I. DES MOYENS EN PROGRESSION POUR UNE MOINDRE DÉSAFFECTION DES ÉLÈVES À L'ÉGARD DE L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL

Les moyens accordés à l'enseignement professionnel en 2002 prolongent les efforts engagés depuis cinq ans, tandis que semble s'amorcer à la dernière rentrée une inversion dans le mouvement de désaffection des élèves qui avait été constaté aux rentrées scolaires 1999 et 2001.

A. DES MOYENS EN PROGRESSION

1. Un effort poursuivi en faveur des personnels

a) Les créations d'emplois de personnels enseignants

Le projet de loi de finances pour 2002 permet la création de 1 770 emplois de professeur de lycée professionnel, pour un coût de 18,7 millions d'euros, soit 122,7 millions de francs, dont 370 créations nettes d'emplois.

Il convient de rappeler que la précédente loi de finances avait permis la création de 2 410 emplois budgétaires de PLP, dont 180 créations nettes.

Les 1 770 créations d'emplois de PLP annoncées pour 2002 se ventilent entre :

- 370 créations nettes destinées à accompagner les innovations pédagogiques, dont 20 emplois de PLP coordonnateurs pédagogiques en CFA ;

- 500 emplois créés par la transformation d'heures supplémentaires, correspondant à une dépense de 5,28 millions d'euros, soit 346,3 millions de francs ; ces emplois représentent la moitié des emplois créés par transformation d'heures supplémentaires dans l'enseignement secondaire. La suppression de 16 200 heures supplémentaires année en deux ans a accompagné la réduction de 23 à 18 heures de l'horaire des enseignants des disciplines pratiques, étant rappelé que 10 000 heures supplémentaires avaient été créées pour financer provisoirement la réduction de leur obligation de service ;

- 900 emplois créés en formation initiale pour résorber l'emploi précaire qui est particulièrement élevé dans la voie professionnelle : le coût de la mesure est de 9,5 millions d'euros, soit 62,32 millions de francs.

Par ailleurs, 310 emplois de PLP (non budgétaires) sont créés en formation continue et en apprentissage, afin de permettre la titularisation des enseignants précaires exerçant en GRETA et CFA (260 emplois) et à la mission générale d'insertion (50 emplois).

Depuis trois ans, le nombre d'emplois de PLP créés pour résorber la précarité aura été de 4 460, dont 4 150 emplois budgétaires ; ils ont permis de développer la titularisation des personnels précaires par les procédures des concours internes et réservés et par les examens professionnels.

Pour l'année en cours, le nombre d'enseignants titularisés dans le corps des PLP devrait dépasser 2 400, contre 1 426 au cours de l'année précédente.

Au total, 6 280 emplois budgétaires de PLP auront été créés depuis 1997.

EVOLUTION DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES DE PLP

 

Titulaires

Stagiaires

Total

1995

64 084

2 121

66 205

1996

64 190

2 121

66 311

1997

64 165

2 061

66 226

1998

64 164

2 061

66 225

1999

65 164

2 061

67 225

2000

66 268

2 061

68 329

2001

68 678

2 061

70 739

2002

70 448

2 173

72 621

CRÉATIONS D'EMPLOIS BUDGÉTAIRES DE PLP

 

Nombre d'emplois créés

1995

0

1996

106

1997

- 85

1998

- 1

1999

1 000

2000

1 104

2001

2 410

2002

1 770

Les nouveaux emplois budgétaires de PLP devraient permettre d'accompagner les innovations pédagogiques annoncées dans la voie professionnelle et faciliter le lancement des lycées des métiers.

b) Les créations d'emplois non enseignants

S'agissant des emplois de personnels ATOS, leur inscription au budget ne les distingue pas par type d'enseignement, mais ils seraient répartis de manière à faire bénéficier les établissements professionnels et technologiques d'une bonification de dotation compte tenu de leurs besoins particuliers en maintenance et en entretien, besoins fortement exprimés lors des auditions du rapporteur.

Le projet de budget pour 2002 prévoit en outre les créations d'emplois suivantes :

- 30 conseillers en formation continue ;

- 13 conseillers d'orientation psychologues (COP) et 7 directeurs de centre d'information et d'orientation (CIO). Les services d'information et d'orientation, qui sont appelés à jouer un rôle important dans la préparation, le déroulement et les suites de l'entretien plan de carrière à 15 ans, expérimenté depuis l'an dernier dans cinq académies, et qui devrait être progressivement étendu, verront donc leurs moyens renforcés par un crédit supplémentaire de 225 000 euros, soit 1,475 million de francs.

c) La nécessaire relance du recrutement et la résorption de la précarité des PLP
(1) Pour l'année en cours

Le concours externe de PLP a enregistré en 2001 la plus forte progression des ouvertures de postes du second degré. Afin d'assurer une couverture satisfaisante des postes ouverts aux concours, des listes complémentaires d'admission ont été ouvertes partout où les doubles ou triples admissions de certains candidats à plusieurs concours risquaient de laisser des postes de PLP non pourvus, les candidats admis sur liste complémentaire ayant ainsi la garantie d'être nommés.

