B. DES HANDICAPS À RÉDUIRE RAPIDEMENT

Pour s'adapter à son environnement, améliorer sa gestion et exporter, DCN a fait évoluer ses structures. D'importants handicaps subsistent toutefois en matière de personnel, de gestion et en raison de la faiblesse des partenariats industriels.

1. Une lente adaptation aux exigences de compétitivité

Entreprise depuis de nombreuses années, l'évolution de DCN en vue d'améliorer son efficacité et sa compétitivité s'opère avec lenteur.

. L'adaptation de DCN à la recherche de marchés étrangers

Dans un premier temps, la création du compte de commerce en 1967 , a permis à DCN de disposer de règles financières plus adaptées à son activité industrielle et lui a donné la possibilité de prendre des commandes sans passer par la loi de finances. En 1970, a été créée la société Sofrantem entre la Société générale, le Crédits Lyonnais, la BNP et la BFCE pour prendre en compte les aspects financiers des contrats de DCN à l'étranger.

Le tournant essentiel a toutefois été pris en 1991 par la création de la société DCN-International , société détenue à 100 % par l'Etat et devant prendre en charge pour DCN les activités commerciales à l'étranger et le suivi des contrats à l'exportation. Cette société a depuis cinq ans un chiffre d'affaires moyen de 0,61 milliard d'euros par an et a permis d'accompagner la montée en puissance des contrats d'exportation dans l'activité de DCN. Presque inexistants il y dix ans, ils représentent aujourd'hui 25 % environ de l'activité. En 1994, ce dispositif fut complété par la création de la société DCN-Log (logistique) filiale à 100 % de DCN-I.

Cette évolution n'est pourtant pas apparue suffisante pour assurer dans de bonnes conditions l'exportation des produits de la construction navale militaire française, certains pays ne souhaitant pas contracter avec un « service » du ministère de la Défense et donc contrôlé par l'Etat et préférant avoir comme interlocuteur un industriel. L'expérience a aussi montré que DCN manquait de culture commerciale et de savoir faire. Des filiales ad hoc ont donc été créées avec le principal partenaire privé de DCN, intervenant sur les systèmes d'armes des bâtiments : Thalès . Il existe déjà deux filiales communes : UDSI pour les systèmes de combat pour les sous-marins et SFCS pour la réalisation des systèmes de combat pour les frégates destinées à l'Arabie Saoudite.

Une négociation est actuellement en cours pour créer entre Thalès et DCN une société commune , la Société de systèmes de défense navals (SSDN), qui aurait pour mission de commercialiser et de gérer l'ensemble des programmes à l'exportation. Les discussions ont longtemps buté sur le partage des tâches entre les deux sociétés. Il semble toutefois qu'un accord soit en vue, garantissant les intérêts de l'industriel et de l'Etat.

Enfin, la constitution d'une filiale avec Technicatome est envisagée pour constituer un pôle français plus puissant en matière de propulsion navale militaire.

. La séparation des activités étatiques et industrielles et la transformation en Service à compétence nationale

Après avoir identifié, au début des années 1990, les activités de nature régalienne et celles à vocation industrielle, il a été décidé en 1996 de séparer , à partir de 1997, les activités industrielles des activités étatiques , c'est à dire de distinguer ce qui relève de la définition d'un programme de son exécution par l'industriel. Auparavant en effet, ces missions étaient réunies au sein de la DGA. La DCN est alors devenue un service distinct du « service des programmes navals » de la DGA. Au plan comptable cette réforme n'est pas achevée, de nombreux actifs n'ont pas encore été transférés à l'Etat.

Une deuxième étape a été engagée en avril 2000 par la séparation de DCN et de la DGA et sa transformation en service à compétence nationale directement rattaché au ministre de la défense . Cette évolution, sans incidence directe sur le mode de gestion, a permis de donner un rôle réellement distinct de DCN par rapport à la DGA. La DGA reste le client et le contrôleur de DCN mais ne se trouve plus en situation « de contrôleur et de contrôlé ». Cette réforme visait donc d'une part à assainir ces relations et d'autre part à préparer le changement de statut de DCN en société.

. L'amélioration de la gestion de DCN

La création du compte de commerce a permis à DCN de déroger au principe d'universalité budgétaire en affectant des recettes à des dépenses, d'assouplir les règles d'engagement, de dégager un résultat annuel et de reporter systématiquement le solde d'une année sur l'autre. Mais le compte de commerce ne permet pas à DCN d'employer directement des agents de l'Etat ou d'effectuer des emprunts pour financer des investissements.

La Cour des comptes a toutefois montré comment ces mécanismes avaient été « dévoyés » en raison de l'absence de contrôles financiers suffisants, de l'abus du caractère évaluatif des dépenses dans un compte de commerce conduisant à l'établissement de « comptes irréguliers et dépourvus de significations économiques ».

L'un des plus graves défauts du compte de commerce a été de ne pas introduire une logique de résultat. La DCN devait vendre sans marge à la Défense mais en réalité cette règle a conduit DCN à facturer ses services à la Marine dans une logique de « coûts constatés » et donc le plus souvent de surcoûts, ne pouvant faire de déficit. L'ensemble des pertes étaient ainsi mises à la charge du budget de l'Etat. Plutôt que de protéger le budget de la Marine de la situation de monopole de DCN, ce système a déresponsabilisé DCN et l'a protégée.

Ces dérives ont conduit à la rédaction d'une Charte de gestion en 1999 modifiant les principes de fonctionnement du compte de commerce. Les relations de DCN avec le ministère de la défense sont contractualisées de telle sorte que la facturation des prestations soit établie en fonction de l'avancement des travaux et du prix défini dans le contrat. Un échéancier des paiements est mis en place. La structure des coûts de DCN doit devenir plus transparente en distinguant les coûts de production des coûts de structure et des coûts « hors exploitation normale » correspondant aux mesures de dégagement des cadres et aux frais des sureffectifs. Le compte de commerce devra désormais dégager un résultat annuel positif ou négatif. Un résultat négatif, ne pouvant pas être gagé sur des réserves, devra être comblé par un abondement au budget de l'Etat. Les charges « hors exploitation normale » sont couvertes par le Fonds d'adaptation industrielle (FAI) financé sur le titre V du budget de la Marine. Un bilan comptable de DCN doit être établi. Enfin, la Charte de gestion demande à ce qu'un plan stratégique sur cinq soit mis en place.

. La diminution des effectifs

Enfin, les évolutions du plan de charge de DCN et l'amélioration de la gestion de l'entreprise nécessitaient de diminuer les effectifs. Ils sont passés de plus de 21 000 en 1995 à moins de 15 000 aujourd'hui.

Cette diminution de plus de 6.000 postes s'est effectuée essentiellement par des mesures d'âge, les personnels âgés de plus de 55 ans puis de plus de 52 ans étant incités à partir. Ces mesures ont été financées par le Fonds d'adaptation industriel (FAI) inscrit au titre V du budget de la Marine pour un montant total, entre 1997 et 2002, de près de 0,5 milliard d'euros et diminuant d'autant ses capacités d'achat et de construction neuve. On estime ainsi que le FAI a représenté un coût supérieur à celui de la 6ème frégate de type La Fayette dont la commande a été annulée.

En revanche, les mesures visant à permettre la mutation des personnels de DCN vers les armées et d'autres services du ministère de la défense se sont révélées un échec dès la seconde année de mise en oeuvre, en raison de la faible mobilité géographique des personnels, de l'inadaptation des postes proposés aux qualifications et des conditions extrêmement avantageuses des départs en préretraite. En 2001, il n'y aura eu que 45 mutations.

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