Mme la présidente. L'amendement n° II-859, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
24 181 478
24 181 478 |
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24 181 478
24 181 478 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
18 431 595
18 431 595 |
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18 431 595
18 431 595 |
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Vie de l'élèvedont titre 2 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
9 918 920
9 918 920 |
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9 918 920
9 918 920 |
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Soutien de la politique de l'éducation nationale dont titre 2 |
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52 531 993
52 531 993 |
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52 531 993
52 531 993 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
52 531 993 |
52 531 993 |
52 531 993 |
52 531 993 |
SOLDE |
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La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Je partage tout à fait l'analyse de M. Bilhac.
Cet amendement vise aussi à revenir sur la suppression de 4 000 postes prévue à la rentrée de 2026. Je rappelle que, depuis 2017, ce sont près de 10 000 postes d'enseignants qui ont été supprimés dans l'éducation nationale.
Une autre piste consisterait à préserver les postes actuels en vue de rehausser le taux de remplacement, à l'heure où près de 7 % des heures d'enseignement dans le second degré n'ont pas été assurées en 2024, faute de remplaçants.
Mme la présidente. L'amendement n° II-621, présenté par Mmes Monier et Brossel, M. Kanner, Mme Blatrix Contat, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mmes Matray et S. Robert, MM. Ros, Ziane, Bourgi et Fichet, Mme Linkenheld, MM. Michau, Montaugé, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
24 181 478 24 181 478 |
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24 181 478 24 181 478 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l'élèvedont titre 2 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l'éducation nationale dont titre 2 |
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24 181 478 24 181 478 |
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24 181 478 24 181 478 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
24 181 478 |
24 181 478 |
24 181 478 |
24 181 478 |
SOLDE |
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La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Je ne reviens pas sur un certain nombre d'arguments que je viens d'entendre, puisque ce sont aussi les miens.
Cependant, mon cher collègue Bilhac, je vous mets en garde contre la tentation de supprimer des effectifs dans l'administration. On a besoin de ces personnels pour garantir une bonne gestion. Si cette idée était mise en œuvre, le risque est que cette tâche incombe aux établissements, ce qui serait très compliqué pour eux.
J'ajoute que la baisse de quelque 106 000 élèves dans le premier degré à la rentrée de 2026 reste à confirmer et, surtout, qu'elle aurait pu contribuer, à effectifs constants d'enseignants, à améliorer la réussite scolaire des élèves et à favoriser un climat scolaire serein, propre à réduire les inégalités scolaires.
À l'heure actuelle, notre école élémentaire publique ne peut pas remplir l'ensemble des missions qui lui sont assignées, à savoir la mise en œuvre de l'école inclusive, la lutte contre le harcèlement et la garantie des remplacements nécessaires. Il sera très compliqué pour elle d'y parvenir si on ne lui donne pas les moyens humains indispensables pour ce faire.
Mme la présidente. L'amendement n° II-620, présenté par Mmes Monier et Brossel, M. Kanner, Mme Blatrix Contat, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mmes Matray et S. Robert, MM. Ros, Ziane, Bourgi et Fichet, Mme Linkenheld, MM. Michau, Montaugé, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
18 431 595 18 431 595 |
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18 431 595 18 431 595 |
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Vie de l'élèvedont titre 2 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l'éducation nationale dont titre 2 |
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18 431 595 18 431 595 |
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18 431 595 18 431 595 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
18 431 595 |
18 431 595 |
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18 431 595 |
SOLDE |
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La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Il s'agit d'un amendement ayant le même objet, mais en faveur du second degré.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Tout d'abord, permettez-moi de faire une petite mise au point à la suite des interventions en discussion générale de MM. Buis et Fialaire, ainsi que de Mmes Monier et Corbière Naminzo.
Tous ont fait mention d'un amendement que la commission a présenté – ce que j'assume totalement – et qui a pour objet la suppression de 4 000 postes de plus que ce que prévoit le projet de loi de finances. Cet amendement a été retiré avant la séance, parce que « les conditions de départ du train n'étaient pas réunies », pour employer un vocabulaire typique de la SNCF (Sourires.), et que la marche était vraisemblablement un peu haute.
Manifestement, mes chers collègues, l'information ne vous est pas parvenue. Dont acte.