Alors que les postes ouverts augmentent de 19 % pour le concours externe et de 25 % pour les concours destinés à résorber la précarité, les pourcentages des admis par rapport aux postes progressent pour tous les concours de PLP, ce qui témoigne de la qualité du vivier des candidats et de l'attractivité d'un corps désormais revalorisé.

Près de 2 300 PLP devaient ainsi être titularisés en 2001 par les trois voies de titularisation, contre 1 426 en 2000 :

- près de 1 100 titularisations au titre du concours réservé, du fait de l'ouverture d'une liste complémentaire d'admission ;

- près de 900 titularisations au titre de la nouvelle voie dite de l'examen professionnel, qui s'adresse aux enseignants non titulaires ayant déjà enseigné pendant au moins dix ans ;

- le concours interne a également bénéficié de listes complémentaires afin d'accélérer la titularisation d'enseignants précaires en poste depuis plusieurs années.

(2) Pour l'année 2002

Avec 18 % d'augmentation du nombre de postes ouverts, le CAPLP externe devrait offrir 3 070 places en 2002, soit la plus forte progression de l'ensemble des concours du second degré, aussi bien pour couvrir un nombre croissant de départs en retraite que pour pourvoir les nouveaux emplois de PLP créés dans le cadre du plan pluriannuel de recrutement.

Les augmentations de postes les plus importantes concernent les disciplines du génie industriel, mécanique et électrique mais aussi en travaux publics, conducteurs routiers, maçonnerie, ainsi que le secteur de l'informatique (augmentation de 36 % des places proposées au CAPET et de 100 % de l'agrégation en économie et gestion - option informatique).

Dans les disciplines générales, les postes offerts aux concours augmentent de près de 20 % afin d'accompagner la mise en place des innovations pédagogiques.

L'évolution du nombre de places offertes au concours externe de recrutement des PLP depuis dix ans est la suivante :


1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

1800

1850

2000

2000

2300

2300

2200

2050

1997

2200

2610

3070

L'augmentation a été de 54 % entre 1999 et 2002 et sera de 18 % entre 2001 et 2002.

Le tableau ci-après montre que le nombre de places offert au concours externe du CAPLP a connu la plus forte progression dans les concours externes du second degré entre les sessions 2000 et 2002 :


 

2000

2001

2002

Évol. 02/01

Évol. 02/00

AGREGATION

1 950

2 000

2 080

+ 4  %

+ 7  %

CAPES

6 925

7 680

8 905

+ 16  %

+ 29  %

CAPEPS

1 050

1 155

1 330

+ 15  %

+ 27  %

CAPET

840

890

1 025

+ 15 %

+ 22 %

CAPLP

2 200

2 610

3 070

+ 18 %

+ 40 %

Total enseignants

12 965

14 335

16 410

+ 14  %

+ 27  %

CPE

470

500

600

+ 20  %

+ 28  %

COP

155

165

190

+ 15  %

+ 23  %

TOTAL

13 590

15 000

17 200

+ 15 %

+ 27 %

(3) Deux mesures spécifiques pour faciliter les recrutements

En 2001, le nombre de candidats par poste au CAPLP reste de 9 inscrits par poste, contre 7 par poste au CAPES et le taux de réussite se situe autour de 10 %, ce qui témoigne du caractère toujours sélectif de ce concours et de la qualité de son vivier.

Cependant, afin d'anticiper des difficultés prévisibles de recrutement résultant d'une concurrence entre les disciplines professionnelles et les besoins des employeurs, le ministère a engagé une politique de prérecrutement des PLP.

• Dès la rentrée 2002, sera ouvert un cycle préparatoire au concours externe de PLP (200 places) destiné à prérecruter en priorité des enseignants dans les disciplines des métiers de la production ; ce cycle préparatoire devrait offrir une rémunération revalorisée, une formation permettant une préprofessionnalisation au métier d'enseignant et si possible une validation diplômante. Le nombre de place limité à 200 reste toutefois insuffisant.

Alors que le cycle préparatoire au concours interne prévoit un financement de 115 000 francs par élève, chaque élève PLP du nouveau cycle préparatoire externe bénéficiera de près de 135 000 francs par an ; l'ouverture de ce cycle représente une dépense de 179 400 euros en 2002, qui sera financée par transformation de 200 places du cycle préparatoire interne en cours d'extinction.

