M. Bernard Buis. Par cet amendement, nous proposons une mesure indispensable pour garantir la continuité des politiques publiques dans les quartiers prioritaires, en particulier en outre-mer.

Il s’agit plus précisément d’autoriser jusqu’en 2026 la mobilisation des instruments de la politique de la ville assurée par les lois de finances pour 2024 et 2025. Cette mesure technique est essentielle.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-976.

M. Vincent Jeanbrun, ministre. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sophie Primas, rapporteur spécial. On nous a dit et répété qu’à ce titre tout était sous contrôle… Toutefois, par mesure de précaution, la commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-867 rectifié et II-976.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 67.

L’amendement n° II-967 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold, Grosvalet, Guiol, Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 67

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer les conséquences, pour les collectivités territoriales et les politiques publiques ainsi financées, du transfert de la liquidation des taxes d’urbanisme. Il présente notamment des recommandations pour remédier et recouvrer les sommes perdues.

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Cet amendement vise simplement à corriger les effets indésirables de la réforme de la taxe d’aménagement sur les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE).

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sophie Primas, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable. Premièrement, il s’agit d’une demande de rapport ; deuxièmement, nous avons déjà eu ce débat, mon cher collègue.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Jeanbrun, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-967 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Enseignement scolaire

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Laure Darcos applaudit également.)

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, très chers collègues, voici un budget historique ! En effet, après plusieurs décennies et même plus d’un demi-siècle d’hégémonie budgétaire, l’école n’est plus au premier rang des dépenses de la Nation. Elle est désormais supplantée par les crédits de la défense, si tant est que ce budget aille à son terme…

Il faut remonter aux années 1960, c’est-à-dire au temps du gaullisme triomphant, pour voir les dépenses militaires devancer le budget de l’enseignement, entre l’épilogue du conflit algérien, les vents mauvais de la guerre froide et la volonté de doter notre pays d’une carapace nucléaire.

Aujourd’hui, un invité regrettable s’impose sur la deuxième marche du podium budgétaire : l’anaconda de l’endettement, qui ne cesse de priver notre État d’oxygène financier. Ainsi, le remboursement des intérêts de la dette dépassera, en 2026, nos dépenses éducatives : voilà un triste constat qu’il convient de ne pas minorer.

Pour autant, le budget que l’État consacre à son école n’a jamais été si élevé. Il dépasse 64,5 milliards d’euros, et il est même en hausse de 0,3 %, soit 200 millions d’euros. Souvenons-nous que, en 2019, le budget de l’enseignement scolaire était de 52,3 milliards d’euros : on observe donc une hausse de 18,8 % en six ans. En y ajoutant le compte d’affectation spéciale (CAS) « Pensions », autrement dit, la participation au financement des retraites, le budget atteint plus de 89 milliards d’euros.

Le contexte de cet exercice budgétaire est aussi marqué par une problématique démographique inédite inquiétante, qui ne cesse de s’aggraver. Notre natalité, comme celle de tous les anciens pays industrialisés, est en effet entrée en hibernation.

En 2010, la France avait accueilli 833 000 berceaux joyeux ; en 2024, le chiffre est tombé à 663 000. Ce n’est plus une baisse, c’est un effondrement – surtout depuis 2022 – dont les conséquences sont inévitables sur les effectifs scolaires.

À la rentrée 2025, on a enregistré 109 000 élèves de moins. L’an dernier, c’était 100 000 et, l’an prochain, la chute sera de près de 140 000.

Un autre élément de contexte doit être mis en exergue : la crise du recrutement des enseignants, de l’attractivité du métier. Elle s’explique par le fait que la mission des enseignants est de plus en plus difficile, que les élèves sont de moins en moins dociles et que les parents sont tantôt intrusifs, tantôt négligents quant au soutien aux apprentissages.

En outre, n’oublions pas la problématique salariale, trop longtemps niée. Nos enseignants sont parmi les plus mal payés d’Europe. Dans ces conditions, la liste des candidats à l’estrade professorale se réduit année après année comme peau de chagrin.

Certes, des efforts ont été faits pour revaloriser les enseignants débutants, mais aucune mesure n’a été prise pour les enseignants en milieu de carrière. La paupérisation des maîtres depuis trente ans est incontestable.