Concernant la suppression des 4 000 postes d'enseignants prévue par le Gouvernement, un certain nombre d'explications vous ont déjà été fournies, notamment par M. le ministre et moi-même, concernant l'évolution démographique. On a bien enregistré une baisse de 100 000 élèves à la rentrée 2023-2024, une autre de 110 000 à la rentrée 2004-2025, et une nouvelle diminution de 140 000 élèves à la rentrée 2025-2026. L'entrée en maternelle des nouveau-nés de 2022 a marqué une très importante chute de la démographie.
Le ministre l'a bien dit : cette chute va se poursuivre. Même avec une réduction de 4 000 postes à la rentrée prochaine, l'amélioration assez nette du taux d'encadrement – que tout le monde souhaite – se poursuivra. En à peine une dizaine d'années, ce taux est passé, dans le primaire, d'un enseignant pour 25 élèves par classe – en 2011 – à un enseignant pour 21 élèves – c'est le pourcentage actuel – ; il va continuer à s'améliorer.
Autre remarque, mes chers collègues, vous avez raison de dire que, dans d'autres pays d'Europe, le taux d'encadrement est plus élevé. M. le ministre en a très bien exposé les raisons : il s'agit de pays qui ont eu une démographie négative ou défavorable plus précocement que la France. Aussi, il faudra un peu de temps à notre pays pour rattraper ce retard, mais nous empruntons la même voie.
Très concrètement, toujours plus de professeurs pour encadrer toujours moins d'élèves améliore-t-il la situation de l'école ? (Oui ! sur des travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
C'est vous qui le dites !
Mme Colombe Brossel. C'est ce que dit le ministère !
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. En tout cas, les résultats actuels ne le prouvent pas forcément !
Les dédoublements de classes, ainsi que les groupes, non pas de niveau, mais de besoins, ont produit leurs effets. On en fait déjà beaucoup ! Faut-il en faire davantage dans le contexte budgétaire et démographique que nous connaissons et qui, malheureusement, ne s'améliorera pas de sitôt ?
On ne peut pas nier la réalité démographique. C'est pourquoi la commission des finances émet un avis défavorable sur ces amendements en discussion commune, par ailleurs pleins de bon cœur.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Edouard Geffray, ministre. À titre personnel, j'estime qu'il est indispensable que l'on puisse « atterrir en douceur » et faire évoluer le nombre d'enseignants sur plusieurs années pour tenir compte du décrochage démographique massif.
En réalité, décider de retarder cet ajustement reviendrait à créer un problème de recrutement dans sept, huit ou neuf ans, tout simplement parce que les effectifs de professeurs auront été totalement décorrélés des effectifs d'élèves.
La suppression des 4 000 postes permet incontestablement d'absorber une partie de la chute de la démographie, mais aussi de maintenir un nombre de professeurs suffisamment important pour qu'à la rentrée scolaire prochaine le nombre d'élèves par classe dans le premier degré soit le plus faible qu'ait jamais connu le système éducatif français. Cela permettra d'avoir un taux d'encadrement qui, je le répète, continuera à s'améliorer un peu plus chaque année.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Je profite de l'occasion pour défendre un amendement que j'ai déposé et qui, hélas, a été déclaré irrecevable.
Pourtant, monsieur le ministre, à vous entendre depuis tout à l'heure, il me semble que cet amendement aurait pu être examiné, puisque vous avez vous-même évoqué la nécessité de prendre un peu de temps pour répercuter cette évolution démographique sur les effectifs d'enseignants. Je proposais justement de mettre en place un moratoire de trois ans dans les zones France Ruralités Revitalisation (FRR). Il s'agit d'un engagement pris en 2023, qui n'a pas été tenu.
Aujourd'hui, les observatoires des dynamiques rurales, qui portent assez mal leur nom, ne permettent pas d'engager un dialogue de confiance, dans la mesure où, pendant que l'on y discute de perspectives pluriannuelles, des coupes ont lieu chaque année dans les effectifs…
À l'heure où je vous parle, certaines communes de mon département du Cantal ont déjà été informées par la direction académique des services de l'éducation nationale (Dasen) de nouvelles suppressions de postes à la rentrée prochaine. Comment voulez-vous que nous ayons un dialogue franc, transparent et prospectif en adéquation avec les données dont nous disposons, si ces coupes brutales, qui ne font l'objet d'aucune concertation, continuent d'avoir lieu année après année ?