• Comme dans l'ensemble du second degré, l'augmentation des départs en retraite et des créations d'emplois justifie une relance du recrutement des PLP et donc entraîne la création de nouveaux supports de stagiaires pour accueillir les lauréats des concours : le projet de loi de finances pour 2002 prévoit à ce titre la création de 112 emplois de PLP stagiaires, pour une dépense de 2,6 millions d'euros, soit 17,05 millions de francs.

Si ces deux mesures sont bienvenues, votre commission se demande cependant si elles répondent au problème des recrutements qui se posera inéluctablement à moyen terme du fait du départ massif des enseignants en retraite, et au fait que les traitements proposés par l'éducation nationale restent souvent très inférieurs aux rémunérations du secteur privé, notamment pour les spécialités de pointe.

Lors de son audition devant notre commission, le ministre délégué a souhaité que l'enseignement professionnel recoure à la formule des professeurs associés, comme le font les universités ; son développement semble susciter un certain scepticisme de la part des organisations syndicales d'enseignants, et apparaît limité du fait d'une difficile complémentarité entre les horaires scolaires et ceux des entreprises.

d) Les mesures d'amélioration de la situation des personnels
(1) La création d'une échelle de rémunération de PLP bi-admissible à l'agrégation

Les PLP qui ont été admissibles deux fois à l'agrégation sont jusqu'à maintenant exclus de l'échelle spéciale de rémunération dont bénéficient les professeurs certifiés bi-admissibles.

Afin de mettre fin à une situation qui n'a aucune justification pédagogique ou juridique, le ministère a obtenu qu'une telle échelle de rémunération soit ouverte en 2002 aux PLP.

La transformation des 256 emplois de PLP concernés représente une dépense pour 2002 de près de 115 000 euros, soit 754 350 francs.

(2) Un accès plus aisé des PLP à la hors-classe

Dans le cadre de l'amélioration du pyramidage budgétaire des corps d'enseignants, le projet de loi de finances pour 2002 prévoit la création de 315 nouveaux emplois de PLP hors-classe.

Cette mesure permettra d'atteindre la part statutaire de 15 % d'emplois de hors-classe par rapport aux emplois de classe normale, contre 14,41 % en 2001.

Par transformation d'emplois, elle permettra de « fluidifier » l'accès des PLP à la hors-classe, et notamment les PLP chefs de travaux, pour un coût de 830 000 euros, soit 5,44 millions de francs.

(3) La revalorisation de la fonction de chef de travaux

Cette mesure résulte des conclusions de la table ronde lancée pour revaloriser et moderniser la fonction de chef de travaux.

A la suite d'un rapport de l'inspection générale soulignant les difficultés de recrutement de chefs de travaux, une réflexion a été engagée dès le second semestre de l'année 2000 pour améliorer les conditions d'exercice et l'attractivité de la fonction de chef de travaux en lycée technologique, en lycée professionnel et en établissement régional d'enseignement adapté.

La concertation avec les organisations syndicales et la mise à l'étude de propositions de revalorisation de la fonction ont été accompagnées pour la rentrée de septembre 2001 par la création de 300 postes, afin de doter les établissements tertiaires d'un chef de travaux.

Un tel objectif exigeait de redéfinir les missions, les conditions de leur recrutement, la formation, le mouvement et le régime indemnitaire de ces personnels. Il s'agissait également de prendre en compte le rôle particulier des chefs de travaux dans les évolutions pédagogiques intervenues ces dernières années (TPE, PPCP, suivi et organisation des périodes de formation en entreprise, apprentissage, renforcement des partenariats avec le monde économique...).

Afin de parvenir à une solution d'ensemble, une table ronde a été ouverte le 28 mai 2001avec les organisations syndicales représentatives. Les conclusions de cette concertation ont débouché sur une refonte de la circulaire du 21 novembre 1991 régissant la fonction de chef de travaux et sur une revalorisation de leur indemnité de responsabilité.

La table ronde a permis d'examiner les difficultés statutaires tenant notamment à l'exercice de la fonction à temps partiel et au nombre important de faisant fonction ainsi que les problèmes de définition et de rationalisation des missions. En contrepartie des évolutions statutaires et de la rénovation de leurs missions, le projet de budget pour 2002 permet donc de revaloriser de 30  % l'indemnité de responsabilité qui est versée à plus de 2 000 chefs de travaux de l'enseignement public et privé sous contrat. Cette revalorisation entrera en vigueur à la rentrée 2002 et représente une dépense nouvelle totale de près de 580 000 euros, soit 3,8 millions de francs.

