M. le président. La parole est à M. Louis Vogel. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Louis Vogel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la construction d'un budget doit refléter les objectifs et les priorités que nous nous fixons. En matière d'enseignement supérieur et de recherche, élément essentiel de souveraineté, au même titre que la défense, je crains, monsieur le ministre, que nous ne soyons pas à la hauteur.

Ma collègue Laure Darcos a plaidé en ce sens : il faut, aujourd'hui plus que jamais, soutenir beaucoup plus que nous ne le faisons la recherche en France.

M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !

M. Louis Vogel. Nous vivons une quatrième révolution industrielle, comme l'a dit Philippe Aghion. Celle-ci est beaucoup plus forte que les trois précédentes. Elle repose sur l'intelligence artificielle, le numérique, le quantique et les biotechnologies. Dans ces domaines, nous sommes faibles. Nous ne voulons pas être les premiers, mais nous ne voulons pas disparaître pour autant.

En ce sens, je regrette à titre personnel que la réforme du crédit d'impôt recherche (CIR) que j'avais proposée, avec des collègues de toutes les travées, qui visait à réorienter les crédits vers les petites et moyennes entreprises (PME), les très petites entreprises (TPE) et les start-up, n'ait pas pu aboutir. Il faut réorienter le dispositif vers les petites et moyennes entreprises et maintenir les aides au dépôt de demande de brevet, qui sont actuellement monopolisées par douze très grosses entreprises en France. Ce sont elles qui seront aux avant-postes dans les domaines de recherche où nous sommes faibles.

Pour rattraper notre retard, il faut stimuler les relations entre les entreprises et les organismes de recherche. Le non-rétablissement du dispositif « jeunes docteurs », qui encourageait l'embauche de jeunes docteurs, pratique pourtant essentielle en matière d'innovation, est un très mauvais signal.

A contrario, la prorogation jusqu'en 2028 du crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative entre les organismes de recherche publique et les entreprises est une très bonne nouvelle.

L'enseignement supérieur et la recherche, c'est aussi la formation. Or nous devons réinventer notre politique de formation pour lutter contre l'échec en premier cycle ; c'est un gâchis inacceptable et qui coûte très cher !

Dans les pays développés, en moyenne, un tiers des étudiants s'inscrivent dans des filières généralistes, deux tiers dans des formations professionnelles. En France, c'est l'inverse. Il faut donc réorienter l'ensemble du système et repenser très profondément l'organisation de nos premières années universitaires, en offrant beaucoup plus de parcours professionnels et en prévoyant des passerelles.

Pour que les universités puissent ouvrir ces parcours, il faut toutefois qu'elles disposent de moyens. C'est pourquoi, à titre personnel, je proposerai à notre assemblée de compenser les décisions prises par l'État qui ne l'ont pas été jusqu'à présent : le compte d'affectation spéciale « Pensions », la complémentaire santé et la hausse du point d'indice. (MM. Bernard Pillefer et Pierre Ouzoulias applaudissent.)

Je salue le travail de notre rapporteur spécial Vanina Paoli-Gagin qui a abattu, au nom de la commission des finances, un travail considérable.

Pour conclure, le groupe Les Indépendants – République et Territoires portera a priori un regard favorable sur le budget présenté, sous réserve de ce qui pourrait être voté durant nos débats. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin.

M. Jacques Grosperrin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2026 s'inscrit dans un contexte budgétaire contraint que nul ne conteste. La nécessité de réduire notre dette impose des choix difficiles.

Pourtant, certains budgets sont stratégiques pour l'avenir de la souveraineté de la France ; c'est le cas de celui de l'enseignement supérieur et de la recherche. Dans un environnement de plus en plus compétitif, il est essentiel de sanctuariser ce budget si nous ne voulons pas perdre du terrain par rapport aux autres pays et à nos concurrents économiques dans la course à l'innovation.

À la lecture de ce projet de budget, une question centrale se pose : est-il à la hauteur des ambitions de notre nation ?

Le programme 150, consacré à l'enseignement supérieur, est doté de 15,6 milliards d'euros en 2026, soit une hausse de 1 % par rapport à 2025. C'est une augmentation symbolique, mais insuffisante. Elle ne couvre ni l'inflation, ni la hausse des salaires, ni l'afflux d'étudiants, qui continue de croître encore pour quelque temps, avant que les effets de la décroissance démographique ne se fassent sentir.