Si l’on y ajoute les poisons du harcèlement, de la violence, de la remise en cause de l’autorité des maîtres, des entorses à la laïcité et de la baisse du niveau constaté par le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa), votre bureau, monsieur le ministre, n’est pas vide de dossiers à traiter !

Quelles sont donc les réponses budgétaires à cette situation préoccupante ?

Tout d’abord, la réforme de la formation initiale a été engagée, avec le recrutement, dès la fin de la licence, des futurs enseignants rémunérés pendant leur apprentissage : 1 400 euros la première année, 1 800 euros la seconde. Ce sont ainsi 7 938 postes d’élèves stagiaires qui ont été créés.

Le but est de former plus tôt nos enseignants, tout en redonnant de l’attractivité au métier. Laissons sa chance à cette réforme !

Autre mesure clé et symbolique : les effectifs d’enseignants ont été réduits de 4 018 équivalents temps plein (ETP) – 2 373 dans le premier degré, 1 645 dans le second –, pour tenir compte de l’évolution de la démographie scolaire.

Rappelons que, l’an dernier, le Gouvernement n’avait pas souhaité supprimer de postes. Précisons aussi qu’une répercussion proportionnelle stricte de la baisse du nombre d’élèves aboutirait, cette année, à une réduction de 9 415 postes. La coupe ministérielle est donc logique et mesurée. En prenant en compte les futurs élèves stagiaires, le plafond d’emploi du ministère augmentera de 5 440 ETP.

Ayons donc bien à l’esprit que, depuis 2015, le premier degré a perdu 621 000 élèves et qu’il en perdra encore 455 000 d’ici à 2029.

Cette baisse massive des effectifs, aujourd’hui dans le primaire, demain dans le secondaire, ne doit pas seulement être subie. Elle peut devenir une chance, non seulement pour poursuivre l’amélioration du taux d’encadrement, qui est passé de 25 à 21 élèves par classe depuis 2011, mais aussi pour bonifier les conditions salariales de nos enseignants, notamment en milieu de carrière.

À cet égard, je déplore que ce budget ne comporte quasiment aucune mesure de revalorisation indemnitaire. N’est-il pas souhaitable, maintenant que les classes comptent beaucoup moins d’élèves, d’avoir un tout petit peu moins de professeurs, quitte à mieux les rémunérer ?

Il ne s’agit certainement pas de « dégraisser le mammouth », pour reprendre une expression malheureuse, mais plutôt de muscler l’éléphant de la sagesse et du savoir. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Autre point saillant de ce PLF : l’embauche de 2 000 nouveaux accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), qui porte leur nombre à près de 140 000. Ces professionnels n’étaient que 43 000 en 2017 et le budget consacré à l’école inclusive s’élevait à 4,74 milliards d’euros.

Notons enfin le recrutement incontestablement bienvenu, quoique peut-être insuffisant, de 200 psychologues et assistantes sociales, dans le cadre du plan Santé mentale et psychiatrie.

Pour conclure, permettez-moi, monsieur le ministre, d’insister sur l’enjeu territorial.

La République, c’est l’égalité des droits et surtout des chances, partout et pour tous. L’école en est et en sera toujours le meilleur vecteur.

Aussi, les adaptations de la carte scolaire ne peuvent se faire que de façon circonstanciée – au point de croix, si j’ose dire –, en partenariat avec les élus locaux.

À ce titre, la ruralité doit faire l’objet d’une attention particulière, tout comme les quartiers dits sensibles, qui bénéficient, eux, des ressources précieuses de l’éducation prioritaire, dont on attend, soit dit en passant, la refonte de la cartographie depuis plus de cinq ans.

C’est aussi une question d’aménagement du territoire, un évanouissement scolaire ne pouvant qu’accélérer la désertification de certaines de nos campagnes.

N’est-il pas temps de réunir un Grenelle de l’école rurale, voire un Saint-Flour ou un Castellane de l’école rurale, pour optimiser le temps de l’enfant en articulant au mieux l’accueil de la petite enfance, le temps périscolaire et l’école ?

Il s’agit de changer de méthode, dans l’intérêt de nos élèves, de nos territoires et de notre pays tout entier.