Votre commission tient cependant à noter que la revalorisation de l'indemnité de responsabilité ne représente environ que 2 % de la rémunération des chefs de travaux et que certaines organisations syndicales demandent un alignement de ces derniers sur la grille indiciaire des agrégés.

2. Les moyens d'intervention et d'investissement

Selon la réponse trop générale fournie à votre commission, les lycées d'enseignement technologique et professionnel bénéficieront d'une « partie substantielle » des 28,8 millions d'euros, soit 188,92 millions de francs, des dépenses d'investissement pédagogique du second degré.

Parmi ces dépenses, 16,31 millions d'euros (106,99 millions de francs) correspondent à des engagements inscrits dans le volet scolaire des contrats de plan Etat-régions pour la période 2000-2006, dont une part importante sera consacrée au développement d'équipements comme la création de plates-formes technologiques dans certains lycées professionnels.

En outre, 125,5 millions d'euros (823,23 millions de francs) permettront à l'Etat de financer notamment les équipements requis par la création ou la rénovation de diplômes professionnels (0,58 million d'euros soit 3,81 millions de francs), de soutenir le développement des laboratoires de technologie en collège (1,02 million d'euros soit 6,71 millions de francs) et de poursuivre la rénovation des équipements informatiques et audiovisuels des établissements régionaux d'enseignement adapté (70 126 euros soit 0,46 million de francs).

Par ailleurs, les sections de techniciens supérieurs disposeront d'une dotation de 5,34 millions d'euros, soit 35,03 millions de francs, de crédits d'équipement ; ces crédits permettront de financer la création du BTS banque et d'engager la rénovation de huit grandes filières de BTS.

Enfin, les moyens affectés à la validation des acquis augmenteront de 760 000 euros, soit 4,985 millions de francs pour abonder de plus de 35 % la dotation affectée au dispositif de validation de l'éducation nationale, ce qui permettra en particulier de développer les centres de validation implantés dans les lycées professionnels.

3. L'application à l'enseignement technologique et professionnel des mesures générales prises pour renforcer l'encadrement des établissements du second degré

Comme l'ensemble des établissements du second degré, les lycées d'enseignement technologique et les lycées professionnels sont appelés à bénéficier des mesures nouvelles financées par le projet de budget pour 2002.

a) Le renforcement de l'encadrement médico-social des établissements

On rappellera que 250 emplois de personnels médico-sociaux sont inscrits dans le projet de budget pour le second degré, dont 25 médecins scolaires, 75 assistants de service social et 150 infirmières et que l'objectif du plan pluriannuel est d'affecter au moins une infirmière par lycée professionnel, ce qui est un minimum, compte tenu des risques spécifiques encourus par les élèves en ateliers.

b) Les personnels ATOS

Le projet de loi de finances prévoit de créer en 2002, 845 emplois de personnels ATOS pour renforcer l'encadrement des établissements, en affectant 120 d'entre-eux dans les internats. L'objectif annoncé par le plan de relance de l'internat scolaire est que chaque département dispose d'ici cinq ans d'au moins un internat en collège, un internat en lycée et un internat en lycée professionnel.

c) La prévention de la violence en lycée professionnel

Dans le cadre de la lutte contre la violence, 82 emplois de conseillers principaux d'éducation (CPE) seront créés en 2002, dont 25 pour les internats ; certains seront affectés au dispositif de prévention des violences en lycée professionnel tel qu'il résulte de la mission Auduc.

d) Le plan de relance de l'internat scolaire

Il convient de rappeler que les lycéens professionnels sont concernés en priorité par le plan de relance de l'internat scolaire public puisque l'on compte 13  % d'internes parmi eux, contre 6  % des élèves de lycée général et technologique.

Ce taux important s'applique notamment par le fait que les formations professionnelles offertes aux lycéens ne sont pas réparties également sur le territoire national et peuvent être éloignées de leur domicile.

En outre, comme les élèves des lycées professionnels, moins favorisés en moyenne que leurs homologues des lycées d'enseignement général et technologique, bénéficient plus fréquemment de bourses, ils sont en conséquence appelés à bénéficier plus largement de la nouvelle prime d'aide à l'internat, d'un montant annuel de 1 515 francs ; la mesure prévue à ce titre pour le second degré en 2002 représente un coût de 12,5 millions d'euros soit 82 millions de francs en année pleine, et devrait bénéficier au total à 55 000 élèves boursiers internes de l'enseignement secondaire.

