MM. Thierry FOUCAUD et Claude HAUT, rapporteurs spéciaux

DEUXIÈME PARTIE :
LE RÉTABLISSEMENT DES MOYENS HUMAINS DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉDUCATION

I. PRÈS DE 9 000 CRÉATIONS D'EMPLOIS : UNE ÉVOLUTION CONFORME À LA LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION

A. UNE HAUSSE DU PLAFOND D'EMPLOIS DE 9 170 ETPT

L'augmentation des effectifs de la mission « Enseignement scolaire » s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.

L'investissement en capital humain est le meilleur garant de la prospérité future d'une nation. Il a un impact sur la croissance potentielle, en améliorant la productivité et l'employabilité des travailleurs. Par ailleurs, favoriser l'égal accès de tous les enfants à l'éducation contribue à la réduction des inégalités sociales et à la résorption de la fracture territoriale.

Dès 2012, un coup d'arrêt a été donné aux suppressions continues de postes dans l'éducation nationale engagées par l'ancienne majorité en application de la politique de non-remplacement d'un départ en retraite sur deux, qui atteignait le rythme « de croisière » de 14 000 suppressions de postes par an en moyenne pendant cinq ans .

La priorité nouvelle accordée à l'éducation nationale s'est traduite, dans la loi de finances pour 2013 , par la création de 9 011 postes supplémentaires (ETP 9 ( * ) ) à la rentrée 2013, dont 230 pour l'enseignement technique agricole.

Conformément aux engagements du Président de la République, le rétablissement d'une année de formation initiale des enseignants s'est accompagné, dès l'adoption de la loi de finances pour 2013, d'une action destinée à faciliter l'insertion professionnelle et la promotion sociale des jeunes dans les métiers du professorat. La création, dès le 1 er janvier 2013, de 6 000 emplois d'avenir professeurs a ainsi constitué une première étape de la mise en oeuvre de cette forme de pré-recrutement au métier d'enseignant.

Le rapport annexé à la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République a détaillé la programmation des 60 000 emplois devant être créés dans l'enseignement au cours de la législature .

Sur ce total de 60 000 postes , 54 000 emplois seront créés au ministère de l'éducation nationale , 5 000 au ministère de l'enseignement supérieur et 1 000 au ministère de l'agriculture au titre de l'enseignement technique agricole .

Dans le présent projet de loi de finances, la mission « Enseignement scolaire » bénéficie de la création de 8 984 postes , comme détaillé ci-après, ce qui est conforme aux objectifs de la loi de programmation et aux engagements de recréer 60 000 postes dans l'éducation nationale au cours de la législature.

Compte tenu du fait que les créations d'emplois interviennent au 1 er septembre de l'année n, et ne produisent d'effet en année pleine que le 1 er janvier de l'année n+ 1, le plafond d'emplois de la mission proposé par le PLF 2014 s'élève à 979 192 ETPT, en hausse de 9 170 ETPT par rapport à la LFI 2013 , comme détaillé dans le tableau ci-après.

Cette évolution fait apparaître la priorité accordée au premier degré qui, pour le seul enseignement public, bénéficie de 44 % de l'augmentation du nombre d'ETPT (à hauteur de 4 040 ETPT).

L'enseignement privé (hors enseignement technique agricole) bénéficie de 9 % des créations de postes.

Cette hausse du plafond d'emplois traduit l'extension en année pleine des créations d'emplois à la rentrée 2013, et l'effet, à hauteur de 0,33 ETPT (soit quatre mois sur douze), des créations d'emplois proposées à la rentrée 2014.

Evolution proposée du plafond d'emplois dans le PLF 2014

(ETPT)

Plafond autorisé 2013 (1)

Plafond demandé 2014 (2)*

Mesures de transfert 2014 (3)

Corrections techniques 2014 (4)

Schéma d'emplois (5)

Programme 140
Enseignement public 1 er degré

318 510

322 388

-162

0

+ 4 040

enseignants 1 er degré

- 3

- 4

+ 464

enseignants stagiaires

encadrement

+ 4

+ 3 576

administratifs

- 159

Programme 141
Enseignement public 2 ème degré

446 636

450 149

- 28

- 41

+ 3 582

enseignants 1 er degré

+ 12

enseignants 2 nd degré

- 78

- 556

enseignants stagiaires

+ 4 071

personnels d'accompagnement et de suivi

- 6

encadrement

- 1

+ 26

Administratifs

- 27

+ 5

+ 67

Programme 230
Vie de l'élève

35 795

36 517

+ 159

+ 41

+ 522

enseignants stagiaires

+ 89

personnels d'accompagnement et de suivi

+ 159

+ 41

+ 433

Programme 139
Enseignement privé 1 er et 2 ème degrés

130 779

131 578

+ 3

0

+ 796

enseignants 1 er degré

3

- 56

enseignants 2 nd degré

- 43

enseignants stagiaires

+ 895

Programme 214
Soutien

23 714

23 741

0

0

+ 27

Programme 143
Enseignement technique agricole

14 597

14 819

0

+ 19

+ 203

enseignants

+ 19

+ 203

TOTAL

970 031

979 192

- 28

+ 19

+ 9 170

* (2) = (1) + (3) + (4) + (5)

Source : projet annuel de performances

B. UN SCHÉMA D'EMPLOIS QUI TRADUIT LA REFONTE DE LA POLITIQUE DE FORMATION INITIALE DES ENSEIGNANTS

1. La création de 8 984 postes (ETP)

Comme le montre le tableau ci-après, la restauration d'une année de formation initiale se traduit par une augmentation des effectifs d'enseignants stagiaires.

