2. Une évolution par secteurs d'activité contrastée
La Poste
est présente sur deux marchés principaux : le courrier et
les colis, d'une part, et les services financiers, d'autre part.
Le courrier et les colis
La Poste réalise, à elle seule, 6 % des échanges
mondiaux de courrier
, le marché intérieur français
étant le premier marché européen en volume et le
troisième en valeur avec respectivement 23 et 19 % du total. Par
rapport à ses concurrents européens, le groupe La Poste figure au
second rang sur le marché du courrier, avec un chiffre d'affaires de
10,25 Md€, après DPWN KONZERN et devant l'opérateur
britannique (11,63 Md€) et le néerlandais TNT Post Group.
Métier traditionnel de La Poste, le courrier tient une place essentielle
dans la structure de ses résultats, ainsi qu'on l'a vu ci-dessus. Aussi,
la
distribution du courrier
fait-elle l'objet d'un
schéma
directeur
destiné à en assurer la modernisation qui repose
sur quatre axes principaux :
- l'
organisation et la fiabilisation du réseau
destinées à industrialiser la préparation du courrier dans
des locaux rénovés et à réduire les délais
de livraison ;
- la
mécanisation du tri-distribution
par
l'équipement des centres de traitement du courrier en machines de tri
très performantes, capables de trier le courrier à distribuer par
ordre des tournées de facteurs ;
- la
modernisation des matériels
(boîtes aux lettres,
chariots poussés, vélos et cyclomoteurs) ;
- et, enfin, la mise en service d'un
système d'information
permettant de connaître l'évolution des trafics
, lequel sera
pleinement opérationnel en 2004.
Eu égard à l'importance du courrier, le
montant des
investissements prévus pour la période 2003-2006 est d'environ
1,5 Md€
soit près de la moitié du montant total des
investissements prévus par l'établissement public La Poste.
Seul un renforcement de la qualité et de l'efficacité du
service de traitement du courrier permettra à La Poste de faire face
à l'ouverture à la concurrence qui se fait désormais de
plus en plus sentir
. Le segment le plus concurrentiel est celui des
« grands comptes » qui appartiennent aux secteurs de la
vente à distance, de la banque, des assurances et des services, secteurs
économiques dont font partie les
80 premiers clients de La Poste
qui représentent 30 % du chiffre d'affaires du courrier
. En
outre, à la concurrence commerciale des autres opérateurs postaux
s'ajoute l'incidence de la «
substitution
technologique
» qui résulte de l'apparition de nouveaux
modes de communication tels qu'Internet. C'est ainsi que sur le marché
du courrier d'entreprise à entreprise, la multiplication des
échanges par courriels est susceptible d'aboutir à une
diminution annuelle du volume de courriers de - 0,5 % en 2004 et
2005 puis de - 1,5 % en 2006 et 2007
. Dans le même ordre
d'idées, on signalera que des innovations telles que la
«
carte vitale
» (dont l'apparition a
occasionné une perte de chiffre d'affaires estimée à vingt
millions d'euros) ou la multiplication des
déclarations d'impôt
par Internet
(600.000 en 2003) ont aussi une
incidence négative
sur l'évolution d'un marché du courrier caractérisé
par la stagnation voire une légère régression
.
On retiendra enfin qu'
en
2002, La Poste a encore
réalisé 7,38 Mds€ soit 49,3 % de son chiffre
d'affaires sous monopole et que le service universel (réservé et
concurrentiel) représente 63,2 % du chiffre d'affaires de
l'activité postale de l'opérateur historique français
,
montant appelé à diminuer du fait de l'entrée en vigueur
des directives européennes précitées. Ces perspectives
expliquent la détermination de La Poste à
atteindre une taille
critique sur de nouveaux marchés en forte croissance
, à
l'instar de celui du
colis et de la logistique
pour lesquels le groupe
La Poste est désormais le troisième opérateur
européen avec 10 % de parts de marchés.
Les services financiers
Avec la gestion des CCP et du « livret A », l'octroi
de prêts à l'habitat et la vente de nouveaux produits d'assurance,
La Poste demeure un acteur important du secteur financier français dont
les positions sur ce marché s'avèrent, cependant, menacées
à moyen terme.
Un premier facteur de faiblesse résulte des disparités
territoriales observées en matière de contribution des services
financiers à la marge de La Poste. Ainsi les tendances lourdes
relatives à l'évolution territoriale des services financiers se
confirment en 2002-2003. Comme les années précédentes, on
observe une
grande disparité dans la répartition entre les
parts respectives du courrier et des services financiers dans le chiffre
d'affaires des bureaux, en fonction de la population de la commune ou ceux-ci
sont implantés
. Alors que dans les bureaux implantés dans les
communes de moins de 2.000 habitants la répartition du chiffre
d'affaires entre services financiers d'une part et courrier-colis d'autre part
est de 63,42 contre 36,58 %, ce rapport est de 54,54 et 45,46 % dans
les communes de plus de 10.000 habitants. En d'autres termes,
plus le
bureau est modeste, plus le poids des services financiers s'accroît
,
jusqu'à atteindre les trois quarts du chiffre d'affaires dans les
bureaux situés en milieu rural.
Pour le reste,
La Poste poursuit activement la modernisation de son
offre
financière
, tant en ce qui concerne les CCP et le
livret « A » qu'en matière de distribution de
prêt ou de vente de produits d'assurance.
En 2003, la Poste a repris la gestion de la partie
« volatile » des CCP
, destinée à faire
face au mouvement à court terme, soit 3 milliards d'euros,
dont elle avait déjà assumé la gestion de la partie stable
l'année précédente. Cette activité
représente environ 31 milliards d'euros. On notera qu'en 2004
aucune dotation n'est inscrite au budget des charges communes concernant la
rémunération des fonds CCP, compte tenu de l'achèvement de
leur transfert total en juillet 2003.