B. UNE MOINDRE DÉSAFFECTION DES ÉLÈVES POUR L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL ?

La dernière rentrée scolaire s'est caractérisée par une légère augmentation des inscriptions des élèves dans les premières années de CAP et de BEP des lycées professionnels. Elle succède à deux rentrées très préoccupantes pour l'enseignement professionnel puisque celui-ci avait perdu quelque 20 000 élèves à la rentrée 1999 et plus de 39 000 à la rentrée 2000, soit trois fois plus que la filière générale et technologique. Une telle hémorragie s'explique sans doute par une certaine désaffection des lycéens et de leur famille pour l'enseignement professionnel, et par un système d'orientation en fin de troisième qui n'a pas encouragé, ces dernières années, les élèves à s'orienter vers la voie professionnelle.

1. Une évolution préoccupante des effectifs d'élèves dans la voie professionnelle par rapport à la voie générale et technologique

Pour l'ensemble du second degré, la baisse a atteint 141 500 élèves entre les rentrées 1995 et 2000.

a) Dans les lycées professionnels

Les effectifs ont diminué de 22 700 élèves entre les rentrées 1995 et 1999. Cette diminution a porté essentiellement sur les rentrées 1998 et 1999 (- 28 000 élèves). A la rentrée 2000, ce mouvement s'est amplifié avec une baisse de 39 100 élèves.

b) Dans les lycées généraux et technologiques

Les effectifs ont diminué de 31 000 élèves entre les rentrées 1995 et 2000. Comme dans les lycées professionnels, s'est produite dans un premier temps une augmentation des effectifs (+ 7 900 élèves) puis une baisse de 25 500 élèves. En 1998, la reprise de l'orientation vers la seconde n'a pas contrebalancé l'évolution démographique, fortement orientée à la baisse. Les variations d'effectifs des lycées à la rentrée 1998 sont dues pour partie à une réduction des taux de redoublement en terminale, mais surtout à celle des effectifs de seconde. En 1999 la baisse a résulté de l'arrivée des générations moins nombreuses nées en 1983 et 1984 qui touche les classes de première et de seconde.

En 2000, la nouvelle baisse de 13 300 élèves s'explique surtout par un effet purement démographique, la génération de 1982, sensiblement plus nombreuse que les suivantes, quittant le second cycle général et technologique.

EVOLUTION DES EFFECTIFS D'ÉLÈVES

En milliers d'élèves

 

1995-1996

Ecart

1996-1997

Ecart

1997-1998

Ecart

1998-1999

Ecart

1999-2000

Ecart

2000-2001

L.P.

773,4

2,5

775,9

3,6

779,6

- 9,3

770,3

- 19,5

750,7

- 39,1

711,6

Lycées 2 nd cycle long

1 482,1

2,0

1 484,1

5,8

1 490,0

- 12,7

1 477,3

- 12,8

1 464,4

- 13,3

1 451,1

2. L'évolution depuis 1980 de la ventilation des élèves dans l'enseignement professionnel

L'enseignement professionnel regroupe des formations professionnelles courtes (BEP et CAP) de niveau V, et des formations professionnelles du niveau baccalauréat (niveau IV) qui sont choisies par les élèves comme l'indique le tableau ci-après :

RÉPARTITION DES ÉLÈVES DE L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL,
PAR NIVEAUX DE DIPLÔMES PRÉPARÉS

Diplômes préparés

 

Niveau V

Ensemble des diplômes

Niveau IV

 

CAP 3 ans (1)

CAP 2 ans

BEP (2)

de niveau V

Bac professionnel (3)

 

Total

dont année terminale

Total

dont année terminale

Total

dont année terminale

Total

dont année terminale

Total

dont année terminale

1980

331 090

98 780

10 385

4 768

215 633

97 623

557 108

201 171

-

-

1985

346 801

113 209

13 506

6 584

265 016

128 435

625 323

248 228

-

-

1990

85 680

31 999

21 281

11 155

354 518

173 081

461 479

216 235

68 365

28 704

1995

21 258

8 291

29 684

13 781

365 627

179 182

416 569

201 254

119 478

56 620

2000

6 049

3 818

42 508

19 247

337 332

167 092

385 889

190 157

129 921

61 478

(1) : y compris les CAP en 1 an depuis 1990 comptabilisés avec la troisième année

(2) : y compris les BEP en 1 an depuis 1995, comptabilisés avec la seconde année

(3) : y compris les BAC pro en 1 an depuis 1995 comptabilisés avec la terminale professionnelle ; les bac pro en 2 et 3 ans et les BMA en 2 et 3 ans sont répartis sur la première et sur la terminale professionnelle.

a) Le niveau V de formation

Le CAP en 3 ans a vu ses effectifs croître entre les rentrées 1980 et 1985 (de plus de 331 000 à près de 347 000) puis diminuer très fortement ensuite. Depuis la rentrée 1990, la baisse est spectaculaire, cette formation, longtemps alimentée à l'issue de la classe de 5 ème , étant en voie d'extinction.