Malgré la hausse affichée, notre excellent (Ah ! sur des travées des groupes Les Républicains et UC.) collègue Stéphane Piednoir évoque des renoncements. Il a raison !

Depuis de nombreuses années, les acteurs de l'enseignement supérieur nous alertent sur l'explosion des coûts de fonctionnement et sur la fonte progressive de leur fonds de roulement. On évoque une trésorerie de 5,6 milliards d'euros, dont 1 milliard serait mobilisable immédiatement.

Les travaux de Stéphane Piednoir montrent que ces chiffres sont imprécis. La subvention pour charges de service public, la SCSP, est certes reconduite avec 14,7 milliards d'euros, mais les nouveaux transferts de charges sociales, non compensés à hauteur de 180 millions d'euros, grèvent les capacités d'investissement des universités. Pourtant, chacun ici est conscient de l'état de vétusté de certains établissements, en particulier les bibliothèques universitaires, véritables lieux de vie pour nos étudiants.

Monsieur le ministre, vous connaissez fort bien le travail exigeant du Sénat. Pourquoi ignorer les recommandations du rapport d'information de Laurence Garnier et de Pierre-Antoine Levi en faveur d'une plus grande transparence de la SCSP ? Inspirez-vous-en !

Un deuxième renoncement concerne la loi de programmation de la recherche, qui devait incarner un réarmement scientifique et une excellence retrouvée : elle est en partie non financée cette année. Sur les 157 millions d'euros supplémentaires, 87 millions servent principalement à financer des mesures déjà engagées, comme la revalorisation de certains salaires, les chaires de professeur junior et la rémunération des doctorants.

En outre, des arbitrages ont conduit à l'annulation d'avancées majeures, comme la suppression de 240 contrats doctoraux en 2025 ou le renoncement à la revalorisation du régime indemnitaire des enseignants et chercheurs, le Ripec, en 2026, à hauteur de 47,5 millions d'euros. Les enseignants du supérieur demeurent exclus de ce régime, alors qu'ils assurent près de 50 % des heures d'enseignement dans le supérieur et la recherche et qu'ils cumulent – c'est considérable – une charge pédagogique et charge administrative. Ils n'ont pas à être une variable d'ajustement. C'est en ce sens que je voterai en faveur de l'amendement n° II-319 rectifié ter de Jean-Baptiste Blanc.

Les nouveaux contrats d'objectifs, de moyens et de performance, auxquels seront alloués 44,5 millions d'euros et qui portent sur 100 % de la SCSP, ambitionnent de refonder intégralement le modèle d'allocation des moyens aux établissements, mais derrière la logique d'efficacité que recouvrent les indicateurs chiffrés se cache en réalité une mise sous tutelle technocratique des universités, soumises peut-être à une logique de rendement plus qu'à une vision véritablement académique.

Par ailleurs, faute de moyens, l'Agence nationale de la recherche voit son taux de succès aux appels à projets reculer, après avoir atteint un pic de 25 % en 2023.

Alors que la liberté académique est menacée ailleurs, la France doit saisir cette opportunité pour éviter un nouveau décrochage. Le programme Choose France for Science est une vraie réussite, mais il faut aller plus loin. Pourquoi ne pas associer le Parlement à une réflexion sur l'avenir de la LPR ? Notre souveraineté en dépend.

Enfin, pendant que la démographie scolaire dans les établissements du premier et du second degré est en décroissance, le nombre d'étudiants accueillis dans les universités françaises augmentera de 14 000 d'ici à la rentrée prochaine. Cette croissance, due en majeure partie à l'augmentation du nombre de néobacheliers, met à l'épreuve le fonctionnement du système d'enseignement supérieur français.

Ce projet de loi de finances marque un recul sur le programme 231 « Vie étudiante ».

Les aides directes aux étudiants, notamment les bourses sur critères sociaux, subissent une baisse de 35 millions d'euros. Cette réduction s'explique par deux facteurs principaux : d'une part, les barèmes des bourses ne sont plus indexés sur l'inflation ; d'autre part, le développement de l'apprentissage, bien que positif en soi, réduit le nombre de bénéficiaires, car les étudiants en alternance ou dans des formations privées ne sont pas éligibles à ces aides.