En matière d'épargne administrée,
il est trop tôt
pour connaître l'incidence de la baisse des taux administrés
entrés en vigueur le 1
er
août 2003 sur les
encours du livret A
.
Dans le secteur des
prêts à l'habitat
, la Poste a
accordé pour 3,8 milliards d'euros de prêts en 2002,
exclusivement à des emprunteurs ayant constitué une
épargne préalable. Sa
part de marché
reste modeste
puisqu'elle ne s'élève qu'à
4,2 %
.
Dans le
domaine de l'assurance
, c'est par l'intermédiaire de la
société AssurPoste dont le chiffre d'affaires a atteint
82,6 millions d'euros en 2002 que La Poste poursuit ses activités.
A ce titre, 177.000 contrats de prévoyance individuelle ont
été vendus en 2002 et, selon les indications transmises à
votre rapporteur pour avis, cette croissance devrait se poursuivre en 2003,
grâce au lancement de nouveaux produits.
Tout comme l'indiquait le Président Gérard Larcher dans son
récent rapport d'information
La Poste : le temps de la
dernière chance
12(
*
)
, votre Commission des Affaires
économiques considère que
les services financiers de La Poste
sont menacés d'asphyxie
, aussi bien par le vieillissement progressif
de leur clientèle que du fait de l'obsolescence de leur gamme de
produits et de la mise en oeuvre de leur rôle de « guichet
social ». Ces facteurs convergents les mettent en situation de
devenir « la banque des pauvres et des vieux », comme
l'estimait le même rapport.
C'est pourquoi, votre Commission se
félicite de l'avancée historique que constitue l'autorisation
donnée à La Poste par le projet de CPC d'étendre sa gamme
financière à l'octroi de prêts immobiliers sans
épargne préalable
et estime que cette prestation devrait,
à terme, être complétée par une attribution de
compétences pour les crédits à la consommation.
Le projet de
Contrat de performances et de convergences 2003/2007
précité tend d'ailleurs à
permettre le
développement de services financiers gérés et
distribués dans des conditions de droit commun
. A cette fin, il pose
le principe de la création, en 2005, d'un établissement de
crédit portant l'ensemble de l'activité des services financiers
afin d'assurer la comparabilité avec ses concurrents,
l'opposabilité des comptes aux tiers et de permettre de vérifier
la conformité de l'activité aux règles et conditions de
concurrence en vigueur. Il prévoit également que cet
établissement pourra octroyer, en 2005, des prêts immobiliers sans
épargne préalable.
Votre commission constate la convergence de son analyse relative à la
nécessaire évolution des services financiers avec les
observations de la CSPTT sur le projet de CPC puisque celles-ci soulignent,
d'une part, que 60 % des clients de La Poste souhaitent
bénéficier de crédits à la consommation dans
l'établissement financier qu'ils ont choisi, et que l'ensemble des
consommateurs pourraient s'inquiéter du rétrécissement de
l'offre de service financier du fait des fusions observées entre les
établissements avant de souligner le caractère légitime de
«
l'extension de la gamme de services[que La Poste] se doit
d'offrir à sa clientèle : le crédit immobilier sans
épargne préalable dans le projet de CPC mais également le
crédit à la consommation, seul levier qui lui permettra de
retenir une clientèle qui lui échappe et d'attirer les jeunes
indispensables au renouvellement de sa base de clientèle.
Votre rapporteur pour avis se félicite qu'aient été prises
en compte dans la version définitive du CPC les
observations
émises par la CSSPTT
sur la nécessité de
développer un
dialogue social décentralisé
au sein des instances de représentation du personnel (IRP). Il sera
particulièrement attentif à la bonne mise en oeuvre des
orientations du CPC.
Le recours aux nouvelles techniques de communication
La Poste est pleinement engagée dans le recours aux nouvelles techniques
de communication
, qui passent notamment par l'utilisation d'Internet. Elle
envisage d'orienter son action en la matière dans
quatre directions :
- le développement du
commerce électronique
par des
offres « en ligne », lequel intéresse la direction
du colis (pour la vente à distance), la direction des clientèles
financières (pour le paiement des achats en ligne) et la direction du
courrier (dans le cadre du marketing direct) ;
- la
dématérialisation
et la
sécurisation
des échanges
, La Poste
développant des gammes de services en matière de courrier
électronique sécurisé (mels sécurisés,
horodatage, archivage), les modes d'accès à Internet (fourniture
d'accès, bornes d'accès), et le développement de services
d'usage (lettre recommandée électronique, cachet
électronique) ;
- le
développement des services liés à
« @laposte.net
»
, cinquième fournisseur
d'adresses électroniques en France avec 2,4 millions
d'utilisateurs, appelée à devenir la « boîte aux
lettres de référence » des échanges pour
communiquer avec les clients de La Poste (promotion des nouveaux produits,
ventes en ligne), offrir un accès plus pratique à certains
services (avis de mise en instance, présentation des relevés de
comptes), développer les services postaux en ligne payants (e-carte
bleue, vidéoposte, bourse) et proposer une adresse
sécurisée et authentifiée pour les échanges avec
les administrations et services publics ;
- enfin
l'accompagnement des très petites entreprises (TPE) et
des petites et moyennes entreprises
(PME) auxquelles La Poste offrira des
services en ligne de préparation d'opérations de marketing
direct, la possibilité de créer des « sites
vitrines » sur Internet et une gamme de services de commerce
électronique.