MM. Nuihau LAUREY et Georges PATIENT

III. LA FORMATION EN MOBILITÉ : DES DISPOSITIFS UTILES POUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DES OUTRE-MER

Compte tenu de leur taille et de leur éloignement à la métropole, les territoires ultramarins ne sont pas en mesure de proposer une offre de formation complète.

Or la part de la population de plus de quinze ans ne possédant aucun diplôme dans les territoires ultramarins est significativement supérieure à celle de l'hexagone (entre 35 et 50 % pour les départements d'outre-mer contre 17 % en métropole) .

C'est pourquoi des dispositifs de formation en mobilité ont été mis en place dans les départements d'outre-mer ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna permettant de renforcer l'employabilité des jeunes et des travailleurs ultramarins.

En 2016, les crédits alloués à ces différents dispositif seront stables par rapport à 2015 s'agissant des AE (41,9 millions d'euros, soit une hausse de 0,8 %) mais en forte progression s'agissant des CP (36,85 millions d'euros, soit une hausse de 20,6 %).

Le « passeport-mobilité formation professionnelle », mis en place par l'article 50 de la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM), constitue le dispositif central d'aide aux personnes bénéficiant d'une mesure de formation qualifiante, hors de leur département ou de leur collectivité d'origine.

Le programme « Cadre avenir » a été mis en place par les Accords de Matignon-Oudinot de 1988 puis pérennisé par les Accord de Nouméa dix ans plus tard. Il vise à assurer la formation, notamment en métropole, de cadres originaires de Nouvelle-Calédonie. Il bénéficie aux cadres ayant un projet professionnel répondant aux besoins identifiés en Nouvelle-Calédonie et nécessitant une formation de niveau supérieur.

Le programme « Cadres pour Wallis-et-Futuna » permet à ses bénéficiaires d'acquérir les diplômes nécessaires pour occuper, à leur retour, des postes à responsabilité. Ces formations peuvent avoir lieu en métropole, en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française.

IV. DES TERRITOIRES CONFRONTÉS À UNE GRAVE CRISE DU LOGEMENT NÉCESSITANT D'IMPORTANTS INVESTISSEMENTS

A. UN NOMBRE DE LOGEMENTS FINANCÉS ET MIS EN CONSTRUCTION QUI NE CESSE DE DIMINUER DEPUIS 2013

La crise du logement outre-mer résulte de différents facteurs à la fois économiques, sociaux, démographiques et géographiques :

- des besoins très importants liés au rattrapage des retards actuels et aux effets d'une croissance démographique très forte dans certains départements et en moyenne supérieure à celle de la métropole ;

- un revenu moyen peu élevé reflétant une forte proportion de bas salaires et un taux de chômage très élevé ;

- des disponibilités foncières limitées ;

- un parc de logements insalubres ou sous-équipés qui demeure très important.

Pourtant, malgré l'importance des besoins annuels, compris entre 21 000 et 24 000, dont près de 11 600 de logements sociaux et en accession, le nombre de logements sociaux et très sociaux financés et mis en chantier ne cesse de diminuer depuis 2013 (cf. tableau ci-dessous).

Logements financés, mis en chantier et livrés dans les départements d'outre-mer et à Saint-Martin entre 2010 et 2014

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Par ailleurs, en dépit d'objectifs ambitieux de production de logements fixés en loi de finances pour 2014 (+ 18 % entre le projet de loi de finances pour 2013 et le projet de loi de finances pour 2014), les taux de réalisation apparaissent décevants (87 % au total).

Objectifs et réalisations de productions de logements

Produits

PLF 2013

PLF 2014

Écart PLF 2014/PLF 2013 en %

Réalisé en

2014

% du réalisé en 2014 par rapport au PLF 2014

Logement locatif social (LLS)

1 400

4 840

+ 245 %

3 183

65 %

Logement locatif très social (LLTS)

1 600

2 850

+ 78 %

2 308

80 %

LLS/

LLTS défiscalisés

3 000

-

-

-

S/total LLS/LLTS

6 000

7 690

+ 28 %

5 491

71 %

Logements spécifiques (étudiants, EHPAD, urgence)

260

260

0 %

84

32 %

S/total locatif social

6 260

7 950

+ 26 %

5 575

70 %

Accession à la propriété (logement évolutif social, logement en accession social logement en accession très social)