Les effectifs des CAP en 2 ans n'ont cessé de croître de façon régulière, passant de près de 10 400 élèves en 1980 à 42 500 en 2000.

Pour le BEP en 2 ans, les effectifs ont également augmenté d'une façon régulière mais, contrairement aux CAP en 2 ans, leurs effectifs diminuent à la rentrée 2000. Les effectifs sont passés de 215 000 élèves en 1980 à 365 000 en 1995 pour s'établir à 337 300 élèves à la rentrée 2000.

Alors que l'on dénombrait 557 100 élèves scolarisés dans des classes préparant à un niveau V de formation en 1980, ils n'étaient plus que 385 900 à la rentrée 2000.

b) Le niveau IV de formation

Le baccalauréat professionnel, dont les premiers diplômés sont sortis à la session de 1987, regroupait un peu plus de 68 000 élèves à la rentrée 1990. Les effectifs n'ont cessé de croître depuis puisque près de 130 000 lycéens suivaient cette formation en 2000.

3. L'enseignement professionnel : une variable d'ajustement du second cycle du second degré ?

L'évolution la plus récente montre que la baisse des effectifs d'élèves de l'enseignement professionnel, constatée depuis 1997, est deux fois plus importante que la perte d'élèves liée à la baisse démographique.

a) Une évolution explicable

Ce phénomène a été certes encouragé par des réformes pédagogiques : du fait de la réforme du collège de 1993, la classe de 5 e a cessé d'être un palier d'orientation, ce qui a contribué à l'extinction des formations de CAP en trois ans et à la diminution des effectifs d'élèves en 4 e technologique de lycée professionnel ; la suppression des classes de 4 e et 3 e technologiques à la rentrée 1999 dans les collèges est aussi responsable en partie de la baisse des effectifs en seconde professionnelle qui n'a pas été compensée par une hausse des demandes d'orientation en lycée professionnel en fin de 3 e générale.

Cette baisse des effectifs a également été encouragée par une certaine inadéquation de l'offre de formation des lycées professionnels, l'attractivité réelle de l'apprentissage qui, lui est rémunéré, ainsi que par la reprise de l'emploi. On peut ainsi remarquer que 8  % des élèves orientés vers un lycée professionnel ne s'y sont pas présentés à la rentrée 2000, notamment parce qu'ils ont choisi l'entrée dans la vie active ou l'apprentissage.

b) Une orientation privilégiée vers la voie générale et technologique

Au-delà de ces raisons pédagogiques et de conjoncture, on assiste aussi à une sorte d' « effet système » qui conduit à considérer l'enseignement professionnel comme une variable d'ajustement du second degré.

Force est de constater à cet égard, que les premières années de la voie professionnelle (secondes professionnelles ou premières années de CAP) ont perdu 4,6 % de leurs effectifs à la rentrée 2000 tandis que les classes de seconde générales et technologiques en gagnaient 2 %, et plus généralement que la baisse démographique ne se traduit pas systématiquement par une limitation de l'ouverture de sections générales et technologiques dans les lycées.

Il en résulte que de nombreux élèves sont orientés dans cette voie où ils enregistrent des taux d'échec importants : plus de 16 000 lycéens triplent par exemple chaque année leur seconde générale.

Votre commission ne peut que s'interroger, comme l'an dernier, sur l'origine du mouvement de reflux des orientations vers l'enseignement professionnel. On peut se demander si, au-delà des voeux des familles, ce choix n'est pas le résultat des impératifs de gestion et d'une politique d'orientation excessive vers les filières générales et technologiques des lycées, ceci au détriment de la réussite des élèves.

Une telle situation est d'autant plus paradoxale que des besoins de salariés et professionnels qualifiés perdurent dans de nombreux secteurs (tourisme, transports, informatique, commerce, services aux particuliers, hôtellerie et restauration, gardiennage et sécurité, maintenance...), comme le signale le groupe « Prospective des métiers et des qualifications » du Commissariat général du Plan, et que les commissions professionnelles consultatives font évoluer chaque année les diplômes techniques et professionnels en fonction des besoins exprimés.

Le mouvement de rénovation des voies professionnelle et technologique, d'ailleurs déjà largement engagé, doit contribuer à revaloriser ces enseignements et à renforcer leur attractivité pour les élèves au moment de leur orientation.

4. Une reprise des inscriptions à la rentrée 2001

a) Les effets du « dispositif réactif piloté » sur les inscriptions en lycée professionnel

Pour inverser la tendance à la baisse des effectifs, le ministère a demandé aux recteurs de mettre en place dans chaque académie un « dispositif réactif piloté » (DRP ) destiné à corriger les effets de système qui tendaient à répercuter l'ensemble de la baisse démographique sur la voie professionnelle ; il s'agissait d'accroître l'attractivité de cette voie pour les jeunes et leurs familles grâce à une amélioration des procédures d'affectation, l'ouverture de nouvelles sections, un effort en faveur de la lisibilité et de la fluidité de la voie des métiers, par exemple grâce à l'ouverture progressive de baccalauréats professionnels partout où existaient des BEP.