Les aides indirectes, comme la restauration universitaire, sont renforcées, mais le réseau des Crous reste fragilisé par des moyens insuffisants et une demande croissante.

Monsieur le ministre, ce projet de loi de finances pour 2026 a été élaboré, nous le comprenons, dans un contexte budgétaire contraint. Il illustre des arbitrages difficiles, mais aussi des renoncements qui soulèvent une question fondamentale : souhaitez-vous réellement que la France retrouve sa place ?

Ce budget, peut-être trop timide et pas assez ambitieux, semble être une réponse temporaire, mais cela ne saurait suffire. Je suis persuadé qu'au fond de vous-même, vous avez envie que la France réussisse et retrouve sa place, mais les exigences budgétaires l'emportent. La France ne peut se satisfaire de ces mesures provisoires, alors que nos partenaires internationaux investissent massivement dans leur avenir. L'excellence ne se décrète pas, elle se finance.

En attendant des jours meilleurs, nous voterons le budget alloué à cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche pour l'année 2026 consacre un abandon : celui de la loi de programmation de la recherche.

Souvenez-vous, aux dires du Président de la République, elle devait être une première historique pour la Nation en matière de financement de la recherche publique. Son ambition était non seulement, par un effort budgétaire sans précédent, de rattraper un sous-investissement chronique, mais aussi d'accroître l'autonomie des universités et de transformer les organismes publics de la recherche en agences de programme capables d'organiser et de financer des thématiques stratégiques. Vaste programme, aurait dit le Général…

Cinq exercices budgétaires après ces proclamations révolutionnaires, le bilan est amer. Les objectifs annuels de la loi de programmation n'ont jamais été entièrement respectés, et ce, dès la première année. La part du PIB consacrée à la recherche a baissé et demeure bien inférieure à celle de nos voisins. La plupart des universités risquent le défaut de paiement et les opérateurs de la recherche financent leurs déficits structurels en puisant dans la trésorerie des programmes en cours.

L'essor sans précédent annoncé en 2020 s'est transformé en naufrage, les promesses de résurrection en soins palliatifs et l'ode à la science en requiem.

De 1958 à 1969, le général de Gaulle avait fait du développement de la science la condition de notre souveraineté et le budget du CNRS avait été multiplié par neuf.

De 1981 à 1985, le président François Mitterrand avait décidé que la recherche devait être une grande cause nationale et son budget avait alors augmenté de 55 %.

Depuis lors, les discours politiques ont cessé de considérer l'investissement dans la science comme un moyen de promotion de la Nation, pour juger la recherche comme une institution structurellement sclérosée, repliée sur elle-même et incapable d'évoluer.

Dénonçant la complexité supposée de l'organisation de la recherche française comme la cause de tous ses maux, les gouvernements successifs n'ont cessé d'ajouter des instances supplémentaires, dont les très récentes agences de programme, frappées d'obsolescence avant même que nous ayons compris à quoi elles pouvaient servir.

De réforme structurelle en réforme structurelle, une évidence demeure : la science française est dans une phase de déclin. Cette phase aurait pu commencer plus tôt sans l'abnégation des chercheurs, qui continuent de produire des connaissances de grande qualité, malgré la pénurie de moyens et la lourdeur des procédures administratives croissantes qui leur sont imposées.

Ce dont ils ont le plus besoin aujourd'hui, c'est de confiance. Leur récente fronde contre l'enflure extravagante des critères d'évaluation du Hcéres doit être entendue.

Jamais le recrutement des chercheurs et des enseignants-chercheurs n'a été aussi sélectif. Les concours du CNRS ont un rayonnement international et un tiers de leurs lauréats est d'origine étrangère. Comment peut-on douter de l'investissement absolu des chercheurs ? Pourquoi les soumettre à tous ces contrôles tatillons qui épuisent leur énergie créatrice ?

