B. LA MISE EN oeUVRE DU DROIT AU LOGEMENT OPPOSABLE

1. Présentation du droit au logement opposable

L'inscription dans le corpus juridique français du droit au logement opposable change considérablement la nature de la politique du logement conduite par l'Etat. En effet, l'article 1 er de la loi du 5 mars 2007 précitée, codifié à l'article L. 300-1 du code de la construction et de l'habitation, précise que le « droit à un logement décent et indépendant (...) est garanti par l'Etat à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et dans des conditions de permanence (...), n'est pas en mesure d'y accéder par ses propres moyens ou de s'y maintenir ».

En vertu de ce nouveau droit, toute personne satisfaisant aux critères d'accès au logement locatif social n'ayant pas reçu de proposition de logement adaptée à l'issue d'un délai anormalement long peut saisir la commission de médiation du département.

Les commissions de médiation, créées par la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, ont vu leur composition et leurs missions modifiées par la loi DALO. Aux termes de cette dernière, une commission devra être mise en place dans chaque département à partir du 1 er janvier 2008. Chaque commission sera composée, à parts égales, de représentants de l'Etat, des collectivités territoriales, des organismes bailleurs et des organismes chargés de la gestion des structures d'hébergement et, enfin, des associations de locataires et des associations spécialisées dans le domaine du logement.

La loi DALO a par ailleurs défini une liste de cinq catégories de demandeurs prioritaires pouvant saisir la commission de médiation sans délai .

Les cinq catégories de ménages prioritaires au sens de la loi DALO

1) Personnes dépourvues de logement ;

2) Personnes menacées d'expulsion sans relogement ;

3) Personnes hébergées ou logées temporairement dans un établissement ou un logement de transition ;

4) Personnes logées dans des locaux impropres à l'habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux ;

5) Personnes logées dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent, si elles ont au moins un enfant mineur, si elles présentent un handicap ou si elles ont au moins une personne à charge présentant un handicap.

De même, la commission de médiation peut être saisie sans délai par toute personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale (RHVS), n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande.

Une fois saisie, la commission de médiation désigne, dans un délai de 3 ou 6 mois selon les départements 41 ( * ) , les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. Elle détermine également, pour chaque demandeur, les caractéristiques du logement en tenant compte de ses besoins et de ses capacités. Elle adresse ensuite au préfet du département la liste de ces demandeurs prioritaires. Le préfet a quant à lui pour tâche de désigner, dans les mêmes délais que les commissions de médiation, chaque demandeur à un organisme bailleur disposant de logements correspondant à la demande, de définir le périmètre au sein duquel ces logements doivent être situés et de fixer le délai dans lequel l'organisme bailleur est tenu de loger le demandeur. L'attribution s'impute alors sur son contingent de logements locatifs sociaux. La loi DALO a également donné au préfet la possibilité de proposer au demandeur un logement locatif privé conventionné.

S'agissant des demandes d'hébergement, la commission de médiation transmet au préfet la liste des demandeurs pour lesquels doit être prévu un tel accueil, ce dernier ayant ensuite pour obligation de leur proposer une place dans une structure d'hébergement dans un délai fixé par décret. La commission a également la possibilité, quand elle juge qu'une demande de logement n'est pas adaptée, de réorienter les demandeurs de logement vers des structures d'hébergement.

A compter du 1 er décembre 2008, un ménage appartenant à l'une des cinq catégories de demandeurs, reconnu prioritaire par la commission de médiation et n'ayant pas reçu une offre de logement adaptée dans un délai fixé par décret, pourra introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement. De même, les personnes sollicitant une place d'hébergement qui se seront vues reconnaître la qualité de demandeur prioritaire et dont la demande n'aura pas été satisfaite pourront exercer un recours à la même date. La possibilité de déposer un recours sera ouverte à partir du 1 er janvier 2012 aux demandeurs n'ayant pas reçu de proposition de logement au-delà d'un délai anormalement long 42 ( * ) .

Si la juridiction administrative saisie par le demandeur constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation, mais que le demandeur ne s'est pas vu proposer un logement adapté ou une place d'hébergement, elle ordonne le logement, le relogement ou l'accueil dans une structure d'hébergement par l'Etat, le cas échéant sous astreinte. Dans les cas où l'injonction du tribunal administratif sera assortie d'une astreinte, le produit de celle-ci sera versé au fonds d'aménagement urbain (FAU) 43 ( * ) de la région où est située la commission de médiation.

* 41 Ces délais seront fixés par le décret en cours d'examen par le Conseil d'Etat.

* 42 Afin de garantir les droits des demandeurs, le législateur a prévu qu'en l'absence de commission de médiation dans le département, le demandeur pouvait exercer le recours devant la juridiction administrative si, après avoir saisi le préfet, il n'avait pas reçu une offre tenant compte de ses besoins et de ses capacités dans un délai fixé par voie réglementaire.

* 43 Institués par la loi SRU, les FAU sont chargés, sous certaines conditions, de recueillir le produit des contributions de solidarité dont sont redevables les communes dans lesquelles le nombre de logements locatifs sociaux est inférieur à 20 %.

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