Les sénateurs, dans leur département, et les élus locaux sont prêts à se mettre autour de la table pour discuter avec vos services et ceux des préfectures. Le plus tôt sera le mieux, monsieur le ministre : nous n’attendons plus que votre impulsion et votre invitation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation, de la communication et du sport. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de l’éducation nationale pour 2026 est relativement stable. Il est désormais le troisième budget de l’État, après celui qui est consacré au remboursement des intérêts de la dette et celui de la défense.

Les crédits pour 2026 se distinguent par la forte variation du nombre d’ETP, qui présente un solde positif de 5 400. Cette situation s’explique par un double mouvement, à commencer par une hausse de 7 900 ETP, conséquence mécanique de l’avancement au niveau bac+3 des concours de l’éducation nationale, suivis de deux années de formation en master sous statut de fonctionnaire.

Ensuite, ce budget supprime 4 000 ETP du fait de la diminution des effectifs d’élèves. On dénombrera 560 000 élèves en moins entre 2024 et 2029 : cette baisse démographique doit être prise en compte.

Aussi, contrairement à l’année dernière, la diminution du nombre d’ETP est raisonnable. À trop attendre, nous risquons une cassure nette au moment du rattrapage, qui devra nécessairement s’opérer.

Toutefois, il ne me semble pas opportun d’aller au-delà du schéma d’emploi proposé par le ministère. Un nombre important de fermetures de classes sera difficile à absorber socialement et risque de remettre en cause les priorités définies par le ministère.

En revanche, il est impératif de préparer collectivement l’école et les territoires à ce choc démographique. Depuis de nombreuses années, on s’accorde sur la nécessité de définir une carte scolaire pluriannuelle. Cette dernière est vouée à ne rester qu’une belle idée tant que le nombre d’ETP sera fixé annuellement.

Il me semble essentiel de définir un schéma pluriannuel d’emploi afin de dessiner une trajectoire connue de tous. Quel que soit le groupe politique auquel nous appartenons, nous pourrions formuler collectivement cette demande après les prochaines échéances nationales.

Sans une telle évolution, l’école ne pourra que subir la déprise démographique, se contentant d’une navigation à vue, année après année.

Je serai très bref sur la réforme de la formation initiale des enseignants, qui reprend plusieurs préconisations de la commission de la culture.

Un certain nombre de questions demeurent à ce titre. Cette réforme nécessite un pilotage politique fort, qu’il s’agisse des professionnels mis à disposition pour former les futurs enseignants ou de l’offre de stages à proximité des lieux d’études et de résidence des jeunes. Il est également essentiel de garantir un maillage territorial suffisamment équilibré des licences professorat des écoles (LPE).

Soyez déterminé et exigeant, monsieur le ministre : il y va de la réussite de cette réforme et de l’attractivité du métier d’enseignant.

La commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport a émis un avis favorable sur l’adoption des programmes budgétaires relatifs à l’éducation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Bernard Fialaire, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de léducation, de la communication et du sport. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je regrette de ne pouvoir saluer la ministre de l’agriculture, car elle est directement concernée par l’examen de cette mission. Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour lui transmettre nos recommandations. (M. le ministre opine.)

L’enseignement agricole est en passe de gagner le pari de l’attractivité retrouvée : à la rentrée 2025, la barre des 200 000 jeunes inscrits dans l’enseignement technique agricole a été franchie. Les effectifs ont progressé de 7 % ces cinq dernières années, dans le contexte démographique que l’on sait.

Les crédits du programme 143, « Enseignement technique agricole », s’établissent à 1,46 milliard d’euros, hors CAS « Pensions ». Ce budget est donc stable par rapport à l’année dernière.

La commission de la culture a émis un avis favorable sur l’adoption de ces crédits. Je tiens toutefois à vous alerter sur le caractère extrêmement rigide des dépenses de ce programme, dans la mesure où plus de 95 % d’entre elles sont contraintes.

Aussi, la commission de la culture met en garde contre toute tentation d’effectuer des économies supplémentaires, qui auraient certes un effet à très court terme, mais qui seraient préjudiciables, à moyen terme, à l’attractivité de l’enseignement agricole.