À la complexité des procédures de financement et à la créativité sans borne de la bureaucratie institutionnelle s'ajoutent maintenant les attaques répétées contre les libertés académiques. Dans un contexte international marqué par une offensive contre la rationalité et alors que les résultats des chercheurs sont contestés au même titre que des opinions politiques ou religieuses, il est de salubrité publique de défendre la spécificité et la valeur du raisonnement scientifique.

La production de données scientifiques vérifiables et soumises au jugement des pairs est l'une des conditions d'existence des politiques publiques. La crise de la covid et la justesse des hypothèses sur le changement climatique devraient nous en convaincre.

Il fut un temps où la science était considérée comme la condition de la liberté politique, l'instrument de l'émancipation individuelle et de la prospérité collective. Condorcet estimait même que les sciences éclairent le législateur et dirigent ses lois vers l'intérêt général.

Pourquoi ces idées, qui ont conduit si longtemps notre nation, sont-elles aujourd'hui contestées ? Devons-nous nous résigner au déclin de la science française et au retour des ténèbres ? Chers collègues, il est grand temps de nous ressaisir. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'espace. Monsieur le président, mesdames les rapporteures, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui pour vous présenter et défendre un budget qui concerne les priorités stratégiques incontestables pour notre pays : la formation de notre jeunesse, dans un monde dont vous connaissez les risques et dont nous ignorons tous ce qu'il peut devenir ; le développement de notre recherche, sans laquelle toute prétention à une quelconque indépendance technologique et économique serait un leurre ; le spatial, enfin, qui est redevenu en quelques années un levier de la puissance scientifique, militaire et politique.

Au moment d'examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », je voudrais que nous partagions ce constat.

Je le sais comme vous, les marges budgétaires sont étroites. L'enjeu est donc de savoir à quoi consacrer l'argent pour ne pas sacrifier notre avenir sur l'autel du présent. Ne pas investir aujourd'hui dans ce qui fera notre croissance et notre indépendance de demain n'est pas plus sain que de laisser courir des dépenses improductives.

Depuis plus de quinze ans, cela a été souligné par de nombreux orateurs, nous stagnons à 2,2 % du PIB investi dans la recherche, alors que, dès 2000, comme nos voisins européens, nous nous étions fixé une cible de 3 %. Cette cible est déjà largement dépassée par l'Allemagne, les États-Unis ou la Corée du Sud, par exemple. Au lieu de se réduire, l'écart s'est même légèrement accru. En 2023, l'effort de recherche de la Nation a encore diminué pour s'établir à 2,18 %. La dépense de recherche des administrations s'élève à 0,74 %, soit son plus bas niveau depuis 1980.

Ce sous-investissement n'est pas une affaire de chercheurs ou d'universitaires. Il se traduit dans notre difficulté à créer des emplois qualifiés et durables et à créer les entreprises innovantes dont nous avons besoin pour tirer les marchés et notre économie.

Aussi, malgré les contraintes, le Gouvernement a-t-il voulu préserver autant que possible ce budget. Pour 2026, il s'établit à presque 29 milliards d'euros, y compris le spatial. Ce budget est celui qui permet de payer avant tout les chercheurs, les enseignants-chercheurs, les techniciens, les ingénieurs qui assurent le fonctionnement des laboratoires et des amphithéâtres.

Malgré l'effort budgétaire, 330 millions d'euros de charges sont transférés aux établissements et ne sont effectivement pas intégralement compensés.

Il y a cinq ans, vous avez adopté à une très large majorité une loi de programmation pour la recherche. C'est le levier que nous nous sommes donné pour rattraper notre retard d'investissement, en assurant une programmation pluriannuelle. Cette année, 87 millions d'euros supplémentaires sont prévus dans le programme 150 au titre de la LPR et 34 millions d'euros pour le programme 172, soit quelque 121 millions d'euros au total, hors spatial.

Ces crédits sont mobilisés en particulier pour le renforcement des rémunérations, notamment celle des contrats doctoraux à partir du 1er janvier 2026. Ce n'est pas un luxe, cela a été dit, car nos chercheurs sont aujourd'hui bien loin de leurs homologues allemands ou britanniques du point de vue de la rémunération, sans parler de leurs collègues outre-Atlantique.

Enfin, les financements prévus permettent d'investir dans des équipements et dans des infrastructures, qui sont un point fort de la France et de l'Europe aujourd'hui, mais qu'il faut maintenir à tout prix pour conserver une recherche de très haut niveau.