Monsieur le ministre, je vous demande de vous engager sur des moratoires de trois ans à compter de la mise en place des observatoires des dynamiques rurales, pour laisser le temps aux territoires de dialoguer et de mener les concertations.
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je formulerai deux remarques.
Je me réjouis que, pour une fois, le ministère anticipe les évolutions démographiques. Cette anticipation est la bienvenue, car, trop souvent par le passé, l'absence de prévision a provoqué des mouvements d'accordéon qui ont été extrêmement préjudiciables à une juste évaluation du nombre de postes à offrir aux concours et, partant, aux étudiants qui, selon les années, étaient plus ou moins nombreux à se porter candidats.
Je reviens sur les propos de notre collègue Stéphane Sautarel.
À organisation constante, et faute d'une véritable réflexion, on est effectivement crispés sur les moyens dont on dispose, en particulier sur l'école dans la ruralité. Je l'ai souligné tout à l'heure à la tribune : dans mon département, 101 professeurs des écoles, qu'ils exercent dans des établissements à classe unique ou dans des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) multisites, sont les seuls adultes dans leur école, avant que les parents ne viennent chercher leurs enfants. Évidemment, toute fermeture de classe crée les crispations que l'on connaît.
Il serait temps, plutôt que de parler constamment de moyens et de considérer que c'est toujours à moyens constants que l'on doit raisonner, de mener une vraie réflexion sur l'école en ruralité.
Mme la présidente. La parole est à M. Adel Ziane, pour explication de vote.
M. Adel Ziane. Je me suis replongé dans le rapport d'information sur le remplacement des enseignants du sénateur Paccaud, qui, dans la première partie de son analyse, mentionne un nombre croissant d'heures d'enseignement non remplacées. Ce n'est pas moi qui le dis, monsieur le rapporteur spécial, et ce n'est pas une question de cœur…
Nous observons ce soir un véritable changement de paradigme.
Faisant preuve d'esprit de responsabilité, chacun se pose, bien sûr, la question de la baisse de la démographie et réfléchit à l'ajustement des effectifs d'enseignants qui serait ou non nécessaire pour tenir compte de la baisse du nombre d'élèves.
Pour ma part, monsieur le ministre, je souhaite revenir sur ce dont a parlé l'un de vos prédécesseurs lors de son audition en octobre 2023 – il y a eu un certain nombre depuis –, un certain Gabriel Attal : à l'époque, disait-il, 15 millions d'heures de cours n'étaient pas dispensées. Partant de ce constat, nous lui avions suggéré – pour tout dire, je l'avais fait moi-même – d'arrêter de supprimer des postes d'enseignants durant un certain nombre d'années, considérant que cela permettrait de réduire le nombre d'heures non assurées et de corriger les difficultés que nous observons aujourd'hui.
Il faut désormais accepter ce changement de paradigme. À cet égard, je me réjouis d'avoir entendu parler de « moratoire ». Ces amendements tendent à régler une partie du problème.
Mme la présidente. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.
Mme Colombe Brossel. D'abord, je remercie le professeur Paccaud pour la leçon. (M. le rapporteur spécial rit.)
Je tiens à réfuter l'argument répété à l'envi par nos collègues LR, qui revient à dire – pardonnez-moi de le résumer à grands traits – que la gauche en demanderait toujours plus. Mes chers collègues, ce n'est pas ce que nous disons ! Nous demandons le maintien des 4 000 postes, et ce afin de transformer l'école. Leur suppression l'empêchera.
On peut avoir un débat sur le lien de causalité entre nombre d'enfants par classe et réussite scolaire. Moi qui lis la littérature du ministère, j'y constate que le dédoublement des classes a produit des effets bénéfiques et que l'on a donc tout intérêt à abaisser le nombre d'enfants dans chaque classe.
Par ailleurs, je veux bien que la démographie soit devenue votre seule et unique préoccupation, mes chers collègues, mais vous oubliez que, pendant des années, les effectifs d'élèves ont augmenté au collège et que, dans le même temps, le nombre de postes d'enseignants n'a pas cessé de diminuer ! Vous voudriez maintenant nous faire croire – pire, faire croire aux enseignants ! – que seule la démographie guide les choix budgétaires du Gouvernement. Non, ce n'est pas sérieux !
Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Monsieur ministre, j'ai écouté attentivement votre propos introductif.
Vous avez indiqué que l'on avait le choix entre trois solutions : premièrement, répercuter purement et simplement la baisse de la démographie et supprimer en conséquence de nombreux postes ; deuxièmement, ne rien faire, ne supprimer aucun poste, ce qui reviendrait à laisser vos successeurs faire les coupes dans les effectifs ; troisièmement, supprimer 4 000 postes. C'est cette dernière solution que vous avez retenue et que vous présentez comme raisonnable, modérée, médiane, qui permettrait de répondre à la crise.
Nous nous inscrivons en faux contre cette analyse ! Aujourd'hui, comme mes collègues l'ont dit, nous avons besoin de ces postes d'enseignants pour transformer l'école !
Mes chers collègues de droite, vous nous parlez sans cesse des savoirs fondamentaux sur lesquels il faudrait se recentrer et de l'autorité qu'il faudrait rétablir. Pour parvenir à faire tout cela, on a besoin de moyens humains ! Il faut un meilleur encadrement des élèves, car ces derniers ont besoin de professeurs à leur écoute avec qui ils puissent échanger au quotidien.
C'est de cela qu'ont besoin les élèves de notre pays.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Soyons précis. Ce sont 3 200 postes qui ont été supprimés dans le second degré depuis 2017, à rebours des évolutions démographiques, puisque l'on a enregistré 68 000 élèves de plus entre 2018 et 2021. L'argument démographique ne peut donc pas être invoqué dans un seul sens, celui qui implique de supprimer des postes. (Mme Colombe Brossel acquiesce.)
Avec près de 26 élèves en moyenne par classe dans l'enseignement secondaire, la France compte parmi les plus mauvais élèves de l'OCDE.
Par ailleurs, les retours que j'ai du terrain montrent que les rectorats admettent un seuil de 30 élèves par classe au collège depuis plusieurs années. Du point de vue pédagogique, ce n'est pas acceptable !
Enfin, pour ce qui est du premier degré, mis à part les classes dédoublées dans les établissements des réseaux d'éducation prioritaire (REP) et des réseaux d'éducation prioritaire renforcés (REP+), les classes rurales uniques ou à faibles effectifs – au passage, heureusement que ces classes sont maintenues pour assurer le maillage territorial ! –, le nombre moyen d'élèves par classe est plutôt de 25, 26 ou 27, comme je le constate dans mon département.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Pierre Monier. On peut dire ce que l'on veut : la qualité de l'enseignement dépend du nombre d'élèves par classe.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique de Marco, pour explication de vote.
Mme Monique de Marco. Monsieur le ministre, je vous ai bien écouté. Malheureusement, je n'ai pas du tout compris ce que vous vouliez dire par « agir », « ne pas subir », « atterrissage en douceur »… Sincèrement, ce ne sont là que des mots…
Permettez-moi de vous poser à mon tour cette question : êtes-vous favorable à la proposition qui a été faite ici, au Sénat, d'envisager un moratoire de trois ans des fermetures de classes en milieu rural ? Savez-vous qu'en ruralité la classe ou l'école est parfois la dernière trace de service public ?
Soyons concrets !
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour explication de vote.
Mme Florence Blatrix Contat. Cela fait plusieurs années que l'on se plaint de la place qu'occupe la France dans le classement Pisa (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) et de la baisse du niveau des élèves.
En définitive, on se plaint des conséquences d'un problème dont on chérit les causes, puisque, depuis toutes ces années, le nombre d'enseignants a fortement baissé. Si l'on compare notre situation avec celle des autres pays de l'OCDE, on constate que la France a un nombre d'élèves par classe plus élevé que la moyenne.