Nous avons particulièrement mal vécu le coup de rabot de 2025 qui s’était matérialisé par la suppression de 45 ETP, alors que les effectifs croissaient et que 4 000 postes étaient préservés pour l’éducation nationale.

Par ailleurs, il conviendra de porter une attention particulière à trois sujets, à commencer par le pacte enseignant. Ce dernier rencontre un succès certain dans l’enseignement agricole, puisque 97 % des crédits ont été consommés l’année dernière. La réduction de 20 millions d’euros de cette ligne budgétaire risque d’entraîner la consommation de l’ensemble des crédits du pacte au premier semestre 2026.

Une décision devra être prise pour la rentrée prochaine : il s’agira soit d’abonder cette enveloppe, soit de mettre fin au pacte enseignant, en prenant le risque, le cas échéant, que certaines missions ne soient plus assurées.

Ensuite, les effectifs accueillis dans les maisons familiales rurales (MFR) sont supérieurs à ceux retenus pour construire ce budget. En résulte une dotation insuffisante, que le ministère aura l’obligation légale d’abonder.

Enfin, un contentieux est en cours avec le Conseil national de l’enseignement agricole privé (Cneap) au sujet de subventions accordées. Il conviendra probablement de prévoir une contribution ; mais j’apprends qu’un amendement vise à allouer 21 millions d’euros supplémentaires pour régler cette question. (M. le ministre et M. le rapporteur spécial le confirment.)

Surtout, nous devons dès à présent porter nos regards vers 2030, date clé fixée par la loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture. Nous devons évidemment travailler à atteindre les objectifs d’accroissement des effectifs et à déployer le bachelor Agro.

Quelques chiffres permettent de mesurer l’effort qu’il reste à faire : 10 bachelors Agro ouvrent sous statut scolaire à la rentrée 2026 avec 5 ETP, mais le ministère souhaite en ouvrir 100 à la rentrée 2027 et 300 à la rentrée 2030.

À partir de 2027, les moyens devront être à la hauteur des ambitions affichées par notre pays pour sa souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations d’agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Organisation des travaux

Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique que 88 amendements sont à examiner sur cette mission.

La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à quatre heures. Compte tenu de l’organisation de la journée, nous pourrions prévoir une heure de discussion supplémentaire pour terminer l’examen de cette mission, aux alentours d’une heure du matin.

Au-delà, conformément à l’organisation de nos travaux, arrêtée par la conférence des présidents, en accord avec la commission des finances, la suite de l’examen de cette mission serait reportée au dimanche 7 décembre prochain.

En outre, la conférence des présidents, réunie le mercredi 3 décembre, a décidé que, lorsque le nombre d’amendements déposés ne paraît pas garantir un examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.

Pour ce qui est de la présente mission, même avec les marges que nous avons dégagées, le nombre d’amendements à examiner, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd’hui, nous contraint à observer un rythme de discussion de 22 amendements par heure, ce qui est élevé.

Aussi, afin de nous donner toutes les chances de terminer ce soir l’examen de cette mission, les durées d’intervention seront, en application de la décision de la conférence des présidents, fixées à une minute. J’en appelle donc à la concision de chacun.

Enseignement scolaire (suite)

Mme la présidente. Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat concernant notre école se concentre habituellement sur les moyens : les uns les trouvent insuffisants, les autres arguent de la décroissance démographique pour demander une adaptation des effectifs.

Disons-le clairement, si les suppressions sont nécessaires face à la décrue démographique et à l’impératif de réduction du déficit budgétaire, le rabot ne constitue pas une politique et ne dispense pas de penser différemment.

Prenons un exemple concret. Dans les Pyrénées-Atlantiques, entre les écoles à classe unique et les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) multisites, 101 professeurs sont seuls dans leur école. Ils ne peuvent donc pas véritablement échanger avec leurs collègues, pour évoquer leurs missions ou leurs pratiques.

Dans ce contexte, toute fermeture de classe et toute suppression de poste est, de fait, vécue comme une fermeture d’école, entraînant son lot de crispations et de défiance.

N’est-il pas temps d’ouvrir une réelle réflexion sur l’offre pédagogique et son organisation en ruralité, d’entrer dans une démarche pluriannuelle et contractuelle avec les élus, pour définir une offre pédagogique adaptée, pensée selon la spécificité de chaque territoire ?

