiaux.

Monsieur le ministre, vous vous heurtez à un autre obstacle : le débat relatif au conditionnement des aides publiques, qui monte aujourd'hui dans notre société.

M. Fabien Gay. Nos concitoyens n'accepteront pas longtemps encore que les subventions directes, les niches fiscales ou les exonérations de cotisations patronales ne soient soumises à aucune condition !

Le Gouvernement et la droite sénatoriale, travaillant main dans la main, durcissent chaque jour les conditions d'attribution des prestations sociales. Mais, quand on parle du capital, ce ne serait pas possible…

Il y va du respect du code du travail et, au-delà, de la dignité humaine. (Marques d'approbation sur les travées du groupe CRCE-K.) Les hommes et les femmes dont nous parlons, qui sont souvent des étrangers en situation irrégulière, se retrouvent dans des exploitations où le mot d'ordre est : « Tu bosses et tu te tais. » Vous ne proposez rien pour mettre fin à la double exploitation qu'ils subissent.

Le fait de conditionner ces exonérations serait vraiment un minimum.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Chers collègues de la droite sénatoriale, vous avez conditionné cette prestation minimale d'existence qu'est le revenu de solidarité active (RSA) à quinze heures d'activité. (Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. Daniel Fargeot. Mais c'est normal !

Mme Raymonde Poncet Monge. Je le répète, la France reçoit des fonds de la PAC. Or en vertu du règlement de cette politique, tout soutien octroyé à ce titre est conditionné au respect des droits des personnes et du travail. À l'évidence, on en est loin – j'en veux pour preuve la situation de l'hébergement, que j'ai évoquée tout à l'heure.

Monsieur le ministre du travail, vous dites que cet outil n'est pas le bon. J'en déduis qu'il faut recourir aux inspecteurs du travail : combien sont-ils ? Quelle est, pour ce corps, la courbe des effectifs ? Combien de contrôles les inspecteurs en fonction peuvent-ils mener dans ces exploitations ? Comment le ministère du travail et ses inspecteurs ont-ils pu laisser mourir les six travailleurs que je citais ? On ne doit pas exercer de telles tâches par temps de canicule ; mais, sauf exception, les pauvres travailleurs occasionnels ne peuvent pas revendiquer eux-mêmes l'application du droit du travail, et vous le savez.

J'y insiste, comment est-il possible que six travailleurs aient pu mourir, au cours d'une même semaine, dans ces exploitations du fait de la canicule ? Si les entreprises ne respectent pas le règlement de la PAC, il faut commencer par leur retirer ces fonds.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'entends que les inspecteurs du travail laissent mourir des gens : un tel propos est peut-être un peu excessif… (Protestations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Très excessif !

M. Fabien Gay. Personne n'a dit cela !

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je suis aussi là pour défendre le corps des inspecteurs du travail, qui mènent une action remarquable et dont nous avons rétabli les effectifs. Il me semblait nécessaire d'opérer cette mise au point.

Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.