Le programme 172 permet de soutenir les organismes publics de recherche. Une part importante de ce programme est consacrée à la recherche sur projets via l'Agence nationale de la recherche qui célèbre demain ses vingt ans. Cette modalité est devenue centrale pour la recherche, dans un environnement où l'appel à projets compétitifs est désormais un standard international.

Une baisse brutale du budget de l'ANR, comme cela est proposé ici au travers de l'amendement n° II-31 – nous aurons l'occasion d'en débattre –, signifierait très concrètement le non-financement de 300 projets avec un impact direct sur 900 laboratoires répartis sur tout le territoire. Ce serait un retour à un taux de succès comparable à celui de 2015, donc un retour en arrière de plus de dix ans. Cela signifierait que des milliers de chercheurs s'épuiseraient un peu plus sur des appels à projets, avec une base réduite et moins financée, ce qui ne pourrait qu'engendrer frustration et inefficacité.

De manière plus générale, ce budget doit permettre d'accroître la performance des établissements d'enseignement supérieur.

Aujourd'hui, les universités délivrent sur notre territoire une formation d'excellence, mais elles répondent aussi à une massification de l'enseignement supérieur, un choix fait par la France : le nombre d'étudiants a augmenté de plus de 800 000 en vingt-cinq ans.

Les universités jouent ainsi le rôle indispensable de préparer et de former les jeunes générations, qui connaissent une très grande diversité, y compris du point de vue de leur bagage à leur entrée dans l'enseignement supérieur. Or ce sont ces jeunes générations qui vont prendre en charge l'avenir de notre pays.

C'est pourquoi nous entendons, avec ce budget, renforcer les outils de dialogue stratégique avec les établissements. Je pense en particulier aux contrats d'objectifs, de moyens et de performance, dont nous avons parlé.

À partir de 2026, une nouvelle étape sera franchie : les Comp devront couvrir l'intégralité de la stratégie de chaque établissement. Ils permettront un déploiement des formations sur l'ensemble du territoire national pour éviter les zones blanches que nous connaissons aujourd'hui dans un certain nombre de départements et contre lesquelles il faut absolument lutter. Une enveloppe de 45 millions d'euros figure à ce titre dans le programme 150.

Ce budget vise aussi à poursuivre la lutte contre la précarité étudiante.

La subvention pour charges de service public du réseau du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous) augmente de 15 millions d'euros dans le budget pour 2026.

Le soutien aux conditions de vie des étudiants passe aussi, et peut-être avant tout, par un investissement continu en faveur du bâti. Grâce à un budget d'investissement maintenu pour la troisième année consécutive à 120 millions d'euros, le Cnous pourra poursuivre les plans de réhabilitation et de construction qui ont été engagés.

Je rappelle que le plan pluriannuel pour le logement étudiant, présenté en janvier dernier, poursuivra son déploiement, avec un objectif de 45 000 nouvelles places en logements étudiants abordables sur trois ans, dont 30 000 logements sociaux. Je connais l'investissement de la Haute Assemblée sur ce sujet et je vous garantis que c'est une priorité que je suis très attentivement.

Enfin, le programme spatial connaît une progression de 38 millions d'euros par rapport à 2025.

Il y a dix jours, j'étais à Brême pour la conférence ministérielle européenne sur le spatial. Les États européens se sont engagés à fournir un effort inédit de 22 milliards d'euros dans le spatial au cours des années à venir, dont près de 3,7 milliards d'euros pour la France dans les trois à cinq prochaines années. La France est ainsi le deuxième contributeur au sein de l'Agence spatiale européenne.

J'indique que, contrairement aux autres grands pays européens du spatial, la France a aussi un budget national qui s'ajoute à ces investissements réalisés au sein de l'ESA. Au total, lorsque l'on cumule le budget national et le budget affecté à l'Agence spatiale européenne, la France reste le premier contributeur européen au spatial.

Toutefois, je souligne également que les États-Unis investissent chaque année – chaque année ! – environ 75 milliards de dollars dans le spatial, à rapporter à l'effort de 22 milliards d'euros des Européens sur les prochaines années. Il existe donc en la matière une disproportion majeure entre les investissements des États-Unis et ceux de l'Europe. J'ajoute que la Chine se situe aujourd'hui à un niveau assez proche de celui des États-Unis.