Au total, l'évolution des emplois s'élève à +8 804 ETP, auxquels il convient d'ajouter la création de 150 postes d'enseignants sur le programme 143 « Enseignement technique agricole » et 30 emplois directement rémunérés par les établissements locaux d'enseignement, soit au total la création de 8 984 postes .

Le tableau ci-après détaille les créations de postes proposées dans l'enseignement scolaire (hors enseignement technique agricole), hors programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale » pour lequel le solde des créations et suppressions d'emplois est nul.

Impact du schéma d'emplois 2014 (hors enseignement technique agricole)

Prog. 140

Prog. 141

Prog. 230

Prog. 139

ETP

ETPT

ETP

ETPT

ETP

ETPT

ETP

ETPT

Enseignants 1 er degré

800

464

-167

-56

Enseignants 2 ème degré

- 2 333

- 556

-243

-43

Stagiaires

4 042

3 576

4 854

4 071

168

89

1 183

895

Encadrement

Administratifs

67

Accompagnement et suivi

500

433

TOTAL

4 842

4 040

2 521

3 582

668

522

773

796

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances 2014

S'agissant du programme 143, vos rapporteurs spéciaux se félicitent de ce que l'hémorragie d'emplois constatée l'année dernière pour l'enseignement technique agricole soit désormais arrêtée , même si l'évolution du schéma d'emplois ne permet pas de rattraper l'intégralité des coupes réalisées pendant le précédent quinquennat (+ 150 emplois en 2014 après + 200 emplois en 2013, à comparer à - 280 emplois en 2012).

Au sein de l'enseignement technique agricole, l'enseignement public avait payé le plus lourd tribut à la politique de réduction des effectifs d'enseignants conduite sous la précédente législature : dans la LFI 2012, 60 % des suppressions d'emplois concernaient l'enseignement agricole public, alors qu'il ne représente que 37 % des effets scolarisés. Le budget 2014 permet donc d'opérer un rééquilibrage, car, à l'inverse, les créations d'emplois s'élèveront à 105 dans l'enseignement public et 45 dans l'enseignement privé (après, respectivement, 140 et 60 emplois dans la LFI 2013).

2. Les conséquences sur les recrutements de la réforme de la formation initiale

L'année 2013 apparaît comme une année charnière donnant lieu à deux types de recrutements d'enseignants.

- une « première vague » de concours selon les modalités antérieurement en vigueur , pour les concours de recrutement externe, destinés aux étudiants en cours de deuxième année de master ; l es candidats admis ont été affectés à la rentrée 2013, avec une décharge d'au moins 3 heures afin de permettre un accompagnement de leur prise de poste ; ces stages ont été regroupés en tout début d'année scolaire, période pendant laquelle leur service sera assuré par des titulaires remplaçants disponibles à cette période de l'année ; 11 000 postes ont ainsi été proposés pour les concours externes du second degré public et 9 000 postes aux concours du premier degré public (soit 20 000 postes au total ).

- en juin 2013, une seconde série de concours organisée selon de nouvelles modalités pour recruter les enseignants destinés à pourvoir les postes de la rentrée 2014 , suivant un calendrier d'admissibilité en juin 2013 et d'admission en juin 2014. Au cours de l'année universitaire 2013-2014, ces étudiants sont formés au sein des nouvelles écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE). Ces modalités transitoires, afin de d'assurer le passage vers des concours refondés, ont porté sur les besoins de la rentrée 2014 : 10 750 postes ont été ouverts aux concours externes du second degré public et 8 500 postes aux concours du premier degré public (soit 19 250 postes au total ).

La session 2014 de droit commun sera la première session rénovée de concours. Les lauréats seront affectés l'année suivant leur admission en septembre 2015, après une année de formation initiale pendant laquelle ils partageront leur service entre une formation au sein des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) et un stage en responsabilité dans une école ou un établissement scolaire, en assurant un demi-service d'enseignement devant les élèves. Le niveau des recrutements doit ainsi permettre de couvrir les besoins à la rentrée 2015. A ce titre, 10 800 postes sont proposés pour les concours externes du second degré public et 8 611 postes pour le premier degré public, soit 19 411 postes au total.

Sans constituer un retour aux instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), les ESPE ont vocation à devenir l'opérateur de formation de l'Etat en faveur des enseignants et des étudiants qui se préparent aux concours de l'enseignement.

Vos rapporteurs spéciaux se félicitent qu'une des premières orientations du nouveau Gouvernement ait justement porté sur la formation initiale des enseignants, en restaurant une année complète avant leur « immersion totale » en classe. Cette réforme apparaissait d'autant plus nécessaire que les nouveaux enseignants, par le jeu des affectations, pouvaient se retrouver d'emblée confrontés à des classes situées en zone sensible ou dites difficiles.


* 9 Emplois équivalent temps plein. Votre rapporteur rappelle qu'un poste (ou ETP), créé à la rentrée scolaire le 1 er septembre de l'année n, ne se traduit que par un tiers d'emploi équivalent temps plein travaillé la première année (ETPT), puisque le fonctionnaire n'est en poste que les quatre derniers mois de l'année civile (soit un tiers d'année). La création, comme la suppression de postes, dans l'éducation nationale ne produira normalement ses effets pleinement qu'à l'issue de l'exercice budgétaire suivant.