La comparaison dans le temps est également instructive : dans les années 1980, par exemple, le nombre moyen d'élèves par classe était de 23,5 au collège ; il s'élève à 25,8 aujourd'hui. Au lycée, il était de 27 élèves par classe ; il s'établit désormais à 30. Comme vous le voyez, les effectifs d'élèves ont augmenté au collège et au lycée et, comme le niveau dans les classes est devenu beaucoup plus hétérogène, les résultats des élèves sont en baisse…
Comme cela a par ailleurs été rappelé, les remplacements ne sont pas assurés partout. C'est notamment le cas dans les zones tendues, mais aussi dans mon département de l'Ain, dans le pays de Gex, ou près de Lyon.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Pillefer, pour explication de vote.
M. Bernard Pillefer. Monsieur le ministre, il me semble que l'on prend le problème à l'envers.
Vous commencez par supprimer des postes, puis nous mènerions une réflexion sous la forme d'un moratoire de trois ans – pourquoi pas ? –, pour définir une nouvelle trajectoire.
Pour avoir été en face d'élèves pendant quarante ans, je pense qu'il est préférable d'abord de mettre en œuvre un moratoire, puis d'établir une trajectoire et, enfin, d'ajuster le nombre de postes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. On le sait tous : notre pays subit une baisse de sa démographie, il a une dette abyssale, ce qui nous pousse à chercher des économies, et notre école a de mauvais résultats. Nous nous accordons tous sur ces constats.
Certains partent du postulat que plus on mettra d'enseignants face aux élèves, meilleurs seront les résultats.
Mme Annick Billon. Eh non, on ne peut pas le garantir !
Aujourd'hui, il est urgent d'envisager des réformes sur le temps long. De ce point de vue, le budget qui nous est proposé assure, finalement, une certaine stabilité.
Oui, l'école a besoin d'être réformée, mais ce n'est pas en mettant plus de moyens, en embauchant plus d'enseignants que l'on parviendra à rehausser le niveau des élèves. (Protestations sur des travées des groupes SER, CRCE-K et si GEST.)
Colombe Brossel, Jacques Grosperrin et moi-même avons mené des travaux autour de la question du maillage territorial des établissements scolaires. Certes, ce n'est pas ce soir que nous parviendrons à nous mettre d'accord – nos débats en attestent –, mais il est possible de conduire une réflexion au long cours sur la question des effectifs. Oui, il faudra nous demander quels postes il faudra supprimer, où et combien de postes il faudra faire disparaître – car c'est inévitable.
Il faut anticiper tout en étant réaliste. Tout cela demande du temps !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Je partage les propos d'Annick Billon.
Le problème qui se pose tient sans doute à la suradministration de l'éducation nationale, qui a pour corollaire un nombre insuffisant d'enseignants face aux élèves. Il conviendrait de renforcer cette présence dans les classes pour parvenir à traiter l'ensemble des situations. (M. Stéphane Sautarel acquiesce.)
De mon point de vue, seuls les deux premiers des quatre amendements en discussion commune qui nous sont soumis procèdent d'une vision correcte de la réalité ; les deux derniers, à l'inverse, traduisent une vision des choses qui n'est pas acceptable.
Chacun sait bien par exemple que, dans notre pays, le pluralisme scolaire est source de réussite. C'est en Bretagne et dans les Pays de la Loire, là où les résultats sont les meilleurs, que le pluralisme scolaire s'affirme le plus. Dans ces territoires, en effet, l'enseignement catholique, l'enseignement privé, prend en charge l'ensemble des élèves ! (M. Pierre Ouzoulias proteste.) Eh oui, Pierre Ouzoulias !
M. Pierre Ouzoulias. Eh non !
M. Michel Canévet. C'est un modèle qu'il faut encourager. Il faut octroyer des moyens à l'enseignement privé pour favoriser la prise en charge de l'ensemble des élèves.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. J'irai dans le sens d'Annick Billon et Michel Canévet.
Partons du constat qui a été dressé, celui d'une baisse de la démographie dans notre pays : il y a quelques années, on enregistrait près de 900 000 naissances chaque année ; l'an prochain, il y en aura moins de 600 000. Ce phénomène a nécessairement un impact sur le nombre d'élèves dans les classes.
Comme l'a dit Michel Canévet, L'un des enjeux fondamentaux tient à la suradministration dans l'éducation nationale. Il existe assurément des marges de progression en la matière. Aujourd'hui, pour un enseignant, organiser une sortie scolaire est devenu complètement dingue ! La mise en place de stages, qui est une bonne chose si l'on veut ouvrir l'école sur l'extérieur, est devenue quasiment impossible, car les enseignants sont confrontés à une montagne de paperasses et de normes.