La mise en oeuvre du DRP dans les académies s'est appuyée sur les préconisations de l'inspection générale relatives à l'affectation des jeunes dans les lycées professionnels qui seront détaillées plus loin.

Les résultats constatés à la rentrée 2001 ont ainsi contredit les prévisions initialement formulées d'une nouvelle hémorragie des effectifs : en septembre 2001, on a constaté en effet un flux de 12 000 inscriptions supplémentaires en première année de BEP et CAP par rapport à la rentrée 2000.

Ce renversement de tendance n'est certes pas suffisant pour compenser la poursuite de la baisse des effectifs « en stock » (effet mécanique dû à l'arrivée en deuxième année et en baccalauréat professionnel des « cohortes » à faibles effectifs) mais semble marquer une inflexion structurelle, puisque la progression du nombre des inscriptions résulte d'une augmentation substantielle des demandes des familles (le taux de demande moyen de la voie professionnelle est passé d'après les données provisoires de 29 % à 31,5 % au plan national).

La rentrée 2001 se caractérise ainsi par une augmentation des premiers voeux satisfaits plus tôt, du nombre d'élèves en 3 ème technologique à projet professionnel et en SEGPA à formation qualifiante (CAP) ; elle se traduit également par l'ouverture de sections de CAP, par une croissance des effectifs des élèves en seconde professionnelle, y compris dans les sections industrielles et par une réduction des places vacantes.

Cette évolution est appelée à se poursuivre à la rentrée 2002 grâce au lancement, dès la rentrée 2001, d'une deuxième phase du « dispositif réactif piloté ».

b) L'évolution du « stock » des effectifs à la rentrée 2001

S'agissant de l'évolution des effectifs en cours de scolarité, on constate en revanche une perte de 23 344 élèves du fait de l'évolution des structures (extinction des CAP en 3 ans : - 3 311 élèves, réduction du nombre de classes de 4 e technologique : - 4 192 élèves), des conséquences des moindres recrutements des années précédentes (- 14 721 élèves, soit - 10 748 élèves en terminales BEP et - 3 973 élèves en première année bac pro), du fait des départs en cours de formation vers l'apprentissage ou pour accéder à l'emploi et aussi des conséquences de l'évolution démographique.

c) L'évolution des flux d'entrée à la rentrée 2001

En mars 2001, la direction de la programmation et du développement (DPD) évaluait à partir d'un modèle exclusivement statistique l'augmentation des effectifs à + 5 812, cette augmentation étant ainsi ventilée :

- première année de BEP : + 2 589 ;

- première année de CAP : + 2 036 ;

- deuxième année de CAP : + 1 110 ;

- divers : + 77.

Le constat établi à partir des chiffres communiqués par les académies à la fin du mois d'août 2001 semble traduire une nouvelle dynamique résultant d'une augmentation des demandes des familles (+ 8 000) à l'issue de la troisième, des décisions des conseils de classe (+ 7 000) à l'issue de la troisième et du total des affectations (+ 12 000).

La différence entre la prévision de la DPD (+ 5 812) et l'observation de la tendance à la rentrée scolaire (+ 12 000) semble donc résulter de la mise en place du DRP dans les académies.

5. Les sorties du système éducatif : un volant incompressible de 60 000 sorties sans qualification ?

a) La répartition des sortants selon le diplôme possédé

La stabilisation de la durée des études a entraîné une augmentation des flux de sortants du système éducatif depuis 1994, en dépit du mouvement de baisse démographique.

Plus de la moitié des sortants ont poursuivi des études supérieures, contre 4 sur 10 en 1990. Environ 120 000 ont terminé leur formation initiale en classe terminale d'un cycle long du secondaire, et de l'ordre de 200 000 au niveau du CAP (niveau V).