Bien sûr, une telle démarche supposerait de recentrer la réflexion non pas sur les postes en eux-mêmes, mais bien sur l’offre pédagogique et l’organisation de l’école en ruralité, pour ensuite en déduire le nombre de postes nécessaires et les moyens à mobiliser. Surtout, elle implique de constater l’échec de l’ensemble des politiques éducatives déployées au cours des quarante dernières années, marquées du sceau de la verticalité, et d’enfin recentrer notre système scolaire là où tout se fait mais rien ne se décide : au niveau de l’établissement.

La Cour des comptes indiquait, dans un rapport publié en 2021, que « les systèmes scolaires les plus performants sont ceux qui donnent le plus de place à chaque établissement, fédérant à ce niveau la communauté éducative autour d’un projet commun qui encourage les enseignants à être novateurs ».

Dans ce même rapport, qui n’a pas pris une ride, la Cour des comptes précise que « la performance globale du système éducatif français […] reste médiocre malgré l’importance des moyens mobilisés ».

Comment lui donner tort, quand plus de la moitié des élèves entrant en classe de quatrième ne maîtrisent pas les compétences élémentaires requises en français et en mathématiques ; quand, chaque année, plus de 60 000 élèves décrochent du système scolaire ; quand la crise des vocations s’amplifie ; quand 53 % des Français estiment que l’école fonctionne mal ?

Malgré tout, l’attachement à notre école demeure : son redressement est espéré, des réponses sont apportées. Pour la majorité des acteurs, ces réponses sont essentiellement financières. C’est ainsi que, depuis quarante ans, on répète en chœur qu’il faut plus de moyens.

Ne serait-il pas temps de remettre en question la légitimité de cette méthode ? Ne masque-t-elle pas, depuis trop longtemps, l’impuissance à réformer un système trop vertical et trop uniforme, oublieux des particularités ?

Alors qu’en Europe la tendance générale conduit à donner plus d’autonomie aux établissements d’éducation, en France, la verticalité, la centralisation et l’uniformisation épuisent toutes les initiatives et repoussent les meilleures idées.

Ainsi, seules 10 % des décisions éducatives de notre pays sont prises à l’échelon des établissements et 2 % des décisions réelles en autonomie totale. Tout est dit : ce sont bien la liberté et l’autonomie qui font défaut.

Ce constat, monsieur le ministre, vous l’avez dressé vous-même en affirmant vouloir rompre avec une « organisation universelle », pour tous les établissements, décidée depuis le ministère. Vous avez évoqué, au sujet de l’école, un « jardin à l’anglaise » qui devrait succéder au « jardin à la française ».

À l’aune de ce constat, je vous invite à ouvrir une réflexion sur l’autonomie des établissements, la liberté des équipes pédagogiques et la capacité à s’adapter aux réalités dans chaque école ou établissement. Il en est grand temps.

À rebours de toutes les politiques de vos prédécesseurs, une telle inflexion susciterait un grand vent de liberté en faveur de notre système éducatif. Elle responsabiliserait les acteurs, valoriserait l’innovation et adapterait l’offre scolaire aux besoins réels de chaque territoire.

C’est là, j’en suis convaincu, que commence le chemin du redressement de notre école.

Il est difficile, pour autant, de trouver dans votre budget les débuts d’un pilotage différencié et une réponse aux problèmes que vous avez identifiés, si j’en crois du moins vos déclarations à la presse.

Certes, les élus du groupe Les Républicains voteront les crédits de cette mission, mais ils réitèrent leur souhait : que les belles volontés affichées se traduisent rapidement en actes concrets.

M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Eh oui !

M. Max Brisson. Veillez, monsieur le ministre, à ce qu’elles ne restent pas, comme ce fut le cas pour vos prédécesseurs, de simples effets d’annonce bien vite oubliés. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si je ne suis pas membre de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport, je me sens parfaitement à ma place dans cette discussion générale. En effet, avant de devenir élu, j’ai été gestionnaire d’établissements scolaires pendant plus de trente-huit ans.

Le monde de l’éducation m’a profondément marqué et je reste très attaché aux conditions dans lesquelles nos enfants grandissent et apprennent.