C'est ce choc de simplification qu'il nous faudrait réclamer unanimement, mes chers collègues. Du moins, nous devrions pouvoir nous retrouver sur ce point.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Philippe Folliot. Il faut faire en sorte de réduire le nombre de normes afin qu'il y ait davantage d'adultes devant les élèves que dans l'administration…
M. Michel Canévet. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Edouard Geffray, ministre. Premièrement, je veux dire que les effectifs d'élèves par classe sont stables dans le second degré depuis vingt ou trente ans, c'est-à-dire sur le long terme. Je vous renvoie aux études de la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (Depp), qui le montrent très bien.
En revanche, les effectifs d'élèves n'ont pas cessé de chuter dans le premier degré. En 2017, on comptait plus de 23 élèves en moyenne par classe. À la rentrée de 2026, le nombre moyen d'élèves dans les classes sera de 21 – et encore, il se pourrait que ce nombre soit un peu moindre, même en tenant compte de la suppression de 4 000 postes d'enseignants.
Deuxièmement, la baisse des effectifs d'élèves par classe a un impact quand, simultanément, les pratiques pédagogiques évoluent. Pardonnez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, mais les dédoublements de classes n'ont produit des effets que parce que les pratiques pédagogiques ont évolué dans le même temps. Sinon, cela n'aurait servi absolument à rien.
M. Max Brisson. On n'en parle jamais !
M. Edouard Geffray, ministre. Troisièmement, nous avons sensiblement amélioré le taux de remplacement. Tout n'est pas encore parfait, mais nous assurons 2,5 millions d'heures de plus grâce au pacte enseignant ; je me permets de le signaler.
Mme Colombe Brossel. Évidemment…
M. Edouard Geffray, ministre. Quatrièmement, je m'inscris en faux par rapport aux propos que j'ai entendus sur la suradministration du ministère de l'éducation nationale. Il y a aujourd'hui 6 gestionnaires pour 1 000 personnes à l'éducation nationale ; or la moyenne dans les administrations publiques en France est de 25 gestionnaires pour 1 000. Mon ministère est quatre fois moins administré que la moyenne des autres ministères. Ce n'est donc pas un levier que nous pourrions activer pour augmenter le taux d'encadrement dans les classes.
Cinquièmement, enfin, je vous répondrai sur la question des moratoires. Je n'y suis personnellement pas favorable, et pour une raison simple : je ne vois pas comment je pourrais, depuis la rue de Grenelle, dire qu'il faut tout suspendre partout.
Je me suis rendu dans une intercommunalité de Charente il y a une semaine exactement. Celle-ci regroupe 49 communes, pour 18 000 habitants : en six ans, les effectifs scolaires sont passés de 1 100 élèves à 900… Eh bien, on m'a expliqué qu'il n'y avait pas d'autre solution que de fermer des classes ou des écoles dans ces communes regroupées en RPI.
La véritable question qui se pose à ces élus n'est pas de savoir s'ils doivent ou non les fermer. De toute façon, ils n'ont pas le choix, puisqu'ils ont perdu 200 élèves en peu de temps. Ils m'ont assuré en revanche qu'ils souhaitaient repenser l'offre pédagogique – ils avaient des idées extrêmement intéressantes en la matière, ce qui fait écho aux propos du sénateur Brisson.
Personnellement, je préfère mille fois maintenir un poste d'enseignant, qui aurait peut-être dû disparaître pour tenir compte d'une baisse de la démographie, et ce pour repenser l'offre pédagogique, plutôt que subir année après année, « pousser la neige » et reporter le problème sine die.
Au fond, si l'on ne change pas l'offre pédagogique – ce qui appelle une réflexion dans les territoires –, on risque de prendre cette vague de la démographie de plein fouet et de la subir terriblement au cours des prochaines années, parce que l'on aura manqué d'intelligence.
Je m'engage solennellement à ce que tous les observatoires des dynamiques rurales soient des lieux de réflexion et de conception d'une offre pédagogique renouvelée, et peut-être renforcée, en lien et en accord avec les collectivités territoriales.