RÉPARTITION DES SORTANTS DE FORMATION INITIALE
SELON LE DIPLÔME POSSÉDÉ

En milliers

Diplôme obtenu

1980

1990

1995

1996

1997

1998

1999

Aucun diplôme

202

137

109

96

107

102

103

Brevet seul

80

62

52

56

42

54

55

CAP, BEP ou équivalent

220

144

132

130

137

130

146

Baccalauréat général

81

50

73

78

81

86

74

Baccalauréat technologique, professionnel et assimilés

32

65

89

92

103

93

103

BTS, DUT et équivalents

29

61

102

89

94

95

89

DEUG, paramédical et social

36

36

31

33

32

43

36

Licences, DEA, doctorats, diplômes de grandes écoles

45

87

135

154

156

146

162

Total sortants de formation initiale

725

642

723

728

752

749

768

Proportion de sortants sans diplôme

28  %

21  %

15  %

13  %

14  %

14  %

13  %

Source : enquêtes sur l'emploi (INSEE).

b) La répartition des sortants par niveau de formation

Les estimations réalisées chiffrent à environ 60 000 l'ensemble des sorties « sans qualification » en deçà du niveau du CAP. Les jeunes concernés représentent environ 8 % des sortants, chaque année, depuis 1994.

RÉPARTITION DES SORTANTS DE FORMATION INITIALE
PAR NIVEAU DE FORMATION

En milliers

Niveau de formation

1990

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Non qualifiés (VI + V bis)

82

56

57

57

57

58

60

Niveau CAP BEP (V)

216

182

194

179

188

187

206

Classes de terminales (IV secondaire)

87

116

111

112

128

129

118

Non diplômés du supérieur (IV supérieur)

73

89

93

104

97

91

97

Ensemble du « niveau IV »

160

205

204

216

225

220

215

Diplômés de l'enseignement supérieur court (III)

97

113

133

122

126

138

125

Diplômés de l'enseignement supérieur long (I - II)

87

126

135

154

156

146

162

Total sortants de formation initiale

642

682

723

728

752

749

768

Proportion de sortants sans qualification

13  %

8  %

8  %

8  %

8  %

8  %

8  %

Sortants estimés à partir des effectifs inscrits

663

697

729

768

777

790

773

- dont « sans qualification » VI - V bis

 
 
 

61

67

60

59

- dont niveau CAP/BEP (V)

 
 
 

191

190

198

204

Proportion de sortants sans qualification

 
 
 

8  %

9  %

8  %

8  %

Source : enquête sur l'emploi (INSEE) et estimations à partir des statistiques scolaires (ministère de l'éducation nationale).

c) La géographie des sortants sans qualification

Une enquête a été engagée avec les rectorats, afin d'appréhender le nombre d'élèves sortants sans qualification. Ce phénomène paraît plus important dans les régions du nord et de l'est, ainsi qu'en Corse, que dans celles de l'ouest, qui disposent d'un tissu de formations plus diversifié.

POURCENTAGE DE SORTANTS « SANS QUALIFICATION » DES NIVEAUX VI-V BIS,
EN FONCTION DE L'ACADÉMIE

Académies

Sortants VI-V bis

parmi les sortants du secondaire

Aix-Marseille

Amiens

Besançon

Bordeaux

Caen

Clermont-Ferrand

Corse

Dijon

Grenoble

Lille

Limoges

Lyon

Montpellier

Nancy-Metz

Nantes

Nice

Orléans-Tours

Poitiers

Reims

Rennes

Rouen

Strasbourg

Toulouse

Ile-de-France

7

12

9

5

9

5

16

8

6

8

5

8

8

8

4

8

9

7

10

4

9

8

4

9

Moyenne France métropolitaine

8

Moyenne des pourcentages estimés pour 1998 et 1999.

Source : DPD.

d) Les observations de la commission

En dépit d'une amélioration constatée depuis le début des années 80, force est de constater que plus de 100 000 jeunes sortent encore du système de formation initiale sans avoir obtenu de diplôme. Ce nombre reste encore trop important. Il convient de s'interroger sur les raisons de cette stabilité et de chercher à y répondre.

De même, si le nombre de sorties sans qualification a diminué de près de 20 000 depuis dix ans, 60 000 jeunes sont encore concernés, alors que la loi d'orientation de 1989 se donnait pour objectif la disparition totale des abandons à ce niveau.

Il convient de souligner que les abandons en cours de préparation au CAP et au BEP, c'est-à-dire avant l'année de l'examen, représentent près de la moitié des sortants sans qualification des niveaux de formation VI et V bis, y compris les apprentis ou lycéens agricoles que les statistiques ne permettent pas de distinguer des lycéens professionnels.

Lors de son audition, le ministre délégué à indiqué que 15 000 lycéens professionnels âgés de plus de 16 ans quittaient leur établissement avant l'obtention de leur diplôme pour entrer dans la vie active.

Il est vraisemblable que les élèves en grand retard scolaire constituent l'essentiel de ces sorties sans diplôme ni qualification : on rappellera à cet égard que le nombre d'élèves de plus de 16 ans encore au collège s'élève à 16 000, que 17 000 triplent la classe de seconde et que 11 000 sortent de cette classe et abandonnent leurs études sans qualification.

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