À cet égard, je souligne le fait que les crédits de la mission « Enseignement scolaire » sont globalement préservés, à hauteur de 64,5 milliards d’euros. Ils sont même en augmentation de 200 millions d’euros par rapport à l’année dernière.

Cette évolution des crédits s’inscrit dans la continuité d’une hausse progressive engagée depuis 2019, de l’ordre de 3,15 milliards d’euros en six ans.

Ce budget grave dans le marbre des priorités stratégiques essentielles : la maîtrise des savoirs fondamentaux, la lutte contre les inégalités sociales et territoriales, le combat contre le harcèlement ou encore le soutien à l’école inclusive.

Toutefois, l’attractivité du métier d’enseignant doit demeurer notre boussole. En toute logique, notre groupe s’est opposé aux suppressions de postes proposées par M. le rapporteur spécial en commission des finances. Le PLF supprime déjà 4 000 postes d’enseignants dans les premier et second degrés, ce qui est considérable.

Les impératifs d’économies budgétaires ne doivent pas nous faire perdre de vue l’essentiel : nous ne pouvons pas dégrader les conditions d’apprentissage des générations futures.

Les enquêtes successives révèlent une baisse du niveau scolaire, notamment en lecture et en écriture, résultant de phénomènes multiples, souvent extérieurs à l’école. Face à ce constat, nous pourrions envisager d’autres solutions que de simples suppressions de postes.

Certes, la décrue démographique pourrait théoriquement justifier une réduction des effectifs, mais cette logique ne vaut que lorsque tout va pour le mieux. Or les indicateurs sont au rouge, tant pour les enseignants que pour les élèves. Il convient d’en tenir compte pour ne pas reproduire, voire aggraver, les erreurs du passé.

Le dédoublement des classes, de CP en particulier, a prouvé sa pertinence. La proposition de notre groupe est la suivante : nous ne nous opposons pas aux économies, mais, plutôt que d’appliquer des règles purement comptables, privilégions le dédoublement des classes partout où cela pourrait être utile, pour les enseignants comme pour les enfants.

S’agissant toujours des effectifs, je salue, monsieur le ministre, le recrutement de 1 200 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) supplémentaires à la rentrée 2026. Depuis 2017, leur nombre a augmenté de plus de 70 %. (M. le ministre le confirme.)

Je note également que la commission des finances souhaite minorer de 20 millions d’euros la subvention pour charges de service public accordée au réseau Canopé.

Présent dans chaque département de l’Hexagone et des outre-mer, ce réseau est un acteur de proximité irremplaçable pour la formation et l’accompagnement des enseignants. Son ancrage territorial, au plus près des établissements, est un atout majeur pour soutenir la transformation pédagogique et l’élévation du niveau des élèves.

Il s’agit également d’un opérateur tourné vers l’international, au cœur de la diffusion du savoir-faire éducatif français et du rayonnement de nos valeurs à l’étranger, en lien avec nos ambassades et les grands organismes multilatéraux.

Une telle concentration de réductions d’emplois fragiliserait gravement la capacité de cet opérateur à exercer ses missions de service public au cœur des territoires.

Ce sujet revêt une importance particulière pour notre groupe, et singulièrement pour notre collègue Samantha Cazebonne. C’est pourquoi nous défendrons un amendement visant à garantir au réseau Canopé les moyens d’assurer ses missions, d’accompagner nos enseignants et de préserver la qualité de notre service public d’éducation.

La santé mentale ayant été déclarée grande cause nationale de l’année 2025, je tiens à souligner la création de 200 postes supplémentaires dans le secteur médico-social, prévue dans le cadre du plan Santé mentale.

Enfin, le budget pour 2026 consacre 25 millions d’euros supplémentaires aux constructions scolaires à Mayotte. Cet engagement, pris dans le cadre du contrat de convergence et de transformation ainsi que de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, m’offre l’occasion de saluer le travail de mon ancienne collègue Salama Ramia.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les élus du groupe RDPI détermineront leur vote sur les crédits de cette mission à l’aune de nos débats et des moyens qui seront alloués, demain, aux conditions d’apprentissage des futurs citoyens de notre pays.