II. LA RÉFORME DE LA PCP

A. L'ÉVOLUTION DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE (PCP)

1. La réforme de la politique commune de la pêche

Conformément au diagnostic qu'elle avait établi dans son Livre vert, la Commission européenne a proposé le 28 mai 2002 une réforme de la politique commune de la pêche (PCP). Celle-ci ne pouvait, en l'état, être acceptée par tous ceux qui sont attachés au maintien d'un secteur de la pêche économiquement viable et durable. Si certaines des préoccupations de la Commission pouvaient être partagées, comme la volonté d'assurer la pérennité de la ressource, la méthode brutale utilisée était en revanche fortement contestable. Au reste, le laxisme relatif observé par certains Etats dans l'application et le contrôle des règlements existants (quotas de pêche, mesures techniques, tailles minimales de commercialisation des poissons) ne saurait conduire à pénaliser l'ensemble des pays de l'Union européenne.

Le Gouvernement a fait valoir ses fortes réserves vis-à-vis de ce projet et a noué une alliance solide avec les pays du Sud de l'Europe (Espagne, Portugal, Italie, Grèce), ainsi qu'avec l'Irlande. La France a ainsi réussi à maintenir jusqu'au bout de la négociation une forte « minorité de blocage » avec laquelle la Commission a dû composer. Le 20 décembre 2002, le Conseil des Ministres a ainsi adopté, après y avoir apporté de nombreuses modifications, trois projets de règlement.

Votre commission se félicite d'abord que, contrairement à la volonté de la Commission européenne, le transfert de compétences du Conseil vers la Commission en matière de fixation des autorisations de captures et des mesures techniques ait été rejeté. Il s'agit en effet de mesures de nature politique , qui doivent relever en conséquence de la seule compétence du Conseil.

Le premier règlement, relatif à la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques, introduit un nouvel instrument de régulation des captures en concurrence avec le système des totaux admissibles de capture (TAC) et des quotas : l'effort de pêche , c'est-à-dire la durée d'activité des navires.

Celui-ci s'applique obligatoirement pour les stocks dont l'état biologique justifie un plan de reconstitution . De tels plans seront établis progressivement pour les espèces dont la biomasse se situe très en deçà du seuil limite scientifiquement admis. A ce jour, trois stocks, concernant les pêcheurs français, ont été identifiés pour faire l'objet de plans de reconstitution : le cabillaud, le merlu et la sole.

En revanche, s'agissant des autres stocks halieutiques, non soumis à plan de reconstitution, l'effort de pêche sera un instrument seulement facultatif en complément des TAC et des quotas, et ces stocks feront l'objet de plans de gestion pluriannuels afin de limiter les variations d'une année à l'autre des possibilités de pêche. Votre commission se réjouit de la reconnaissance du principe de la pluriannualité, de la distinction entre les stocks réellement en difficulté sur un plan biologique et ceux, beaucoup plus nombreux, qui sont en situation satisfaisante, et de la limitation du caractère obligatoire de l'effort de pêche, instrument contesté par la France en terme d'efficacité.

Les deuxième et troisième règlements modifient le règlement 2792/99 relatif aux aides structurelles au secteur de la pêche. Les deux modifications majeures sont les suivantes :

- suppression, à partir du 1 er janvier 2005, de l'ensemble des aides publiques (nationales et communautaires) à la construction des navires de pêche. Grâce à la France et au « Groupe des Amis de la Pêche », la proposition initiale de la Commission n'a pas été retenue (abrogation des aides publiques dès le 1 er janvier 2003).

- suppression des plans d'orientation pluriannuels (POP) et de la segmentation des flottilles qui y était attachée. Dorénavant, l'encadrement de la flotte de chaque Etat membre se fera globalement et les niveaux de référence (en kW et GT) établis au 1 er janvier 2003 constitueront des limites infranchissables, réduites automatiquement du montant des capacités de sorties avec aides publiques.

- afin d'accompagner socialement la mise en place des plans de reconstitution, le troisième règlement ouvre la possibilité aux Etats membres de majorer de 20 % les primes maximales de sortie de flotte pour les navires qui verraient, du fait de ces plans, leur activité réduite de plus de 25 %.

Outre la réforme de la PCP, le Conseil des ministres de décembre 2002 a adopté deux séries de décisions portant sur la fixation des TAC et des quotas pour 2003 et sur les premières mesures de limitation de l'effort de pêche des stocks de cabillaud menacés d'épuisement. Des plans de reconstitution pour le cabillaud et le merlu doivent être soumis au Conseil des ministres avant la fin 2003.

2. Les réformes à venir

Au-delà de cette réforme, la Commission a complété, ou complétera, au cours de l'année 2003 sa proposition globale de réforme de la PCP par la publication de documents supplémentaires concernant notamment l'aquaculture, la pêche en Méditerranée, les avis scientifiques, la politique de contrôle, le volet externe de la PCP et les impacts socio-économiques.

Le gouvernement français a ainsi rappelé son souci de voir reconnaître les besoins spécifiques des départements d'Outre-Mer ainsi que ceux qui s'expriment dans les pêcheries méditerranéennes. Deux projets ont retenu plus particulièrement son attention :

- D'une part, la pêche en Méditerranée , sur laquelle la Commission doit déposer une proposition de règlement-cadre qui révisera notamment les mesures techniques applicables dans cette mer. La Commission souhaite un élargissement des zones de protection de la pêche, question à l'ordre du jour de la Conférence diplomatique de Venise les 25 et 26 novembre 2003. La France est favorable à l'approfondissement de la réflexion sur la création de manière concertée des zones de protection de pêche, selon une approche graduelle et régionale.

- D'autre part, la France entend conserver la spécificité de la pêche dans les DOM , en permettant la construction de navires de pêche au-delà du 31 décembre 2004, en maximisant les crédits ouverts au titre du POSEIDOM, et en réservant la zone économique exclusive autour des DOM aux navires immatriculés dans ces départements. L'examen de ces demandes françaises relatives aux DOM et à la Méditerranée s'effectuera au cours des prochaines semaines et des prochains mois lors de la négociation des textes proposés par la Commission.

3. La perspective de l'élargissement

L'élargissement aura des conséquences sur la PCP. Neuf pays candidats ont aujourd'hui accepté l'acquis communautaire relatif à la PCP. Des difficultés se sont posées pour trois Etats :

- pour la Lituanie, il a été accepté d'introduire un régime de gestion de l'effort de pêche dans le golfe de Riga ;

- la Pologne, qui avait demandé une zone permanente réservée aux pêcheurs polonais, correspondant aux eaux sous souveraineté et juridiction polonaise, a finalement retiré cette demande ;

- pour Malte, qui avait demandé une zone exclusive de 25 miles, c'est le régime normal qui a été retenu : Malte dispose de sa souveraineté dans les 12 miles, et une zone d'exclusion, non discriminatoire, sera créée de 12 à 25 miles.

S'agissant du marché, les concessions tarifaires reposent sur un modèle de libéralisation graduelle et réciproque du commerce de tous les produits de la pêche.

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