Au-delà du projet de loi de finances, je suis engagé dans la recherche de financements hors des enveloppes budgétaires discutées aujourd'hui. La mobilisation des financements issus de France 2030 – j'espère que ce budget sera maintenu – et des fonds européens reste une priorité.

À l'échelon européen en particulier, la France doit mieux faire pour améliorer la qualité des projets et augmenter les taux de retour, qui restent aujourd'hui très en deçà de la cible de 17,5 % que nous nous étions fixée et qui correspond à la contribution française. Un travail important est mené depuis longtemps sur cette question et nous devons le poursuivre. J'ai demandé à l'écosystème de se mobiliser à ce sujet, afin que nous soyons plus tournés vers l'international dès la formation des futurs chercheurs.

Il est indéniable qu'il existe aujourd'hui un manque de lisibilité dans le système de financement des universités. Cela affecte les établissements et la qualité du dialogue entre ces derniers et l'État.

C'est pourquoi je souhaite organiser dès janvier prochain des assises qui doivent permettre, en se fondant sur un socle de vérité partagée à propos du financement de l'enseignement supérieur, d'ouvrir un espace de travail collectif et de redonner de la visibilité à l'ensemble du secteur, tout en dessinant des pistes pour l'avenir.

Trois objectifs pourront structurer cette démarche, qui se déroulera sur plusieurs mois.

D'abord, établir un état des lieux incontestable et partagé du financement public, ainsi que des charges et des ressources – je pense par exemple à la mobilisation des fonds européens – des universités, en objectivant les efforts tant des pouvoirs publics que des établissements.

Ensuite, ouvrir un dialogue sur la contrainte de gestion des établissements, qui est probablement l'une des sources du fardeau bureaucratique qui pèse sur la recherche.

Enfin, ancrer un repositionnement plus stratégique de la relation État-universités, avec la déconcentration de la discussion contractuelle et la redéfinition du rôle des administrations centrales du ministère.

Pour garantir l'impartialité, la crédibilité et la solidité de la démarche, les travaux seront coprésidés par deux personnalités incontestables pour leur expertise sur des sujets financiers et budgétaires et sur l'environnement de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Il s'agira d'un exercice collectif avec une place importante consacrée à France Universités ainsi qu'aux organisations syndicales et représentatives des étudiants. C'est bien entendu un travail que nous mènerons conjointement avec le ministère chargé des comptes publics.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la France forme chaque année des centaines de milliers d'étudiants. Elle compte certains des meilleurs chercheurs au monde. Elle tient son rang dans l'Europe du spatial. Ce sont des conditions indispensables pour préserver notre croissance économique et notre souveraineté.

La voie est donc étroite pour élaborer un budget qui préserve notre crédibilité financière. Au moment de faire votre choix, n'oubliez pas que vous avez entre vos mains les leviers de notre avenir. Comme l'écrivait l'un de nos grands romanciers du XIXe siècle, l'avenir de l'humanité est dans le progrès de la raison par la science. Cette pensée doit guider votre choix dans les heures qui viennent. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Bernard Fialaire, Laurent Lafon, Pierre-Antoine Levi applaudissent également.)

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Recherche et enseignement supérieur

31 913 970 038

31 475 272 492

Formations supérieures et recherche universitaire

15 628 183 638

15 585 143 424

dont titre 2

451 377 966

451 377 966

Vie étudiante

3 238 826 359

3 223 989 026

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

8 563 913 527

8 212 392 870

Recherche spatiale

1 847 679 541

1 847 679 541

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

1 477 776 585

1 485 846 635

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

538 162 635

542 162 635

Recherche duale (civile et militaire)

150 019 167

150 019 167

Enseignement supérieur et recherche agricoles

469 408 586

428 039 194

dont titre 2

269 260 623

269 260 623

M. le président. L'amendement n° II-2144, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

 

 

 

 

Vie étudiante

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

25 000 000

 

25 000 000

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

25 000 000

 

25 000 000

 

SOLDE

+25 000 000

+25 000 000

La parole est à M. le ministre.