750

575

- 23 %

472

82 %

S/total Accession à la propriété

750

575

- 23 %

472

82 %

Accessibilité et habitabilité

1 500

1 700

+ 13 %

1 407

82 %

Subventions à l'amélioration des logements locatifs sociaux

1 500

1 600

+ 6 %

2 894

180 %

S/total Amélioration et réhabilitation

3 000

3 300

+ 10 %

4 301

130 %

Total général

10 010

11 825

+ 18 %

10 348

87 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire

B. UNE ACTION DE L'ÉTAT PRÉSERVÉE EN 2016, MAIS QUI NE PERMETTRA PAS DE RÉPONDRE AUX IMPORTANTS BESOINS

La ligne budgétaire unique (LBU) sera dotée pour 2016 de 247,6 millions d'euros en AE (soit un montant quasi identique à celui de 2015) et de 234,67 millions d'euros en CP (- 3,7 %) . Ces montants sont cohérents avec les montants exécutés en 2014 (226,4 millions d'euros en AE et 228,7 millions d'euros en CP).

Montant des autorisations d'engagement votées et consommées consacrés
à la ligne budgétaire unique

(en millions d'euros)

Source : projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances

Montant des crédits de paiement votés et consommés consacrés
à la ligne budgétaire unique

(en millions d'euros)

Source : projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances

Si vos rapporteurs spéciaux se félicitent du maintien du niveau des AE consacrés à la LBU, ils s'inquiètent en revanche de la baisse prévue des CP, qui traduit notamment une diminution du nombre de logements sociaux financés et mis en chantiers (cf. supra ).

À cet égard, le plan logement outre-mer 2015-2020 , signé le 26 mars 2015 par les ministères des outre-mer et du logement, le secrétariat d'État à la politique de la ville ainsi que par treize partenaires : la caisse des dépôts et consignations, l'agence française de développement (AFD), l'union sociale de l'habitat (USH), la Fédération des entreprises publiques locales (FEPL), l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'agence nationale pour l'habitat (Anah), la fédération des Pact, Habitat et développement, la fédération française du bâtiment, Action Logement, l'agence nationale pour l'information sur le logement (Anil), l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et EDF-SEI, apparaît bienvenu.

Ce plan décliné localement en accords territoriaux, poursuit sept objectifs principaux : libérer et ménager le foncier, construire des logements neufs de qualité, réhabiliter et améliorer le parc existant, maîtrise les coûts, développer les parcours résidentiels et l'accession sociale à la propriété, lutter contre l'habitat indigne et dégradé, engager la transition énergétique dans le secteur du bâtiment.

Vos rapporteurs spéciaux veilleront à ce que le niveau de crédits en AE dans un premier temps puis en CP ensuite soit en mesure d'accompagner le financement de ce plan.

Ils considèrent en outre que, compte tenu du caractère hétérogène des territoires, ces crédits devraient faire l'objet d'une répartition prenant davantage en compte les besoins de chacun d'entre eux.

Répartition par territoire des crédits de la ligne budgétaire unique inscrits en loi de finances initiale et consommés en 2014

(en euros)

AE

CP

LFI

Consommation

LFI

Consommation

Guadeloupe et Saint-Martin

58 853 543

58 067 694

45 791 539

49 133 676

Guyane

31 731 219

28 778 930

31 854 983

36 381 095

Martinique

41 064 283

40 584 995

36 832 324

46 404 079

Réunion

90 676 887

89 394 860

87 203 017

86 637 659

Mayotte

18 959 658

89 35 504

11 402 591

9 435 198

Saint-Pierre-et-Miquelon

685 000

397 040

681 896

404 252

Unité opérationnelle centrale

600 000

199 636

600 000

310 336

Total distribué

242 570 590

226 358 658

214 366 350

228 706 295

Réserves

30 188 073

29 133 650

Total

272 758 664

226 358 658

243 500 000

228 706 295

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Par ailleurs, l'augmentation des CP de la LBU entre 2011 et 2015 n'a pas permis d'éviter le retour à un niveau important des impayés de l'État vis-à-vis des bailleurs sociaux qui s'élevaient à 22,2 millions d'euros en 2014, contre 7,2 millions d'euros en 2011.

Vos rapporteurs spéciaux estiment par conséquent que la diminution des CP prévue pour 2016 obère les capacités de l'État à diminuer le montant des impayés de l'État à l'égard des bailleurs sociaux.